La pratique du théâtre et le développement chez l’enfant 

Les instructions officielles

L’apprentissage du langage oral paraît désormais fondamental au regard des programmes pour le cycle 2 en vigueur (Bulletin Officiel n°11 du 26 novembre 2015) qui le placent en première ligne dans le volet des enseignements du français.
La pratique d’une activité théâtrale à l’école permet par ailleurs de travailler un certain nombre de compétences que nous retrouvons dans les instructions officielles actuelles.
En premier lieu, il est fait mention dans les contributions essentielles des différents enseignements au socle commun que l’acquisition d’une aisance à l’oral accompagnée d’une étude du fonctionnement de la langue permet aux élèves de produire des énoncés oraux maîtrisés. Cet aspect est l’une des priorités à travailler au regard des difficultés que semble traverser le groupe-classe. Acquérir un langage approprié pour exprimer clairement sa pensée est primordial pour se donner toutes les chances d’être bien compris de ses camarades. De plus, l’initiation à différentes formes de langages, artistiques notamment, favorise les interactions sociales : il existe une multitude de façons de communiquer, par l’oral bien sûr, mais aussi par l’action, celle du corps ou celle que l’on peut exprimer à travers une création artistique. Mobiliser le pouvoir expressif du corps est un apprentissage fondamental, inhérent aux pratiques théâtrales, qui peut améliorer les relations entre pairs s’il est maîtrisé.
L’une des compétences visées par le socle commun de connaissances et compétences est de mener à bien une production artistique dans le cadre d’un projet personnel ou collectif. Le projet tel que nous l’envisageons est conforme à cette attente et amène l’élève à exprimer ses émotions, ses préférences ainsi que respecter celles d’autrui. Il s’agit non seulement de mobiliser des savoirs pour s’exprimer au mieux, mais aussi de mettre en œuvre une réelle écoute dans le cadre d’un échange où chacun peut justifier son point de vue. La pratique théâtrale impose une situation de coopération dans laquelle des règles d’échanges doivent être comprises et respectées pour l’intérêt de tous. Cette pratique permet de contribuer pleinement à la formation de la personne et du citoyen (domaine 3) : « Ces enseignements (l’ensemble des activités artistiques, l’enseignement du français et de l’éducation physique et sportive) nourrissent les goûts et les capacités expressives, fixent les règles et les exigences d’une production individuelle ou collective, éduquent aux codes de la communication et d’expression, aident à acquérir le respect de soi et des autres, affutent l’esprit critique. »
(2015, p.8). Avec le théâtre, l’élève peut jouer avec l’action et l’observation, être dans l’expression et l’écoute : il devient le centre d’une critique constructive, indispensable pour acquérir et renforcer des compétences.
Par ailleurs, la responsabilisation inhérente à toute activité théâtrale (apprendre un texte, amener un costume ou un objet) participe à la construction du futur citoyen. L’élève, en apprenant à respecter ses engagements, à travailler en autonomie et à coopérer grâce à cette pratique artistique parviendra mieux à s’impliquer dans la vie de sa classe, de son école : c’est un premier pas vers le principe de responsabilité individuelle et collective.

