Importance de la Convention relative aux droits de l’enfant sur la question des MNA
La Convention relatives aux droits de l’enfant (1989, ci-après CDE) est un des dix instruments internationaux des droits humains des Nations Unies. Ce traité vise à garantir à tous les enfants, protection et soutien pour un développement harmonieux. Ce texte oblige donc les Etats parties à respecter et garantir les droits énoncés à tout enfant relevant de leur juridiction. Afin de s’assurer du respect de la CDE, un organe de contrôle, appelé Comité des droits de l’enfant, est chargé d’examiner les rapports des Etats parties concernant l’application des droits de l’enfant. Suite à l’examen des rapports des pays tous les 5 ans, le Comité émet des recommandations pour améliorer le respect de la Convention. Ce Comité émet également des Observations générales pour expliciter le sens dont doit être compris certains articles de ladite Convention. Dans le cas présent, la CDE consacre un article spécifique à ces jeunes migrants qui sont séparés de leurs parents afin qu’ils puissent également jouir des droits énoncés dans ce texte, en insistant sur leur besoin d’une protection spéciale étant donné leur vulnérabilité.
Or, dans la réalité, il a été constaté par divers travaux sur la question, que les MNA sont fréquemment considérés comme des requérants d’asile avant d’être considérés comme des mineurs (Antony, 2010). Cette considération se retrouve dans les textes législatifs comme nous le verrons, mais émerge également des discours publics. Le Comité des droits de l’enfant a recommandé à la Suisse dans les Observations finales de 2015, d’intensifier ses efforts en vue d’éliminer toute forme de discrimination à l’égard, entre autres, des enfants migrants. En effet, bien qu’il salue les efforts qu’a entrepris la Suisse pour lutter là-contre, il recommande d’amplifier ses efforts. De plus, le Comité émet la recommandation d’établir, comme pour les conditions d’encadrement, un standard national minimum pour l’appui à l’intégration des MNA (Observation finales, 2015, let. H).
Approche méthodologique
Ce mémoire de recherche est de type qualitatif, car il s’inscrit dans une démarche compréhensive nécessaire pour récolter le sens subjectif que les MNA ont de leur intégration sociale et l’importance de leurs relations sociales avec la population résidante. En effet, étant donné qu’ils sont reconnus comme enfants, acteurs, sujets de droit, les MNA ont une voix et s’approprient des outils à disposition pour s’adapter à leur nouvel environnement.
Ce travail s’inscrit dans le Master interdisciplinaire en droits de l’enfant. Il fait suite à un stage de quatre mois effectué auprès des MNA du Canton de Fribourg, qui m’a permis de créer des relations de confiance avec les jeunes et d’observer leur réalité et leur ressenti quant à la procédure d’asile et aux enjeux d’une bonne intégration. De là découle mon questionnement autour de l’importance des relations entre ces jeunes migrants et la population d’accueil, ainsi que l’image d’eux-mêmes que leur renvoie la population pour la construction de leur identité et de leur développement. C’est à travers une approche interdisciplinaire qu’il est pertinent d’aborder la complexité liée aux questions entourant les MNA.
L’approche interdisciplinaire est importante car elle permet d’aborder différents points de vue et d’établir un certain dialogue entre les disciplines, notamment à travers des concepts provenant des domaines juridique, politique, sociologique et psychologique. Ce travail présente d’abord une partie théorique, constituée d’un cadre légal qui permet de contextualiser le travail dans un système politique spécifique à la Suisse et d’un cadre théorique qui revient sur des concepts utiles à la compréhension des processus psychosociaux en jeu lors du processus d’intégration des MNA.
La partie empirique est centrée sur le vécu des mineurs. L’intérêt est d’interroger des MNA en procédure d’asile, ou détenteurs d’un permis, qui tentent de s’intégrer dans la population d’accueil. S’intéresser à leur ressenti permet de leur donner une voix et de les considérer comme détenteurs d’une vérité qui est la leur. Cet angle de recherche permet de comprendre la multitude des réactions et des enjeux psychosociaux derrière leur processus d’intégration.
Procédure d’asile
La procédure d’asile désigne la période durant laquelle les autorités compétentes, en l’occurrence le SEM, examinent chaque cas, pour déterminer si les personnes remplissent les conditions d’octroi du statut de réfugié et donc le droit à la protection de la Suisse. Un certain nombre de considérations sont prises en compte afin de s’assurer avec certitude des dangers que le requérant encoure en cas de renvoi dans son pays d’origine. Cependant, il est possible pour le SEM, conformément à la LAsi, de ne pas entrer en matière, lorsque la requête semble être abusive. Dès leur arrivée sur le territoire suisse, les ressortissants des pays qui n’appartiennent ni à l’Union européenne (UE), ni à l’Association européenne de libre-échange (AELE), sont soumis aux lois qui règlent le séjour des étrangers, c’est-à-dire la Loi fédérale sur les étrangers (LEtr) et la Loi sur l’asile révisée (LAsi). Dès leur arrivée, ces migrants déposent une demande d’asile auprès d’un des centres d’enregistrement et procédure de Suisse. La durée dans un centre de premier accueil dure maximum 90 jours (art. 16 OA 1). Ils sont ensuite répartis dans les différents cantons selon une clé de répartition énoncée à l’article 21 de l’Ordonnance sur l’asile (OA 1).
