La poly(aniline) parmi les polymères conducteurs électroniques

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Structure électronique et dopage des polymères-conjugués

Structure électronique à l’état non dopé

La structure électronique des polymères-conjugués peut être décrite par une structure de bande [3]. Pour expliquer cette structure de bande, partons du cas simple du poly(acétylène) comparé à des composés modèles appropriés, comme lustréil sur la Figure 3. Si on considère la molécule d’éthylène, l’orbitale moléculaire occupée de plus haute énergie (HOMO : Highest Occupied Molecular Orbital) et l’inoccupée de plus basse énergie (LUMO : Lowest Unoccupied Molecular Orbital) sont les orbitales liante et antiliante*. L’ajout de motifs -CH=CH- conduit à une augmentation du nombre d’orbitales moléculaires de type ainsi qu’à une diminution de la différence d’énergie entre laHOMO et la LUMO due à un plus fort recouvrement orbitalaire. Ainsi, quand le nombre de motifs est élevé, les niveaux liants et antiliants discrets sont de moins en moins discernables et on peut décrire le système par deux bandes énergétiques séparées par une bande interditou gap énergétique : la bande issue de la HOMO est appelée Bande de Valence (BV) et celle issue de la LUMO, Bande de conduction (BC).
Figure 3: Diagramme des orbitales moléculaires () du polyacétylène et de ses composés modèles : Pour l’éthylène, le butadiène, l’octatétraène, les 2 Nrbitaleso atomiques 2pz (contenant chacune un électron non apparié) se recouvrent pour donner N orbitales moléculaire liantes et N orbitales moléculaires antiliantes*. Les 2 N électrons se placent sur les N orbitales qui sont donc totalement occupées. Le poly(acétylène) constitue la limite infinie 3[].
Qualitativement, il en va de même pour la structureélectronique des autres polymères-conjugués, la détermination de la structure exacteaugmentant avec la complexité de la chaîne macromoléculaire (structure chimique, conformations).
A l’état neutre, la bande de valence des polymères-conjugués est pleine et la bande de conduction est vide. Si le gap est grand, la probabilité pour qu’un électron ait assez d’énergie pour se trouver dans la bande de conduction est quasiment nulle : le matériau est isolant. Si le gap est petit, l’agitation thermique peut permettre à certains électrons de passer dans la bande de conduction : le matériau est semi-conducteur. Si on peut réduire ce gap à une valeur inférieure à l’énergie thermique kT, ou introduiredes charges dans la bande de conduction de façon significative, on obtient un conducteur électronique. A l’état neutre, les polymères- conjugués non dopés sont des semi-conducteurs voiredes isolants avec une conductivité électroniquedc de l’ordre de 10 -7-10-12 S.cm-1.
Des modifications chimiques de la structure du polymère permettent de moduler la valeur du gap ainsi que la position des bandes de valence et de conduction, notamment lors du greffage de groupements électro-donneurs ou électro-accepteurs qui modifient la densité électronique de la structure-conjuguée. Cependant ce genre de modification sur les polymères-conjugués n’a pas à ce jour permis d’obtenir un métal synthétique. C’est donc l’ajout de charge qui permet d’obtenir de fortes conductivités. Par analogie avec les semi-conducteurs inorganiques on appelle dopage le processus qui consiste à introduire ces charges sur la chaîne pour obtenir un état conducteur, et ce bien que les phénomènes mis en jeu dans le cas des conducteurs organiques soient tout à fait différents.