La pratique du théâtre et le développement chez l’enfant

Analysons en quoi une pratique théâtrale à l’école (jeu dramatique, expression dramatique, expression théâtrale, théâtre) peut se révéler comme un facteur possible et essentiel du développement chez l’enfant. Selon D. Jouault (2006), membre du groupe départemental Théâtre de l’académie de Créteil, quatre fondamentaux sont en effet mis en œuvre dans les activités de pratique théâtrale à l’école : l’espace, le corps, la voix et l’objet.
– L’espace : la pratique théâtrale permet à l’élève de conscientiser l’espace qui l’entoure : l’espace et le corps étant en effet étroitement liés, l’élève prend conscience de l’importance de son jeu dans ce lieu d’évolution. Les temps vécus sur scène permettent aux élèves d’améliorer leur représentation de l’espace au travers d’une décentration de leur perception. Ce n’est qu’après 7 ans que l’enfant peut entrer dans le stade des rapports projectifs (distinguer la droite et la gauche d’autrui) selon Bruno De Lièvre et Lucie Staes (2006). Les ateliers théâtre sont particulièrement propices à cet apprentissage, l’intérêt de maîtriser cette compétence fait sens pour les élèves quand il s’agit de se repérer et se déplacer sur scène.
– Le corps : l’enfant utilise son corps dans l’activité théâtrale pour exprimer des sensations, communiquer des émotions aux autres. Il doit apprendre à se placer pour être vu des spectateurs et doit apprendre à se connaître pour affiner la motricité de son corps.
– La voix : outil fondamental pour entrer en communication avec les autres, il s’agit d’apprendre à bien articuler, à moduler sa voix pour faire passer des sentiments et acquérir des techniques de respiration pour appuyer ses idées.
– L’objet : la manipulation d’objets favorise le développement psychomoteur. Le déplacement, l’échange, l’observation d’objets sont des activités régulières dans l’activité théâtrale et aident à faire le lien entre les trois fondamentaux cités précédemment. De plus l’objet, réellement présent ou non, peut être détourné de son usage habituel et permet alors de développer l’imaginaire de l’enfant.
Le jeu dramatique représente un apprentissage par l’expérimentation et nécessite une implication directe de l’enfant. Il synthétise l’apport individuel et la réalité du collectif. La pratique théâtrale s’appuie essentiellement sur le collectif, tout en mettant l’individu au centre de l’activité au travers d’un travail de collaboration, de mise en commun de compétences.
Les jeux dramatiques, selon Léon Chancerel (1939), permettent aux enfants « d’extérioriser, par le mouvement et la voix, leurs sentiments profonds et leurs observations personnelles ».
L’expression prévaut sur le sens artistique, et favorise le développement personnel et social des élèves.

La construction sociologique chez l’enfant

La réussite des apprentissages fondamentaux est favorisée par un contexte équilibré d’activités physiques, ludiques et réflexives, qui permettent à l’élève de développer sa personnalité, d’élargir ses références, et d’atteindre une certaine socialisation.
Travailler sur le sentiment d’appartenance à un groupe nous paraît essentiel, au regard des travaux menés par Philippe Meirieu (1992). Selon lui, le groupe favorise la découverte d’une certaine sociabilité, porteuse de solidarité, à l’inverse du fonctionnement plutôt autoritaire et individualisé de notre société. De plus, les apprentissages cognitifs se trouvent renforcés au travers des interactions sociales : la confrontation des représentations de chaque élève permet de modifier et d’améliorer les compétences de chacun.
La pratique de théâtre que nous envisageons est conforme à cette démarche socioconstructiviste : elle permet à chacun de trouver sa place dans le groupe-classe, et accroit les compétences globales par l’apport et la confrontation des expressions personnelles.
Le fait d’envisager cette pratique sous la forme d’une démarche de projet permet également d’accentuer certains leviers porteurs de sociabilité. En effet, selon P. Perrenoud (1999), une situation de projet permet, outre la mobilisation de savoirs et savoir-faire acquis et la construction de compétences, de donner à voir des pratiques sociales qui accroissent le sens des apprentissages scolaires. Le projet induit un travail de coopération, dont l’enjeu est de comprendre le rôle de chacun dans la démarche globale afin que tous se responsabilisent et se fédèrent autour du but visé. Cela permet aux élèves de prendre confiance en eux, renforce leur identité personnelle. L’implication dans un projet les incite à travailler de façon plus autonome, à faire des choix et à les négocier : les échanges entre pairs se trouvent accrus, l’ouverture de chacun devient nécessaire.

