La place du pharmacien dans l’accès des personnes migrantes en situation de grande précarité en France

Depuis toujours, l’humanité a été en mouvement. Certaines personnes se déplacent pour des raisons économiques, pour rejoindre leur famille ou étudier. D’autres, se déplacent pour fuir des conflits, des persécutions, le terrorisme ou des violations des droits de l’Homme. Le changement climatique et les catastrophes naturelles qui en découlent forcent plusieurs millions de personnes à se déplacer. De nos jours, il n’y a jamais eu autant de personnes vivant dans un autre pays que celui dans lequel elles sont nées. En 2019, le nombre de migrants dans le monde était d’environ 272 millions de personnes, soit 51 millions de plus qu’en 2010 mais la plupart d’entre eux se déplacent au sein de leur pays d’origine. Les déplacements forcés massifs de population constituent aujourd’hui une crise mondiale qui appelle une action collective de la part de la communauté internationale. Le nombre de réfugiés et demandeurs d’asile en France est en hausse rapide et constante. Les principales nationalités à déposer des demandes d’asile sont les Afghans, les Albanais, les Géorgiens, les Guinéens et les Ivoiriens.

L’exil, l’émigration, la violence et la torture engendrent chez l’être humain d’importants traumatismes dont le traitement suppose relation, reconnaissance et réparation. Pourtant, la France traverse une crise des politiques d’hospitalité et de solidarité qui font suite à de multiples mesures restrictives sur les conditions d’accès aux soins et les dispositifs d’accueil des migrants. L’état de santé des migrants se dégrade après leur arrivée en France, c’est ce que l’on appelle le «Healthy migrant effect » malgré que la France fasse partie des pays d’Europe où le dispositif d’accès aux soins des migrants en situation irrégulière est le plus généreux, c’est l’Aide Médicale d’État (AME). En effet, au cours de leur parcours de soins en France, les migrants en situation de grande précarité vont rencontrer plusieurs obstacles d’accès à la santé. Parmi ces obstacles, on retrouve la barrière de la langue et la barrière culturelle qui vont venir entraver la relation soignant soigné. A cela s’ajoute la méconnaissance des droits en santé des migrants ainsi que la complexité des démarches administratives tant pour les migrants eux mêmes que pour les professionnels de santé.

Les obstacles d’accès aux soins ainsi que l’exclusion, la précarité sociale et la précarité administrative dans lesquelles se trouvent les migrants aggravent leur état de santé. La survenue et la sévérité de la maladie sont favorisées par ces multiples facteurs de vulnérabilité, au sein du pays d’origine des migrants, durant leur parcours d’exil et dans leur pays d’accueil. Tous ces phénomènes sont à l’origine d’une dégradation de l’état de santé des migrants après leur arrivée dans le pays d’accueil.

L’état de santé des migrants en France 

La population étudiée se compose des personnes migrantes en situation de grande précarité vivant actuellement sur le territoire français. Afin d’axer cette thèse uniquement sur les personnes en situation de grande précarité, seuls les migrants « sans-papiers » (en « situation irrégulière ») ainsi que les migrants en cours de demande d’asile ou demandeurs d’asile (en « situation régulière ») seront étudiés.

Voici quelques définitions proposées par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) afin d’éviter une certaine confusion sur les termes de migrants, immigrés ou étrangers, demandeurs d’asile, réfugiés et sans-papiers, ou encore « clandestins », reflétant par ailleurs la fragmentation du statut administratif des étrangers :

« Un demandeur d’asile est une personne ayant demandé le statut de réfugié au titre de la convention de Genève 1951. Un Étranger est une personne qui n’a pas la nationalité française, terme utilisé par les autorités de police et les acteurs juridiques. Le terme d’Exilé évoque le caractère contraint de la situation de migration et notamment ses aspects psychologiques. Une personne Immigrée est une personne née étrangère et résidant désormais en France, terme et définition du Haut Conseil à l’intégration utilisés pour le recensement démographique. Une personne reste immigrée même si elle acquiert la nationalité française. Un Migrant, au sens de migrant international, est une personne ayant vécu à l’étranger et résidant désormais en France. Les migrants nés hors de France sont des immigrants, qu’ils soient français de naissance ou immigrés. Un Réfugié ou protégé subsidiaire est, au sens juridique, une personne ayant obtenu le statut de réfugié ou la protection subsidiaire internationale accordé(e) par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ou la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).

