La presse comme témoin de la popularité de la bicyclette 

La presse comme témoin de la popularité de la bicyclette 

Introduction

En France, l’engouement pour la « petite reine » n’est plus à présenter. En Maine-et Loire, cet intérêt est historique, il est même encore célébré de nos jours. Depuis l’année 2016 la ville de Saumur organise le festival Anjou Vélo Vintage, un rassemblement de deux jours qui célèbre la bicyclette à travers des randonnées cyclosportives ouvertes à tous et un village d’expositions dans l’esprit de la vie de l’entre-deux-guerres.
L’après Première Guerre mondiale inaugure la belle époque du sport. La guerre a permis aux sports collectifs, le football en premier lieu, de se diffuser dans tout le pays et parmi toutes les couches sociales. Jacques Defrance parle de « structuration et croissance des sports »1. La popularisation de la pratique sportive et des activités liées au sport en fait un sujet d’étude plus large que lors de notre travail sur le cyclisme à Angers avant la Première Guerre mondiale.
Le sujet de ce mémoire est donc le cyclisme dans le Maine-et-Loire pendant l’entre-deux-guerres. Il fait suite au mémoire de première année de Master réalisé en 2016 sous la direction d’Éric Pierre, qui traitait du Développement du cyclisme associatif à Angers entre 1875 et 1914, posant les bases du sport cycliste dans une ville qui s’autoproclame pionnière en la matière. Nous y démontrions que le cyclisme s’est développé à Angers grâce à trois principaux acteurs : les associations dans un premier temps, le public dans un deuxième temps, et enfin la municipalité.

Cette discipline nouvelle a très rapidement obtenu du succès auprès des Angevins, d’abord les plus aisés (le Véloce-Club d’Angers, première association de la ville, était basé en plein centre-ville), puis les couches populaires (le Vélo-Doutre angevin était, comme son nom l’indique, situé dans le quartier populaire de la Doutre). La mairie d’Angers n’a jamais été hostile à l’égard de ces sociétés sportives malgré l’étonnante absence de vélodrome permanent. Le développement de ce sport à Angers est un des plus précoces de France, si bien que la ville s’affiche fièrement comme une des pionnières du sport cycliste.

 L’entre-deux-guerres : contexte historique et sportif

 La France au sortir de la Grande Guerre
 

Contexte politique

La IIIe République résiste au premier conflit mondial, et en sort renforcée grâce à la victoire. George Clemenceau est le président du Conseil de novembre 1917 au début de l’année 1920 et est considéré comme un grand artisan de la victoire. Mais la joie que celle-ci provoque ne doit pas masquer le terrible bilan de cette guerre, tant sur le plan humain, démographique, qu’économique, que nous évoquerons par la suite.
La politique des gouvernements d’après guerres est très influencée par le souvenir encore très frais d’un conflit qui a touché, directement ou indirectement, toute la population. De nombreuses associations de tous bords politiques sont créées pour soutenir les anciens combattants, mais aussi pour maintenir un sentiment d’union sacrée et d’amour de la patrie, deux valeurs qu’ont porté les combattants sur le champ de bataille. De gauche à droite, le principal objectif politique est le maintien de la paix.

 Contexte économique

Sur le plan strictement financier, le bilan de la Première Guerre mondiale est une catastrophe. La France a fait passer sa dette extérieure à 33,6 milliards de francs en 1918 contre « seulement » 51 millions en 19144, en empruntant principalement aux banques américaines. La dette intérieure a quant à elle été multipliée presque sept fois, passant de 33 à 219 milliards francs-or. Cela influe directement sur l’inflation – les prix ont quasiment quadruplé en 1918 par rapport à 1913 – qui menace gravement l’économie française et sa monnaie.

 Contexte social

1 350 000 hommes, sur les 8 660 000 mobilisés, ont trouvé la mort sur les champs de batailles de la Première Guerre mondiale. Il faut ajouter à cela 100 000 décès consécutifs aux blessures de guerre et 1 100 000 invalides. Sans oublier les 250 000 « victimes de la surmortalité du temps de guerre due aux mauvaises conditions d’hygiène, aux privations ou encore à l’épidémie de grippe dite espagnole qui fauche à elle seule plus de 100 000 civils »6. Cette boucherie a aussi des conséquences à long terme sur les naissances puisqu’un déficit d’un million est estimé. La mortalité infantile passe de 17,5‰ en 1914 à 22‰ en 1918.