Présentation projet, travaux spécifiques de théâtre mis en œuvre

La pratique théâtrale impose aux élèves un certain engagement ainsi qu’une forme d’autonomie. Chacun va devoir faire un effort pout vaincre sa timidité, lutter contre sa tendance individualiste ou apprendre la patience, voire canaliser sa violence. Chacun devient responsable de la cohésion de groupe : en s’investissant selon ses capacités, en respectant ses engagements (proposer une mise en scène, apprendre un texte, apporter un accessoire…), mais aussi en dépassant sa peur du jugement et en respectant les propositions des autres.
En classe, les techniques théâtrales permettent de travailler l’expression orale et écrite : savoir parler pour communiquer, c’est à dire articuler, porter sa voix, son regard, accepter le regard de l’autre, rendre son exposé vivant au travers de l’intonation, de la gestuelle, et enfin susciter l’intérêt du public en construisant son discours (développer un point de vue, faire appel à son imagination, proposer une progression dramatique). Les exercices d’improvisation imposent une écoute de l’autre, sans quoi la situation ne peut fonctionner.
C’est également l’occasion de travailler des textes dialogués, en étudiant le vocabulaire propre à chaque personnage. Un travail de compréhension est impératif afin d’étudier l’explicite et l’implicite du texte, avant d’aborder la lecture expressive.
La pièce de théâtre « le reflet de Sam » de Gilles Abier m’a parue être un sujet de travail particulièrement intéressant. Sam, un garçon d’une dizaine d’années, est renvoyé de son école suite à un comportement inadapté et doit rester chez sa grand-mère. Pour se venger, il laisse échapper le perroquet de la vieille dame. Celui-ci en disparaissant emporte le reflet de l’enfant. Sam part donc à la recherche de l’oiseau et vient à rencontrer des personnages malicieux mais mal intentionnés. Cela le mène à la salle des pardons, lieu surréaliste et propice pour faire le point sur les comportements de chacun… Il s’agit d’une pièce assez ambitieuse avec quelques scènes un peu longues pour des élèves de CE2, mais son thème central est totalement en adéquation avec l’objectif de travail sur ce projet. Les élèves peuvent s’identifier très facilement au personnage principal et sont amenés à se poser des questions fondamentales quant aux relations avec les autres et aux conséquences éventuelles d’un comportement irrespectueux.
Dès la première séance, il faut imposer des règles claires et les faire respecter scrupuleusement. Le fait de changer de lieu, de se mouvoir et de s’exprimer plus librement, de travailler à travers le jeu peut amener certains élèves à adopter une attitude inadéquate. La nécessité de l’engagement de tous, le sérieux du travail, le respect, l’écoute de l’autre sont rappelés en début de séance.
En cas de comportement perturbateur, l’élève est mis à l’écart momentanément : le fait de regarder les autres travailler de façon ludique amène l’enfant à comprendre que chacun doit respecter les règles indispensables pour la cohésion de groupe et à se calmer avant de rejoindre ses camarades.
À l’opposé, même si cette classe est composée d’une majorité d’élèves volontaires pour le travail oral, quelques élèves se montrent réticents à l’idée de se produire devant les autres. Je privilégie donc dans un premier temps les exercices de groupe, dans lesquels chacun peut s’exprimer sans être seul face à un public, me montre encourageante, leur propose d’intervenir, mais ne l’impose pas : ces élèves ont besoin de plus de temps, et le fait de voir leurs camarades prendre plaisir à ces ateliers les incite tôt ou tard à participer, à trouver leur place. D’ailleurs, d’autres rôles que celui d’acteur peuvent être envisagés, si la perspective d’une représentation est source de blocage : répétiteur, metteur en scène, accessoiriste, décorateur, souffleur…
L’enseignant se doit d’être ferme et mener les élèves précisément vers les objectifs fixés.
Avant tout, il s’agit d’être bienveillant, d’encourager, et d’instaurer un climat de confiance et de respect : il faut souligner les points positifs mais aussi savoir reprendre certains aspects des propositions. Les ateliers théâtre mettent encore plus en exergue la possibilité de proposer, de se tromper, de recommencer, d’effectuer un travail constructif.

