Les MAS et les FAM
Les Maisons d’Accueil Spécialisées (MAS) : Elles ont vu le jour en septembre 1978, avec le décret d’application de la loi d’orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 [15]. Ce sont des établissements médico-sociaux qui accueillent des personnes adultes qu’un handicap intellectuel, moteur ou somatique grave, ou une association de handicaps intellectuel, moteur ou sensoriel, rendent incapables de se suffire à elles-mêmes dans les actes essentiels de la vie courante et qui sont tributaires d’une surveillance médicale et de soins constants. Elles assurent de manière permanente l’hébergement, les soins médicaux, les aides de la vie courante et les soins d’entretien des personnes handicapées. Elles relèvent de la loi 2002-2 du 2 janvier 2002, rénovant l’action sociale et médico sociale [16]. Les Foyers d’Accueil Médicalisés (FAM) : Ils ont été mis en place par la circulaire n°86-6 du 14 février 1986 [17]. Cette circulaire fixe leurs missions et confère une importance particulière à leur implantation, celle-ci devant permettre une ouverture à la vie sociale. Ils concernent les personnes adultes lourdement handicapées physiques, mentales ou atteintes de handicaps associés dont la dépendance totale ou partielle :
– les rend inapte à toute activité à caractère professionnel.
– rend nécessaire l’assistance d’une tierce personne pour les gestes essentiels de la vie courante ainsi qu’une surveillance médicale et des soins constants.
Ils relèvent de la loi 2002-2 du 2 janvier 2002, rénovant l’action sociale et médico sociale [16]. Le public accueilli en MAS et en FAM : Au départ, les FAM devaient constituer des structures de prises en charge expérimentales, ayant notamment pour objectif de compléter les solutions déjà existantes (les MAS et les foyers de vie ou foyers occupationnels). En principe, ils accueillent des personnes un peu moins dépendantes que la population hébergée en MAS, mais dans la pratique les publics sont sensiblement les mêmes. Dans ce mémoire de recherche, nous nous intéressons particulièrement aux adultes cérébrolésés : accueillis dans ces lieux de vie, classés en GMFCS IV ou V, et présentant des troubles cognitifs
La prise en charge en lieu de vie
La prise en charge de la personne accueillie en MAS ou en FAM est basée sur une notion importante : le projet d’accueil et d’accompagnement, introduit par la loi du 2 janvier 2002 [16]. Souvent appelé “projet personnalisé” sur le terrain, il désigne la démarche de co-construction du projet entre l’usager (et son représentant légal le cas échéant) et les équipes professionnelles. Son élaboration, qui résulte d’un travail pluridisciplinaire constant avec la personne et son entourage (avec des réunions d’équipe régulières), a fait l’objet en décembre 2008 de recommandations de bonnes pratiques par l’ANESM [18]. Ce projet personnalisé, fréquemment actualisé, contient entre autres deux volets indissociables : la qualité de vie (quotidienne, sociale et citoyenne) et les soins. Pour permettre l’autonomie et l’engagement de la personne dans les activités de vie quotidienne qu’elle a choisies, signifiantes pour elle et significatives pour la société, l’ergothérapeute a un rôle important à jouer au sein de l’équipe pluridisciplinaire. Il intervient essentiellement sur 3 axes :
– la relation à l’environnement humain, notamment via la communication et l’expression.
– la relation à l’environnement matériel, notamment via le contrôle d’environnement.
– l’indépendance fonctionnelle, notamment via le déplacement et la posture.
Dans le cadre de ce mémoire de recherche, nous centrons notre propos sur la question de l’indépendance fonctionnelle, à travers la capacité à remplir une fonction d’alimentation, sans nuire à la fonction respiratoire… voire à la fonction vitale !
Les fausses routes alimentaires et les conséquences des troubles de la déglutition
L’alimentation est une fonction essentielle pour tout être vivant, que nous retrouvons à la base de la pyramide des besoins du psychologue Abraham Maslow (1943) (cf. Annexe 5) [15]. Sa défaillance ne peut durer dans le temps, sous peine de conséquences graves pour la santé (perte de l’intégrité physique, psychique et sociale). A l’occasion de la 2ème Journée régionale du Réseau Breizh IMC (2009), R. Lanvin indique que : “Nous, soignants, savons que nous parlons d’une fonction vitale, visant à réparer la dette énergétique que tout être vivant contracte à chaque instant pour assurer sa survie. Nous savons que l’insuffisance de cette fonction conduit à favoriser l’éclosion ou le développement de maladies conduisant, plus ou moins rapidement mais inéluctablement, à la mort” [16]. A cette dimension sanitaire s’ajoute une dimension socio-culturelle, qui fait du temps de repas un moment de plaisir, de partage et d’échange entre les individus au sein d’une communauté.L’alimentation met en jeu la déglutition, qui permet le passage des aliments de la bouche à l’estomac, tout en assurant la protection des voies aériennes. Chez l’adulte atteint de paralysie cérébrale, les troubles de cette fonction de déglutition sont fréquents. Leur expression la plus préoccupante est sans nul doute la fausse route, au cours de laquelle un aliment passe dans les voies respiratoires (qu’il obstrue partiellement ou totalement). Le réflexe de toux, censé provoquer l’expulsion de l’aliment en question, est souvent insuffisant (voire parfois absent) chez l’adulte paralysé cérébral. Parmi les fausses routes, nous distinguons la pénétration (entrée du bol alimentaire dans le vestibule laryngé) et l’aspiration (des résidus alimentaires passent sous le plan glottique). L’ergothérapeute et kinésithérapeute Didier Bleeckx (2001) propose une classification des fausses routes en fonction de leur moment de survenue par rapport au réflexe de déglutition. Une bonne connaissance de leur étiologie permet d’anticiper et prévenir plus efficacement ces fausses routes [3].
