La place de l’enseignant dans l’accompagnement du développement des compétences narratives et syntaxiques

Partie théorique

L’oral : les compétences syntaxiques et narratives en maternelle

Acquisition de la syntaxe

Le langage s’apprend par le biais d’une interaction entre l’adulte et l’enfant, ce que Lentin (1971) appelle « interaction langagière adaptée ». Ainsi, le parler des adultes que l’enfant va côtoyer durant ses premières années va lui permettre d’agencer ses premiers mots puisqu’il aura perçu l’organisation des mots dans la phrase qui lui confère un sens précis, et que ce sens change si l’on inverse l’ordre des mots. C’est par ces interactions authentiques avec son environnement que l’enfant va progressivement s’approprier puis acquérir les constructions syntaxiques en procédant par essais.
Le fait majeur dans l’acquisition du langage n’est pas l’apprentissage de ce langage maisbien « la mise en fonctionnement de la fonction-langage » (Lentin, 1975, p. 21). Lentin entendpar là que l’enfant n’est pas passif dans son apprentissage du langage et qu’il ne lui suffit pas d’écouter comment il doit manier ou non les mots pour réellement apprendre à parler.
L’apprentissage du langage est une activité « personnelle originale et créatrice ».
L’acquisition de la syntaxe passe par plusieurs phases importantes (Bassano et al., 2020) :
• La première est la capacité des enfants à combiner deux mots ensemble. Cette capacité est nécessaire pour l’accès à la formation de la phrase et donc dans la primo acquisition de la grammaire.
Ce phénomène combinatoire va commencer dès les premiers mois de l’enfant, de par cette influence du milieu familial. Ainsi, Bassano, Labrell et Bonnet (2020) ont démontré que 50% des enfants étaient précoces au niveau de la combinatoire puisqu’ils réussissaient à combiner des mots tels que « papa parti » à partir de 18-20 mois. Ce score passe à 90% dès 22-24 mois, marquant la production par tous de la combinaison des mots. (Annexe 1). Cependant, les premières périodes d’assemblages des mots sont marquées par l’omission quasi-systématique des déterminants, des prépositions, des pronoms et des auxiliaires pour les verbes (Eduscol,2016).
• La seconde phase est l’acquisition des structures complexes. Ces dernières varient selon l’âge puisque les enfants n’en produisent que très peu durant leurs premiers mois, mais aussi selon le niveau des enfants puisqu’un écart considérable existe au cours del’acquisition de la syntaxe.
Jusqu’à 25 mois les enfants ne produisent en moyenne que quatre structures complexes. A ce stade, les enfants avancés parviennent à produire des structures avec des déterminants devant les noms (malgré une utilisation majeure de l’article défini), des pronoms sujets (je, tu, il…) devant les verbes et commencent à produire un début de conjugaison (avec des auxiliaires et modaux). A ce stade, une explosion grammaticale fulgurante a lieu, où l’écart entre les enfantsest considérable, puis l’évolution ralentit. L’écart entre les deux types d’enfants s’efface totalement à 41 mois, stade où les enfants parviennent presque tous à utiliser et produire des constructions (prépositionnelles, possessives, interrogatives et subordonnées). (Annexe 2)
• La dernière phase est l’acquisition des phrases complexes. Elles comportent un mot de liaison établissant « une relation plus ou moins élaborée entre deux propositions », comme« bébé dort quand il est fatigué ». A noter que « le processus d’acquisition des structurescomplexes est plus précoce et plus rapide que celui des phrases complexes » (Bassano etal., 2020, p.102).
Ici, le processus d’acquisition reste très bas jusqu’à 28 mois avec un score moyen en dessous de 1 et pour seules phrases complexes produites des négatives, ce qui s’explique par le fait que la négation ne relie pas deux propositions. Un pic de progression a lieu vers 38 mois. Mais contrairement aux structures complexes, le score maximal n’est pas atteint à 42 mois et l’écart entre enfants persiste. A 41 mois, les plus avancés en produisent 14, alors que les plus faibles en produisent à peine 8. (Annexe 3). Seuls le « pas », le « comme », et le « si » conditionnel dans un contexte dit affirmatif sont maitrisés par 90% des enfants. Il est plus simple d’employer des morphèmes dans des phrases simples, qu’au sein d’une phrase complexe comportant deux propositions et que ce morphème sert alors à créer un lien entre elles.
Canut (2014) rappelle que « les tests post hoc de Bonferroni (différenciation des groupes d’âges 2 à 2) montrent néanmoins que l’évolution la plus significative s’effectue à partir de 5 ans » (Canut, 2014, p.7). Qu’il s’agisse des complétives ou des circonstancielles, la moyenne des enfants de 5 ans est très nettement supérieure à celles des enfants moins âgés (Annexe 4).
Plus particulièrement, au niveau des complétives la conjonction « que », le discours indirect, l’interrogative indirecte, les constructions infinitives, mais aussi « parce que », « pour » suivi d’un verbe infinitif, les temporels et les relatifs évoluent fortement à partir de 5 ans. (Annexe 5). Les évolutions opérées ne sont pas identiques selon les catégories syntaxiques, notamment au niveau des complétives, des relatives, des corrélatives et des circonstancielles. Pour certaines, de grandes évolutions ont lieu puis se stabilisent à partir de 4 ans, et pour d’autres les grandes évolutions n’ont justement lieu qu’à partir de 5 ans.