Exercices d’improvisation

La capacité à improviser se développe au travers de situations présentant des contraintes : l’élève va s’appuyer sur celles-ci pour inventer et créer des propositions, mais devra aussi s’adapter à celles des autres lors de travaux en groupe.
Toutes les façons de…. (individuel) : les élèves, en file indienne, passent très vite un par un pour dire une phrase (la même pour tous). Elle est exprimée d’une manière différente selon les indications données par le professeur au moment de passer (joyeux, en colère, méfiant, nerveux, timide, triste, inquiet, horrifié, dégoûté…).
Cet exercice particulièrement dynamique demande aux élèves de s’adapter rapidement, fait travailler une grande palette d’émotions (et donne ainsi un inventaire de ce qu’il est possible d’exprimer). Il est aussi très intéressant pour révéler, à partir d’une même phrase, des intentions très différentes. Cela peut permettre de relancer une scène en cas de blocage, de l’éclairer sous un sens nouveau et inattendu.
L’espace/Toiles de maîtres (groupe) : La scène se situe dans une galerie de peinture. Les élèves, dispersés, admirent les différentes peintures en exprimant modérément leur sentiment.
Puis l’un d’entre eux se positionne face au public et exprime son admiration pour une toile.
Les autres élèves le rejoignent alors et disent une phrase face à cette œuvre magnifique.
Quand tous se sont exprimés, ils se promènent à nouveau dans la galerie et la scène recommence, mais cette fois-ci devant un tableau jugé hideux.
Cet exercice d’improvisation nécessite une appropriation de l’espace scénique, sans déplacements superflus et impose du rythme, de l’expressivité. C’est l’investissement dans le sentiment à jouer qui sert de levier pour trouver quelque chose à dire.

Plan de séquence

Deux séquences sont menées de façon parallèle : l’une en classe porte sur la découverte du genre littéraire qu’est le théâtre, avec l’étude de textes. La seconde se déroule dans une autre salle plus propice au travail en ateliers avec un travail sur la respiration, le corps, l’espace, la voix et l’objet.
De janvier à février, la première séquence détaillée ci-dessous a pour objectif de faire découvrir ce genre littéraire aux élèves.

Indicateurs et outils de suivi

Plusieurs outils de suivi ont été mis en place. Ils sont centrés sur le climat à l’école et le comportement des élèves en classe.

Évaluation du climat de classe

Le premier outil est un questionnaire d’auto évaluation qui permet de sonder le climat de classe. Proposé deux fois, en début et en fin de séquence, il permettra d’observer les évolutions éventuelles ressenties par les élèves. Les concepts portent donc sur les deux éléments centraux de notre hypothèse, la pratique théâtrale et les relations entre pairs.

Respect des règles de vie

Le deuxième outil se concentre sur le comportement en classe : il s’agit d’un suivi quotidien et individuel basé sur le respect des règles de vie en classe. Chaque jour, l’élève a un pétale vert qui peut changer de couleur (orange puis rouge) en fonction de son comportement. Il est averti au préalable (prénom noté au tableau), puis le changement de couleur est effectué et justifié à l’élève si celui-ci ne respecte toujours pas la règle de vie de classe. Les fleurs de comportement doivent être signées par les parents en fin de semaine. De plus, tous les élèves ayant eu un comportement exemplaire sur une semaine peuvent prétendre à une responsabilité la semaine suivante : il s’agit de fonctions valorisantes sous forme de métiers (facteur, portier, responsable de l’ordre, du tableau, des devoirs, de la date en anglais…). Les élèves se sentent ainsi plus investis dans la vie collective de la classe.
Dans le cadre de travail réflexif, un relevé hebdomadaire depuis la rentrée de janvier permet de voir l’évolution sur un plan quantitatif du respect de ces règles de vie.

