La peste dans le monde

La peste dans le monde

La peste est avant tout une maladie des rongeurs (Baltazard, 1960), causée par le développement dans l’organisme d’une entérobactérie gram négatif Yersinia pestis (Yersin, 1894). Elle est transmise à l’homme par la piqûre d’une puce vectrice de l’agent pathogène (Simond, 1898). Mais la transmission peut aussi se faire d’homme à homme par inhalation de la bactérie. La peste existe sous trois formes cliniques chez l’homme:
– La forme bubonique qui est mortelle dans 50 à 70 % des cas en moins d’une semaine, en l’absence d’un traitement adapté.
– La forme pulmonaire qui est mortelle en moins de trois jours dans 100 % des cas non traités à un stade très précoce (Carniel, 2002).
– La forme septicémique qui présente un taux de létalité élevé de 30 à 50%.

La peste est largement distribuée dans le monde et est maintenue au sein des réservoirs animaux, en particulier des rongeurs dans les foyers naturels de l’infection. Elle reste une menace sérieuse pour la société moderne (Abbott et Rocke, 2012).

Distribution dans le monde 

La distribution géographique initiale de la peste peut être définie par la répartition des pays touchés par les trois pandémies qui se sont succédées. Actuellement la distribution de la maladie est affiliée plutôt à la répartition géographique de ses foyers naturels (Tikhomirov, 1999). Les foyers naturels où la peste est enzootique chez les rats, les écureuils terrestres et autres rongeurs, se trouvent sur les continents d’Afrique, d’Asie et d’Amérique (Fig.1) (Tikhomirov, 1999 ; Carniel et Guinet, 2008). Chaque foyer naturel est caractérisé par des rongeurs spécifiques qui lui servent de réservoirs, les espèces de rongeurs impliquées varient d’une région géographique à l’autre (Abbott, 2012). Les rats commensaux du genre Rattus qui se sont répandus partout dans le monde à partir de l’Asie (Tikhomirov, 1999) occupe parfois seuls certains foyers, dans lesquels ces rats jouent à la fois le rôle de réservoir et d’espèce sensible à la peste (Guis, 2003).

Les rongeurs réservoirs 

Plus de 200 espèces de mammifères peuvent être infectées par la peste (Fig.2). Les rongeurs forment les principaux groupes d’animaux les plus atteints (Abbott et Rocke, 2012). Ils sont classés soient en hôtes enzootiques soient en hôtes épizootiques. Les hôtes enzootiques sont constitués de rongeurs qui sont relativement résistants à la peste, ils sont aussi à l’origine d’épizootie chez les rongeurs plus sensibles et plus proches de l’homme.

Les mécanismes de transmissions et les puces vectrices 

Des études en laboratoire ont montré que la peste peut être transmise par au moins 80 espèces de puces (Pollitzer 1954, 1960), mais le mécanisme de la transmission est variable (Gage et Kosoy, 2005). Le rôle joué par la puce dans la transmission de la peste a été initialement démontré par Simon en 1898 (Mollaret, 1999). Le mécanisme de cette transmission ne fût décrit qu’en 1914 : la puce réalise un blocage au niveau de son proventricule par le développement d’un biofilm microbien qui est à l’origine de régurgitation de bactéries infectieuses à chacun de ses repas sanguin et assure ainsi la transmission de la maladie à l’hôte (Hinnebusch, 2005 ; Bacot et Martin, 1914) (Fig.3). Le blocage du proventricule empêche le sang d’atteindre l’estomac. Comme la puce affamée essaie à plusieurs reprises de se nourrir, le sang aspiré de l’hôte mammifère remplit son œsophage, se mélange avec les bacilles, et est régurgité de nouveau dans l’hôte mammifère. Finalement, la puce bloquée meurt de faim et de déshydratation. Cette capacité à se bloquer lui a valut l’appellation de « puce bloquée » (Fig.4). Ce type de transmission par les puces bloquées constitue le paradigme dominant dans la dynamique de transmission de l’agent étiologique de la peste (Y. pestis) (Hinnebusch, 2010).

La puce orientale du rat Xenopsylla cheopis (Siphonaptera: Pulicidae), Rothschild, produit facilement cette capacité à se bloquer et est considérée ainsi comme le vecteur de la peste le plus efficace (Gratz, 1999), la transmission se faisant à partir du 5e jour de l’infection. Xenopsylla brasiliensis, (Siphonaptera: Pulicidae), Baker, ayant aussi une importante capacité à se bloquer, est le vecteur le plus fréquent en Afrique subsaharienne.

