La place du corps et de la voix dans les pratiques poétiques 

La « Métachorie » : danse et poésie de Valentine de Saint-Point

Commençons par éclairer les difficultés à comprendre ce qu’est la Métachorie.
C’est Valentine de Saint-Point qui invente cette sorte de danse, qui est en réalité moins une véritable « danse » qu’une nouvelle forme d’expression corporelle se voulant en complète opposition avec les ballets traditionnels de l’époque. La réflexion sur la danse s’oriente autour de la conception même du pas de la danseuse.
Elle écrit dans la Métachorie :
La danse, sous quelque forme que ce soit, n’est que de la cadence marquée : par des pas traditionnels, comme dans les ballets d’opéra, ou par des attitudes ou des gestes instinctifs ou sensoriels [. . . ] la danse moderne est à créer [. . . ] on ne peut plus aujourd’hui, jouer rythmiquement avec son corps au hasard Quand Valentine écrit cela, la danse est une manifestation du corps, répondant à un certain instinct. Valentine propose une autre danse, qui soit au contraire cérébrale, entraînant une nouvelle conception du pas de la danseuse : ce qui fondait la danse (le pas – l’instinct – le corps) est remis en question. Valentine tente un renouvellement du genre en l’associant, chose tout à fait nouvelle, à la poésie. Afin de s’éloigner des grâces, jugées ridicules, des danseuses de l’époque, Valentine propose de mettre en évidence dans cet art l’Idée poétique ou le Concept. En proposant que le mouvement de la danseuse soit basé sur une stylisation géométrique, elle opère une disjonction entre la musique et le geste chorégraphique, comme l’explique Véronique Richard de la Fuente : « la Métachorie offrait le spectacle de la destruction définitive du Solennel et du Sublime, tout en présentant un spectacle de plaisir, mais un plaisir nouveau, mental».
Valentine réalise quelques représentations de sa Métachorie dans le but de faire connaître ce nouvel art. En 1913 , à la comédie des Champs Élysées, a lieu un spectacle d’une heure et demie, auquel assistent un certain nombre d’amis de Valentine : Picasso, Rodin, Marinetti et d’autres futuristes, Ravel, Satie, de Segonzac, Apollinaire, les Delaunay, Clément Dupuy. D’après Fawzia Zouari , qui accorde une large part à la description du spectacle, trois draps sont suspendus à la scène, illuminés de rouge, bleu, rose et orange. Consciente des risques d’incompréhensions de la part du public, Valentine fait lire un prologue explicatif par Maurice Saillard du Théâtre Antoine. Puis, après qu’un poème eut été déclamé parDe Max, célèbre tragédien de l’époque, un morceau de Debussy est joué pendant que Valentine entre en scène avec un costume de guerre comportant un casque mérovingien, en déclamant un poème de vingt alexandrins, Les Pavots de sang. Au deuxième tableau, son visage est voilé, elle apparaît derrière un rideau pendantque De Max dicte par sa lecture les figures symboliques qui résument les idées.
Au troisième tableau, enfin, Valentine mime l’amour par des poses voluptueuses.
Ce spectacle d’un nouveau genre choque énormément les spectateurs présents et ne rencontre pas le succès. Un des articles critiques qui paraissent, de Georges Casella, est si infamant que Maurice Kaplan, l’un des collaborateurs de la revue Monjoie !, le provoque en duel pour défendre la réputation de Valentine deSaint-Point ! Même Marinetti ne semble pas avoir apprécié la Métachorie.

