La préparation des observations HIFI du programme PRISMAS

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La formation d’étoiles massives

La formation d’étoiles massives est encore mal comprise. Néanmoins, les avis convergent sur le fait qu’elle n’est pas une version à plus grande échelle de la formation d’étoiles de faible masse (Zinnecker & Yorke 2007). Une proto-étoile est considérée comme massive à partir du moment où sa masse dépasse 8 M . Ce type de formation a lieu dans des nuages moléculaires géants, c’est-à-dire présentant des densités de colonne de H2 de l’ordre de 1023–1024 cm 2. Les sources massives se forment plus généralement en amas, elles peuvent ensuite être éjectées hors de l’amas. Il semble néanmoins que dans certains cas, on ne puisse pas retrouver l’amas d’origine, suggérant qu’elles puissent se former isolément (de Wit et al. 2005; Selier et al. 2011; Bestenlehner et al. 2011). Les sources massives en formation peuvent être subdivisées en plusieurs catégories :
les nuages sombres infrarouges, appelés IRDCs pour InfraRed Dark Clouds qui ne possèdent pas encore de cœur en leur centre et sont donc encore froids, les cœurs moléculaires chauds appelés hot cores qui se caractérisent par la présence d’une chimie riche en molécules complexes organiques (cf Sect. 1.2.2),
les régions HII hyper-compactes et ultra-compactes qui présentent des poches de gaz ionisé dû à la photo-évaporation des disques (pour les régions HII hyper-compactes) ou à la photo-ionisation du cocon de poussière et de gaz dans lequel elles sont nées (pour les régions HII ultra-compactes),
les régions HII compactes et classiques dans lequel le gaz est totalement ionisé, le plus souvent par plusieurs sources, détruisant ainsi le nuage moléculaire parent. Ces sources sont alors observables en infrarouge proche et en visible.
La séquence d’événements menant à la naissance d’étoiles massives semble être la suivante (Zinnecker & Yorke 2007) :
1. la phase de compression, qui correspond à la formation de cœurs ou filaments molé-culaires denses, à l’intérieur du nuage moléculaire géant. Deux scénarios s’affrontent : effondrement monolithique dans un cœur isolé (McKee & Tan 2003) versus accrétion compétitive dans un proto-amas (Bonnell et al. 1997, 2001). Le premier suppose que les cœurs sont des condensations moléculaires dans un quasi-équilibre supporté par la turbulence qui mènent à la formation de proto-étoiles massives uniques ou multiples gra-vitationnellement liées. La masse est supposée être déterminée avant que le processus de formation stellaire n’ait commencé. La compétition pour le matériel en effondrement a seulement lieu entre des membres proches d’un système multiple. Le deuxième scénario décrit la phase de compression comme transitoire en raison de mouvements aléatoires dans le nuage auto-gravitant. La matière qui va former l’étoile peut venir de divers endroits du nuage parental. Les proto-étoiles bougent relativement au gaz moléculaire. Puisque de multiples sources sont souvent formées simultanément, chaque proto-étoile est donc en compétition avec les autres pour le matériel moléculaire disponible.
2. la phase d’effondrement qui se passe de façon non-homologue, c’est-à-dire que la distribution relative de matière change (densité uniforme au centre et gradient de densité fort sur les bords ; Larson 1969), contrairement à l’effondrement « inside-out » d’une sphère singulière isotherme décrit par Shu (1977) et qui est admis comme le meilleur modèle de formation des proto-étoiles de faible masse,
3. la phase d’accrétion de la matière des objets proto-stellaires. Contrairement aux proto-étoiles de faible masse pour lesquelles l’accrétion s’arrête bien avant le démarrage des réactions nucléaires, les sources massives en formation peuvent éventuellement brûler leur hydrogène et développer des vents radiatifs alors qu’elles continuent d’accréter et donc évoluer sur la séquence principale vers des états plus chauds et plus lumineux.
4. la destruction du nuage parental due aux vents, aux jets et au rayonnement UV produits par les étoiles massives. Quand le nuage a totalement été dissipé, on a généra-lement un amas d’étoiles OB ou une association OB mêlée à des étoiles de masse plus faibles.
Un scénario de collision stellaire peut aussi être évoqué : des sources massives fusionneraient entre elles, créant ainsi un objet encore plus massif. Mais il serait plutôt rare et se limiterait aux étoiles les plus massives des amas jeunes les plus riches (e.g. Zinnecker & Yorke 2007).

