La production d’écrits à l’école
Pourquoi écrire à l’école ?
L’un des rôles de l’école est de développer l’esprit critique de l’élève et lui apporter les compétences et connaissances dont il aura besoin en tant qu’élève, mais surtout en tant que futur citoyen. Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture définit les grands enjeux de formation de l’élève. Le domaine 1 « Les langages pour penser et pour communiquer » permet « l’accès à d’autres savoirs et à une culture rendant possible l’exercice de l’esprit critique » . Ainsi, l’écrit est un langage qui constitue un outil privilégié au service de tous les apprentissages comme le rappellent les programmes d’enseignement . Il est un vecteur majeur de la réussite scolaire, notamment grâce à son pouvoir réflexif, d’après Dominique Bucheton , professeure des Universités en sciences du langage et de l’éducation.
Par ailleurs, l’écrit tient une place importante dans notre société. Sa maîtrise est un enjeu considérable, parce qu’elle « conditionne l’insertion sociale des individus et participe à la construction des élèves en tant que sujets », comme le souligne Claire Joubaire . L’école doit donc donner aux élèves les outils pour se réaliser et s’intégrer dans la société en tant qu’adultes.
Enfin, l’écriture est au cœur du rapport à l’autre, elle est un outil de communication et intervient dans une progression partant de l’oral pour se diriger vers l’écrit comme le préconisent les instructions officielles, avec de véritables destinataires. Elle vise plusieurs effets : informer, émouvoir, questionner, écrire pour et avec les autres…. L’écriture est aussi un rapport à soi. On peut écrire pour soi, pour retenir, pour réfléchir, pour apprendre. C’est l’écriture comme outil collaboratif, outil d’expression et de communication qui sera l’objet de ce mémoire.
Les compétences d’écriture au cycle 2
Conformément aux instructions officielles du programme d’enseignement du cycle 2, l’élève doit comprendre et s’exprimer en utilisant la langue française, notamment à l’écrit. La production d’écrits doit s’accompagner d’un travail sur la langue permettant à l’élève de réaliser des « écrits simples, organisés, ponctués, de plus en plus complexes et de commencer à exercer une vigilance orthographique » . L’élève doit avoir un regard réflexif sur la langue et l’écrit qu’il a produit. Nous verrons que certaines fonctionnalités du numérique, notamment du traitement de texte, ont influencé positivement cette posture réflexive et de questionnement de l’élève vis-à-vis de son écrit.
Au cycle 2, trois compétences sont principalement travaillées par les élèves en écriture :
• Copier ;
• Ecrire des textes en commençant à s’approprier une démarche ;
• Réviser et améliorer l’écrit qu’on a produit.
Ces compétences viennent alimenter les attendus de fin de cycle 2 :
• Copier ou transcrire, dans une écriture lisible, un texte en respectant la mise en page, la ponctuation, l’orthographe et en soignant la présentation ;
• Rédiger un texte cohérent, organisé, ponctué, pertinent par rapport à la visée et au destinataire ;
• Améliorer un texte, notamment son orthographe, en tenant compte d’indications.
Les activités réalisées dans le cadre de ce mémoire font intervenir ces trois compétences.
Le processus d’écriture
Il existe différents types d’écrits à l’école. Ils interviennent dans de nombreuses disciplines mais n’ont pas tous la même finalité. Ils peuvent être un outil au service des autres apprentissages ou un sujet d’étude à part entière. Je me suis intéressée à ce deuxième aspect qui met en œuvre les compétences spécifiques de l’acte d’écriture. Ces compétences interviennent dans plusieurs étapes constitutives de l’écriture issues des travaux d’Hayes et Flower.