Dopage des polymères-conjugués

Le dopage des polymères-conjugués peut se résumer en une réaction d’oxydation ou de réduction, et dans certains cas en une réaction acide/base. Le dopage redox peut alors être de type n ou de type p selon qu’on introduit des charges négatives ou positives. Le dopage de type n (ou p) correspond à une réduction (ou une oxydation), c’est-à-dire à un ajout (ou retrait) d’électrons transformant les chaînes en polyanions (ou polycations). Dans les deux cas, la neutralité du système est assurée par l’ajout de contre-ions en quantité adéquate. Ce dopage peut s’effectuer soit chimiquement au moyen d’un réducteur (ou oxydant) adapté accompagné d’une source de contre-ions, soit par électrochimie par réduction cathodique ou oxydation anodique, également en présence d’un électrolyte contenant les contre-ions nécessaires à la conservation de l’électroneutralité du système.
Contrairement au dopage des matériaux inorganiques,le dopage redox est réversible. De plus, le dopage des polymères conducteurs diffère de celui des semi-conducteurs inorganiques, en ce que l’ajout de charges (minoritaires) dans les composés inorganiques se faisant par dopage par substitution, entraîne une déformation du réseau cristallin qui est légère et localisée alors que lorsqu’une charge est introduite sur une chaîne polymère, elle engendre une déformation de la chaîne. Dans le premier cas, la structure de bande est conservée et le dopage de type n (ou p) revient à introduire un électron (ou un trou) délocalisé dans la BC (ou la BV), alors que dans le second le changement de conformation de la chaîne modifie le recouvrement orbitalaire et donc la structure électronique de l’ensemble : l’ajout de charges se marque par l’apparition d’états localisés dans le gap accompagné d’un remaniement des bandes de valence et de conduction (cf. Figure 4). Lorsque le taux de dopage augmente, ces états discrets créés dans le gap peuvent alors égalementformer des bandes, caractéristiques de la délocalisation des porteurs de charge.
L’interaction entre les charges introduites (électrons ou trous) et les chaînes-conjuguées provoque une déformation de ces dernières qui modifie le transport des charges: c’est le couplage électron-phonon. Ainsi lorsqu’une charge se déplace sur une chaîne polymère, elle en modifie la structure énergétique qui influe alors sur la distribution des charges et ainsi de suite, ce qui rend la modélisation des phénomènes edtransport électronique plus ardue que dans le cas des métaux.

Cas particulier de la poly(aniline)

La Poly(aniline) (PANI) est principalement synthétisée par polymérisation oxydante par voie chimique, électrochimique [7-8], ou par catalyse enzymatique [9] à partir de l’aniline ou par polycondensation [10].
La PANI existe sous différents états d’oxydation selon le degré d’oxydation des atomes d’azote (cf. Figure 7). Les 3 états principaux sont :
– la leucoéméraldine : solide blanc composé d’enchaînement de 100% de motifs à l’état réduit de type benzène diamine. Ce solide s’oxyde à l’air.
– l’éméraldine : un solide bleu constitué de 50% demotifs réduits benzène diamine et 50% de motifs oxydés de type quinone diimine. C’est la forme stable de la PANI.
– la pernigraniline : solide rouge composé d’enchaînements de 100% de motifs oxydés de type quinone diimine. Ce solide est facilement hydrolyséen milieu acide.
Sous sa forme éméraldine base, la PANI est un semiconducteur- dont le gap théorique est estimé à 1,4eV par Vignolo et al. [11], valeur qui est légèrement inférieure à celles mesurées expérimentalement, de l’ordre de 2,0eV [12-15].
La forme conductrice de la PANI est un sel d’éméraldine qui peut être obtenu par dopage redox à partir de la forme leucoéméraldine lors de réactions d’oxydation chimique ou électrochimique, comme pour la plupart des polymères-conjugués. Lors du dopageredox, le nombre d’électrons de la chaîne varie alors que le nombre de protons reste inchangé.
Par ailleurs, de par la présence des atomes d’azote, la PANI présente la particularité de pouvoir également être dopée par interaction avecn uacide de Lewis [16-20] ou par simple protonation de la forme éméraldine base par un acide de Brönstedt [ 21]. Dans ce dernier cas qui nous intéresse, le dopage acido-basique consiste en la protonation des azotes des sites imines. En effet les pKa de 2,5 et 5,5 [22-23] correspondants respectivement aux motifs benzène diamines et quinone diimines, favorisent la protonation des sites imines [24] par des acides forts. Ce type de dopage acido-basique s’effectue alors sans modification du nombre d’électrons ni de l’état d’oxydoréduction de la chaine : seule les orbitales de ces électrons sont modifiées. Le sel obtenu est un polymère de type semi-radical cation (ou poly(radical semiquinone)) en interaction avec les contre-ions, exactement comme dans le cas du dopage redox (cf. Figure 8). Ce dopage protonique (de type p) offre la possibilité de doper et dédoper la PANI autant de fois qu’on le souhaite par un stimuli extérieur qui est le pH.
Dans le cas de la PANI dopée, les porteurs de charge peuvent être des polarons ou des bipolarons. Différentes études expérimentales (notament par spectroscopie RPE qui permet de mettre en évidence les polarons pourvus d’un spin) [25-26] et théoriques [11] convergent vers le fait qu’à faible taux de dopage, les polarons do minent et que la compétition entre les deux types de porteurs de charge augmente avec le taux de dopage [27]. Cependant même à fort taux de dopage, le transport électronique dans la PANI dopée demeure majoritairement attribué aux polarons, dont la répartition est décrite comme un réseau polaronique avec une délocalisation plus ou moins étendue des porteurs ed charges [28-29].