Gestion des tensions

Enfin, les conflits apparaissent majoritairement pendant les récréations et le temps périscolaire (temps de restauration en particulier). Il me fallait donc trouver une approche permettant de gérer ces rivalités de manière constructive. En effet, si de nombreux psychanalystes ou psychologues tels que Freud, Piaget ou Wallon ont souligné l’importance du conflit dans la construction de l’enfant (celui-ci va découvrir, affirmer sa propre identité en la confrontant à celle des autres), il faut que l’issue de cette confrontation soit positive : cette situation ne doit pas se révéler être destructrice, mais au contraire devenir une opportunité pour se construire, grandir. Afin d’apaiser la situation, une boite aux lettres est mise en place : les incidents sont reportés de façon non anonyme et mentionnent l’ensemble des protagonistes, l’origine du problème et les sentiments éprouvés. Le passage à l’écrit permet aux élèves de prendre du recul, d’analyser la situation plus calmement et de mettre des mots sur leur ressenti. Cela peut les amener à relativiser l’importance de la situation.
Il est ensuite nécessaire d’instaurer un dispositif d’échange afin de régler ces différents de façon non violente : un temps de parole hebdomadaire sous forme de conseil collectif des élèves est mis en place où sont abordés les responsabilités, le comportement adéquat, les conditions de fin de conflit et solutions à proposer si le problème n’est pas résolu.

Situations favorisant la coopération

Enfin, il apparaît opportun au regard des besoins évoqués précédemment de proposer des situations favorisant la coopération en classe. Les possibilités d’échanges entre élèves permettant l’aide, l’entraide ou le tutorat doivent être plus nombreuses. L’aide consiste à permettre aux élèves de communiquer entre eux lors d’un exercice afin de trouver la solution à un problème plus facilement : cela se passe la plupart du temps avec son ou ses voisin(s) direct(s), sans cadre formel. L’entraide amène les élèves à coopérer par petits groupes afin de trouver une solution en mutualisant les savoirs et savoir-faire de chacun. Enfin, le tutorat requiert une organisation plus pointue, avec désignation de tuteurs potentiels ayant les compétences requises et l’établissement d’un objectif précis. Cela nécessite également pour les élèves cibles de sentir qu’ils sont en situation de besoin et de savoir demander de l’aide. Il est important que l’ensemble des élèves comprenne que l’aide ne signifie pas donner directement la réponse, mais fournir une assistance pour trouver une stratégie possible menant à la solution. Cette situation de tutorat est particulièrement intéressante car le tuteur va remobiliser ses connaissances et les structurer pour les adapter à cette nouvelle situation.
L’enfant aidé va pouvoir résoudre un niveau de problème plus avancé que celui qu’il aurait pu atteindre seul. Il s’agit là de mettre en œuvre une situation d’apprentissage prenant en compte « la zone proximale de développement » telle que définie par L. Vygotski (1934) : le développement cognitif se fait en allant atteindre une capacité supérieure à celle maîtrisé initialement, avec l’aide d’un adulte ou d’un élève plus avancé.
P. Meirieu (2009, p.122) est d’avis qu’une véritable « co-opération » est indispensable pour compenser les disparités entre élèves, et que cela rend l’enfant co-responsable de la construction de son savoir. La mise en place de groupe d’apprentissage doit selon lui appliquer ces trois principes pour proposer un conflit sociocognitif bénéfique à l’élève :
– situation permettant une véritable interaction sociale constructive ;
– langage identique pour les membres du groupe, clé d’une communication efficace ;
– équilibre entre hétérogénéité et homogénéité du groupe, afin d’assurer l’investissement, la motivation et la cohésion de celui-ci.
Certaines formes de collaboration peuvent ainsi être mises en place au cours de nombreux apprentissages initialement éloignés du projet (mathématiques, histoire, géographie, sport…).
Le langage constitue à nouveau un socle indispensable à la réussite de cette forme de travail et doit faire l’objet d’une attention particulière.