Mutation médiologique

Les trois âges de la poésie selon Casteras

Raymond de Casteras commence son ouvrage consacré aux Hydropathes en remontant aux origines et en expliquant l’évolution de la poésie. Il faut lire et relire ces pages qui montrent la lucidité de Casteras qui avait compris, déjà, en 1945, les mutations de la vie poétique. Il existe, selon lui, trois âges de la poésie : « À l’origine, le chantre » : le chantre – autrement appelé « chanteur, aède, rapsode, trouvère » ou « chanteur de plein vent » – est le poète de la tradition orale qui doit chanter ses poèmes pour les transmettre au public. Celui-ci n’a accès aux œuvres que par l’intermédiaire de l’aède, il ne peut lire les œuvres, seul, car la publication écrite n’existe pas encore. Casteras rappelle que les assonances et les rimes sont alors des moyens mnémotechniques pour le chantre — comme pour le public —, qui ne possédait que sa mémoire pour fixer ses œuvres.
Puis, le chantre a fait place à « l’homme de cabinet de travail ». Cette évocation du poète à son cabinet de travail est tout à fait conforme à la conception du poète défendue par Joachim Du Bellay dans La Deffence et illustration de la Langue Francoyse : il fait le choix du labeur contre l’ardeur et conseille au poète de vivre reclus et, « comme mort en soi-même suer et trembler maintes fois et comme nos Poètes courtisans boivent, mangent et dorment à leur aise, endurer de faim de soif et de longues vigiles ». Le poète n’a pas à se mêler à la foule courtisane, il doit « chercher la solitude et le Silence ami des Muses ».
Raymond de Casteras explique que le poète de cette seconde ère conserve certes du zèle à réciter ses œuvres, mais en cénacles fermés ou dans des salons, toujours en groupe restreint. Le public lit le poème qui a été imprimé ou en prend connaissance lors des récitations faites par des artistes de théâtre – mais jamais par l’auteur lui même qui viendrait déclamer devant le monde. C’est que – et Casteras l’écrit sans en mesurer tous les retentissements dans l’histoire littéraire – l’imprimerie a été inventée et a bouleversé le mode d’accès à la poésie, autrefois chantée, maintenant lue. Dans cette ère-là, le public « n’[est] pas directement atteint ; il y fa[ut] l’édition, ou à défaut, l’interprétation d’un artiste professionne ». Mais un problème se pose, résumé par cette phrase de Léon Xanrof, citée par Raymond de Casteras : « Faire un chef d’œuvre n’est rien, le produire en public, voilà la difficulté ». Le nœud du problème réside dans cette dichotomie ressentie par Léon Xanrof et par certains poètes de la génération de Maurice Rollinat et Marie Krysinska : le poème créé et écrit sur le papier n’est pas suffisant, le laisser lire par d’autres artistes est une forme de facilité que certains ne veulent plus accepter. Le poème n’a pas fini d’être « produit », pour reprendre le terme de Xanrof, lorsqu’il a été écrit : encore faut-il parvenir à le lire devant le public.
C’est le début du troisième âge de la poésie, qui selon Casteras commence avec les Hydropathes, et amorce une ère « moderne » : c’est ce que Régis Debray appelle une nouvelle « mutation médiologique ».

Médiologie : définition et enjeux

« Médiologie s’appelle l’étude des médiations matérielles à travers lesquelles un Verbe se fait chair. Une idée, force collective. Un message, vision du monde ». Voici comment Régis Debray présente et essaye de définir la médiologie, discipline complexe et récente, que l’on pourrait situer entre la sociologie et la communication, qui va nous aider à mieux comprendre l’importance de cette nouvelle façon de faire (de) la poésie, qui naît dans les cabarets car elle bouleverse le mode de communication qui se tisse traditionnellement entre un poète et un lecteur à travers le texte.
Par « medium », Debray désigne les différentes techniques qui permettent de diffuser des œuvres : le papier, le livre, le CD. . . sont des media.

L’oubli expliqué par la mutation médiologique ?

Apollinaire : le fondateur d’une réflexion médiologique ?