Structuration à différentes échelles

Polymères et copolymères aux topologies variées

Cas général

Les polymères peuvent former une grande variété d’aggrégations supramoléculaires plus ou moins ordonnées selon leur composition chimique etla topologie de la macromolécule. Le cas des copolymères constituées de 2 blocs ou plus, de structure chimique profondément différentes est un cas exemplaire dans la mesure ou cette différence de nature chimique est fréquemment le moteur de l’auto-organisation des macromolécules et des processus de micro-ségrégation de phase. Figure 23: Exemple des différentes structures obtenues par auto-organisation de copolymères diblocs A-B linéaires : micelles sphériques ou cylindriques, sphères arrangées en réseau cubique face centrée ou cubique centré, en cylindres en arrangement hexagonal, en phase gyroide, lamellaire, lamellaire modulée ou perforée [132].
Les copolymères diblocs constituent un exemple caractéristiques de ce phénomène. En fonction de leur structure chimique, de la nature des blocs, de leur rigidité et du rapport des longueur des blocs A et B, les copolymères peuvent se structurer selon toute une variété de type d’organisation (cf. Figure 23) [132-133]. Cette auto-organisation donne ainsi lieu à un matériau homogène à l’échelle macroscopique, et structuré à l’échelle nano- ou microscopique.
Les polymères en peigne qui nous interessent peuvent également s’auto-organiser en formant généralement des structures lamellaires (en mono- uo bi-couche) ou hexagonales [134].

Les PANI fonctionalisées

Dans le cas des polymères-conjugués, la synthèse de polymères en peigne permettant de conserver un squelette-conjugué n’est possible que pour certains polymères comme le poly(thiophène) (PT) [135-136] ou le poly(p-phénylène vinylène) (PPV) mais ne peut s’appliquer à d’autres comme en particulier le poly (acétylène) ou la poly(aniline) sans dégrader significativement leurs propriétés électroniques.
En effet, des copolymères en peigne à base de poly(aniline) avec des chaînes pendantes alkyles ou alkoxy ont déjà été synthétisés, dans butle principal d’améliorer la solubilité de la PANI en milieu organique comme en milieu aqueux (cf. Figure 24).
La fonctionalisation par des groupements alkoxy sur des cycles benzéniques permet d’obtenir des poly(2-alkoxyaniline)s qui sont solubles dans le THF et le chloroforme à l’état dopé. Cependant dans tous les cas, la conductivité électronique mesurée pour les polymères, dopés dans des conditions identiques, est plus faible que celle de la PANI non substituée et diminue avec l’augmentation de la taille du groupement alkoxy [30] :dc passe de 5 S.cm-1 pour la PANI à 0,1 S.cm -1 pour la poly(2-methoxyaniline) et 1. 10-5 S.cm-1 pour la poly(2-hexyloxyaniline). Dans le cas des PANI fonctionalisées par des groupements alkyles sur le cycle benzénique, la perte de conductivité est plusimportante encore avec une conductivité de 7. 10-7 S.cm-1 pour la poly(2-hexylaniline) [31]. De même les poly(aniline)s en peigne N-substituées par des chaînes alcanes présentent de rèst mauvaises propriétés de conduction électronique qui se dégradent également avec l’augmentation de la taille de la chaîne latérale : ainsi la conductivité mesurée pour la poly(N-méthylaniline) n’est que de 7.10 -5 S.cm-1 et de 9. 10-7 S.cm-1 dans le cas de la poly(N-propyl aniline) [32].
Cette baisse de conductivité électronique à l’étatdopé lors du greffage peut s’expliquer par une torsion des cycles aromatiques les uns par rapport aux autres induite par la présence de ces chaînes latérales limitant ainsi la délocalisation électronique intra-chaîne. D’autre part, nous pouvons aussi supposer que l’augmentation de la taille des groupements latéraux accroît la distance inter-chaîne ce qui diminue le transfert des porteurs de charges d’une chaîne à l’autre (conductivité inter-chaîne) et donc diminuela conductivité globale [30].
La fonctionalisation (par liaison covalente) du squelette macromoléculaire de la PANI ne semble donc pas être adaptée si l’on souhaite maintenir une bonne conductivité électronique du polymère dopé. Ainsi, pour contrôler et ajuster la structuration des polymères conducteurs électroniques, paraît-il judicieux et pertinent de faire appel aux concepts de la chimie supramoléculaire permettant de structurer les matériaux moléculaires, macromoléculaires et supramoléculaires.