La chimie associée à la formation stellaire

La chimie du milieu interstellaire

La chimie du milieu interstellaire se caractérise par deux types de chimie : l’une en phase gazeuse et l’autre à la surface des grains, et qui bien évidemment interagissent entre elles.
Les réactions en phase gazeuse peuvent être divisées en plusieurs catégories telles que :
les réactions ion-molécule du type A + B+ ! C + D+ ; elles sont très souvent sans barrière d’activation, et donc favorisées dans les milieux froids, permettant ainsi la formation d’ions moléculaires de plus en plus complexes,
la recombinaison dissociative, A+ + e ! C + D, qui produit une grande quantité de molécules neutres grâce à l’intéraction entre les ions précédemment formés et des électrons libres,
les réactions neutre-neutre du type A + B ! C + D, très efficaces dans les régions de hautes températures telles que les régions de chocs, les régions de photodissociation et les cœurs chauds des proto-étoiles ; elles peuvent aussi jouer un rôle à basse température quand elles ont lieu entre radicaux libres ou entre un radical libre et une molécule non saturée car elles n’ont généralement pas de barrière d’activation,
l’association radiative, A + B ! AB + h , processus lent mais potentiellement efficace si l’un des partenaires est très abondant (H2 par exemple),
la photodissociation du type AB + h ! A + B, mécanisme principal de destruction des molécules dans les parties externes des nuages moléculaires soumises au rayonnement ultraviolet,
le détachement associatif, A + B ! AB + e , impliqué dans la chimie des anions,
les réactions de transfert de charge, A+ + B ! A + B+.
La chimie à la surface des grains joue aussi un rôle très important dans la chimie du milieu interstellaire. De nombreuses molécules ne peuvent pas se former en phase gazeuse ou alors en quantité insuffisante par comparaison aux observations. C’est notamment le cas de l’hydrogène moléculaire, H2, pour lequel la surface du grain de poussière va jouer le rôle de catalyseur en permettant la rencontre entre deux atomes d’hydrogène, ceux-ci étant particuliè-rement mobiles à la surface des grains. Dès que la molécule H2 est formée, elle est rapidement éjectée dans la phase gazeuse. D’autres molécules plus complexes se forment aussi à la surface des grains, comme le dioxyde de carbone (CO2) détecté dans les manteaux de glace des grains (D’Hendecourt & Jourdain de Muizon 1989), ou bien comme le méthanol (CH3OH, Menten et al. 1988), le sulfure d’hydrogène (H2S, Minh et al. 1989), etc, molécules pour lesquelles les abondances observées dans la phase gazeuse ne peuvent pas être reproduites par des modèles ne prenant en compte que les processus en phase gazeuse.
La chimie à la surface des grains et la chimie en phase gazeuse interagissent ensemble par des mécanismes d’adsorption et de désorption. Dans les milieux froids et denses, les molécules (formées en phase gazeuse) et les atomes peuvent être adsorbés sur les grains, c’est-à-dire se coller à la surface des grains de poussière formant ainsi un manteau autour du cœur silicaté et carboné du grain. La disparition de la phase gazeuse de ces molécules/atomes s’appelle la déplétion. La déplétion est particulièrement marquée dans les cœurs pré-stellaires, où la température est de plus en plus froide et la densité de plus en plus grande vers le centre du cœur. Dans ces objets, le monoxyde de carbone, CO, et le diazote, N2, vont disparaître de la phase gazeuse, pour se coller à la surface des grains. Nous verrons en Section 1.2.4.2, que la déplétion du CO à l’intérieur des cœurs pré-stellaires va avoir une grande importance sur la deutération des molécules. A la surface des grains, les molécules et/ou atomes peuvent réagir entre eux pour former d’autres molécules. On peut citer, par exemple, l’hydrogénation du CO qui peut mener à la formation du formaldéhyde, H2CO, et du méthanol, CH3OH (e.g. Shalabiea & Greenberg 1994; Watanabe & Kouchi 2002).
Ces nouvelles molécules formées à la surface des grains peuvent alors être libérées en phase gazeuse par désorption. La désorption peut être thermique (e.g., Fraser et al. 2001). Ce mécanisme est très important dans les cœurs des proto-étoiles où la température est élevée en leur centre. Dans ces cœurs chauds, les molécules complexes sont très abondantes. On ne sait pas vraiment si les molécules complexes observées sont formées directement à la surface des grains et libérées en phase gazeuse ou si des molécules légérement moins complexes sont désorbées et réagissent ensuite entre elles en phase gazeuse pour se complexifier davantage. Les deux processus jouent sûrement un rôle. Le paragraphe suivant décrit plus en détail ces cœurs chauds que l’on appelle hot cores/hot corinos. La désorption peut aussi être non thermique. Si elle est causée par un photon UV, on parle de photo-désorption (e.g., Öberg et al. 2009a,b). Elle a principalement lieu dans les régions externes des nuages moléculaires où le champ UV est important. Elle peut également être induite par des rayons cosmiques (e.g., Herbst & Cuppen 2006). Les molécules piégées à la surface des grains peuvent aussi être libérées en phase gazeuse dans les chocs créés par les jets moléculaires qui vont détruire les grains. On parle de sputtering (processus par lequel les atomes et molécules présents à la surface des grains sont éjectés des grains à la suite d’un bombardement par des particules énergétiques ; e.g., Pineau des Forets & Flower 1996).

Les hot cores et hot corinos

On qualifie de hot core un cœur de proto-étoile massive qui se caractérise par une chimie riche en molécules organiques complexes telles que l’éther diméthylique, CH3OCH3, l’acide acétique, CH3COOH, le cyanure de méthyle, CH3CN, etc (e.g. Turner 1991). Ce type de ré-gion se caractérise par une densité importante (n 106 cm 3) et une température élevée (T 100 K) permettant la désorption des molécules composant les manteaux de glace des grains. De grandes quantités d’eau sont aussi libérées dans ces cœurs chauds puisque la température de sublimation de l’eau est de 100 K environ et que l’eau est un composant important des glaces des manteaux de grains (cf Sect. 1.2.5.2).
On a longtemps pensé, en raison de la durée nécessaire pour convertir des molécules de première génération en molécules complexes de seconde génération, que seules les proto-étoiles massives pouvaient conduire à la formation de molécules organiques complexes, jus-qu’à la découverte de gaz chaud dans la proto-étoile de type solaire IRAS 16293-2422 et à la mise en évidence de sauts en abondance prononcés pour les molécules de H2O et H2CO au centre de l’enveloppe proto-stellaire, comme observés dans les proto-étoiles massives (Ceccarelli et al. 2000a,b). Cependant, il a aussi été suggéré que cette augmentation d’abondance pourrait être due à une destruction partielle des manteaux de glace des grains dans les chocs (Schöier et al. 2002). Pour confirmer la présence d’un analogue de hot core dans la proto-étoile IRAS 16293-2422, il fallait donc démontrer la présence d’une chimie organique riche au sein de cette source. Ce fut fait par Cazaux et al. (2003) avec la découverte d’acide formique, HCOOH, d’acétaldéhyde, CH3CHO, de formiate de méthyle, CH3OCHO, d’éther diméthylique, CH3OCH3, d’acide acétique, CH3COOH, de cyanure de méthyle, CH3CN, et de cyanure d’éthyle, C2H5CN, grâce à des observations en direction de cet objet avec le téles-cope de 30 m de l’IRAM. La présence de molécules complexes fut également mise en évidence dans une autre proto-étoile de type solaire, NGC 1333 IRAS 4A (Bottinelli et al. 2004a). L’origine de l’émission de ces molécules a été confirmée par des données interférométriques en direction de ces deux sources qui montrent bien que l’émission est centrée sur les régions internes chaudes de l’enveloppe proto-stellaire (Bottinelli et al. 2004b, 2005). Par analogie avec les hot cores dans les sources massives, on parle de hot corinos pour les proto-étoiles de faible masse. D’autres hot corinos ont ensuite été découverts dans les proto-étoiles de faible masse NGC 1333 IRAS 4B et NGC 1333 IRAS 2A (Jørgensen et al. 2005a; Sakai et al. 2006; Bottinelli et al. 2007).