Résultats

Bilan comportemental (observation de l’enseignant)

Bilan lors des séances de pratique en classe et en atelier

L’investissement lors des lectures en classe est très important. Les élèves sont très volontaires pour proposer des interprétations de texte ou font un réel effort de concentration, d’écoute quand ils n’ont pas la parole. Certains élèves, moins à l’aise habituellement avec l’exercice de lecture à haute voix, prennent véritablement du plaisir à lire soit les didascalies, soit un petit rôle adapté à leur potentiel. Le travail sur des textes de théâtre revêt plusieurs aspects positifs, moins présents lors de textes relevant d’autres genres littéraires : une souplesse d’investissement chez l’élève est possible, celui-ci peut adapter sa participation à sa capacité et se trouve ainsi plus facilement en situation de réussite ; ce genre littéraire impose également une grande écoute, indispensable pour tous les participants (il faut s’exprimer au bon moment, il faut donc suivre les dialogues) et une certaine concentration du fait de la présentation inhabituelle du texte (didascalies, personnages indiqués en majuscule, à ne pas prononcer). Nous constatons même une certaine forme de solidarité, ceux étant en situation d’écoute pure étant parfois tentés de reprendre avec bienveillance une erreur de la part d’un lecteur. Enfin, la perspective de représentation finale est un réel enjeu pour les élèves, stimulant et porteur de craintes : cela aide les élèves à se projeter rapidement dans les personnages, et ils prennent conscience que plusieurs étapes, et un travail sérieux sont nécessaires pour parvenir au mieux à cette échéance.
La mise en route des ateliers théâtre se déroule bien globalement. Les premières séances nécessitent un rappel des règles d’écoute, de comportement attendu car le fait de se trouver dans un cadre inhabituel, avec une expression plus libre peut déstabiliser certains.
Les exercices individuels ou à deux fonctionnent particulièrement bien. Les élèves se montrent très motivés pour travailler en petits groupes et proposer une scénette improvisée à leurs camarades. Quelques élèves ont plus de mal à s’insérer dans un groupe de façon active et se montrent moins motivés pour s’exprimer devant les autres. Cependant, s’ils sont plus en retrait lors des premières séances, nous pouvons observer un investissement croissant en fin de séquence. Il est à noter que tous participent sans difficulté à l’exercice « toutes les façons de … » : même les plus réservés prennent beaucoup de plaisir à passer. L’exercice, très dynamique et très ludique, permet d’étoffer la palette d’expressions et renforce la cohésion de groupe.
Les exercices d’improvisation en groupe imposent un véritable travail en autonomie. Le cadre posé, les élèves doivent s’organiser pour permettre à chacun de s’exprimer et proposer une scénette structurée, dans un temps imparti. Cela demande un effort d’écoute assez important, et génère donc quelques tensions parfois.
Nous rencontrons cependant de réelles difficultés sur des exercices tels que « le courant passe » ou « 1… 2… 3… ». Je dois les interrompre rapidement, la tension entre élèves devenant trop forte. Les élèves ne s’écoutent pas du tout, et rejettent la responsabilité de l’événement inattendu (deux, voire courants simultanés, ou l’annonce d’un chiffre en chœur) sur un ou plusieurs camarades, de façon parfois agressive. Le silence nécessaire pour ce type d’exercice n’est rapidement plus au rendez-vous, malgré un rappel des règles et des enjeux. Ces exercices étant révélateurs du manque d’écoute et parfois de cohésion du groupe, il est à souhaiter que nous réussissions d’ici la fin d’année.