• La planification
Elle amorce le processus d’écriture. Il s’agit de construire une vue d’ensemble du texte (but du texte, genre du texte, destinataire, contenu), de récupérer, sélectionner et organiser les connaissances relatives au sujet. Le CNESCO (Conseil National d’Evaluation du Système Scolaire), lors de sa conférence de consensus « Écrire et rédiger : comment guider les élèves dans leurs apprentissages ? » en mars 2018, a mis en lumière l’importance des activités préparatoires constitutives de l’étape de planification. Elles consistent à donner aux élèves de la matière pour écrire. Les études présentées lors de cette conférence du CNESCO ont montré que ces activités améliorent la qualité des textes produits . Elles peuvent être menées sous différentes formes (recherche d’informations, réflexion collective, répertoire de mots, travail sur le lexique à utiliser…). Au cours de cette année, les activités préparatoires ont été menées sous plusieurs formes avec mes élèves. Cette étape de planification s’est avérée essentielle pour entrer dans l’activité d’écriture, afin d’apporter aux élèves les idées et le lexique nécessaire à leurs productions. Les productions écrites ont toutes commencé par une phase orale visant à récolter les propositions des élèves. Il s’agissait de construire un répertoire de mots ou d’idées de manière collective (liste, panel de mots). Lors des premiers écrits (Période 2), ces propositions étaient répertoriées sous une forme traditionnelle, c’est-à-dire sur une grande affiche répertoriant les idées sous forme de dictée à l’adulte, avec reformulation par l’enseignant si nécessaire. Dès les premiers écrits, cette activité collective orale s’est révélée riche d’échanges et concourrait à augmenter la motivation et la confiance des élèves dans l’écrit qu’ils allaient produire. Il me paraissait contre-productif de modifier cette phase collective d’échanges préalables que je souhaitais conserver de manière orale. L’utilisation du numérique devait alors conduire à l’améliorer, la facilité et à l’enrichir. Nous verrons de quelle manière le numérique y a contribué dans la suite de ce mémoire.
• La rédaction
La rédaction désigne la mise en texte à proprement parler. Elle implique de faire les choix lexicaux adéquats, de gérer les aspects de mise en page, de veiller à la cohérence et à la cohésion du texte et à respecter les contraintes d’écriture éventuelles. Il existe différentes modalités de rédaction (individuelle, collaborative, en binôme) qui ont été menées dans le cadre de ce mémoire. Nous verrons selon quelles modalités le numérique a contribué à cette mise en œuvre.
• La révision
La révision a pour but d’améliorer le texte produit et comporte deux sous-processus, à savoir le repérage des dysfonctionnements et la correction en vue de la réécriture. Il s’agit de s’assurer que l’écrit produit correspond au projet d’écriture initial, que les formes et structures employées sont grammaticalement correctes et que le texte a du sens. Je me suis intéressée à cette étape de différentes manières au cours de l’année. Le repérage des dysfonctionnements et leur correction a été initié dès la Période 2 avec l’utilisation d’une fonctionnalité du traitement de texte : le réviseur orthographique. En Période 4, l’objectif étant de rendre le travail de réécriture moins chronophage pour l’élève, une autre fonctionnalité du traitement de texte a pu être utilisée : la commande vocale.
Cependant, on ne peut pas réduire l’acte d’écriture à cette succession d’étapes. En effet, leur mise en œuvre n’est pas linéaire et l’écriture est un acte d’engagement et d’implication de l’élève. Il fait intervenir ses connaissances du monde et de la langue, ses représentations de luimême comme sujet écrivant et de l’autre comme destinataire. Nous verrons que le numérique influe sur la mise en œuvre de ces étapes et leur interrelation.
La place du numérique dans la production d’écrits
La place du numérique en classe
Le développement des technologies numériques, notamment au service de la communication, a renforcé et diversifié les pratiques d’écriture. C’est à l’école que l’élève va acquérir et développer les compétences d’écriture. Ainsi, l’école se doit « d’être à la hauteur de l’explosion des pratiques d’écriture » comme le souligne Dominique Bucheton, et notamment en y intégrant le numérique.