Les Ressortissants de pays tiers proviennent de pays hors Union européenne mais membres de l’Espace économique européen ou de la Suisse. Les Sans-papiers ou clandestins sont des étrangers en séjour irrégulier. Ces termes sont destinés par leurs utilisateurs à souligner le caractère illégitime ou légitime de la présence de la personne. » .

Au vu du public cible choisi, les personnes migrantes en situation de grande précarité, voici quelques définitions qui permettent d’établir une relation directe entre droits fondamentaux, précarité, pauvreté ou grande pauvreté et exclusion.

Qu’est-ce que la précarité ? 

La précarité ne se réduit pas à l’aspect financier, c’est un phénomène multidimensionnel. Selon le Conseil Économique, social et environnemental : « La précarité est l’absence d’une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et aux familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut être plus ou moins étendue et avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives. Elle conduit le plus souvent à la grande pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence, qu’elle tend à se prolonger dans le temps et devient persistante, qu’elle compromet gravement les chances de reconquérir ses droits et de réassumer ses responsabilités par soi-même dans un avenir prévisible » .

Selon l’Académie Nationale de Médecine « La précarité est le défaut d’accès à un ou plusieurs des dispositifs qui permettent aux personnes et aux familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux. L’insécurité qui en résulte peut-être plus ou moins importante, avoir des conséquences plus ou moins graves et définitives. Elle conduit le plus souvent à la pauvreté quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence, qu’elle tend à se prolonger ou devient persistante, qu’elle compromet gravement les chances de reconquérir ses droits et de réassumer ses responsabilités par soi-même dans un avenir prévisible. Cette définition exprime la vulnérabilité, l’inquiétude et la perte de dignité de ces personnes qui basculent dans la précarité, la grande pauvreté qui s’ensuit étant définie de plus par des critères économiques et financiers. La précarité peut être la conséquence de nombreuses situations médicales (maladies chroniques, handicaps, troubles psychiatriques, personnes vulnérables et isolées), médico-sociales (déficits fonctionnels, dépendances liées à l’âge) et socio- économiques (exclusion sociale quelle qu’en soit la cause : perte de revenus, chômage, migration, familles monoparentales) » .

De plus, d’après l’Académie Nationale de Médecine, l’entrée en précarité est accentuée chez les personnes migrantes ou étrangères du fait de leur culture, leurs difficultés d’usage de la langue française ainsi que leurs origines.

Qu’est-ce que l’exclusion ? 

Terme paradoxal. Le préfixe « ex » : hors de, devrait limiter aux individus qui, faisant partie d’un groupe en sont rejetés, alors que « cludere » signifie fermer et permet d’étendre la signification du mot également à l’interdiction et au rejet de ceux qui n’en font pas partie . On considère ainsi comme exclues, les personnes ne possédant pas les mêmes droits ou ne pouvant pas participer aux mêmes activités que les autres (exemple : immigrés, handicapés) . L’exclusion sociale est la marginalisation, la mise à l’écart d’une personne ou d’un groupe en raison d’un trop grand éloignement avec le mode de vie dominant dans la société. Ce processus peut être volontaire ou subi.