Les cristaux liquides ioniques

Il existe un très grand nombre de cristaux liquide ioniques [151]. Les exemples les plus courants de cristaux liquides ioniques sont les tensioactifs ioniques généralement utilisés comme savons. Leur formule générale est CH COO-M+, avec M=Li, Na, K, Rb ou Cs. Ces n 2n+1 savons sont solubles dans l’eau. A forte concentration ils présentent des mésophases lyotropes mais également thermotropes. Skoulios a réalisé uneétude systématique des savons de métaux alcalins [151] et a mis en évidence l’existence de phases colonnaires ou smectiques selon la longueur de la chaîne alcane et la nature de l’ion métallique. Il a également montré que le processus de fusion s’effectuait en 2 étapes : tout d’abord la fusion des chaînes alcanes puis celle de la tête polaire carboxylate liée au métal. En général, la température de fusion des chaînes alcane est d’autant plus élevée que la chaîne est longue alors que celle du passage à l’état liquide isotrope ne dépend pas de la longueur de la chaîne et est donc attribuée à la fusion de la tête polaire. En d’autres termes, l’état cristal-liquide est caractérisé par la fluidité induite du mouvement des chaînes alcanes dont la dynamique moléculaire permet une structuration maintenue par les interactions polaires.
Le contre-ion dans le cas précédent est un ion inorganique mais peut également être une molécule organique [171-173]. Dans ce second cas on parle alors d’auto-assemblage par interactions ioniques comme dans le cas des sulfonates de guanidium qui présentent des mésophases smectiques (cf. Figure 37) [172-173].

Transport électronique à différentes échelles

Les propriétés électroniques macroscopiques des polymères conducteurs à l’état dopé sont influencées par des facteurs de diverses origines et intervenant à différentes échelles, qui se révèlent parfois difficiles à identifier et à contrôler. A l’échelle moléculaire, c’est majoritairement la nature chimique, la régularité tructurales de la chaîne et le degré d’oxydation induit pas le dopage qui sont mis en jeu. A plus grande échelle, le transport électronique est influencé par l’organisation structurale et dynamique des supramolécules. Le transport électronique est donc gouverné par des lois différentes selon l’échelle de distance et de temps à laquelle on l’étudie expérimentalement.