Les hydrocarbures et la chimie WCCC (Warm Carbon Chain Che-mistry)

La formation des hydrocarbures

Les hydrocarbures sont des espèces particulièrement intéressantes car abondantes dans le milieu interstellaire et à la base d’une chimie très riche. Cette abondance des hydrocarbures peut s’expliquer en phase gazeuse par la capacité du carbone à former des espèces de plus en plus complexes par des réactions ion-molécule qui peuvent être de plusieurs types :
des réactions de fixation (réaction d’un atome de carbone C avec de petits ions hydro-carbures), par exemple : C + CH+3 ! C2H+2 + H,
des réactions d’insertion (réaction de l’ion C+ avec des hydrocarbures neutres), par exemple : C+ + CH4 ! C2H+3 + H,
des réactions de condensation (réaction entre des ions hydrocarbures et des hydrocar-bures neutres), par exemple : CH+3 + C4H! C5H+2 + H2.
Les processus d’hydrogénation (réactions de type CA+ + H2 ! HCA+ + H) sont aussi à prendre en compte, puisque les réactions de fixation et d’insertion permettent de produire de nombreux ions insaturés (i.e. comportant des liaisons multiples carbone-carbone). Toutefois des énergies d’activation sont généralement nécessaires pour initier ces réactions. Une fois que les ions les plus complexes sont formés, ces processus ne sont donc que peu efficaces avant de devenir cinétiquement impossibles. Les recombinaisons électroniques permettent alors de mener à la formation d’hydrocarbures neutres observés dans le milieu interstellaire. Des ré-actions neutre-neutre sont également à considérer pour certains hydrocarbures (Turner et al. 2000). Tous ces différents mécanismes conduisent alors à la formation du réseau hydrocarbure en phase gazeuse. Ce dernier est à l’origine de nombreuses molécules, telles que les cyano-polyynes (HC2n+1N) et des composés carbonylés (molécules présentant une double liaison C=O). Il faut noter que les réactions de recombinaison électronique sont sensibles à la température. Les coefficients des taux de réaction sont plus élevés à basse température, d’où la présence d’hydrocarbures dans les régions froides. Le cyclopropenylidene (c-C3H2) comme d’autres radicaux : C2H, CN, etc, traceraient notamment les régions froides et peu denses (van Dishoeck et al. 1995). Le méthane (CH4) joue aussi un rôle important dans la chimie des hydrocarbures. Cette molécule est un important constituant des glaces qui se forme par hydrogénation d’un atome de carbone à la surface des grains (Öberg et al. 2008). Le méthane est ensuite désorbé dans les régions où la température est supérieure à 25 K. La libéra-tion du méthane en phase gazeuse pourrait favoriser la formation du propyne (CH3CCH). Il semble néanmoins, d’après Aikawa et al. (2008), que le propyne soit plutôt formé par une com-binaison de réactions en phase gazeuse (qui conduisent à la formation de chaînes carbonées insaturées telles que C3H et C3H2) et de réactions en surface des grains (qui les hydrogènent). Le propyne, comme de nombreuses autres molécules organiques, serait donc ensuite libéré en phase gazeuse par désorption thermique. Après la sublimation du CH4, une fraction réagit avec C+ pour former du C2H+3, précurseur dans la production de plus grands hydrocarbures insaturés. Ce mécanisme peut aboutir à la régénération d’hydrocarbures dans les enveloppes proto-stellaires et à un type particulier de chimie qualifiée de WCCC (Warm Carbon Chain Chemistry).