Des auteurs comme eux « anticipent de leurs réflexions et de leurs propres innovations en musique et en poésie les ressources illimitées du medium à venir ou émergeant ». C’est Jean-Pierre Bobillot qui écrit cette phrase à propos d’Apollinaire dans un article intitulé « La Voix réinventée », où il se propose de démontrer que cet auteur est l’un des premiers à amorcer une réflexion médiologique sur la poésie. En effet, J.-P. Bobillot prend pour événement fondateur de la naissance de l’audiosphère le jour de décembre 1913 où « Apollinaire, Verhaeren, René Ghil et quelques autres ont eu l’occasion d’enregistrer un ou (exceptionnellement) plusieurs de leurs poèmes au phonographe, sous la houlette de l’éminent professeur Ferdinand Brunot, à la Sorbonne, dans le cadre des “Archives de la Parole”, nouvellement créées ».
Deuxième étape de cet événement fondateur : « Un peu plus tard, “le 27 mai [1914] à 17 heures”, le même Apollinaire assiste, toujours en Sorbonne et “devant un nombreux auditoire”, à la diffusion publique (ce fut, vraisemblablement, la seule) de ces enregistrements ».
Ainsi, on peut considérer ces deux dates comme les moments fondateurs de la naissance d’une nouvelle médiosphère, pour deux raisons.
D’abord parce qu’Apollinaire prend véritablement conscience du medium.
Il est frappé par l’opportunité toute nouvelle apportée par le phonographe qui crée « ces premières pages de livres auditifs dont c’était à la fois la première édition et la première audition ». Le livre imprimé sur papier peut, dès l’invention du phonographe, être supplanté, du moins concurrencé, par un nouveau support, un nouveau medium. C’est ce qu’Apollinaire exprime dans cette expression étonnante de « livres auditifs ».
Ensuite, parce qu’avec la possibilité d’enregistrer sa voix, le poète peut également envisager de chanter son poème, ce que le livre imprimé ne pouvait permettre. C’est d’ailleurs un regret exprimé par Apollinaire de n’avoir eu la présence d’esprit, en décembre 1913, de chanter : « comme je fais mes poèmes en les chantant sur des rythmes [. . . ], j’aurais dû les chanter comme fit René Ghil ». Apollinaire crée ses poèmes en chantant, il aurait donc fallu chanter, au lieu de se contenter de lire, puisque lire un poème ne permet pas de rendre compte de « [l]a propre enveloppe intonative, [de l]a corporéité phonatoire, [de l]a dynamique » du poème. Ainsi, avec les débuts des enregistrements sonores de la poésie et avec la réflexion amorcée par Apollinaire en 1913-1914, commence à se développer une poésie qu’on peut qualifier de « sonore » car elle prend la mesure des possibilités offertes par le medium – l’enregistreur, le phonographe – dans l’élaboration d’une poésie à jouer, à chanter, à crier. . .