Echelle moléculaire: transport intra-chaîne

A l’échelle moléculaire, le transport électroniquese fait principalement le long de la chaine-conjuguée. Le transport électronique est donc influencé par la nature chimique de la chaîne de PANI (la régularité des enchainements) et sa conformation [192]. Cette dernière dépend alors de la nature du squelette-conjugué bien sûr, mais également de la nature dudopant et éventuellement du solvant résiduel à la mise en forme (notamment de m-crésol) qui vont définir la géométrie et la dynamique locale. La modélisation des propriétés électroniques, basée sur la structure chimique (par des méthodes ed chimie quantique ab initio principalement de type Hartree Fock, ou à partir de la Théorie de Fonctionnelle-Densité DFT [193]), doit donc tenir compte des différents isomèresde position pour et des différentes conformations.
Pour décrire la structure locale de la chaîne de PANI, les modélisations se basent sur des oligomères qui servent de composés modèles. En effet, des études semi-empiriques ont montré une faible évolution des propriétés électroniques et optiques quand la taille de la chaine augmente [194-195]. D’un point de vue expérimental, des oligo(aniline)s contenant 7 à 24 cycles ont été synthétisées et il apparaît queslspectres d’absorption des formes neutres (non dopées) dans le DMF ne changent pas avec la taille de l’oligomère [196]. Cette invariance avec la taille de l’oligomère s’expliquerait par la faible délocalisation des orbitales p à cause de la présence des atomes d’azote le long de la chaine et d’angles de torsion importants entre les cycles benzéniques induits par des effets stériques [194]. Les études semi-empiriques sur des tétramères et octamères d’aniline terminés par un groupement phénylique, (toujours à l’état non dopé), montrentégalement que l’ajout d’un solvant polaire diminuerait les interactions stériques et rendrait ces oligomères plus flexibles [195]. Les auteurs proposent également les diagrammes d’énergi des oligomères en fonction de l’angle de torsion des benzènes dans les 3 états d’oxydation. Des études théoriques sur le trimère et le pentamère à différents états d’oxydation, mais nondopés, [197] montrent par optimisation de la géométrie du pentamère que l’état Eméraldine dupolymère peut être traité de façon générale comme compose d’unités Pernigraniline et eucoéméraldineL interconnectées. Cependant la modélisation à l’état dopé se révèlensuite plus complexe du fait de l’interaction ionique et du grand nombre de configurations et conformations possibles. En ne tenant compte que du désordre positionnel et en faisant abstraction des torsions entre les cycles et des variations de longueur de liaisons, Vignolo et al. [11] ont calculé la structure de PANI dans les 3 états d’oxydation non dopés puis du seld’émeraldine, dans les configurations polaronique et bipolaronique. Les auteurs décriventles électrons de la chaîne de PANI au moyen d’un Hamiltonien effectif unidimensionnel de ‘Tight Binding’ (Liaisons Fortes). La méthode de dynamique moléculaire utilisée, basée rsun hamiltonien de type ‘Tight Binding’ est très utile pour étudier la structure dynamiqueet les propriétés électroniques des systèmes covalents. En effet, cette méthode introduit les calculs de structure électronique dans la dynamique moléculaire au moyen d’un hamiltonien empirique qui permet de faire le lien entre la dynamique moléculaire déterminée par des calculsab initio et les simulations utilisant des potentiels empiriques classiques. Les calculs mènent pour le sel d’éméraldine à une structure électronique où la HOMO découle des orbitales de l’atome d’azote dans les sites amines et des carbones benzoïques et la LUMO des orbitales de l’a zote imines et des carbones quinoiques. Ces auteurs montrent également que le désordre (répartition plus ou moins aléatoire des unités benzènes diamines et quinones diimines dans le cas de réseaux polaroniques et bipolaroniques) se marque par une fragmentation du spectre électronique, un élargissement de la densité des états électroniques et la présence’étatsd énergétiques dans des zones interdites dans le cas d’un système ordonné.
Toujours en utilisant un modèle de ‘Tight Binding’pour décrire les propriétés électroniques de la chaîne polymère, Hey et al. [198] ont étudié la conductance de chaine unidimensionnelle de PANI en fonction de la température. Ces auteurs considèrent la chaîne comme un réseau polaronique unidimensionnel parfait [199]. Quand la température diminue des paires polaroniques se créent correspondant à des défauts dans la structure. Quand la température diminue encore ces paires polaroniques peuvent se recombiner en bipolarons [200]. En introduisant un temps de vie pour caractériser les processus dissipatifs dus aux défauts, les auteurs montrent que les défauts polaroniques puis bipolaroniques augmentent la rétrodiffusion des électrons et diminue ainsi la probabilité de transmission électronique à travers la chaîne de PANI [201].

