La plongée, un sport en expansion
La plongée sous-marine est une activité sportive en pleine expansion. Autrefois réservée à une population d’initiés, de sportifs, bien souvent professionnels, elle attire aujourd’hui un public très divers et de tout profil. Le rapport de la Sport and fitness industry association de 2015 estime à 3 millions le nombre de participants à des activités de plongées sous-marine au cours de l’année précédente. Le milieu sous-marin, qui occupe plus de 70% de la surface de la Terre, a toujours exercé sur l’homme une vive attraction en raison de son caractère mystérieux, de la beauté et de la richesse de sa flore et de sa faune et des trésors qu’il recèle. Pénétrer la mer constitue l’un des plus grands défis relevés par l’Homme. L’immersion et l’exploration des profondeurs attirent et effraient à la fois mais la fascination de l’homme pour les océans reste aujourd’hui entière. La plongée en scaphandre autonome offre une sensation de totale liberté pour observer la faune et la flore, ainsi que les fonds sous marins, dans un monde où le silence, la sensation d’apesanteur, la ventilation grâce à un appareil de protection respiratoire, participent pleinement à cette expérience où l’homme ne fait qu’un avec l’eau. Les médias participent activement au développement de cette attraction et à la banalisation de la plongée par la diffusion de films et la promotion de séjours dans des destinations tropicales où le vacancier peut goûter aux joies des activités subaquatiques. De même, les fabricants d’équipements mettent la plongée à la portée des néophytes et non sportifs. Autrefois réservée à une élite, la plongée sous-marine est en pleine phase de démocratisation. Ainsi, on dénombre en 2019 en France, 2079 clubs de plongée affiliés à la FFESSM dont environ 40 nouveaux clubs ouverts par an. Ce qui représente 140 848 licenciés en 2019.
Un sport à risque
La plupart des assureurs et des spécialistes sportifs s’accordent sur le fait que, malgré sa récente popularisation, la plongée reste une activité à haut risque, souvent classée aux cotés de l’alpinisme ou du base jumping.
Le nombre annuel d’accidents de plongée est en constante augmentation dans le monde. Au Brésil, par exemple, le nombre de décès liés à la plongée de loisir a augmenté de 0,5 cas par an dans les années 90, à 1 par an de 2000 à 2009, puis à 3 par an de 2010 à 2014, d’après le DAN annual diving report de 2016 (1). On compte environ 2 décès pour 100 000 plongeurs de loisirs aux États Unis chaque année. En 2016, le nombre de décès liés à la plongées notifié au DAN au niveau mondial s’élevait à 169, dont 27 en Europe, 19 dans les Caraïbes, 59 aux Etats Unis (2). Les décès et blessures graves en plongée semblent souvent associés à des comportements dangereux ou à des conditions hasardeuses, mais ils peuvent survenir sans cause apparente, ni erreur de procédure à la descente ou à la remontée (on parlait auparavant d’accidents immérités). Malgré les progrès des équipements, la vigilance des centres de formation et la compétence des professionnels de la plongée, des accidents se produisent toujours et continueront de survenir, sans que l’on constate d’erreur de procédure (temps de travail, paliers de décompression, vitesses de remontées respectées). En ce qui concerne le département du Var et plus particulièrement la ville de Toulon, chaque saison connait son lot d’accidents de plongée. On dénombre annuellement en moyenne 130 à 140 accidents de plongée pris en charge aux urgences de l’HIA Sainte Anne. Ce chiffre est en constante augmentation d’une année sur l’autre.
Les accidents de plongée
La plongée sous-marine expose à des accidents spécifiques, regroupant de multiples tableaux cliniques, répartis selon les lois physiques qui régissent ce milieu hostile :
– Les accidents barotraumatiques liés aux conséquences de la variation des volumes gazeux soumis aux variations de pression ;
– Les accidents biochimiques liés à la réactivité biologique des gaz sous pression ;
– Les accidents de désaturation liés aux conséquences de la désaturation des gaz diluants dans l’organisme.
Par ailleurs, les contraintes liées à l’immersion peuvent être à l’origine d’un accident cardiorespiratoire spécifique, de description plus récente et dont l’incidence annuelle semble en constante évolution : l’œdème pulmonaire d’immersion, aux conséquences parfois dramatiques. Classiquement, la plongée peut se décomposer en trois principales phases au cours desquelles des modifications importantes de pression surviennent :
– La descente, phase pendant laquelle surviennent les accidents barotraumatiques (sinus, dents, oreille moyenne et interne) ;
– Le séjour au fond, où ont lieux les accidents biochimiques (intoxication à l’oxygène, au dioxyde de carbone, à l’azote) et les œdèmes pulmonaires d’immersion ;
– La remontée, qui n’est pas en reste en termes d’accidents barotraumatiques (surpression pulmonaire, barotraumatismes ORL et digestifs) mais qui est avant tout le moment critique où apparaissent, dans l’organisme, les bulles de gaz responsables des accidents de désaturation.
Physiopathologie des accidents de plongée
Les accidents barotraumatiques ou mécaniques
Un barotraumatisme est une lésion tissulaire résultant des variations des volumes gazeux contenus dans un espace clos, qui causent des déformations et lésions des tissus, à l’occasion de fortes variations de pression. En effet d’après la loi de Boyle-Mariotte, à température constante, pour une quantité de matière gazeuse donnée, le volume V d’un gaz est inversement proportionnel à la pression P qu’il reçoit, ainsi le produit de la pression P par le volume V de ce gaz ne varie pas.