Rollinat, Krysinska, Saint-Point : les oubliés médiologiques

Mais si, comme nous l’avons montré plus haut, Maurice Rollinat, Marie Krysinska et Valentine de Saint-Point anticipent cette mutation médiologique, s’ils ont, avant Apollinaire, pris conscience de l’intérêt de relier le poème à sa mise en voix, ils n’ont cependant pas eu la chance de détenir déjà l’appareillage nécessaire à l’enregistrement. C’est en cela qu’ils sont des « anticipateurs », des contemporains des prémisses de l’invention du phonographe, tandis qu’Apollinaire est lecontemporain de l’utilisation du phonographe.
Si l’on peut donc les louer pour avoir su déceler toutes les potentialités médiologiques de la poésie, on doit également reconnaître ici un écueil : nos auteurs n’ont pu permettre à la postérité de profiter de leurs performances scéniques et nous voyons ici une des raisons de leur oubli. Leur art scénique aurait nécessité, pour cela, des enregistrements sonores ou visuels.
Dès lors, une question se pose concernant la réception de ces œuvres : peuton lire Marie Krysinska sans Marie Krysinska, sachant qu’on ne peut la voir ni l’entendre ? Maurice Rollinat pose indirectement la question dans un poème des Névroses intitulé « Chopin » : « Hélas ! Toi mort, qui donc peut jouer ta musique ? »
Les contemporains également sont nombreux qui pointent le paradoxe d’une œuvre scénique que l’on ne peut apprécier sans la voir ni l’entendre. Léo Trézenik, contemporain de Rollinat, relève la spécificité de la poésie de Rollinat :
Ce qui fait l’originalité de Rollinat, c’est qu’il n’est ni un poète ni un musicien, ni un diseur de vers, mais qu’il est les trois et que ceci n’est pas séparable de cela. Pour le juger, il faut entendre à la fois les trois Rollinat réunis en un seul.
De même que sa musique jouée ou chantée par un autre perd de sa saveur, de même ses vers sans la musique ne sont plus cela.
Goudeau également, dans Dix ans de bohème, résume avec une jolie formule les enjeux de ce problème médiologique : « Qui n’a fait que le lire n’a point connu ce merveilleux artiste ». Marie Krysinska fut également réputée pour sa capacité à composer « librement des pages sur des poèmes considérés jusqu’alors comme immusicables de Beaudelaire [sic], Verlaine, Charles Cros [. . . ] », c’est-à-dire de poèmes que l’on jugeait impossibles à mettre en musique. Ses créations sont de l’ordre de la performance, si l’on veut bien prendre ce terme en syllepse : créer des musiques pour de tels poèmes « immusicables » est une performance au sens où cela relève du génie, ou du moins du tour de force, et une performance puisqu’elle venait ensuite sur la scène du Chat Noir pour les jouer devant le public.
Il est alors difficile de percevoir les qualités des performances scéniques de nos auteurs, dont nous n’avons aucun enregistrement. Aussi l’oubli guette-t-il inévitablement.
Faut-il donc considérer que toute lecture et toute interprétation (« interpréter » au sens de : « dégager un sens ») que nous puissions tenter aujourd’hui, en tant que critique, soit vouée à l’échec, en l’absence de l’auteur pour interpréter (au sens de : « jouer », « mettre en scène ») son œuvre ? Nos interprétations sont-elles condamnées à être toujours plus fades que si nous étions nés en cette fin du XIX e siècle ? Cette situation met en cause la critique elle-même et la capacité du chercheur à démontrer la qualité d’une œuvre ou son originalité, si ce n’est par le truchement indirect de témoignages extérieurs. S’il y a une perte considérable de saveur, il faut moins penser cette situation médiologique comme un échec que comme une façon d’interroger les modalités de la critique et de penser l’œuvre de ces auteurs dans une histoire de l’art qui ménage une place à la poésie comme art de la scène.