La chimie WCCC

La chimie WCCC a été mise en évidence, il y a quelques années, suite à la découverte de nombreuses chaînes carbonées dont du C4H, C4H2, C5H, C6H et C6H2 ainsi que de longs cyanopolyynes (HC5N, HC7N, HC9N) dans la proto-étoile de faible masse IRAS 04368+2557 située dans le nuage sombre L1527 (Sakai et al. 2007, 2008). La présence d’hydrocarbures à ce stade est plutôt surprenante car l’abondance des hydrocarbures est connue pour être importante dans les cœurs pré-stellaires et décroître au fur et à mesure de la formation stel-laire. Or cette source se situe à un stade transitoire entre Classe 0 et Classe I. La présence importante de chaînes carbonées dans L1527 pourrait s’expliquer par un temps d’effondre-ment rapide pendant la phase pré-stellaire. Dans ces conditions, une partie des hydrocarbures formés dans le cœur pré-stellaire auraient pu survivre. Cela semble ne pas être suffisant pour expliquer les abondances observées et nécessiterait d’impliquer un mécanisme de régénéra-tion dans les régions plus chaudes de l’enveloppe après la sublimation du méthane piégé à la surface des grains. Si le méthane présente une abondance supérieure à 10 7, il peut alors être le destructeur principal du C+, formant ainsi les ions C2H+3 et C2H+2, ce qui relancerait la formation d’hydrocarbures à grande chaîne (Aikawa et al. 2008; Hassel et al. 2008). En effet, ces ions permettraient de former par recombinaison électronique du C2H et du C2H2. L’acé-tylène, C2H2, peut alors réagir avec C+ pour former de plus grandes chaînes. Une réaction de condensation entre C2H2 et C2H+3 produit du C4H+3, qui par recombinaison dissociative mène à du C4H. Des réactions neutre-neutre entre C2H2 et CN permettent de former HC3N. Via ces réactions, des molécules à chaînes carbonées variées sont formées efficacement dans une région dense chauffée par la proto-étoile naissante. Les distributions spatiales des inten-sités de transitions de C3H2, de CCH et de C4H traduisent également une augmentation de leurs abondances au-dessus d’une température 20-30 K, confirmant que ces molécules sont bien régénérées suite à la sublimation du méthane (Sakai et al. 2010). La chimie WCCC a été détectée dans une autre proto-étoile de faible masse, IRAS 15398-3359, située dans la constellation du Loup (Sakai et al. 2009), avec la découverte de C4H, C4H2, CH3CCH et HC5N en direction de l’objet. Ces sources WCCC se caractérisent aussi par une déficience en molécules organiques complexes telles que celles découvertes dans les hot corinos. Deux types de chimie semblent donc s’opposer dans les proto-étoiles de faible masse : une où les molécules organiques complexes saturées domineraient et une autre où les chaînes carbonées (non-saturées) seraient particulièrement abondantes.
Figure 1.3 – Scénario possible pour expliquer la variation d’abondances des hydrocarbures dans les proto-étoiles de faible masse. Le schéma (a) représente le scénario de phase sans cœur longue qui favorise la conversion du carbone C en CO et par conséquent la chimie de hot corino. Le schéma (b) représente le scénario de phase sans cœur courte qui ne permet pas une conversion massive du carbone C en CO. Le carbone C est hydrogéné à la surface des grains pour former du méthane, CH4. La désorption thermique du CH4 présent en forte abondance sur les grains permet alors de créer des hydrocarbures à longues chaînes en phase gazeuse : c’est la chimie WCCC. Schéma extrait de Sakai et al. (2009).
Une possible explication à cette variation de la composition chimique serait liée à l’échelle de temps de la phase pré-stellaire. En effet, la forme majeure du carbone change de C en CO à travers des réactions en phase gazeuse dans les cœurs pré-stellaires en environ 106 ans. Ceci est comparable ou plus long que le temps de chute libre ( 4 105 ans). L’abondance de C peut donc être très importante dans les dernières étapes de la phase sans cœur, si le temps d’effondrement est rapide. Les atomes de carbone peuvent alors dépléter sur les grains avant d’avoir été transformés en CO. Dans ce cas, le CH4 est efficacement produit sur les grains par hydrogénation du carbone, ce qui peut mener à une chimie WCCC après sa désorption. Les chaînes carbonées produites dans la phase pré-stellaire pourraient aussi survivre dans le cas d’un effondrement rapide, ce qui expliquerait une distribution spatiale étendue des hydrocarbures (Sakai et al. 2010). D’un autre côté, la situation est différente si la phase pré-stellaire est plus longue que le temps de chute libre. En effet, dans le cas d’un effondrement lent, le carbone atomique est en grande partie converti en CO dans la phase gazeuse. Le CO déplète alors sur les grains en plus grande quantité que le carbone atomique. Le méthanol et le formaldéhyde sont alors formés abondamment par hydrogénation du CO, tandis que le méthane est peu produit du fait de la déficience en C sur les grains. Les molécules résultantes H2CO et CH3OH peuvent alors contribuer à la production de molécules organiques plus complexes comme le HCOOCH3, menant à une chimie de hot corino. Ces deux scénarios sont représentés schématiquement en Figure 1.3. Le type de chimie étant lié au temps d’effondrement, des sources présentant une chimie intermédiaire devraient donc exister.

La deutération

Le deutérium

Le deutérium (symbolisé par D) est un isotope de l’hydrogène. Il se caractérise par la présence d’un neutron, en plus du proton et de l’électron qui constituent l’atome d’hydrogène. Il s’est formé, en même temps que l’hydrogène, l’hélium, le lithium et le béryllium, lors de la nucléosynthèse primordiale, dans les premiers instants de l’Univers qui ont suivi le Big-Bang. C’est un élément facilement détruit à haute température uniquement. Sa disparition s’est donc arrêtée au moment de l’expansion de l’Univers et donc de son refroidissement. Depuis, le deutérium est détruit de manière continue en raison des réactions nucléaires à l’intérieur des étoiles. La réaction nucléaire principale causant sa disparition est la réaction entre un proton et le deutérium pour former du 3He. Cette diminution de l’abondance de deutérium est appelée phénomène d’astration. Il n’existe pas de processus de formation du deutérium en dehors de la nucléosynthèse primordiale. Cet atome est par conséquent représentatif du taux d’expansion de l’Univers et un outil clé pour contraindre les conditions physiques des premiers instants de l’Univers et donc la densité baryonique (c’est-à-dire la densité de baryons, dont les représentants les plus connus sont le proton et le neutron). L’abondance du deutérium a été mesurée dans plusieurs QSOs (Quasi Stellar Objects), des noyaux de galaxie actifs situés à de très grandes distances. Les abondances mesurées ( 2.82 10 5 ; Pettini et al. 2008) sont donc très proches de la valeur primordiale. Dans le milieu interstellaire local, l’abondance de deutérium est d’environ 1.5 10 5, mais de grandes variations sont observées à plus grande distance (Linsky et al. 2006).

