LA PRATIQUE DU MEDECIN GENERALISTE
Type dโรฉtude
Il sโagissait dโune รฉtude quantitative basรฉe sur un questionnaire (cf. annexe 1), รฉlaborรฉ ร partir des donnรฉes bibliographiques et des questions posรฉes par lโรฉtude. Il est composรฉ de 16 items, comportant des questions majoritairement fermรฉes, avec des possibilitรฉs de commentaires pour certaines. Ces items รฉtaient classรฉs en 3 parties :
-la premiรจre oรน le mรฉdecin gรฉnรฉraliste se prรฉsentait (sexe, รขge, mode dโexercice, zone dโexercice). -la seconde partie sโintรฉressait dans un premier temps aux formations รฉventuelles en soins palliatifs reรงues. Dans un second temps, elle sโattachait ร dรฉcrire ses pratiques quand il รฉtait confrontรฉ aux dรฉcisions de LAT, et les difficultรฉs รฉventuelles rencontrรฉes. Enfin, le mรฉdecin รฉtait interrogรฉ sur son dรฉsir de formation complรฉmentaire.
-la troisiรจme partie recueillait lโavis du mรฉdecin sur la procรฉdure collรฉgiale. Il a รฉtรฉ conรงu sous Microsoft Word, et testรฉ par 5 mรฉdecins avant son envoi : les 2 directeurs de thรจse, 2 mรฉdecins gรฉnรฉralistes, un mรฉdecin en Santรฉ publique. Le courrier accompagnant a รฉgalement รฉtรฉ relu (cf. annexe 2). Le comitรฉ dโรฉthique a รฉmis un avis favorable lors de sa sรฉance du 11 Fรฉvrier 2015. Le questionnaire a ensuite รฉtรฉ mis en forme via Google drive, afin quโil soit envoyรฉ et rempli par voie รฉlectronique.
Analyse critique de la mรฉthode
Les questionnaires ont รฉtรฉ envoyรฉs par mail aux mรฉdecins gรฉnรฉralistes du dรฉpartement, ce qui a exclu les 3 mรฉdecins qui nโont pas transmis leurs adresses รฉlectroniques au CDOM. Les mรฉdecins ont rรฉpondu de faรงon anonyme, sans avoir ร sโidentifier, il รฉtait donc possible pour une personne de rรฉpondre plusieurs fois, ce qui reste peu probable. Cependant, concernant des sujets aussi dรฉlicats et complexes, lโanonymat paraissait indispensable afin dโavoir des rรฉponses franches concernant les pratiques et le ressenti. Il nโy avait pas de questions dont la rรฉponse รฉtait obligatoire, ce qui a entrainรฉ quelques donnรฉes manquantes. Nรฉanmoins, cela a permis que tous rรฉpondent ร lโรฉtude mรชme quand ils ne souhaitaient pas donner leur avis pour une question. Le taux de retour est correct. Dans ce type de travail, il est gรฉnรฉralement proche de 25% [18]. Malheureusement, il est trop faible pour tirer des conclusions qui soient reprรฉsentatives de lโensemble des mรฉdecins gรฉnรฉralistes.
Analyse des donnรฉes socio dรฉmographiques
Les femmes reprรฉsentaient plus du tiers de lโeffectif de lโรฉtude, ce qui est infรฉrieur aux chiffres rรฉgionaux et nationaux, soit respectivement 46.4% et 44.9% ; et supรฉrieur aux chiffres du dรฉpartement 30.4%. Lโรขge moyen de 49 ans รฉtait comparable aux chiffres dรฉpartementaux, rรฉgionaux et nationaux (respectivement 54 ans, 51 ans, 52 ans) [19]. La plupart des mรฉdecins interrogรฉs avaient une activitรฉ en cabinet de groupe, et les chiffres รฉtaient similaires ร ceux communiquรฉs par le CDOM 53. Effectivement, ce mode dโexercice est de plus en plus privilรฉgiรฉ par les mรฉdecins actuels [20]. La majoritรฉ des mรฉdecins exerรงaient en zone rurale (1/2 exclusivement, et ยผ partiellement). Il faut rappeler que la Mayenne nโest pas un dรฉpartement trรจs peuplรฉ ; la densitรฉ par habitants est basse : 59hab/km2 [21]. Les donnรฉes socio dรฉmographiques utilisรฉes sont celles transmises par le CDOM 53, et non celles disponibles dans lโatlas de dรฉmographie mรฉdicale รฉditรฉ par le CNOM (discordance majeure constatรฉe par le CDOM 53).
