La production du charbon de bois

Le rassemblement du bois et le rangement de la meule

   Après la coupe et le débitage du bois, le rassemblement est la troisième opération vers la production de charbon de bois (annexe photo 3). Il s’agit d’un travail individuel fait manuellement par le surgha (tout au moins pour les petits rondins) ou avec une charrette le plus souvent à traction asine. Le coût de la location de la charrette par jour est de 1500 FCFA. Le bois est déposé d’une façon radiale par tas d’une largeur égale à la longueur des rondins. Ces piles ont souvent une hauteur supérieure à 2m. A la suite de cette opération (rassemblement du bois), le surgha fait appel à ses collègues avec lesquels il partage le même contremaitre et d’autres parfois pour le rangement de la meule. Avec l’aide de ceux-là, les gros calibres sont roulés sur eux-mêmes ou soulevés jusqu’au site de rassemblement. Sur l’emplacement de la future meule à charbon de bois, le sol n’est pas creusé, le bois est déposé à même le sol, les plus gros calibres en dessous de plus petit (annexe photo 4). Ce travail collectif se fait le plus souvent en moins de 4h de temps. En contre partie de l’aide apportée par ses collègues, le surgha leur fait préparer le repas, leur offre du thé, du sucre, de la cola, des bonbons… Les dépenses sont supportées par lui-même ou contactées à crédit auprès du patron via le contremaitre. Suite au rangement collectif du bois, le surgha entame seul habituellement la couverture de la meule en ménageant une cheminée au centre. Il s’agit de mettre sur le bois ainsi rangé de la paille préalablement tressée (grande meule) ou associée à des feuilles (petite meule). Par la suite, avec une pelle, il collecte le sol ceinturant la meule (importance du choix d’un site non pierreux) qu’il met sur la paille ou les feuilles.

La carbonisation

   La carbonisation consiste à transformer par une combustion partielle du bois en charbon de bois dans une meule (annexe photo 5). C’est une étape qui marque la fin de la production du charbon de bois. Le plus souvent, les surghas qui ont des places de coupe s’entendent pour carboniser en même temps. Cela permet à l’un et à l’autre de bénéficier de la compagnie du voisin. En effet, dès l’allumage de la meule, le surgha séjourne en brousse le temps de la carbonisation. Il construit une petite hutte près de sa meule. Les braises sont introduites dans la meule par la cheminée ouverte en haut. Puis le trou est obturé. Tout le temps de la cuisson, le surgha veille à colmater avec soin toute brèche qui se constitue sur la couverture de sol. Après l’allumage, le surgha ouvre des évents entre 3 et 6 à la base de la meule. Au fur et à mesure de la combustion, la fumée au début noire, puis blanche devient incolore, alors muni de sa pelle, il ferme les trous de la base et en ouvre d’autres dans la partie centrale puis au sommet. S’il s’agit d’une grande meule, il monte dessus avec l’aide de deux branches de Lannea spinosa ou de Bombax costatum parallèles. A la fin de la cuisson du charbon, la meule s’affaisse. Alors le surgha attend quelques jours (5 au plus) avant de commencer l’extraction du charbon. La carbonisation complète se fait entre 6 et 15 jours en fonction des dimensions de la meule.

La meule traditionnelle

   La meule traditionnelle est une méthode de carbonisation utilisée par les surghas réguliers Travaillant pour des organismes d’exploitation forestière ou irréguliers. Nous avons identifié trois types de meules traditionnelles : la meule Socé, la meule Bambara et la meule Peulh. La meule traditionnelle se présente comme une surface circulaire avec des rayons dominants de l’ordre de 6 à 9m suivant le niveau de production. Les plus hautes peuvent mesurer 6m ou plus et produire Jusqu’à 800 quintaux. Après la carbonisation et l’évacuation du charbon, l’empreinte de la meule se caractérise par son sol noir mélangé avec de petits morceaux de charbon, de la poussière de cendre sur une surface circulaire dénudée. La couleur noire peut persister pendant plus de 30 ans. En effet, les petits morceaux de charbon et les minuscules débris d’incuits (bois partiellement carbonisé) ralentissent le lessivage du sol en piégeant le sable qui se tasse et durcit. La durabilité de l’empreinte de la meule dépend plus cependant du diamètre de la première meule et du nombre de carbonisation sur le site. Le diamètre est généralement proportionnel à la hauteur. Plus il est grand, plus la hauteur est élevée et plus durera le temps de carbonisation imprimant ainsi un sol plus noir.