L’eau et ses isotopes

L’omniprésence de l’eau

L’eau est une des molécules les plus intéressantes du milieu interstellaire en raison du rôle qu’elle a joué dans l’apparition de la Vie sur Terre. Elle peut, par ailleurs, jouer un rôle important dans le processus de formation stellaire via le refroidissement du gaz chaud. C’est aussi une molécule-clé du réseau chimique de l’oxygène, que ce soit en phase gazeuse ou à la surface des grains.
En plus d’être très abondante sur Terre, l’eau est omniprésente dans le milieu inter-stellaire : jets moléculaires, nuages moléculaires, hot cores, cœurs denses, disques proto-planétaires, etc. L’eau a été détectée pour la première fois en direction d’Orion en 1969 grâce à l’observation d’une raie maser à 1.35 cm (Cheung et al. 1969). Les raies masers étant non-thermales, il est impossible de déterminer une abondance à partir de la mesure de leur émission. Il faudra attendre le Kuiper Airborne Observatory et plus particulièrement le satel-lite ISO (Infrared Space Observatory) pour pouvoir observer les raies rotationnelles de H2O, pour lesquelles il est nécessaire de s’affranchir de l’atmosphère terrestre. Plusieurs satellites dont Spitzer, SWAS (Submillimeter Wave Astronomy Satellite) et ODIN seront ensuite en-voyés dans l’espace pour étudier plus en détail cette molécule, jusqu’à l’envoi plus récent de l’Observatoire Spatial Herschel (cf Sect. 1.3) qui, grâce notamment à son instrument HIFI (cf Sect. 1.3.2), permet d’observer de nombreuses transitions de l’eau dont les trois fonda-mentales à 557, 1113 et 1670 GHz. Ces différents télescopes spatiaux ont permis de montrer que l’abondance de l’eau varie énormément d’un objet à l’autre. A l’intérieur des cœurs pré-stellaires, l’abondance de l’eau en phase gazeuse est faible, inférieure à 10 8 (Bergin & Snell 2002; Caselli et al. 2010), tandis qu’elle peut atteindre des valeurs bien plus élevées dans le gaz des jets moléculaires de proto-étoiles ( 10 5–10 4 ; Liseau et al. 1996; Lefloch et al. 2010; Kristensen et al. 2010). En phase solide, l’eau est un important constituant des manteaux de glace des grains où elle peut présenter des abondances allant jusqu’à 10 4 (e.g., Pontoppidan et al. 2004).

Les mécanismes de formation de l’eau

L’eau peut se former à la fois en phase gazeuse et à la surface des grains. La Figure 1.7 résume les différents mécanismes à l’oeuvre pour former de l’eau.
En phase gazeuse, la formation de l’eau peut résulter de réactions ion-molécule menant à la formation de l’ion H3O+, qui peut alors se recombiner dissociativement pour former H2O (e.g., Bates 1986; Rodgers & Charnley 2002). Ces mécanismes ont notamment lieu dans les nuages diffus. L’eau peut également être produite en phase gazeuse grâce à la réaction hau-tement endothermique O + H2 ! OH + H suivie par la réaction entre OH et H2 (Wagner & Graff 1987; Hollenbach & McKee 1989; Atkinson et al. 2004). Du fait de la haute endo-thermicité de cette première réaction, ce mécanisme est typique de milieux présentant de très hautes températures comme les régions de chocs et les cœurs chauds de proto-étoiles massives.
Dans les régions froides et denses, le mécanisme principal de formation de l’eau a lieu à la surface des grains, grâce à une série de réactions impliquant des atomes d’oxygène et d’hydrogène ayant accrété (e.g., Tielens & Hagen 1982). De plus en plus d’expériences de laboratoire sont menées pour déterminer l’efficacité des réactions impliquant O, O2 et O3 (e.g., Mokrane et al. 2009; Dulieu et al. 2010; Cuppen et al. 2010). Comme expliqué en 1.2.1, les molécules d’eau piégées à la surface des grains sont rapidement libérées en phase gazeuse dès que la température du milieu est suffisamment élevée pour les sublimer ( 100 K ; Fraser et al. 2001), augmentant ainsi l’abondance gazeuse de l’eau dans les régions internes chaudes de l’enveloppe proto-stellaire (Ceccarelli et al. 1996, 1999, 2000a). Le sputtering créé par les chocs peut aussi libérer les molécules d’eau piégées dans les grains.