Les différentes terminologies expliquées ci-dessus montrent la complexité du sujet, il est alors important de le contextualiser. C’est pourquoi, on évoquera tout d’abord les différentes trajectoires des publics étudiés, puis le cadre juridique auquel ils peuvent être liés. Enfin, on s’intéressera à trois études concrètes relevant l’état de santé des migrants en France.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : L’ETAT DE SANTE DES MIGRANTS EN FRANCE
1.1. LA SITUATION MIGRATOIRE ACTUELLE EN FRANCE
1.1.1. La situation migratoire dans le Monde
1.1.2. La situation migratoire en France
1.1.3. La situation en matière de Santé mondiale
1.2. QUELQUES ELEMENTS CLES SUR LE DROIT D’ASILE EN FRANCE
1.3. L’ETAT DE SANTE DES MIGRANTS EN FRANCE : ANALYSE DE 2 ETUDES REALISEES PAR MEDECINS DU MONDE ET LE COMEDE
1.3.1. Analyse d’étude n°1 : État de santé des personnes accueillies dans les Centres d’Accueil, de Soins et d’Orientation de Médecins du Monde en 2017
1.3.2. Analyse d’étude n°2 : État de santé des personnes ayant effectué le bilan de santé du COMEDE entre 2007 et 2013
1.3.3. Focus inégalités en santé femmes-hommes et appui d’une étude sur l’état de santé des femmes
CHAPITRE 2 : LES INEGALITES D’ACCES AUX SOINS DES MIGRANTS EN SITUATION DE GRANDE PRECARITE EN FRANCE
2.1. REGLEMENTATION ET DROITS A LA SANTE DES MIGRANTS EN SITUATION DE GRANDE PRECARITE EN FRANCE
2.1.1. Histoire de l’Aide Médicale d’État et de la PUMA
2.1.2. Les droits en santé des personnes migrantes en situation irrégulière ou « sans-papiers » : la prestation sociale d’Aide Médicale d’État (AME)
2.1.3. Les droits en santé des personnes migrantes en situation régulière : La Protection Universelle Maladie (PUMA) et la Complémentaire Santé Solidaire (CSS)
2.2. PRINCIPAUX OBSTACLES D’ACCES AUX SOINS : RENONCEMENT AUX SOINS ET REFUS DE SOINS
2.2.1. Renoncement aux soins des personnes migrantes en situation de grande précarité : hébergement, domiciliation, barrière de la langue
2.2.2. AME, PUMA, CSS : un accès différencié aux soins
2.2.3. Des difficultés de prises en charge du public migrant en situation de grande précarité par les professionnels de santé
2.3. CONSEQUENCES ET ENJEUX DE CES INEGALITES D’ACCES AUX SOINS
2.3.1. Dégradation du « bien-être » : de l’état de santé mentale, physique et sociale
2.3.2. Les nouvelles maladies émergentes chez les personnes migrantes
CHAPITRE 3 : LA PLACE DU PHARMACIEN VERS UN MEILLEUR ACCES AUX SOINS DES MIGRANTS EN FRANCE
3.1. UNE PROTECTION MALADIE PROTECTRICE, UNIVERSELLE ET ACCESSIBLE A TOUS
3.1.1. Vers une fusion de l’AME au sein du dispositif PUMA de la Sécurité sociale
3.1.2. Vers une Couverture Santé Universelle
3.2. DES DISPOSITIFS DESTINES A AMELIORER LA PRISE EN CHARGE DES PERSONNES EN SITUATION DE GRANDE PRECARITE
3.2.1. Les dispositifs de « soins gratuits »
3.2.2. Des modèles de prise en charge pluridisciplinaire
3.2.3. Sensibilisation et formation des professionnels de santé
3.3. PROPOSITIONS RELATIVES A LA STRATEGIE DE TRANSFORMATION DU SYSTEME DE SANTE S’INSCRIVANT DANS LE PROGRAMME « MA SANTE 2022 »
3.3.1. Prévention et promotion de la santé
3.3.2. Mieux structurer l’Offre de Soins dans les territoires : les Pharmaciens au sein d’un collectif au service des patients
3.3.3. Développer l’ambition numérique en santé
CONCLUSION
ANNEXES

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