P x V= constante ou P1 xV1 = P2xV2 = constante
Ainsi, si l’on considère un volume V d’air à la surface de l’eau, c’est-à-dire à la pression atmosphérique de 1 bar, celui-ci diminuera de moitié lorsqu’il atteindra une profondeur de 10 m (c’est-à-dire à une pression de 2 bars). Inversement, si nous considérons un volume V d’air à 10 m de profondeur, son volume doublera lorsqu’il remontera à la surface. Certains accidents pourront alors survenir lors de la descente dans l’eau, lorsque la pression augmente (diminution de volume), d’autres à la remontée, lorsque la pression diminue (augmentation de volume). Les barotraumatismes sont les accidents de plongée les plus fréquents et toutes les cavités aériques de l’organisme peuvent être concernées par ce phénomène : oreilles (moyenne ou interne), dents (en cas d’existence d’une cavité pathologique), sinus, poumons, estomac, intestins, de même que le volume artificiel créé entre la face et le masque.
Les barotraumatismes de l’oreille moyenne ou BTOM peuvent survenir lors d’une descente avec défaut d’équilibrage de la pression de part et d’autre de la membrane tympanique. Ils se manifestent par une otalgie, parfois accompagnée d’acouphènes et d’une hypoacousie, avec ou sans perforation tympanique. Les barotraumatismes de l’oreille interne ou BTOI par transmission d’une onde de pression au niveau des liquides labyrinthiques, possiblement associés à un BTOM, entrainent ordinairement des vertiges rotatoires intenses avec nausées, vomissements et parfois une hypoacousie.
Les barotraumatismes sinusiens sont révélés par des douleurs intenses de siège variable selon le sinus atteint, couramment associées à une épistaxis. Ils peuvent survenir lors de la descente ou de la remontée, et sont favorisés par une dysperméabilité ostiale liée à un épaississement de la muqueuse du sinus ou un polype qui obstrue l’ostium du sinus concerné.
La prévention des barotraumatismes dentaires passe par une visite annuelle chez le dentiste qui doit rechercher tout défaut d’étanchéité ou cavité dentaire qui pourrait s’obstruer (déchet alimentaire) lors de la remontée, gênant alors l’évacuation du gaz sous pression emprisonné. La surpression pulmonaire est un accident redoutable qui est causé par une augmentation rapide du volume gazeux dans l’arbre bronchopulmonaire, et plus particulièrement les alvéoles pulmonaires. Cet accident est favorisé par une remontée trop rapide, avec un débit expiratoire insuffisant ou une expiration bloquée gênant l’évacuation d’un gaz en détente. Il survient plus volontiers dans la zone des 10 m (où les variations de pressions sont les plus fortes). Le volume du gaz contenu dans les alvéoles augmente jusqu’à la limite d’élasticité pulmonaire créant alors une distension puis une déchirure des parois alvéolaires. Le gaz sous pression peut alors traverser les parois et gagner les tissus environnants : plèvre, médiastin, péricarde et même la circulation pulmonaire artérielle causant alors une embolie gazeuse systémique cérébrale. La symptomatologie peut ainsi être très variable mais associe signes généraux, pulmonaires et neurologiques en cas d’embolie cérébrale (définissant la gravité du tableau clinique).
Les accidents biochimiques ou toxiques
Les accidents biochimiques regroupent les accidents liés à la réactivité biologiques des gaz respirés sur l’organisme. L’élévation de la pression ambiante en plongée provoque une augmentation de la pression partielle de l’oxygène, de l’azote et des autres gaz respirés. En effet, selon la loi de Dalton, la pression partielle Pp d’un gaz contenu dans un mélange gazeux est égale à la Pabsolue à laquelle est soumis ce mélange, multipliée par la fraction de ce gaz dans le mélange.
Ppi = Pabsolue x %i
Par exemple, dans l’air atmosphérique (sec) de pression 1 bar, la proportion d’oxygène est autour de 21%. La Pp en oxygène est égale à 1 x 21% soit 0,21 bar. Ainsi au cours de la descente, la Pp des gaz d’un mélange gazeux augmente proportionnellement à la Pabsolue jusqu’à devenir toxique pour l‘organisme, ce qui limite la pénétration de l’homme sous la surface en exposant les plongeurs au risque de perte de connaissance en eau, donc à la noyade.
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Table des matières
Introduction
1.La plongée, un sport en expansion
2.Un sport à risque
2.1.Les accidents de plongée
2.2.Physiopathologie des accidents de plongée
3.Une activité stressante
3.1.Définition du trouble de stress post traumatique
3.2.Dépistage du stress post traumatique
Matériel et méthode
1.Type d’étude
2.Population étudiée
3.Questionnaires et recueil de données
3.1.Description du protocole de dépistage des troubles psychiques au sein du SMHEP
3.1.1.Phase initiale
3.1.2.Evaluation à 3 mois
3.1.3.Description des échelles utilisées
3.2.Procédure de recueil des données
4.Critères de jugement principal et secondaires
5.Analyse statistique
Résultats
1.Procédure d’inclusion et diagramme de flux
2.Caractéristiques de la population étudiée
3.Résultats des questionnaires
3.1.Incidence du TSPT et des troubles anxiodépressifs à 3 mois
3.2.Recherche de facteurs associés au TSPT et aux troubles anxiodépressifs à 3 mois
3.3.Recherche de facteurs associés aux scores de PCL5 et de HAD A et D à 3 mois
Discussion
1.De faibles taux de TSPT chez les accidentés de plongée
1.1.Différences socio-démographiques entre plongeurs et polytraumatisés
1.2.Différences dans la préparation et les capacités d’auto-régulation émotionnelle
1.3.Différences liées à l’évènement en lui-même et aux suites
2.Des sujets néanmoins symptomatiques
3.Limites de l’étude
Conclusion
Références bibliographiques
Annexes