Le rapport ortho/para de l’eau

La molécule d’eau, H2O, présente, en raison d’une différence de spin nucléaire total (I), deux formes différentes : ortho–H2O (I=1, Ka+Kc impair) et para–H2O (I=0, Ka+Kc pair). Les transitions entre ces deux formes sont interdites et on peut donc considérer ces deux formes comme deux molécules différentes. A l’équilibre, le rapport d’abondance de la forme ortho sur la forme para est de 3 à haute température (& 30 K) et diminue vers les températures plus basses (cf Fig. 1.8). Il se calcule comme le rapport de la fonction de partition de la forme ortho (sommation sur tous les niveaux ortho) sur celle de la forme para (sommation sur tous les niveaux para) :
np = Pgp exp( Ep=kT ) (1.16)
no go exp( Eo=kT )
avec no=np le rapport de la densité de la forme ortho sur celle de la forme para, k la constante de Boltzmann et T la température. Eo et Ep sont les énergies des niveaux des formes ortho et para. go et gp correspondent aux poids statistiques des formes ortho et para. Pour l’eau, si J est le moment cinétique total d’un niveau, go = 3(2J + 1) et gp = 2J + 1. Pour des températures élevées, le rapport d’abondance est équivalent au rapport des poids statistiques, soit 3 pour la molécule d’eau. L’étude du rapport ortho/para présente un intérêt non négligeable car il peut garder la mémoire de la formation de la molécule. Supposons que la molécule d’eau soit détectée dans un choc avec un rapport ortho/para inférieur à 2. Les températures dans les chocs étant très élevées, le rapport ortho/para serait, à l’équilibre, de 3 si l’eau s’était formée au moment du choc. Mais si l’eau s’est formée à la surface de grains froids, l’énergie générée par la réaction chimique est partagée avec le grain et les molécules d’eau devraient s’équilibrer à un rapport ortho/para qui reflète la température du grain. Au moment de son entrée en phase gazeuse via sputtering suite au choc, le rapport ortho/para garderait alors la mémoire de la température du grain à laquelle s’est formée l’eau. Un mélange entre formation en phase gazeuse dans le choc et sputtering ne peut pas être exclu et donc une mesure de rapport ortho/para inférieur à 3 représenterait une limite supérieure du rapport ortho/para de la glace d’eau contenue dans les manteaux des grains. Des conversions ortho-para peuvent néanmoins avoir lieu via une collision avec un proton ou un ion H+3 menant à un échange de protons (Flower et al. 2006; Lis et al. 2010). Au bout d’un temps suffisamment long (qui dépend de l’abondance en ions et de la densité du milieu), le rapport ortho/para peut alors être modifié jusqu’à atteindre l’équilibre avec la température du gaz.
Le rapport ortho/para de l’eau a pu être déterminé pour la première fois avec l’instrument HIFI d’Herschel dans des nuages diffus situés sur la ligne de visée de deux régions de formation stellaire massives SgrB2 et W31C (Lis et al. 2010). Il est de 2.35 0.35 en direction de SgrB2 à des vitesses correspondant à l’anneau moléculaire en expansion. Cela suggère une formation de l’eau à la surface des grains à une température d’environ 27 K ou bien une relaxation en phase gazeuse jusqu’à un équilibre avec la température du gaz des nuages diffus (T 30 K). Le rapport ortho/para est un peu plus élevé sur la ligne de visée de W31C avec une valeur de 2.8 0.2, compatible avec la valeur à l’équilibre à haute température, 3:1. Il a aussi été déterminé dans plusieurs comètes. Les températures de spin nucléaire (températures correspondant aux rapports ortho/para observés à l’équilibre) déduites étaient de l’ordre de 30 K (Bonev et al. 2007), proche de la valeur mesurée en direction de SgrB2. La similarité des rapports ortho/para de l’eau déterminés dans les différentes comètes étudiées montre que les températures de spin ne varient pas avec la distance héliocentrique de la comète (pas d’effet dû au changement de température du gaz ou de la surface), ne varient pas avec la production de gaz de la comète et ne dépendent pas de l’histoire dynamique de la comète (pas d’effet dépendant de l’origine de la comète et de la température interne de son noyau).