Transport inter-chaîne et passage à l’échelle méso/macroscopique

Au-delà de la chaîne unique, Zupiroli et al. [28] ont montré que le transport électronique était également gouverné par une composante inter-chaînedans la mesure où les électrons peuvent passer par saut (hopping) d’une chaine à l’autre, ce passage s’effectuant d’autant mieux que les chaînes sont proches et bien ordonnées. Le modèle développé met alors en évidence la coexistence dans le matériau de deux types de zonesnon-équivalentes d’un point de vue de la structure: des zones fortement dopées qui sont interprétées comme des amas polaroniques (grains conducteurs) et d’autres moins dopées moinsconductrices. Le contre-ion (dopant) agirait comme un potentiel attractif sur le porteur de charge et stabiliserait les nouvelles espèces polaroniques transverses. De plus, il agirait comme un pont facilitant l’effet tunnel entre les chaînes polymères voisines et par conséquent améliorerait grandement la délocalisation des porteurs de charge dans l’amas.La présence de ces deux types de zones, l’une fortement conductrice de type métallique et ‘autrel moins conductrice aux propriétés semi-conductrices, a également été mise en évidencepar microscopie à effet tunnel sur des films de PANI[HCl] [201]. D’autre part, Laridjani et al. [149] ont montré que la PANI était composées de zones amorphes et cristallines qui présentaient le même ordre local mais dans lesquelles la longueur de corrélation entre les chaînes variait (longueur de cohérence). La diminution de cette longueur de corrélation dans les zones amorphes peut alors s’expliquer par un fort désordre conformationnel. En tenant compte de la nature semi-cristalline des PANI dopées, les amas polaroniques décrits par Zupiroliet al. peuvent alors être interprétés comme des zones bien ordonnées (cristallines) et les zones moins conductrices comme des zones amorphes. D’où une amélioration du transport électronique dans les zones cristallines par rapport à des zones moins ordonnées ou amorphes.
On pourrait alors s’attendre à ce que la conductivité augmente avec le taux de cristallinité des films de PANI dopée, ce qui peut être expérimentalement observé [36]. Cependant, il apparaît également que les films présentant la plus forte cristallinité ne sont pas forcément les films les plus conducteurs [202-203]. C’est donc que d’autres paramètres gouvernent letransport électronique, comme par exemple la taille et la forme des cristallites, la nature de leur dispersion, la nature de la phase amorphe ou de l’interface entre les 2 types de zones… En effet, différents modèles sont développés pour rend compte des propriétés de transport électronique dans le système à l’échelle méso- puismacroscopique (cf. Chapitre V-2).
Les études expérimentales de Fedorkoet al. [204] suggèrent que ce sont les zones amorphes qui limitent le transport électronique. En effet, ces auteurs montrent que la transition métal-isolant peut être induite dans PANI[CSA] par l’ajout de plastifiant. Ces plastifiants étant exclus des zones cristallines, c’est donc la modification de la structure de la zone amorphe qui est responsable de la transition observée. Les plastifiants ayant la particularité d’ajouter de la mobilité dans les matériaux polymères, leur incorporation dans les zones amorphes permettrait la suppression des torsions sur la chaîne lors de la mise en forme. Cette réduction du désordre augmenterait alors la longueur de délocalisation intra-chaîne et améliorerait la conductivité en permettant un meilleur couplage entre « grains » métalliques par effet tunnel. Les efforts de structuration pourraient donc se tourner vers une amélioration de l’ordre dans les zones amorphes.
D’autre part, pour évaluer l’importance des zones morphesa et cristallines sur le transport du matériau dans son ensemble, on peut citer la modélisation réalisée par Johanssonet al. [205]. Les auteurs étudient l’influence du désordre sur letransport inter-chaîne dans les systèmes-conjugués désordonnés. Ils différencient les zonesamorphes désordonnées des zones cristallines ordonnées par la valeur du coefficient de couplage inter-chaîne. Ils considèrent alors 8 chaînes alignées parallèlement. Un champ électrique est ensuite appliqué perpendiculairement à l’axe des chaînes pour observ er le transport inter-chaîne. Entre les 4 premières chaînes le couplage inter-chaîne est fort entre les 4 suivante le couplage inter-chaîne est faible. En absence de différence de potentiel, ils observent que les charges se trouvent délocalisées sur plusieurs chaînes dans les zones de fort couplage : la diffusion à travers les zones de faible couplage inter-chaîne n’est pas possible. Si le champ appliqué n’est pas assez fort, la charge reste alors bloquée en bordure de zone ordonnée. Si le champ appliqué est suffisamment fort, les électrons peuvent traverser les zones amorphes par effet tunnel. Le temps moyen de résidence de la charge dans les zones désordonnées est alors négligeable devant le temps passé dans les zones ordonnées.
Selon cette analyse pour deux systèmes ayant un même taux de cristallinité, celui constitué de gros cristallites peu nombreux serait donc plus conducteur que celui composé d’un grand nombre de petits cristallites. Il parait donc également important de limiter les interfaces entre les deux types de zones.
Enfin les études expérimentales sur les PANI plastdopées [40,42] ont montré une corrélation nette entre la dynamique moléculaire et les propriétés de transport électronique. En effet, la température de transition vitreuse correspond à la température en-deçà de laquelle le transport dans les films de PANI plastdopée est gouverné desprocessus de type hopping, et au-delà de laquelle la conduction est de type métallique. Le ransport électronique est donc également affecté par la mobilité des dopants. Un équilibreeraits donc à trouver entre un ordre structural et une certaine dynamique pour obtenir des matériaux de forte conductivité.