Observation des comportements lors des situations de coopération

Les élèves acquièrent majoritairement le réflexe, en ayant réalisé – et réussi un exercice demandé, de se signaler pour proposer de l’aide à un camarade qui en aurait besoin. Face à eux, les élèves ayant besoin d’aide se signalent volontiers, éprouvant un réel besoin d’apprendre comment faire. Il faut toutefois rappeler régulièrement l’objectif confié aux tuteurs, qui ne doivent pas donner directement la réponse et convaincre les tutorés de l’intérêt de faire plus que de savoir. “La pulsion de savoir tue le désir d’apprendre” selon P. Meirieu (2009, p.122). La collaboration n’est pas une chose simple à mettre en place, et n’est pas spontanément efficace. Lors des travaux de groupe plus particulièrement, les points de vue subjectifs des élèves se trouvent confrontés dans un débat critique parfois vif. Il est en effet primordial que le langage soit précis, pour bien représenter ce que souhaite exprimer son auteur, afin de lui permettre d’être bien compris. Alors seulement les élèves peuvent dépasser leurs représentations initiales pour arriver à une conception plus élaborée. Henri Wallon parle à ce propos de “processus d’objectivation” (1952, pp.309-323): les élèves doivent apprendre à argumenter afin de soutenir leur propos. Encore une fois, il est primordial de trouver les mots justes, de savoir les exprimer pour se donner toutes les chances de donner un avis rationnel. Certains élèves en situation de réussite sur un savoir précis éprouvent des difficultés pour transmettre leur compétence, ne sachant pas comment la présenter, la mettre en mots. Cette situation peut se révéler rapidement frustrante et freiner leur désir de s’impliquer dans tout processus de collaboration. De façon générale, les situations de collaboration proposées en classe fonctionnent plutôt bien lorsqu’il s’agit de travailler en mode tutoral (constitué par le hasard le plus souvent, sans facteur amical). Les élèves savent alors faire preuve de solidarité et de respect. Les situations de travail en petit groupe, que ce soit avec des groupes hétérogènes, ou homogènes de besoin, ont plus de mal à fonctionner, malgré un objectif assez clair. Les échanges ne se font pas réellement, chacun restant assez autocentré sur sa conception initiale. La répétition de ce type d’échanges permettrait certainement aux élèves d’apprendre à mieux s’exprimer, se faire confiance et ainsi s’écouter, confronter leurs points de vue pour apprendre les uns des autres.

Bilan qualitatif (questionnaires) et quantitatif (suivi fleurs de comportement et traitement des conflits)