L’eau deutérée

L’eau deutérée, HDO, est supposée se former de manière similaire à l’eau. Comme ex-pliqué précédemment, en raison des différences d’énergie de vibration de point 0, le rapport HDO/H2O sera élevé si l’eau est formée à basse température, comme c’est le cas à la surface des grains, tandis qu’il sera faible si l’eau est formée à haute température comme dans les hot cores ou les régions de photo-dissociation. La différence d’énergie de vibration de point 0 entre HDO et H2O est de 886 K (Hewitt et al. 2005).
Les régions de formation stellaire massives :
L’eau deutérée a été détectée pour la première fois en 1975 dans Orion KL (Turner et al. 1975). C’est la troisième molécule deutérée découverte dans le milieu interstellaire après DCN et HD. Néanmoins, à cette époque, le fractionnement de l’eau ne pouvait pas être déterminé puisque l’isotope principal de l’eau (à l’exception des raies masers) n’est pas observable depuis le sol du fait de la grande quantité d’eau dans l’atmosphère. Les premières estimations de rapport HDO/H2O ont été réalisées en utilisant des observations sol de l’isotope H218O de l’eau (Jacq et al. 1988, 1990). Les rapports isotopiques trouvés sont compris entre 3 et 6 10 4 (Jacq et al. 1990). Des valeurs similaires sont obtenues par Gensheimer et al. (1996) et Helmich et al. (1996), suggérant une formation de l’eau à la surface des grains. De manière générale, dans les hot cores, le rapport HDO/H2O est inférieur ou égal à 10 3. Il semble cependant que, dans Orion, des valeurs plus élevées ( 10 2) aient été mesurées (Persson et al. 2007; Bergin et al. 2010). On notera que Bergin et al. (2010) ont estimé le rapport HDO/H2O à partir de la détection du très rare isotope HD18O, observé pour la première fois avec l’instrument HIFI d’Herschel.
Les proto-étoiles de faible masse :
L’étude de la deutération dans les proto-étoiles de faible masse a commencé bien plus tard, après la découverte que des molécules deutérées pouvaient être présentes en abondance dans ces environnements (Ceccarelli et al. 1998). Contrairement aux sources massives, les rapports HDO/H2O déduits semblent très variables. Dans la première source à être étudiée, IRAS 16293-2422, Stark et al. (2004) trouvent un rapport HDO/H2O dans les parties internes de l’enveloppe de quelques 0.01% tandis que Parise et al. (2005) concluent sur un fraction-nement de 3%. Cette différence s’explique par le fait que Stark et al. (2004) n’ont pas fait l’hypothèse d’une désorption thermique au centre de la proto-étoile. Dans le hot corino de la source NGC 1333 IRAS 4B, Jørgensen & van Dishoeck (2010a) obtiennent une limite supé-rieure de 0.06%. Enfin dans la proto-étoile NGC 1333 IRAS 2A, Liu et al. (2011) trouvent une limite inférieure de 1%. Les Sections 3.4.1 et 3.4.3 décrivent plus précisément les méthodes utilisées dans ces études. Le nombre de raies prises en compte et les modèles utilisés peuvent en effet mener à des résultats assez incertains. L’eau lourde, D2O, a été détectée par Butner et al. (2007) pour la première fois via la transition fondamentale de para-D2O à 317 GHz, en direction de la source IRAS 16293-2422. Les rapports isotopiques obtenus dans le hot corino sont de 1.7 10 3 pour D2O/HDO et de 5 10 5 pour D2O/H2O.
L’eau deutérée a aussi été cherchée dans les glaces des grains en direction de jeunes proto-étoiles massives et de masse intermédiaire (Dartois et al. 2003) et de proto-étoiles de faible masse (Parise et al. 2003). Le rapport HDO/H2O des glaces a été estimé via des observations de bandes d’élongation de O–H et O–D. Seules des limites supérieures ont été déterminées. Elles sont . 0.4 – 1% en direction des proto-étoiles massives et de masse intermédiaire (Dartois et al. 2003) et . 0.5 – 2% dans les proto-étoiles de Classe I (les sources de Classe 0 ne sont pas assez brillantes dans l’infrarouge proche ; Parise et al. 2003). Il semble, par ailleurs, difficile de pouvoir atteindre des limites inférieures plus basses.

L’origine de l’eau des océans terrestres

L’origine de l’eau sur Terre est un sujet qui fait particulièrement débat. La similarité entre la composition de la Terre et celle d’un certain type de météorites, les chondrites enstatites, suggère une proto-Terre particulièrement sèche au départ. Les chondrites font partie des mé-téorites les plus primitives. Elles sont issues d’astéroïdes trop petits pour être différenciés et gardent donc la mémoire des débuts de la formation du Système Solaire. Les chondrites enstatites sont particulièrement sèches et viennent essentiellement de la partie interne de la ceinture d’astéroïdes ( 2 UA). La Terre étant sèche à son début, il a fallu que de l’eau soit apportée par la suite afin de constituer les océans et de permettre l’apparition de la Vie. Plusieurs hypothèses s’affrontent dont l’accrétion locale et les impacts de comètes et d’asté-roïdes. Dans le premier scénario, la Terre aurait accrété à la fin de sa formation, des embryons planétaires provenant de la ceinture externe d’astéroïdes (2.5–4 UA) et avec une composition similaire aux chondrites carbonées, météorites riches en eau. La deuxième hypothèse suggère un apport d’eau par des comètes ou des astéroïdes lors de grands bombardements. Les co-mètes, en plus de l’eau, pourraient aussi avoir apporté des molécules prébiotiques qui, une fois en contact avec l’eau liquide des océans, auraient trouvé un milieu propice à leur évolution.
La deutération dans les comètes et les météorites de l’eau fait donc l’objet d’un grand intérêt. En effet, en comparant le rapport HDO/H2O de ces corps avec celui de l’eau des océans terrestres pour laquelle le VSMOW (Vienna Standard Mean Ocean Water) est de (1.558 0.001) 10 4 (Lecuyer et al. 1998), on peut conclure sur les sources potentielles d’apport d’eau sur Terre. Six mesures du fractionnement en deutérium de l’eau ont été réali-sées en direction de six comètes du nuage de Oort : Halley (Eberhardt et al. 1995), Hyakutake (Bockelée-Morvan et al. 1998), Hale-Bopp (Meier et al. 1998), 2002 T7 (Hutsemékers et al. 2008), Tuttle (Villanueva et al. 2009) et Ikeya-Zhang (Janini & Gibb 2010), avec une valeur moyenne de (2.96 0.25) 10 4, soit deux fois plus que le rapport HDO/H2O des océans terrestres. Le rapport D/H mesuré dans des chondrites carbonées CI est, par contre, en total accord avec la valeur VSMOW, suggérant ainsi que les astéroïdes constitueraient le principal réservoir de l’eau sur Terre et non pas les comètes (Morbidelli et al. 2000).
Plus récemment, des observations Herschel/HIFI ont cependant relancé l’hypothèse de l’origine cométaire de l’eau terrestre avec la mesure du rapport HDO/H2O dans une comète de la famille de Jupiter, Hartley 2. Ce type de comètes ne provient pas du nuage de Oort comme les autres comètes étudiées mais de la ceinture de Kuiper. La ceinture de Kuiper se situe au-delà de l’orbite de Neptune, entre 30 et 50 UA, tandis que le nuage de Oort se situe au-delà de 5000 AU (cf Fig. 1.9). Le rapport D/H mesuré dans cette catégorie de comètes est de (1.61 0.24) 10 4 et donc en total accord avec la valeur des océans terrestres (Hartogh et al. 2011). Les comètes de la ceinture de Kuiper pourrait donc constituer un réservoir non négligeable de l’eau des océans terrestres. La Figure 1.10 représente le fractionnement en deutérium mesuré dans les comètes comparativement à la valeur des océans terrestres et à la valeur D/H de la nébuleuse solaire.
Si les comètes ont vraiment participé à l’apport de l’eau sur Terre, il est important de comprendre comment l’eau a évolué depuis la formation du cœur pré-stellaire jusqu’à la formation du disque proto-planétaire à partir duquel se forment les planètes et les comètes. Ce rapport était-il prédéfini au tout début de la formation stellaire et conservé jusque dans les comètes et puis sur Terre ou a-t-il subi des modifications au cours de la formation stellaire ? Cette thèse a notamment pour objectif de fournir des réponses à cette question travers l’étude du rapport HDO/H2O dans plusieurs proto-étoiles de Classe 0, potentiels futurs Soleils. La grande qualité des données de l’instrument HIFI du satellite Herschel a notamment permis de contraindre plus précisément le fractionnement en deutérium dans ces sources. Ce satellite est décrit dans la Section suivante.