Analyse des dรฉcisions de LAT prises par le mรฉdecin gรฉnรฉraliste. Les mรฉdecins gรฉnรฉralistes sont souvent confrontรฉs ร ce type de situations complexes (44 mรฉdecins sur 53 soit 84% des mรฉdecins interrogรฉs). Une รฉtude, rรฉalisรฉe en 2013 visant ร รฉvaluer le rรดle des mรฉdecins gรฉnรฉralistes dans les dรฉcisions de LAT prises au CHU dโAngers confirme ces rรฉsultats. Parmi les 227 mรฉdecins gรฉnรฉralistes interrogรฉs, 43% (n=98) avaient dรฉjร รฉtรฉ amenรฉs ร prendre ces dรฉcisions. Les traitements concernรฉs par les LAT รฉtaient les suivants : traitement anticoagulant, chimiothรฉrapie, hydratation, transfusion, antibiothรฉrapie, rรฉanimation, nutrition artificielle, dialyse [22]. Les mรฉdecins gรฉnรฉralistes, dโaprรจs la littรฉrature, prennent en charge peu de patients en fin de vie (maximum 3 par an), ils seraient pourtant confrontรฉs trรจs frรฉquemment ร ces dรฉcisions de LAT [13]. Il sโagit donc de prise en charge rare mais oรน se posent souvent ces questions complexes de LAT. Les mรฉdecins sont donc peu entrainรฉs et cโest pourtant ร eux que revient de prendre ces dรฉcisions, ce qui peut รชtre difficile ร faire.
Dans plusieurs travaux, les mรฉdecins ont dรฉcrit les difficultรฉs quโils rencontrent en fin de vie, comme la chronophagie, la solitude, la lourdeur de dรฉcisions complexes รฉthiques, avec la peur de faire le mauvais choix [9,17, 23]. Un travail qualitatif sur le sujet retrouvaient que tous les mรฉdecins interrogรฉs รฉprouvaient des rรฉticences ร accompagner leur patient en phase terminale ; et que ces accompagnements pouvaient รชtre sources dโรฉpuisement professionnel [9]. Pourtant, dans ce travail, les chiffres sont surprenants : la plupart des mรฉdecins interrogรฉs, 37 sur 43 rรฉpondants soit 86% dรฉclaraient รชtre peu ou pas du tout en difficultรฉ, et environ deux tiers dโentre eux nโauraient jamais reรงu de formation. Pourquoi ? Les mรฉdecins gรฉnรฉralistes rรฉpondants sont peut-รชtre bien sensibilisรฉs, et/ou accompagnรฉs et/ou formรฉs ร ce type de prise en charge. Deux tiers des mรฉdecins rรฉalisent un dรฉbriefing avec lโรฉquipe de soins une fois le patient dรฉcรฉdรฉ, ce qui est trรจs satisfaisant. Bien quโil ne sโagisse pas dโune obligation, cela parait important compte tenu de la difficultรฉ de ces prises en charge.
Concernant les prises de dรฉcisions de LAT, on constate, dans cette รฉtude, que les mรฉdecins interrogรฉs prennent majoritairement lโavis des professionnels paramรฉdicaux : 41 rรฉpondants sur 44 soit 93% dโentre eux les consultent souvent ou de faรงon systรฉmatique. Leur avis parait effectivement indispensable, car par leur prรฉsence quotidienne auprรจs du malade et de ses proches, dans les รฉtablissements mรฉdico-sociaux ou au domicile, ils apportent des informations essentielles. Par leur proximitรฉ, ils apportent des renseignements sur les symptรดmes dโinconfort, les ressentis sur la situation, lโhistoire du patient, les convictions de celui-ci, son point de vue quand il pouvait encore sโexprimer sur sa maladie, lโavis des proches… Ils peuvent รฉgalement donner leur avis sur la prise en charge proposรฉe par le mรฉdecin. Ces รฉlรฉments paraissent prรฉcieux dans ces situations de fin de vie, car il sโagit dโavoir une vรฉritable rรฉflexion รฉthique sur la situation du malade, et lโavis de chacun des intervenants est essentiel. Dans cette รฉtude, le recours ร lโavis dโun confrรจre est moins systรฉmatique : 23/44 soit environ la moitiรฉ des rรฉpondants le fait toujours, ร souvent. Quand lโavis est pris, il sโagit majoritairement dโun mรฉdecin spรฉcialisรฉ en soins palliatifs, ensuite du confrรจre, puis du mรฉdecin spรฉcialiste rรฉfรฉrent. Dans le dรฉpartement, le Rรฉseau Pallia 53 sโest fixรฉ comme objectif le dรฉveloppement des liens avec les acteurs du domicile, en sโappuyant sur les EMSP [24]. Cet objectif pourrait avoir รฉtรฉ atteint puisque le mรฉdecin en soins palliatifs apparait comme รฉtant lโinterlocuteur privilรฉgiรฉ. Le Rรฉseau Pallia 53 est composรฉ, entre autres, de 4 EMSP rรฉparties sur lโensemble du dรฉpartement : Chรขteau-Gontier/ Segrรฉ, Laval, Mayenne, Renazรฉ/Craon [25].