Syntaxe et narration dans les programmes de cycle 1

Comme l’indique Sauvage (2005), l’acquisition du langage oral dans la lutte contre les inégalités se prépare dès l’école maternelle, au même titre que l’apprentissage de l’écriture et de la lecture dans la lutte contre l’illettrisme.
La volonté de faire du langage une priorité au sein des apprentissages du Cycle 1 est présente dans les nouveaux programmes de 2020 (MEN, 2020, p. 7), qui lui confèrent une place centrale dans le domaine « Mobiliser le langage » et l’érigent en facteur de lutte contre les inégalités entre élèves. Ce travail sur le langage oral en classe permettrait donc la réussite de tous puisque « la stimulation et la structuration du langage oral d’une part, l’entrée progressive dans la culture de l’écrit d’autre part, constituent des priorités de l’école maternelle et concernent l’ensemble des domaines ».
L’importance accordée à la syntaxe dans les programmes de 2020 apparaît dans l’objectif « Oser entrer en communication », qui indique que l’enfant doit progressivement s’exprimer de façon plus complexe et parvenir à une meilleure organisation de ses phrases. On le voit également à travers les attendus de fin de cycle 1. En effet, l’élève doit être capable de « s’exprimer dans un langage syntaxiquement correct et précis » et « reformuler pour se faire mieux comprendre » (MEN, 2020, p. 13).
Dans la circulaire de rentrée de 2019 relative aux priorités pour l’école primaire, l’intitulé « Renforcer la préparation aux apprentissages fondamentaux » faisait déjà explicitement apparaître la volonté que la maternelle joue un rôle majeur pour la « maîtrise future des savoirs fondamentaux ». La circulaire permet alors d’affirmer que « le travail sur l’oral permet d’atteindre un premier niveau de conscience de l’organisation lexicale et syntaxique de la langue » (MEN, 2019, p.13).

Une surévaluation du lexique au détriment de la syntaxe dans l’apprentissage du langage