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Table des matières

1 Contexte astrophysique 
1.1 La formation stellaire
1.1.1 La formation d’étoiles de type solaire
1.1.2 La formation d’étoiles massives
1.2 La chimie associée à la formation stellaire
1.2.1 La chimie du milieu interstellaire
1.2.2 Les hot cores et hot corinos
1.2.3 Les hydrocarbures et la chimie WCCC (Warm Carbon Chain Chemistry)
1.2.4 La deutération
1.2.5 L’eau et ses isotopes
1.3 L’Observatoire Spatial Herschel
1.3.1 L’Observatoire Spatial Herschel
1.3.2 L’instrument HIFI
1.3.3 Implications dans les programmes à temps garanti : CHESS et PRISMAS
2 Les outils d’analyse et de modélisation 
2.1 Des observations à la réduction des données
2.1.1 Les observations
2.1.2 La préparation des observations HIFI du programme PRISMAS
2.1.3 La réduction de données
2.2 L’analyse des données
2.2.1 L’analyse avec CASSIS
2.2.2 Les bases de données spectroscopiques
2.2.3 Analyse du relevé spectral TIMASSS
2.3 Les modèles de transfert radiatif
2.3.1 Transfert radiatif
2.3.2 Modélisation ETL : les diagrammes rotationnels
2.3.3 Modélisation hors-ETL
3 La deutération de l’eau dans la proto-étoile de faible masse IRAS 16293- 2422 
3.1 La proto-étoile IRAS 16293-2422
3.2 Observations
3.2.1 Données Herschel/HIFI
3.2.2 Données IRAM-30m
3.2.3 Données JCMT
3.3 Modélisation et résultats
3.3.1 Modélisation
3.3.2 Les coefficients de collision de l’eau deutérée
3.3.3 Modélisation de l’eau deutérée
3.3.4 Modélisation de l’eau
3.3.5 Modélisation de l’eau lourde
3.3.6 Rapports HDO/H2O, D2O/HDO et D2O/H2O
3.4 Discussion sur le fractionnement en deutérium de l’eau
3.4.1 Comparaison avec de précédentes études
3.4.2 Contraintes sur la formation de l’eau
3.4.3 Comparaison du rapport HDO/H2O dans d’autres proto-étoiles
3.4.4 Comparaison avec le modèle chimique d’Aikawa et al. (2012)
4 L’eau deutérée dans les proto-étoiles de faible masse NGC 1333 IRAS 4A et IRAS 4B 1
4.1 La région de formation stellaire NGC 1333 IRAS 4
4.2 Observations
4.2.1 Données Herschel/HIFI
4.2.2 Données IRAM-30m
4.2.3 Données JCMT
4.2.4 Données CSO
4.3 Modélisation et résultats
4.3.1 Modélisation
4.3.2 L’enveloppe proto-stellaire d’IRAS 4A
4.3.3 L’enveloppe proto-stellaire d’IRAS 4B
4.3.4 Le flot moléculaire d’IRAS 4A
4.4 Discussion et perspectives
4.4.1 Détermination des rapports HDO/H2O
4.4.2 Comparaison des abondances de HDO entre proto-étoiles de faible masse
4.4.3 Perspectives pour la proto-étoile IRAS 4B
5 Etude de l’eau deutérée dans des proto-étoiles massives : le cas de la région HII G34.26+0.15 
5.1 La région HII ultra-compacte G34.26+0.15
5.2 Observations
5.2.1 Données Herschel/HIFI
5.2.2 Données IRAM-30m
5.2.3 Données CSO
5.3 Modélisation et résultats
5.3.1 La structure de la source G34
5.3.2 Contraintes du profil en vitesse et du paramètre b-doppler
5.3.3 Influence du décalage entre observations pointées et pic d’émission du HDO
5.3.4 Influence de la température de saut sur la détermination des abondances
5.4 Discussion et perspectives
5.4.1 Discussion des résultats et perspectives pour le rapport HDO/H2O
5.4.2 Discussion des abondances de HDO
6 Conclusion et perspectives 
A Etude des hydrocarbures dans la proto-étoile de faible masse IRAS 16293- 2422 
A.1 Etude des hydrocarbures dans le relevé spectral TIMASSS
A.1.1 Hydrocarbures détectés dans le relevé spectral TIMASSS
A.1.2 Diagrammes rotationnels
A.2 Etude interférométrique du propyne (CH3CCH) avec ATCA
A.3 Cartographie des hydrocarbures avec le télescope de l’IRAM-30m
A.3.1 Présentation des cartes
A.3.2 Interprétation des cartes
Publications
Acronymes
Table des figures
Bibliographie 

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