La prévention posturale des troubles de la déglutition
La posture de la personne paralysée cérébrale est une préoccupation importante de l’ergothérapeute travaillant en MAS ou en FAM. Elle fait l’objet en institution d’un bilan clinique systématisé. Celui-ci se décompose en plusieurs étapes :
– un bilan fonctionnel et d’autonomie dans les actes de la vie quotidienne.
– des mesures anthropométriques, en utilisant la Mesure du Contrôle Postural Assis (MCP2A) et un fauteuil de simulation.
– l’évaluation des points d’appuis, au moyen d’une nappe de pression.
– la proposition d’une Aide Technique à la Posture (ATP) à inclure dans l’Aide Technique à la Mobilité (ATM), la plus confortable, fonctionnelle et prévenante pour la santé possible.
Cela étant fait, l’adulte cérébrolésé en lieu de vie dispose d’un système ATP + ATM personnalisé. Celui-ci va pouvoir être utilisé par l’aidant pour adapter la posture de la personne à l’activité qu’elle souhaite réaliser. Dans le cas de la prise alimentaire, certaines postures sont à favoriser : Comme le souligne l’orthophoniste Sarah Haynes, une bascule d’assise de 20° limite l’incidence et la gravité des dysphagies [25]. Conformément aux résultats des recherches entreprises par Stephen Fraser & Catriona M. Steele :
– La position du menton rentré semble pertinente pour des bols alimentaires de gros volume, mais pas pour de plus petits volumes.
– Elle ne devrait pas être recommandée avant examen vidéo fluoroscopique, qui établit le rapport bénéfices/risques. [26]
Ces données viennent remettre en cause une croyance très répandue, selon laquelle une assise à 90° et une flexion de tête sont toujours de bons réflexes. Même s’ils constituent généralement une solution fonctionnelle acceptable, ils ne sont pas pour autant généralisables à tous les résidents. Le suivi doit être individualisé et conforme aux recommandations du médecin référent.
|
Table des matières
1. INTRODUCTION
1.1. Contexte
1.2. Thème général
1.3. Utilité sociale et intérêt et enjeux pour la pratique professionnelle
1.4. Questionnement de départ
1.5. Pré-enquête exploratoire auprès des aidants professionnels
1.6. Problématique pratique
1.7. L’adulte paralysé cérébral en lieu de vie (MAS ou FAM)
1.7.1. Classification par l’AACPDM de la paralysie cérébrale
1.7.2. Les MAS et les FAM
1.7.3. La prise en charge en lieu de vie
1.8. Mécanisme des dysphagies
1.8.1. En cas d’hypotonie (schéma postural en flexion)
1.8.2. En cas d’hypertonie (schéma postural en extension)
1.9. Les fausses routes alimentaires et les conséquences des troubles de la déglutition
1.9.1. Les conséquences des troubles de la déglutition à court et moyen termes
1.9.2. Les conséquences des troubles de la déglutition sur le long terme
1.10. La prévention posturale des troubles de la déglutition
1.11. Cadre théorique
1.11.1. Les théories de l’apprentissage
1.11.2. Le modèle transthéorique (ou modèle de la porte tournante)
2. MATÉRIEL & MÉTHODE
2.1. Choix de la méthode de recherche
2.2. Critères d’inclusion et d’exclusion
2.3. Choix et construction de l’outil théorisé de recueil de données
2.4. Déroulement de l’enquête auprès des ergothérapeutes
2.5. Choix des outils de traitement des données
3. RÉSULTATS
3.1. Présentation des données
3.2. Analyse des données
3.2.1. Résultats en lien avec les théories de l’apprentissage
3.2.2. Résultats en lien avec le modèle transthéorique
4. DISCUSSION DES DONNÉES
4.1. Interprétation des résultats et réponse à l’objet de recherche
4.2. Discussion autour des résultats et critique du dispositif de recherche
4.3. Propositions et transférabilité pour la pratique professionnelle
4.4. Conclusion
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
Télécharger le rapport complet