Le dépistage est une action de santé publique, qui consiste à rechercher une pathologie chez un individu asymptomatique d’une population donnée, les deux objectifs principaux étant une intervention précoce et une amélioration du pronostic (1). Il peut être individuel, selon les facteurs de risque propres à chaque individu, ou organisé, dans le cadre d’un programme national instauré par les autorités de santé (par exemple, dépistage du cancer colorectal, du sein ou du col de l’utérus) (2). Dans ce dernier cas, le programme de dépistage doit répondre à l’ensemble des dix critères (3) établis par Wilson et Jungner en 1968 . Le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent chez l’homme en France et représente la troisième cause de mortalité par cancer (4). Son diagnostic repose sur la réalisation d’un toucher rectal et le dosage du PSA sérique total, suivi d’une confirmation anatomopathologique après réalisation de biopsies prostatiques .
Actuellement, il n’existe ni en France, ni à l’international, de programme de dépistage systématique du cancer de la prostate (5), la plupart des études sur le sujet n’ayant pas démontré de réduction statistiquement significative de la mortalité spécifique au cancer de la prostate (6-8), ou très faible, de l’ordre de 1 décès évité pour 1000 hommes dépistés (9). Néanmoins, certaines sociétés savantes recommandent une détection précoce des cancers de la prostate à haut risque à l’échelle individuelle, selon les facteurs de risque personnels (10,11), justifiée par une mortalité supposée plus élevée dans cette population. Enfin, l’ensemble des recommandations et sociétés savantes semblent unanimes sur la nécessaire information du patient concernant les bénéfices et les risques, portant à la fois sur le dépistage, sur la démarche diagnostique ainsi que sur les modalités thérapeutiques, dans le cadre d’une décision médicale partagée .
LA PROSTATE : ANATOMIE ET FONCTION
La prostate est une glande de l’appareil génital masculin, de forme ovoïde, qui pèse environ 15 à 20g chez l’homme jeune. Elle est située au carrefour des voies urinaires et génitales, sous la vessie et en avant du rectum. Elle entoure la partie proximale de l’urètre (ainsi nommée urètre prostatique) directement au sortir du col vésical, cette portion recevant en son sein les canaux éjaculateurs, résultant de la jonction des canaux déférents et des vésicules séminales, s’abouchant à l’urètre prostatique en regard du colliculus séminal.
Elle est constituée d’environ 75% de tissu glandulaire et 25% de tissu fibromusculaire lisse, anatomiquement répartis en quatre zones, mais le plus souvent décrit de façon simplifiée, en deux zones distinctes :
– La zone interne (zone de transition), zone exclusive du développement de l’hypertrophie bénigne de prostate (HBP)
– La zone externe (zone centrale et périphérique), au sein de laquelle se développe le cancer de la prostate, au dépend notamment de la zone périphérique (80% ; les 20% restants étant répartis à hauteur de 15% pour la zone de transition et 5% pour la zone centrale) .
Enfin, elle peut être le siège de différentes affections : infectieuse, idiopathique (HBP) ou tumorale. Par ailleurs, la prostate étant une glande exocrine, son principal rôle est la sécrétion de liquide séminal (à hauteur de 20% environ, le reste étant produit par les vésicules séminales). Ce dernier entre dans la composition du sperme en se mélangeant avec les spermatozoïdes, provenant des testicules, par l’intermédiaire des canaux déférents. Par ailleurs, la prostate joue également un rôle lors de l’éjaculation, de par la présence de deux sphincters situés de part et d’autre de celle-ci. Le sphincter situé à la partie proximale de l’urètre prostatique est constitué de fibres musculaires lisses, qui en se contractant, permet d’empêcher l’éjaculation rétrograde, tandis que le sphincter distal est constitué de fibres musculaires lisses et striées, assurant ainsi la continence mais également l’expulsion du sperme lors de l’éjaculation.
LE CANCER DE LA PROSTATE
Histoire naturelle du cancer
Le cancer de la prostate est un cancer qui est le plus souvent sporadique (80% des cas), mais il peut également être héréditaire (10%) ou familial (10%). Sur le plan anatomopathologique, 95% des cancers de la prostate correspondent à des adénocarcinomes, majoritairement développés aux dépends de la zone périphérique. Au stade localisé, le cancer de la prostate est la plupart du temps asymptomatique. Sa progression vers un stade localement avancé peut-être à l’origine de symptômes frustres et aspécifiques de type génito-urinaires (pollakiurie, dysurie, brûlures mictionnelles, rétention urinaire, …). Enfin, au stade métastatique, les douleurs osseuses rebelles constituent l’un des principaux points d’appel, avec l’altération de l’état général. Le cancer de la prostate est majoritairement un cancer à évolution lente (10 à 15 ans en moyenne), restant ainsi très longtemps localisé, sans rupture de la capsule prostatique, expliquant l’absence de symptôme à la phase initiale. La progression du cancer vers le stade métastatique après 10 ans de suivi concerne moins d’un homme sur cinq. Etant donné le temps de progression vers un stade métastatique, les patients décèderont la plupart du temps d’une affection intercurrente .