 Le sport dans l’entre-deux-guerres : popularisation, début du sport spectacle, débats sur le professionnalisme

C’est véritablement le cyclisme et le sport automobile qui opèrent la démocratisation des pratiques sportives et du sport-spectacle. Le prix de la bicyclette a fortement diminué depuis les premières machines qu’utilisaient quelques membres des élites urbaines, et le journaliste Henri Desgranges – lui-même ancien coureur cycliste et à pied, faut-il le rappeler – fondateur du journal L’Auto, amorce la croissance de l’intérêt pour la « petite reine » et son Tour de France créé en 1903. Il invente à lui tout seul un marché et un modèle économique qui est encore valable de nos jours, à savoir le sponsoring à grande échelle. Il existait, certes, déjà des coureurs professionnels rémunérés par des marques de cycles désireuses de publicité vivante, mais la création, l’organisation et le financement d’une course à étapes si longue par un journal est une grande première. La diffusion à grande échelle de ce sport déclenche, en ce début de XXe siècle, un mouvement qui voit plusieurs centaines de milliers de personnes sillonner les routes de France sur leur vélo.

 Le sport dans le Maine-et-Loire : le cyclisme toujours sur le devant de la scène malgré l’arrivée en force du football

La culture de masse se diffuse rapidement dans le Maine-et-Loire. L’essor du cinéma dans l’Anjou est largement visible dans l’entre-deux-guerres : 150 lieux de projection existent en 1934, dont 75 proviennent de réseaux catholiques et une quinzaine de réseaux laïques. Quatre salles existent à Angers cette année-là, deux à Cholet et deux à Saumur. A la fin des années 1930, un Choletais sur quatre va au cinéma au moins une fois par semaine. Le nombre de salles augmente alors que des places plus chères sont instaurées, ce qui montre, selon Jean-Luc Marais, que « tous les publics sont touchés »17.

 Les débuts du cyclisme à Saumur

A Saumur, terre hippique plus que vélocipédique, le cyclisme n’a pas eu des débuts faciles malgré la création du Véloce-Club de Saumur dès 1878, trois ans seulement après le Véloce-Club d’Angers qui est lui-même un des premiers clubs de l’hexagone. Cependant, les sociétaires ont l’interdiction « de monter [leur] véloce en ville sous peine d’une amende de cinq francs »20, ce qui réduit considérablement leur liberté de circuler et impose des contraintes non négligeables à la société vélocipédique naissante. Il était donc impossible d’organiser des courses dans la ville de Saumur jusqu’à la construction du vélodrome sur la rive gauche de la Loire. Il a été construit en 1894 à l’emplacement de l’actuel boulevard du Maréchal Juin. Avec une longueur totale de 333,33 mètres, dont deux lignes droites de 103 mètres pour 7 mètres de large, la piste en ciment n’a rien à envier aux plus prestigieuses de l’époque. Seuls les virages relevés à 30 degrés semblent assez peu pentus.

 Le cyclisme à Cholet

Cholet est la troisième ville de l’Anjou à développer le sport vélocipédique. Le Véloce-Club d’Angers est invité le 14 juillet 1888 à participer à une manifestation cycliste organisée par la municipalité de Cholet, sur la place Travot. Le succès est au rendez-vous, et le Véloce-Club Choletais (V.C.C.) est créé le 7 octobre de la même année. L’association ne tarde pas à organiser sa première course puisqu’une première compétition sur route a lieu entre Cholet et la Séguinière le 11 novembre 188823.

 Rappels historiographiques

 Le sport par les sciences sociales et humaines : un intérêt tardif ?

Robert Chapatte, commentateur du tour de France, a prononcé en 1960, lorsque Charles de Gaulle a salué le peloton à Colombey les Deux Eglises, une phrase assez représentative de l’intérêt porté au sport par les chercheurs de l’époque : « Au risque de faire sourire les intellectuels délicats pour lesquels le cyclisme est un sport vulgaire, nous dirons simplement : ‘’ merci monsieur le président ’’. »29
Nous avons présenté l’histoire du sport dans notre mémoire sur le cyclisme associatif à Angers30 comme un champ de recherche récent qui ne s’est développé à part entière qu’à partir des années 1990. Le sport a été l’objet d’études sociologiques à partir des années 1960, en second plan d’abord avant d’être un sujet de thèses dans les années 1970.

 Présentation des sources

La grande majorité des sources présentes dans ce mémoire sont issues des archives départementales de Maine-et-Loire. Ce sont, pour la plupart, des archives associatives ou de presse.
La série M sur l’administration générale du département, abrite la cote 40 M 30 sur les sociétés vélocipédiques de Maine-et-Loire. Nous l’avons déjà en partie étudiée l’année dernière car les documents qui s’y trouvent datent d’entre 1875 et la Seconde Guerre mondiale. Nous y trouvons des déclarations de création d’associations, des règlements, ainsi que des demandes d’autorisation pour des courses vélocipédiques. Ces dernières s’arrêtent en 1927 sans que nous en connaissions la raison.

Les associations cyclistes

 Les clubs historiques

Le monde du cyclisme associatif est quelque peu touché par la Grande Guerre. Que ce soit à Angers, Cholet ou Saumur, les trois villes auxquelles nous nous intéressons en particulier. Le paysage associatif est modifié, et souvent dans le même sens. Pour ces trois villes, une seule société vélocipédique s’impose à partir de 1919, alors que deux, voire trois clubs cohabitaient dans la même municipalité. Nous tenterons d’expliquer ces changements ville par ville.