La place du corps et de la voix dans les pratiques poétiques

Une poésie incarnée

Évolution du rapport au corps du XVIII e au XX e siècle

Un corps, des corps

Avant de traiter du corps comme nouveau medium, il faut cerner la multiplicité des manières d’envisager le corps, d’un point de vue essentiellement sociologiqueet social. En effet, le corps est ce qui assure le lien entre l’être et les autres, c’estavant tout une enveloppe visible et charnelle qui expose directement à l’altérité et qui peut même exhiber la dimension charnelle et sensuelle.
Le corps occupe ainsi un espace et « il est lui-même un espace qui possède ses enveloppes : la peau, le halo sonore de sa voix, l’aura de sa respiration. Ce corps physique, matériel, peut être touché, senti, contemplé. Il est cette chose que les autres voient, scrutent dans leur désir ». Cet aspect là, particulièrement important dans le cadre de la poésie des cabarets, est décrit par Marie Krysinska au chapitre 8 de son roman La Force du désir. Luce Fauvet se rend en spectatrice au Chat Noir (en sa dernière année d’ouverture) et scrute le corps de douze jeunes hommes qui l’entourent et attisent son désir. Son imagination l’entraîne sur plusieurs pages de la Grèce antique à la Rome décadente qui s’achèvent ainsi : Luce « songe que, sans doute, en ce corps dégradé par l’errante aventure de la vie moderne, trop contraire, habite une âme de demi-dieu sylvain qui, au temps de Phidias, poursuivait les éphèbes dans les bois de citronniers ». Dans ce passage, non seulement derrière le corps, on devine ou on cherche une âme (on retrouve donc la dichotomie âme / corps évoquée à propos de Maurice Rollinat), mais enplus le corps agit comme le stimulant de l’imagination.
Cela montre combien le corps doit être envisagé en lien avec l’imaginaire , puisqu’il est source de sentiments et de sensations. La relation qui s’élabore entre les êtres est donc une relation faite de désir. Le roman de Marie Krysinska évoqué plus haut semble vouloir analyser ce désir lié au corps dans une double dimension : le corps de l’autre et son propre corps. En effet, dans le dernier chapitre de la première partie de son roman, au chapitre 13, le récit décrit la manière dont Luce Fauvet, en se rendant au bain, joue avec son corps et la manière par laquelle celui-ci devient source de pensées libertines : à présent, mollement étendue dans le zinc émaillé – qui contrefait les mosaïques des Thermes romains – Luce est toute au bien-être de cette caresse liquide dont elle jouit et dont elle joue en haussant et en baissant le niveau d’eau sur son buste, d’un paresseux mouvement de reins.
Puis deux paragraphes plus loin : par longs moments, Luce s’immobilise douillettement, le regard suivant ses cuisses et ses jambes au fond de l’eau qui les nuance d’un ton de jade.
Elle se plaît alors à s’évoquer personnifiant une source folâtre ou quelque nymphe bocagère.
Retenons la construction pronominale du verbe « s’évoquer » qui rend bien compte de la fertilité des pensées érotiques stimulées par le personnage lui-même.
Le corps est tantôt perçu comme le lieu de sensations et le lieu de la connaissance, comme au XVIII e siècle dans la philosophie sensualiste , tantôt perçu comme source d’inquiétude. « Je suis dans mon corps et ne puis le quitter » : cette co-présence continue pose des questions puisque « le sujet – le moi – n’existe qu’incarné », il n’y a donc aucune distance possible entre le corps et l’esprit. Maisle corps est en même temps source de dépossession, il échappe au moi par « lesommeil, la fatigue, la possession, l’extase, la mort. Il est cadavre à venir ».

Le XIX e siècle, ou l’emprise de la religion

Si le XIXe siècle est celui du désenchantement du monde et de la mort de Dieu, si la ferveur s’atténue sensiblement par rapport aux siècles précédents, la religion chrétienne reste très ancrée dans le quotidien et dans les pratiques sociales. Si la remise en question de la religion est si violente, c’est que celle-ci perdure encore, notamment à travers les femmes, garantes des croyances et des traditions religieuses et à travers le développement des spiritualités.
Au début du XIX e siècle, la représentation du corps du Christ devient prétexte au développement d’une sensibilité tragique. La spiritualité du premier XIX e siècle a insisté avec une violence inouïe sur le corps douloureux du Christ rédempteurdont les souffrances sont décrites avec le plus grand réalisme. Henri Zerner explique que le XIX e siècle a une lourde tradition de fonds gréco-romain auquel s’ajoute une « surcharge » judéo-chrétienne : « c’est peut être ce poids de la tradition, cette surcharge symbolique, et l’anxiété qu’elle pouvait générer, qui fait l’originalité de la vision du corps chez les artistes du XIX e9 ». Or, d’une part la religion chrétienne est la religion de l’Incarnation qui pose le corps de l’enfant Jésus puis du Christ au centre du système des croyances. Le corps religieux est un corps souffrant, orienté sur une représentation pathétique du Christ qui doit inspirer le respect et l’admiration. D’autre part, le corps, au sens charnel de son acception, est rejeté par la religion chrétienne comme lieu de la tentation et de la luxure. Il est hanté par le démon et la tentation. La gourmandise et la luxure constituent le risque de reléguer l’homme au statut de bête. Le corps, c’est le mal, ou, si l’on se fie à la formule d’Amiel : « cave carnem », attention à la chair . Jean Starobinski rappelle qu’au XIX e siècle, l’homme veut être une bonne conscience et se définit abstraitement. Le corps est donc dans cette perspective une « adjonction encombrante », voué à l’abandon, oublié, refoulé. Inessentiel,contingent, il est le symbole de la « misère de la condition charnelle ».