La traรงabilitรฉ dans le dossier mรฉdical est moyenne : environ 2/3 des mรฉdecins le font toujours, ร souvent. Et parmi ceux qui ne le font jamais, on retrouve les mรฉdecins qui nโont pas reรงu de formation. Est-ce par mรฉconnaissance de cette obligation ? Est-ce parce que lโinscription dans le dossier du patient nโest pas dans la culture mรฉdicale des mรฉdecins interrogรฉs ? Dans ce travail, un seul mรฉdecin a dรฉclarรฉ respecter systรฉmatiquement et de faรงon intรฉgrale la procรฉdure collรฉgiale. Une รฉtude rรฉalisรฉe par lโINED et publiรฉe en 2012 sโintรฉressaient aux dรฉcisions mรฉdicales en fin de vie en France [26]. Elle a rรฉvรฉlรฉ que les obligations lรฉgales de la loi Lรฉonetti nโรฉtaient pas totalement connues ou respectรฉes.
Concernant la formation en soins palliatifs des mรฉdecins gรฉnรฉralistes. Un travail rรฉalisรฉ en 2012 a mis en รฉvidence les difficultรฉs rencontrรฉes par les mรฉdecins gรฉnรฉralistes du dรฉpartement de la Mayenne lors de la prise en charge palliative ร domicile. Parmi elles : le manque de temps, le manque de formation spรฉcifique en soins palliatifs, des difficultรฉs rรฉelles ร gรฉrer la douleur et les autres symptรดmes dโinconfort qui occasionnent des hospitalisations, les difficultรฉs ร travailler en รฉquipe, la solitude face ร la souffrance et ร la mort [29]. Le rapport du CCNE dresse un triste constat sur la fin de vie en France. Dans les EHPAD, un mรฉdecin sur cinq nโa aucune formation ร la prise en charge des malades en fin de vie. 80% des mรฉdecins nโauraient pas reรงu de formation ร la gestion de la douleur. Parmi les dรฉtenteurs du DU de soins palliatifs, seuls 28% sont des mรฉdecins. Le rapport recommande : des efforts majeurs pour faire connaรฎtre et appliquer la loi, un dรฉveloppement de la formation des mรฉdecins et lโamรฉlioration de la prise en charge au domicile [10]. Ces รฉlรฉments sont retrouvรฉs dans plusieurs revues de la littรฉrature [15, 30, 31]. On retrouve un taux รฉlevรฉ de mรฉdecins souhaitant une formation supplรฉmentaire en soins palliatifs, et bien quโils se disent plutรดt ร lโaise avec lโusage des diffรฉrents mรฉdicaments utilisรฉs pour soulager les symptรดmes de la douleur et les symptรดmes dโinconfort. Ce sont les thรจmes quโils souhaitent majoritairement voir dรฉvelopper.
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Table des matiรจres
Remerciements
Liste des abrรฉviations
Plan
1 Introduction
2 Matรฉriels et mรฉthodes
2.1 Objectifs de lโรฉtude
2.2 Type de lโรฉtude
2.3 Population รฉtudiรฉe
2.4 Recueil des donnรฉes
2.5 Analyse des rรฉsultats
3 Rรฉsultats
3.1 Caractรฉristiques de la population รฉtudiรฉe
3.2 Formations en soins palliatifs
3.2.1 Type de formation suivi
3.2.2 Thรจmes abordรฉs
3.2.3 Durรฉe de la formation
3.3 Les limitations et arrรชts de traitements
3.3.1 Avis de lโรฉquipe paramรฉdicale
3.3.2 Sollicitation dโun confrรจre pour aider ร la prise en charge
3.3.3 Mรฉdecins sollicitรฉs pour la prise en charge
3.3.4 Concernant la recherche des souhaits exprimรฉs antรฉrieurement par le patient
3.3.5 Inscription dans le dossier mรฉdical
3.3.6 Difficultรฉs, souffrance face aux prises de dรฉcisions de LAT
3.3.7 Refus de prise en charge de patients
3.3.8 Aisance avec les traitements ร mettre en place pour soulager
3.3.9 Dรฉbriefing
3.3.10 Formation complรฉmentaire en soins palliatifs
3.3.11 Thรจmes ร aborder lors de formations ultรฉrieures
3.4 Ressenti quant ร la procรฉdure collรฉgiale
4 Discussion
4.1 Analyse critique de la mรฉthode
4.2 Analyse des donnรฉes sociodรฉmographiques
4.3 Analyse des dรฉcisions de LAT prises par le mรฉdecin gรฉnรฉraliste
4.4 Concernant la formation en soins palliatifs des mรฉdecins gรฉnรฉralistes
4.5 Avis sur la procรฉdure collรฉgiale
4.5.1 Avis favorable sur la procรฉdure collรฉgiale
4.5.2 Avis dรฉfavorable sur la procรฉdure collรฉgiale
4.6 Analyse des biais
4.7 Perspectives
5 Conclusion
6 Rรฉfรฉrences bibliographiques
7 Liste des figures
8 Liste des tableaux
9 Table des matiรจres
10 Annexes
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