Les ressources maternelles relatives au langage et notamment au lien lexique-syntaxe (Eduscol, 2016) viennent rappeler l’indissociabilité du lexique et de la syntaxe dans l’acte de parole car l’acquisition des mots caractérisant les objets du monde, et l’assemblage de ces mots pour former des phrases s’apprennent de manière conjointe. Connaître du lexique ne suffit pas,il faut que les élèves sachent comment utiliser ces mots pour former un énoncé syntaxiquement correct et complexe pour traduire leur pensée. Lexique et syntaxe sont donc mobilisés ensemble lors des échanges.
La syntaxe joue pourtant un rôle dans l’acquisition et l’utilisation du lexique. En effet, pour pouvoir être réutilisé, le lexique doit être mémorisé par les élèves (Eduscol, 2016). Il faut donc élaborer desjeux permettant cette fixation des acquis lexicaux, notamment des devinettes, qui peuvent être créées par les élèves puis répondues. Cela vaut pour tous les jeux où les enfantsdoivent combiner des mots dans des énoncés puisqu’on ne peut pas utiliser les mots et donc lesacquérir si on ne les combine pas dans des énoncés.
Philippe Boisseau (2020) insiste sur le fait qu’il faut donner la priorité à la syntaxe et non au lexique dans l’enseignement du langage car elle occupe une place centrale de ce domaine d’une part, et qu’elle nécessite de nombreuses opérations mentales pouvant être complexes pour les enfants, surtout de cycle 1. Ceci la rend donc extrêmement difficile à assimiler. Un travail permanent et rigoureux est à effectuer par l’enseignant, dès la maternelle, si l’on veut permettre aux enfants de maîtriser progressivement les éléments du langage et produire des énoncés plus complexes.
Boisseau (2020) explique que pour la syntaxe, de nombreux apprentissages sont à construire tout au long de la scolarité des élèves, en commençant par la phrase déclarative simple. Il indique que la phrase déclarative simple ne représente même pas 2% des phrases produites par les élèves de primaire, ce qui coïncide avec le fait que cette structure n’est pas utilisée à l’oral, même par les adultes. Pourtant, cette structure sert de base pour l’écrit. Il faut donc sensibiliser et familiariser les enfants aux codes de l’écrit pour leurs apprentissages futurs.

La place de l’enseignant dans l’accompagnement du développement des compétences narratives et syntaxiques

L’interaction enseignant/enfant

Une place instable et critiquée de l’enseignant au sein des échanges

S’il est indéniable d’affirmer que l’enfant apprend à parler en interaction constante avec l’adulte, selon Péroz (2013), ce principe est pourtant à nuancer lorsque l’enfant se trouve à l’école. En effet, l’interaction duelle qui a lieu au sein du cadre familial est difficilement transposable au cas de l’école, où l’enseignant est en interaction avec une vingtaine d’enfants et non un seul. Cette interaction duelle entrainant un certain nombre d’étayage de la part de l’adulte, elle est mise à mal dans le cadre scolaire où l’interaction devient la plupart du temps collective. Ce groupe classe constitue une entrave à l’apprentissage du langage reposant sur un étayage permanent de l’adulte. Une nécessité de créer des « groupes conversationnels » commele préconisent notamment Lentin et Florin, s’impose pour que chaque enfant puisse prendre laparole.
Toujours selon Péroz (2013), un problème persiste quant à la place et au rôle même de l’enseignant dans les interactions langagières. En effet, alors que l’on pose le principe d’individualisation de l’apprentissage du langage, qui induit nécessairement une intervention massive de l’enseignant, on lui reproche d’intervenir trop fréquemment dans les échanges. Florin constate ainsi que même au sein de groupes conversationnels, l’enseignant intervient plus que tous les enfants du groupe réunis. Les enfants ne peuvent alors pas réfléchir et construire leurs réponses et énoncés correctement puisque l’enseignant leur impose un rythme interactionnel qui n’est pas adéquat et des interventions trop brèves. Les résultats des élèves ne sont d’ailleurs pas pertinents, avec environ 5,5 mots seulement par séance.
La source de ce problème est ainsi le modèle lui-même puisque le principe a érigé l’enseignant en « gestionnaire direct de la progression des élèves sur tous les plans » (Péroz,2013, p.5), ce qui l’oblige à occuper la place centrale des échanges, rendant difficile l’écoutedes élèves.