Femme et corps

La femme tentatrice

Or, cette condamnation du corps tentateur et pécheur n’est pas sans rapport avec le statut de la femme au tournant du siècle. « La peur masculine se nourrit des fantasmes de dévoration et de submersion par l’Eve tentatrice ». L’ambiguïté demeure pour les artistes, entre la répulsion et l’attirance. En cette fin de siècle, une certaine image de la femme fascine les artistes décadents, la femme fatale, qui, caractérisée par son ambiguïté, devient objet esthétique.

Valentine et la Métachorie

Il était important de resituer ces débats et les divergences qui commencent à poindre au XIXe entre les diverses conceptions du corps dans l’art et dans ladanse, car Valentine de Saint-Point, avec la Métachorie, s’inscrit dans la lignée de ces remises en cause et en dépasse les enjeux avec une danse tout à fait particulière.

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Table des matières
Remerciements 
Introduction générale 
Méthode 
Problématisation 
Explication raisonnée du choix du corpus 
Mots-clés 
I « La poésie n’avance qu’à coups d’audace » : nouveautés des pratiques poétiques 
1 Naissance de nouveaux lieux de production poétique
1.1 Les Hydropathes ou la « renaissance littéraire pour le Vieux Quartier latin »
1.2 La « Métachorie » : danse et poésie de Valentine de Saint-Point
2 La poésie performance
2.1 Naissance de « l’auteur interprète »
2.2 La mise en scène : une contre-intimité ?
3 Mutation médiologique
3.1 Les trois âges de la poésie selon Casteras
3.2 Médiologie : définition et enjeux
3.3 L’oubli expliqué par la mutation médiologique ?
3.3.1 Apollinaire : le fondateur d’une réflexion médiologique ?
3.3.2 Rollinat, Krysinska, Saint-Point : les oubliés médiologiques
Conclusion
II La place du corps et de la voix dans les pratiques poétiques 
4 Une poésie incarnée
4.1 Évolution du rapport au corps du XVIII eau XX e siècle
4.1.1 Un corps, des corps
4.1.2 Le XIX e siècle, ou l’emprise de la religion
4.2 Femme et corps
4.2.1 La femme tentatrice
4.2.2 Corps et danse : vers une « écriture corporelle » ?
4.3 Valentine et la Métachorie
4.3.1 Valentine contre ses contemporain(e)s
4.3.2 La Métachorie, danse de l’Esprit
4.3.3 Désir et corps chez Valentine de Saint-Point
4.4 La surfemme nietzschéenne : une nouvelle conception de la femme
5 « Je crie donc je suis »
5.1 « A cry et à cors »
5.2 « La Voix », Les Névroses
5.3 « Kry-cri »
Conclusion
6 Désacralisation et déchristianisation
6.1 « La voix est un objet de jouissance » (Michel Poizat) : pouvoir subversif de la voix
6.2 Faire descendre l’art de son piédestal symbolique et « écorcher » la littérature : la question (épineuse) de l’avant-garde
6.3 Un art des « bruits » ?
Conclusion
III Vers la poésie scénique 
Définir la poésie sonore
Naissance d’une lignée oubliée
Place de Valentine de Saint-Point dans cette lignée
7 L’art, une attitude existentielle ?
8 De la poésie comme performance à l’œuvre d’art totale
9 La poésie, un vivier expérimental et exploratoire
9.1 Le monologue fumiste
9.2 Le théâtre d’ombres
9.3 Les improvisations
Conclusion : apprendre à lire l’histoire littéraire autrement 110
Bibliographie 
Résumé du mémoire 
Mots-clés

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