Conformément au domaine 2 « Les méthodes et outils pour apprendre » du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, un enseignement explicite des outils numériques doit être conduit. L’élève doit utiliser de manière pertinente le numérique pour produire du contenu. L’élève doit savoir élaborer des outils y compris numériques dont il peut se servir pour s’entrainer, réviser et mémoriser. La carte mentale peut faire partie de ces outils. Elle a d’ailleurs fait l’objet d’un travail spécifique dans le cadre de ce mémoire.
Comme évoqué plus haut dans les différentes étapes du processus d’écriture, le numérique contribue aux modalités de travail basées sur l’échange et la coopération (écriture collaborative). Il offre également des fonctionnalités intéressantes et diversifiées (clavier, commande vocale) pour la production d’un texte et sa révision. En parallèle, l’élève doit se familiariser avec ces fonctionnalités et les logiciels utilisés afin de faciliter la rédaction et la relecture. Il apprend à utiliser les fonctions simples d’un traitement de texte et à manipuler le clavier. Le numérique peut être utilisé pour transcrire un texte écrit à la main. La transcription à l’ordinateur de textes manuscrits a constitué une activité spécifique dans le cadre de ce mémoire. Elle fait partie d’une des compétences à travailler par l’élève en cycle 2 (copier) et permet une réflexion, notamment grâce à l’identification des mots mal orthographiés. Ce travail ne se limitait pas à une simple activité de copie mais s’inscrivait dans un projet d’écriture (alimenter le cybercarnet) visant à lui donner du sens et générer de la motivation. Concernant l’écriture directement sur ordinateur ou tablette, d’après les travaux de Lacelle et Lebrun, écrire avec le numérique ne remet pas en question les connaissances et compétences mises en œuvre dans l’écriture traditionnelle (grammaire de la phrase et du texte, étapes du processus d’écriture). Ces compétences se retrouvent dans l’utilisation du numérique à des fins d’écriture et le rituel de la « phrase du jour » permettait de les mettre en œuvre. Malgré sa présence de plus en plus marquée dans les programmes d’enseignement, notamment dans le cadre de la réforme de refondation de l’école en 2013, le numérique peine encore à trouver sa place dans les pratiques d’écriture, à la fois comme objet d’étude et comme outil au service des apprentissages. En ce qui concerne la production d’écrits, l’écriture à la main prédomine à l’école. Pourtant, en dehors de l’école, dans la vie sociale et professionnelle, les adultes et les adolescents utilisent essentiellement les outils numériques comme moyens de communication et de production d’écrits. Cet état de fait a également été rapporté par Sylvie Plane, professeur des universités en Sciences du Langage, qui s’est intéressée aux raisons de cette situation paradoxale. Il semble ainsi nécessaire de réduire l’écart entre ces deux pratiques d’écriture. L’utilisation du numérique dans le processus d’écriture permet ainsi de réduire cet écart.
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Table des matières
INTRODUCTION
1. La production d’écrits à l’école
1.1. Pourquoi écrire à l’école ?
1.2. Les compétences d’écriture au cycle 2
1.3. Le processus d’écriture
2. La place du numérique dans la production d’écrits
2.1.1. La place du numérique en classe
2.1.2. Utiliser le numérique de manière responsable
2.1.3. Les outils numériques utilisés en classe
2.1.3.1. Le cybercarnet : Un outil pour produire des écrits
2.1.3.2. Framapad : Un outil d’écriture collaborative
2.1.3.3. Framindmap : Un outil pour la réalisation d’une carte mentale
2.1.3.4. Le traitement de texte et ses fonctionnalités
3. Mise en œuvre et analyse des activités
3.1. La phrase du jour
3.2. Production d’articles pour le cybercarnet
3.3. Ecrire une lettre aux correspondants
3.1. Concours d’écriture : écrire la suite d’une histoire
3.2. Apports et limites des outils numériques utilisés
CONCLUSION
Bibliographie
Sitographie
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