Résultats et analyses

Les marottes : un outil efficace d’entrée en activité

La mise en place de marottes a eu lieu à partir de la séance 4, de façon progressive. La première phase consistait à demander aux élèves de lever la marotte correspondante lorsque le personnage parlait. Pour les élèves les plus à l’aise, il était possible de les laisser verbaliser à ma place le dialogue du personnage. Ainsi, même les élèves les plus timides étaient actifs et valorisés. Ensuite, en séance 5, les élèves devaient comment à jouer l’histoire entre eux, chacun ayant un personnage. Puis en séance 6, des jeux de rôles avec les marottes avaient lieu.
Pour vérifier l’hypothèse selon laquelle l’usage des marottes favorise l’implication des élèves, nous allons comparer les interventions des élèves avant la séquence et pendant la séance 6.
L’organigramme 1 va dresser le portrait-robot des différentes interventions du groupe classe avant la séquence. L’organigramme 2 va quant à lui venir illustrer le nombre de mots produits par les enfants en comparaison des nombres de mots produit par moi-même lors de la séance 6.
Cet organigramme a été élaboré d’après la grille de pré-évaluation située en annexe 10, et qui m’a permis de constituer les différents groupes de paroles. Tous les élèves du groupe des grands parleurs interviennent souvent et coupent la parole aux autres. Dans le groupe Gr2MP, tous participent mais moins que les grands parleurs. Le groupe Gr3MP est moins performant que le groupe Gr2MP. Enfin, dans le groupe des petits parleurs, rares sont les interventions de ces enfants.
Lors de la séance 6, où les élèves doivent jouer des saynètes, on note une implication et un investissement général des élèves. Tous participent activement sauf deux élèves. L’un du groupe Gr4PP, et un autre dans le groupe Gr3MP qui est le groupe le plus « faible » des moyens parleurs. Ils étaient attentifs aux consignes et voulaient jouer avec les marottes mais dès lors qu’il a fallu le faire avec le dictaphone, ils n’ont plus voulu.
Le groupe 4 des petits parleurs parlent moins que moi et produisent moins que les autres groupes. En effet, ils parlent plus de deux fois moins que le groupe 1. J’ai pu constater une participation active et un investissement des élèves qui prenaient plaisir à jouer avec les marottes malgré leur timidité. Hormis l’élève cité ci-dessus, tous produisent des énoncés après sollicitation, pas toujours complets et corrects, mais ils essaient et se complètent entre eux.
Les extraits ci-dessous, issus de la séance 6 des groupes 4 et 2, viennent corroborer l’idée de participation des élèves. On peut y voir que les enfants produisent des énoncés et rebondissent assez rapidement à mes propos. On remarque également leur investissement dans l’entraide qui existe entre eux. Lorsqu’un élève ne se souvient plus, un autre l’aide ou répond à mes relances, ce qui prouvent qu’ils sont attentifs à ce qui se passe lors des jeux de rôles avec les marottes même lorsque ce n’est pas à leur tour de jouer. Les extraits se trouvent en annexe (annexes 19 à 26).

Syntaxe : les jeux de mises en situations favorisent-ils l’acquisition des structures syntaxiques ?

La séquence élaborée comportait une séance spécifique à l’apprentissage des différents points syntaxiques de l’album. Cette séance correspond à la séance 6, et également la séance 7qui devait opérer un rappel pour les élèves à besoin et un renforcement pour les autres, mais qui n’a pu avoir lieu en raison du distanciel.
Le but de la séance était d’effectuer des jeux de rôles pour intégrer les structures syntaxiques. Les élèves disposaient des marottes et une attention particulière était portée à deux scènes principales : la scène où Casse-noisette vient frapper à la porte de Kipic et lui explique ce qui lui arrive, puis la scène où Kipic et Casse-noisette frappent à la porte de Touffu. Ces deux scènes sont construites de la même manière, mais un changement de pronom a lieu puisqu’on passe d’un singulier à un pluriel. Chaque élève devait choisir une marotte personnage et aller « toquer », en se présentant, en disant pourquoi il vient et en formulant une demande.
Pour confirmer ou non cette hypothèse, nous allons comparer les résultats des séances 6 et 8 pour les différents points syntaxiques suivants :
– Réutilisation des structures syntaxiques répétitives
– Formulation d’une interrogation avec inversion S/V
– Utilisation des pronoms
– Utilisation de la négation

Emploi des structures répétitives

Quatre structures répétitives majeures sont présentes dans l’album. Leur utilisation par les élèves est étudiée aux seins des tableaux 2 et 3 suivants. La comparaison a une nouvelle fois lieu entre la séance 6, lors des jeux de rôles, et la séance 8, lors de la narration finale. L’étude concerne chacune de ces 4 structures.