Conclusion générale

   L’exploitation forestière du charbon de bois apporte divers atouts aux populations sénégalaises et de la sous-région, voire de la planète. Elle est marquée par une dégradation liée aux facteurs climatiques et exacerbée par l’action anthropique. En dépit de la résilience des forêts, la tendance actuelle d’évolution est préoccupante, considérant la pression démographique et les faibles performances de l’agriculture. Aussi le déboisement et la dégradation des ressources forestières risquent-ils de continuer à s’accélérer. A cela, s’ajoute le fait que les combustibles ligneux garderont encore pour longtemps une place importante dans la consommation domestique d’énergie. Aussi toute mesure visant à satisfaire les besoins des populations de façon durable devra procéder à une évaluation qualitative, quantitative et périodique des ressources forestières afin de mieux orienter leur exploitation. Pour satisfaire les objectifs de maintien de l’équilibre écologique, de satisfaction des besoins des populations, la gestion de l’exploitation forestière du charbon de bois devrait être abordée selon une approche pluridisciplinaire qui privilégie l’aménagement agro-sylvo-pastoral, reflet de l’articulation entre les politiques forestières, énergétiques et agricoles et qui implique aussi les différents acteurs. L’exploitation du charbon de bois a permis aux populations de la communauté rurale de Missirah de sortir dans des difficultés et de bénéficier des avantages pour leur développement. Que sera alors l’avenir de ces populations sans l’exploitation du bois ?

Table des matières

Introduction
Synthèse bibliographique
Problématique
Définition des concepts
Méthodologie
Première Partie : Présentation de la CR de Missirah
Carte de localisation de la CR de Missirah
Chapitre I : Cadre physique
I-I-Géologie
I-II-Géomorphologie
I-III-Relief
I-IV-Climat
I-IV-1-Les facteurs
I-IV-2-Les éléments
I-V-Ressources hydriques
I-VI-Types de sols
I-VII-Végétation
Chapitre II : Cadre humain
II-I-Peuplement
II-II-Evolution démographique
Chapitre III : Cadre économique
III-I-Agriculture
III-I- Elevage
Deuxième partie : Les préalables et production du charbon de bois sur le chantier
Chapitre I : Les étapes vers la production
I-I- Accord préalable du conseil rural et du chef de village
I-II- La délimitation des chantiers
I-III-Le contrôle de l’exploitation sur le chantier
I-IV- Accord et le contrôle
Chapitre II : Particularité d’un site d’exploitation et déroulement de la production
II-I-Particularité d’un site d’exploitation
II-II-Les étapes et le matériel d’exploitation
Chapitre 3 : Typologie des meules et la sélection des espèces
III-I- Typologie des meules
III-II-Sélection des espèces
Troisième partie : L’exploitation forestière du charbon de bois
Chapitre I : Organisation de l’exploitation forestière et ses acteurs
I-I-Organisation de l’exploitation forestière
I-II-Les acteurs
I-III-Les utilisations du charbon de bois et les destinations des productions
Chapitre II : L’exploitation du charbon de bois dans la CR de Missirah
II-I-Historique de la production du charbon de bois à Missirah
II-II-Localisation d’exploitation actuelle (2012-2013)
Chapitre III : Les problèmes liés à la production du charbon de bois et les solutions
III-I-Les problèmes liés à la production du charbon de bois
III-II-Les solutions
Conclusion générale
Bibliographie
Annexes

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