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Table des matières

Introduction: Contexte et Motivations
Chapitre I : Etude bibliographique
A. La poly(aniline) : un polymère conducteur électronique
1. La poly(aniline) parmi les polymères conducteurs électroniques
2. Structure électronique et dopage des polymères π-conjugués
3. Cas particulier de la poly(aniline)
4. Applications
B. Structuration à différentes échelles
1. Polymères et copolymères aux topologies variées
2. La chimie supramoléculaire : Concepts et applications à la PANI dopée
3. Les cristaux liquides
C. Transport électronique à différentes échelles
1. Echelle moléculaire: transport intra-chaîne
2. Transport inter-chaîne et passage à l’échelle méso/macroscopique
Références
Chapitre II : Synthèses et caractérisations des ‘briques de base’
A. Synthèse et caractérisations des dérivés d’aniline
1. La tétra(aniline) (TANI)
2. La Poly(aniline) (PANI)
B. Synthèse et caractérisations des dopants : les acides n-alcanesulfoniques (Cx)
1. Synthèse et caractérisations chimiques
2. Comportement thermotrope
3. Influence de l’eau sur l’organisation structurale
C. Dopage et mise en œuvre
Références
Chapitre III : Etude des supramolécules Tétra(aniline) dopées
A. Stabilité thermique
B. Transitions de phase
1. Transition vers l’état isotrope
2. Mésophases
3. Transition vitreuse
4. Schéma de comportement
C. Organisation structurale
1. A température ambiante
2. Evolution de la structure avec la température
D. Etude dynamique par Diffusion Incohérente Quasiélastique des Neutrons (IQNS)
1. Dispositif expérimental
3. Conclusions
Références
Chapitre IV: Etude des propriétés thermiques et structurales des supramacromolécules de Poly(aniline) dopées
A. Stabilité thermique
B. Transitions de phases
C. Structure à température ambiante
D. Cristaux liquides thermotropes
E. Influence du solvant sur la structure et l’agrégation supramoléculaire
F. Conclusion: polymère vs. Tétramère
Références
Chapitre V: Propriétés électroniques
A. Etude spectroscopique de la structure électronique
1. Cas des PANI dopées
2. Cas des TANI dopées par les acides n-alcanesulfoniques : TANI[Cx]
3. Cas des PANI dopées par les acides n-alcanesulfoniques : PANI[Cx]
B. Propriétés de transport électronique
1. Principe des mesures
2. Modèles de transport électronique
3. Conductivité à température ambiante des films de poly(aniline) dopées
4. Dépendance thermique de la conductivité
5. Conclusions
Références

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