Facteurs de risque
Plusieurs facteurs de risque ont été mis en avant comme prédisposant au cancer de la prostate :
• L’âge : facteur de risque majeur, le risque de développer un cancer de la prostate avant 50 ans est faible, mais celui-ci augmente rapidement avec l’âge.
• Les facteurs génétiques : certaines prédispositions génétiques sont responsables de formes familiales héréditaires de cancer de la prostate (5 à 10% des cancers), ce dernier n’étant pas plus sévère mais pouvant survenir plus précocement. On estime que le risque de développer un cancer de la prostate serait multiplié par 10 à 20 par rapport à la population générale dans le cadre d’une forme héréditaire.
• Les antécédents familiaux : le risque de développer un cancer de la prostate est multiplié par un facteur 2 à 5 dans le cadre d’une forme non héréditaire, forme ne rentrant pas dans le cadre de la définition des formes génétiques et qui représenterait 5 à 25% des cancers de la prostate (le pourcentage restant représentant les cas sporadiques).
• Les facteurs ethniques : l’incidence du cancer de la prostate est plus élevée en Europe et aux Etats-Unis, notamment chez les Afro-Américains, avec une incidence 1.6 fois plus élevée que chez les Caucasiens. On note également une incidence plus élevée aux Antilles, dans un contexte de pollution environnementale au chlordécone (18) (les cancers de la prostate concernant les ouvriers agricoles ayant manipulé ce pesticide sont désormais reconnus comme maladie professionnelle suite au décret n°2021-1724 du 20 décembre 2021 publié au Journal officiel).
• Certains facteurs entrant dans la définition du syndrome métabolique (HTA et périmètre abdominal élevé) sont associés à un risque plus élevé de cancer de la prostate.
D’autres facteurs de risque sont suspectés (antécédent de syphilis/gonococcie, alimentation riche en calcium, supplémentation en acide folique, …) sans certitude qu’ils puissent intervenir dans le développement du cancer prostatique. Par ailleurs, le rôle de l’alimentation dans le développement du cancer de la prostate a été à l’origine de plusieurs études mais avec des résultats controversés . Enfin, aucun aliment ni médicament n’a pour l’heure fait preuve de son efficacité en prévention primaire .
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Table des matières
I. INTRODUCTION
1. LA PROSTATE : ANATOMIE ET FONCTION
2. LE CANCER DE LA PROSTATE
A. Histoire naturelle du cancer
B. Facteurs de risque
C. Diagnostic
a) Le toucher rectal
b) Le dosage du PSA sérique total
c) Les biopsies prostatiques
D. Score histopronostique de Gleason puis ISUP
E. Classification de D’Amico
F. Le bilan d’extension
G. Les différents traitements
3. EPIDEMIOLOGIE DU CANCER DE LA PROSTATE
A. Incidence
B. Mortalité
C. Survie
4. LE DEPISTAGE
5. SURDIAGNOSTIC ET SURTRAITEMENT
6. CONCEPT DE DECISION MEDICALE PARTAGEE
7. L’INFORMATION DU PATIENT
A. Ce que dit la loi
B. Le concept de littératie en santé
C. L’importance de l’information écrite
II. MATERIEL ET METHODE
1. TYPE D’ETUDE
2. STRATEGIE DE RECHERCHE
3. CRITERES D’INCLUSION
4. CRITERES D’EXCLUSION
5. BIBLIOGRAPHIE
6. EVALUATION DES DOCUMENTS DE L’ETUDE
A. La formule de lisibilité de Flesch
B. La grille SFP
C. La concordance inter-évaluateurs
D. Méthode de sélection des meilleurs supports évalués
III. RESULTATS
1. SUPPORTS RETENUS ET CARACTERISTIQUES
2. EVALUATION DES SUPPORTS SELECTIONNES
A. Résultats des scores de lisibilité
B. Résultats de l’évaluation qualitative
C. Degré de concordance inter-évaluateurs
IV. DISCUSSION
1. ANALYSE DES RESULTATS
2. MEILLEURS SUPPORTS RETENUS
3. FORCES ET LIMITES
4. PERSPECTIVES
V. CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
RESUME