La narration : les multiples demandes de rappel de l’histoire permettent ils l’émergence d’un récit de plus en plus fluide et construit ?

« Un rappel de récit est une activité langagière qui consiste pour un enfant à dire, avec ses mots à lui, à l’oral, ce qu’il a compris d’une histoire qui lui a été lue » (Brigaudiot, 2000, p.125).
De plus, « L’école demande régulièrement aux élèves d’évoquer, c’est-à-dire de parler de ce qui n’est pas présent (récits d’expériences passées, ou de fiction). Ces situations d’évocations entrainent les élèves à mobilier le langage pour se faire comprendre sans autre appui, elles leur offrent un moyen de s’entrainer à s’exprimer de manière de plus en plus explicite » (Brigaudiot, 2015).
Lors de cette séquence sur l’album « A trois on a moins froid », les enfants devaient raconter l’histoire en entier lors de la séance 3 consacrée à l’apprentissage du vocabulaire. Ce travail se poursuivait lors de chaque début de séance. Ces rappels permettaient de réactiver leurs connaissances sur l’histoire et le travail effectué dessus (le vocabulaire et les inférences notamment), mais aussi pour qu’ils s’entrainent régulièrement à raconter. En effet, plus on demande aux enfants de raconter, et plus les récits seront construits avec un lexique adapté et de qualité, et une syntaxe de plus en plus complexe (Cèbe et Goigoux, 2018).
Pour vérifier cette hypothèse, nous avons comparé les productions concernant le rappel de récit des enfants de la séance 3, avec les productions de la séance 8, qui constitue la narration finale de l’histoire. Cette comparaison permettra de mettre en exergue les progressions opérées du fait de rappel de récit réguliers. Plusieurs critères sont pris en compte dans l’évaluation de la narration par les élèves :
– Les types de phrases produites : subordonnée de temps, de condition, relative, propositions coordonnées
– L’utilisation de connecteurs : « mais », « soudain », « ainsi »
– L’utilisation de verbe de parole : « dit », « crie », « demande », « répond »