 Les nouvelles associations

Si le cyclisme de l’Anjou est dominé par les associations que nous venons de présenter, il faut également évoquer les autres sociétés sportives qui proposent du vélo parmi d’autres sports. Elles sont plus difficiles à cerner car elles ne laissent pas beaucoup de traces dans les sources. Ce sont généralement de petites associations qui proposent des activités sportives à un public plus ou moins restreint, et elles n’organisent pas forcément d’événements particuliers.

 Le paysage social du cyclisme

 Les origines sociales des membres des clubs

 La situation à la fin du XIXe siècle

Les archives qui permettent de définir les origines sociales des cyclistes sont peu nombreuses. Les seules que nous avons pu utiliser datent de la fin du XIXe siècle et ne concernent pas les sociétés vélocipédiques angevines, c’est pourquoi nous ne les avons pas étudiées dans notre précédent mémoire. Si la fin du XIXe siècle n’entre pas dans notre cadre temporel de l’entre-deux-guerres, nous avons tout de même choisi d’inclure ces données dans notre étude car cela peut nous permettre de les comparer avec la tendance de l’entre-deux-guerres.

Conclusion

Le sport et le cyclisme tels qu’ils sont montrés aujourd’hui – c’est-à-dire à travers son ultra-médiatisation – est bien différent de la réalité de terrain. Le sport vit grâce à ceux qui le font, et non grâce à ceux qui en profitent. C’est le monde du sport associatif qui est garant d’une certaine idée de la chose sportive comme elle était conçue à ses débuts. En effet, si aujourd’hui le tissu du sport associatif est dense, c’est parce qu’il s’est solidement construit à partir de la fin du XIXe siècle, et consolidé dans l’entre-deux-guerres grâce à la popularisation de cette pratique.
Le cyclisme, sport central autour duquel s’articule ce travail, est un sport qui, à la fin de la Première Guerre mondiale, a déjà une histoire. Notre mémoire sur le développement du cyclisme associatif à Angers entre 1875 et 1914158 a mis en valeur l’activité qu’a connu ce sport pendant cette période. L’intérêt de ce travail sur le cyclisme en Maine-et-Loire dans l’entre-deux-guerres est d’observer l’évolution du cyclisme à Angers, et de comparer Angers avec le reste du département, en fonction des documents auxquels nous avons pu avoir accès. Nous avons aussi fait, dans la mesure du possible, l’étude de la composition sociale des clubs cyclistes du département, en cherchant une possible évolution entre l’avant-guerre et l’entre-deux-guerres. Enfin, notre troisième axe de recherche s’est porté sur la mise en valeur du cyclisme à une époque où un bon nombre de sports se popularisent à tous les échelons de la société.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. L’entre-deux-guerres : contexte historique et sportif
1. La France au sortir de la Grande Guerre
i. Contexte politique 
ii. Contexte économique 
iii. Contexte social 
2. Le sport dans l’entre-deux-guerres : popularisation, début du sport spectacle, débats sur le professionnalisme 
3. Le sport dans le Maine-et-Loire : le cyclisme toujours sur le devant de la scène malgré l’arrivée en force du football
i. Les débuts du cyclisme à Saumur 
ii. Le cyclisme à Cholet 
II. Rappels historiographiques 
1. Le sport par les sciences sociales et humaines : un intérêt tardif ?
2. L’histoire du sport féminin
3. Histoire du sport dans l’entre-deux-guerres
4. Histoire du Maine-et-Loire
III. Présentation des sources 
ÉTUDE DE CAS
I. État des lieux du cyclisme au sortir de la Première Guerre mondiale
1. Les associations cyclistes
i. Les clubs historiques 
ii. Les nouvelles associations 
2. Les infrastructures
3. Organisations de courses et événements
i. L’institutionnalisation du calendrier cycliste 
ii. L’émergence d’un cyclisme « festif » 
iii. Des disciplines plus variées 
II. Le paysage social du cyclisme
1. Les origines sociales des membres des clubs
i. La situation à la fin du XIXe siècle 
ii. Des différences selon les associations 
iii. La situation de l’entre-deux-guerres 
iv. Une division sociale au sein des associations
2. Les différents types d’associations comme empreintes de la popularisation du sport ? 
i. Les clubs historiques plus stables, mais plus bourgeois ?
ii. Les nouvelles associations : entre éducation, tourisme et loisirs
a. Les associations de loisirs et tourisme 
b. Les associations à but militaire et/ou éducatif
3. Les débuts du sport féminin 
III. La promotion du cyclisme
1. Le pouvoir des municipalités
2. Le rôle de la presse 
i. La presse au service de ses propres événements sportifs
VEILLON Baptiste – Le cyclisme associatif en Maine-et-Loire dans l’entre-deux guerres
ii. La presse comme témoin de la popularité de la bicyclette 
iii. La presse au service des annonceurs 
3. L’émergence de sports concurrents ?
CONCLUSION 

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