Questionnaires sur le climat de classe

Le questionnaire d’auto évaluation permet d’obtenir des avis très révélateurs en janvier 2017 (schéma 1 ci-dessous) concernant le climat de classe et l’écoute entre pairs :
En janvier 2017, plus de la moitié de la classe admet ne pas maîtriser ses gestes quelle que soit la circonstance, et plus d’un tiers des élèves reconnait ne pas écouter ses camarades lorsque ceux-ci s’expriment. Ils sont eux-mêmes un tiers à ressentir des difficultés pour s’exprimer et se faire comprendre. Seuls 2 élèves pensent arriver très souvent à s’exprimer pour se faire comprendre.
Une grande majorité (81%) se sent toutefois bien dans la classe. La relation avec les professeurs étant un facteur très important pour un climat de classe serein, je souhaite également aborder ce sujet. Pour obtenir un avis le plus proche de leur sentiment, je rappelle aux élèves l’objectif de ce questionnaire, l’utilisation qui en sera faite, et leur donne la possibilité de répondre de façon anonyme. À l’affirmation “cela se passe bien avec mes professeurs”, 18 élèves répondent positivement en janvier, et 4 négativement.
Enfin, une très grande majorité d’entre eux (90%) estime avoir beaucoup de copains, 72% se sentent appréciés par les autres élèves, et 40% trouvent qu’il est difficile de se faire des amis à l’école. 40% des élèves se disputent souvent à très souvent avec leurs camarades, et en cas de problème, 33% admettent donner des coups.
En mai 2017, le second questionnaire permet de constater quelques évolutions quant au ressenti des élèves sur leur capacité d’expression corporelle et orale : ils sont désormais plus nombreux à maîtriser leurs gestes quelle que soit la circonstance (14 élèves pensent y arriver souvent ou très souvent, alors qu’ils étaient 10 en janvier). Cette tendance se confirme également sur le plan oral, bien que moins fortement : sur l’ensemble de la classe, 3 élèves arrivent à s’exprimer pour se faire comprendre très souvent (2 en janvier), et 14 élèves pensent pouvoir y arriver souvent (13 en janvier) : près des ¾ des élèves estiment donc pouvoir se faire comprendre en mai. Une évolution est également constatée sur l’écoute : ils sont désormais 17 à écouter très souvent ou souvent leurs camarades lorsque ceux-ci s’expriment, contre 14 auparavant. Il n’y a pas de différence notable sur le plan du bien-être, de la relation avec les professeurs ou de la popularité, même si une légère amélioration peut être notée. Les disputes seraient moins nombreuses selon le ressenti des élèves : en mai, 3 élèves pensent se disputer très souvent (6 en janvier), 3 souvent (inchangé), 10 parfois (7 en janvier) et 6 très rarement (inchangé). Enfin, en cas de problème, les élèves sont plus nombreux à discuter (9 en mai, contre 5 en janvier), et moins nombreux à donner des coups (5 en mai, contre 7 en janvier).
Le bilan après 4 mois de pratique théâtrale apparaît donc plutôt positif, sans pour autant avoir suscité de changement majeur. Les modes d’expressions physique et orale semblent être plus efficaces, et les situations conflictuelles seraient moins nombreuses.
Concernant la coopération (schéma 3), l’élément le plus marquant de ce questionnaire concerne le respect : en janvier 2017, un seul élève répond que dans la classe, les élèves se respectent et s’écoutent, contre 16 réponses négatives (2 ne savent pas répondre à cette question). À l’affirmation “dans la classe, c’est chacun pour soi”, 5 élèves seulement ne sont pas d’accord, contre 11 (soit la moitié de la classe) qui valident ce point de vue, et 6 qui ne se positionnent pas. Cela vient conforter la première impression générale et l’observation effectuée lors des premiers ateliers.
Pour résumer, en janvier 2017, le travail en groupe, bien qu’apprécié par 16 élèves, n’est pas vécu de manière positive au regard de l’altruisme, du respect et de l’écoute des autres, de l’ambiance et du gain de temps potentiel. Il ressort après discussion avec les élèves sur leur motivation à travailler en groupe (le fait de trouver du plaisir interroge au regard des réponses apportées sur les autres éléments de ce questionnaire) qu’ils apprécient ce type de travail car ils peuvent s’exprimer plus aisément en petit groupe (même s’ils ne ressentent pas une grande écoute) et qu’ils apprécient le fait d’aider leur camarade si celui-ci en a besoin (la totalité des élèves répond positivement à l’affirmation “j’aime aider”). Ce constat est confirmé par l’observation de la pratique de classe que j’ai pu observer et évoquer précédemment.

 

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Table des matières
Introduction 
1. Partie théorique 
1.1 Historique du théâtre à l’école
1.2 Les instructions officielles
1.3 La pratique du théâtre et le développement chez l’enfant
1.4 La construction sociologique chez l’enfant
2. Partie pratique 
2.1 Contexte, problématique, hypothèse
2.2 Présentation du projet, travaux spécifiques de théâtre mis en œuvre
2.3 Plan de séquence
2.4 Indicateurs et outils de suivi
2.4.1 Evaluation du climat de classe
2.4.2 Respect des règles de vie
2.4.3 Gestion des tensions
2.4.4 Situations favorisant la coopération
3. Résultats 
3.1 Bilan comportemental (observation de l’enseignant)
3.1.1 Bilan lors des séances de pratique en classe et en atelier
3.1.2 Observation des comportements lors des situations de coopération
3.2 Bilans quantitatif et qualitatif
3.2.1 Questionnaires sur le climat de classe
3.2.2 Suivi quotidien de comportement individuel
3.2.3 Traitement des conflits
3.3 Discussion
3.4 Conclusion
Bibliographie

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