La répartition se fait de manière uniforme ; cependant le SEM peut tenir compte de la présence d’un membre de la famille, de leur nationalité et de leur besoin d’encadrement (art. 22 OA 1). Une fois attribué à un canton, les requérants sont logés dans des foyers. Les demandes d’asile provenant de MNA doivent en principe être traitées en priorité (art. 17.2 LAsi). Dans la réalité, les cas de « renvoi Dublin » sont la priorité du SEM pour pouvoir renvoyer les requérants d’asile dans d’autres Etats dans le délai légal. La procédure prend fin, dès lors que le SEM rend une décision. Soit le requérant d’asile voit sa demande d’asile acceptée avec l’octroi d’un permis B, soit le statut de réfugié est refusé mais son renvoi est illicite, donc le requérant est accepté provisoirement avec l’octroi d’un permis F, soit les motifs invoqués ne correspondent pas aux critères d’asile et ils sont déboutés.
Droit international
En abordant le droit international en matière d’asile ou concernant les réfugiés, il convient de mentionner la Convention relative au statut des réfugiés. Cette Convention régit les conditions minimales que les Etats doivent respecter concernant les réfugiés. Entrée en vigueur en Suisse en 1955, cette Convention ne mentionne à aucun moment le cas des mineurs non accompagnés. En revanche, La Convention relative aux droits de l’enfant, entrée en vigueur le 26 mars 1997, consacre un article spécifique aux MNA. Cette Convention est dite contraignante, car elle oblige les Etats parties à prendre des mesures protectrices, mais également à accorder des droits et des libertés, tels que civils, sociaux, politiques, économiques ou culturels, à toute personne mineure se trouvant sur le territoire suisse. Ainsi, la CDE a eu un impact important sur les conditions d’existence des MNA, relevant de la juridiction helvétique.
En effet, les MNA se voient attribuer les droits présents dans la Convention comme cela est compris dans l’art. 22 CDE. « Les Etats parties prennent les mesures appropriées pour qu’un enfant qui cherche à obtenir le statut de réfugié ou qui est considéré comme réfugié en vertu des règles et procédures du droit international ou national applicable, qu’il soit seul ou accompagné de ses père et mère ou de toute autre personne, bénéficie de la protection et de l’assistance humanitaire voulues pour lui permettre de jouir des droits que lui reconnaissent la présente Convention et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ».
De ce fait, ils se voient reconnaître les principes fondamentaux de la CDE, ainsi que tous les droits qui peuvent les concerner. Tout d’abord, il convient de citer les quatre principes généraux qui permettent d’interpréter l’ensemble des droits compris dans la présente Convention. – le principe de non-discrimination (art. 2 CDE), qui reconnaît les droits énoncés dans la Convention à « tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, indépendamment de toute considération de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre de l’enfant… ». Autrement dit, les MNA doivent se voir attribuer les mêmes droits à une protection et à des conditions minimales pour un bon développement que les enfants résidents suisses. Ainsi, le Comité des droits de l’enfant précise notamment dans son Observation générale n⁰ 6 que « des mesures devraient être prises pour remédier à tout préjugé défavorable à l’égard des enfants non accompagnés ou séparés dans la société ou toute stigmatisation de ces enfants » (2005, p. 8).
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Table des matières
Résumé
1 Introduction
1.1 Contextualisation de l’objet de recherche
1.1.1 Définitions des MNA
1.1.2 Importance de la Convention relative aux droits de l’enfant sur la question des MNA
1.2 Approche méthodologique
1.3 Question de départ
2 Cadre légal : Asile, législation spécifique concernant les MNA et mesures d’intégration
2.1 Asile
2.1.1 Notion « d’asile »
2.1.2 Requérants d’asile
2.1.3 Procédure d’asile
2.2 Cadre légal spécifique aux MNA
2.2.1 Droit international
2.2.2 Droit fédéral
2.2.3 Droit cantonal
2.3 Mesures d’intégration
2.3.1 Intégration dans le contexte suisse
2.4 Défis identifiés concernant les MNA
3 Cadre théorique
3.1 Intégration
3.1.1 Concept d’intégration
3.1.2 Recherche d’une définition de l’intégration
3.1.3 Ambivalence des mesures d’intégration concernant les requérants d’asile
3.1.4 Enjeux pour les MNA
3.2 Relation intergroupe
3.2.1 Catégorisation sociale
3.2.2 Identité sociale
3.3 Le MNA, un acteur social
3.3.1 Système de l’acteur
3.3.2 L’intégration sous l’angle du système de l’acteur
4 Questions et hypothèses de recherche
5 Méthodologie de recherche
5.1 Méthode
5.2 Echantillon
5.3 Procédure
5.4 Précautions éthiques
5.5 Récoltes des données
6 Résultats
6.1 Relations
6.1.1 Réseaux relationnels des MNA
6.1.2 Obstacles rencontrés pour les MNA
6.1.3 Accès à la population et difficulté à tisser des liens stables
6.2 Valeurs
6.2.1 Système de valeurs du pays d’origine ou de Suisse ?
6.2.2 Importance de la religion
6.3 Image de soi
6.3.1 Image de soi découlant du terme « requérant d’asile »
6.3.2 Effet d’expérience discriminante ou du regard des autres
6.4 Motivations
6.4.1 Motivation liée au processus d’intégration
6.4.2 Motivation liée à l’établissement de liens avec les Suisses
6.5 Activités
6.5.1 La scolarité et la formation
6.5.2 Les loisirs
6.5.3 La reconstruction identitaire et l’accès aux soins
7 Analyse des résultats
7.1 Interprétation des résultats
7.2 Discussion
7.3 Intégration sociale et droits de l’enfant
7.4 Recommandations : Améliorer les contacts entre société d’accueil et MNA en vue d’une meilleure intégration sociale
8 Conclusion
9 Bibliographie
ANNEXES
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