Discussion et conclusion

L’oral est un domaine nécessitant un apprentissage long et parfois laborieux pour les enfants. La séquence élaborée a permis de lever tous les obstacles potentiels à la compréhension et la narration d’une histoire lue en classe. Elle a permis d’intégrer tous les élèves grâce à l’utilisation des marottes pour contourner la timidité de certains, et le travail spécifique sur le vocabulaire de l’album a favorisé la compréhension de l’histoire et du schéma narratif.
Tout cela a permis de répondre à la question : la création d’un théâtre de marottes en classe de moyenne section est-elle véritablement un outil efficace pour aider les élèves à développer leurs compétences syntaxiques et narratives ?
La séquence a permis de travailler en premier lieu sur la compréhension de l’histoire et sa chronologie en mémorisant le vocabulaire nécessaire, dans le bon ordre. Ce travail a été d’autant plus bénéfique qu’il a été fait à travers l’embodied cognition, impliquant la gestuelle des élèves et l’appropriation des mots par le corps. Evidemment, le travail effectué trouve sa limite en ce qui concerne les mots les plus compliqués à prononcer et peu habituel dans le langage quotidien des élèves tel que « hospitalité ». De ce fait, effectuer ces séances en préalable de la première lecture aurait permis de lever les obstacles de vocabulaire pour tous en amont et de démarrer l’album avec le même bagage de vocabulaire.
L’utilisation des marottes pour s’approprier le dialogue et le schéma narratif a également été positif puisqu’elle a permis à tous les élèves de pouvoir participer et produire des énoncés, contrairement aux séances de parole en groupe classe ou en groupes non-homogènes. Même s’ils ne se souvenaient pas toujours du dialogue, notamment pour le groupe des petits parleurs, tous les élèves essayaient de continuer le dialogue après relances ou aides de ma part et de la part des camarades du groupe de parole. Dans chaque groupe, les prises de paroles des enfants sont égales voire très supérieures aux miennes, surtout dans le groupe des grands-parleurs quiparlent presque deux fois plus que moi.
Cependant, le travail sur les structures syntaxiques répétitives aurait pu être davantage consolidé après la séance 6, notamment en séance 7 comme initialement prévu. Cette séance n’a pu avoir lieu puisque j’ai été absente en raison du covid et elle n’a finalement fait l’objet que d’un rappel d’histoire à la maison, avec l’aide des marottes. Si cette séance avait pu avoir lieu dans les conditions prévues dans la trame de séquence, les structures répétitives auraient été révisées et elles auraient été davantage mémorisées par tous les élèves, ce qui aurait engendré des productions finales plus riches au niveau syntaxique.
Cette critique est à nuancer car même si les structures répétitives ne sont pas toutes présentes dans les narrations finales, de nombreux points syntaxiques travaillés lors des séances ont été mémorisés et réinvestis par les élèves. Les phrases négatives et l’utilisation du pronom « nous » sont réutilisées et maitrisées par les élèves. De plus, lorsque ces structures spécifiques ne sont pas reprises, les énoncés sont néanmoins corrects vis-à-vis des normes du langage oral.
Enfin, les différentes relances de ma part tout au long de la séquence, ponctuées de connecteurs et embrayeurs, ont permis aux enfants de se les approprier et de produire des narrations finales fluides et organisées.
Ainsi, fournir aux élèves des modèles et leur faire des feedbacks immédiats lors des situations de langage sont donc très importants pour le développement syntaxique et narratif des enfants.
L’enseignant doit avoir conscience de cela s’il veut amener les élèves à des niveaux supérieurs.
En conclusion, l’acquisition de la syntaxe est un processus plus complexe et long qu’il n’y paraît. Une planification de séquences spécifiques à cet enseignement doit être mise en place par l’enseignant dès la maternelle, en étant vigilant sur le rôle que l’enseignant joue dans ce processus. Lors de ces séances, il doit être capable de s’ériger en modèle linguistique pour les élèves, tout en prenant en compte les spécificités et difficultés de chaque élève pour lui fournir un modèle adapté. Par cette rigueur, les inégalités entre élèves se verront réduites et l’entrée dans l’écrit en cycle 2 sera facilitée et ne marquera pas davantage les inégalités entre les élèves.

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Table des matières
1. Introduction 
2. Partie théorique
2.1. L’oral : les compétences syntaxiques et narratives en maternelle
2.1.1. Acquisition de la syntaxe
2.1.2. Syntaxe et narration dans les programmes de cycle 1
2.1.3. Une surévaluation du lexique au détriment de la syntaxe dans l’apprentissage du langage
2.2. La place de l’enseignant dans l’accompagnement du développement des compétences narratives et syntaxiques
2.2.1. L’interaction enseignant/enfant
2.2.2. Des feedbacks permanents et de qualité
2.2.3. Une rigueur particulière pour le développement syntaxique
2.2.4. L’efficacité de la mise en voix
2.3. Formulation de la problématique et présentation des hypothèses
2.3.1. Problématique
2.3.2. Hypothèses
3. Méthode 
3.1. Participants
3.1.1. Les élèves
3.1.2. Les groupes
3.2. Déroulement et mise en œuvre matérielle
3.2.1. Déroulement de la séquence
3.2.2. Mise en œuvre matérielle
4. Résultats et analyses
4.1. Les marottes : un outil efficace d’entrée en activité
4.2. La multimodalité : une meilleure compréhension du récit
4.3. Syntaxe :les jeux de mises en situations favorisent-ils l’acquisition des structures syntaxiques?
4.3.1. Emploi des structures répétitives
4.3.2. Phrase interrogative avec inversion
4.3.3. Diversification des pronoms et utilisation du « nous »
4.3.4. Utilisation de la négation
4.4. La narration : les multiples demandes de rappel de l’histoire permettent-ils l’émergence d’un récit de plus en plus fluide et construit ?
5. Discussion et conclusion 
Bibliographie 
Annexes

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