D’autres espèces de puce comme les puces d’écureuils Oropsylla montana (Siphonaptera: Pulicidae), Baker, qui ne sont pas des puces bloquées réalisent une forme alternative de transmission appelée « transmission de phase précoce ». En effet, elle est dite précoce car elle peut se faire dans les 3 heures qui suivent l’infection (Eisen et al., 2006). Dans ce cas, les agents étiologiques de la peste n’infestent pas le proventricule de la puce vectrice mais plutôt son intestin posterieur ou proctodeum. Lors du repas de sang de la puce, les bactéries sont alors poussées du proctodeum vers les pièces buccales pour être ensuite régurgitées (Eisen et al., 2007), assurant ainsi la transmission. Oropsylla montana est le principal vecteur de Y. pestis pour les humains en Amérique du Nord (Craven et al., 1993).

La transmission de la peste par la puce de l’homme Pulex irritans (Siphonaptera: Pulicidae), qui ne développe que rarement un blocage de l’intestin antérieur, pourrait aussi expliquer la propagation rapide de la peste au Moyen Age dans les régions d’Europe où la puce orientale de rat X. cheopis était rare (Eisen et al., 2006). Elle est aussi considérée comme un vecteur probable ou possible en Angola, Burundi, République Démocratique de Congo, Iran, Iraq, Népal, Tanzanie, et au Brésil (Gratz, 1999). Cette transmission en phase précoce est considérée comme efficace et pourrait conduire rapidement à une propagation d’épizooties de peste (Eisen et al., 2006). Elle procure aussi à la puce un rôle de réservoir de la peste pendant la période enzootique (Gage et Kosoy, 2005) vu qu’elle est capable de rester infectieuse pendant 2 à 3 semaines (Eisen et al., 2007).

La peste à Madagascar

La peste importée de l’Inde a été diagnostiquée pour la première fois à Madagascar en 1898 dans le port de Toamasina, depuis elle y demeure endémique. Elle s’est d’abord répandue vers le port d’Antsiranana en 1899 et de Mahajanga en 1902, pour atteindre plus tard les hauts plateaux. En 1921, seule la capitale a été officiellement touchée par la peste, probablement à cause des échanges permanents avec les côtes et l’impossibilité de contrôler tous les voyageurs (Brygoo, 1966). A partir de 1922, la zone déclarée contaminée s’est élargie progressivement vers la région Itasy, au Nord au lac Alaotra, à l’ouest à Tsiroanomandidy et au Sud à Ambalavao (Fig.5). Toujours sur les hauts plateaux, une autre zone au Nord dans le massif de Tsaratanàna a été aussi touchée par la peste (Fig.5) (Chanteau, 2006). Ces zones constituent aujourd’hui les foyers naturels de la peste dans des hautes terres malgaches. Ces foyers, plus frais et situés dans les zones de montagne se trouvent au-dessus de 800 m d’altitude, de degré hygrométrique de 85% à 95% et de température moyenne autour de 25°C (Abbott, 2012). La réapparition de la peste dans la capitale en 2014, 20 ans après le dernier cas en 1991 (Chanteau et al., 1998), constitue aujourd’hui un phénomène inquiétant car le risque d’épidémie dans cette zone d’importante concentration humaine est élevée (Boisier et al,. 2002).

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Table des matières

A. Introduction générale
B. Généralités
I- Rappels sur la Peste
1. La peste dans le monde
2. La peste à Madagascar
3. Lutte contre la transmission de la Peste
II- Le fipronil
1. Propriété physico-chimique
2. Les produits de métabolisation du fipronil
3. Utilisation
4. Contexte général d’utilisation d’insecticide systémique
C. Matériel et Méthodes
1. Modèles biologiques
2. Test de sensibilité des puces de la souche d’Amparaky au fipronil en tube OMS
2.1 Principe
2.2 Matériels
2.3 Méthodologies
2.4 Analyse des données
3. Test de toxicité aigüe du fipronil par gorgement des puces de la souche de Tsararano Ambony sur les espèces de Rattus
3.1 Principe
3.2 Matériels
3.3 Méthodologies
3.5 Protocole expérimental
3.6 Analyse des données
4. Test de toxicité aigue du fipronil par gorgement artificiel des puces de la souche d’Amparaky
4.1 Principe
4.2 Matériels
4.3 Méthodologies
4.4 Protocol expérimental
4.5 Analyse des données
5. Détection des états de gorgement des puces de la souche de Tsararano Ambony par ELISA Repas Sanguin
5.1 Principe
5.2 Matériels
5.3 Méthodologies
5.4 Protocole expérimental
5.5 Analyse de données
D. Résultats
1. Test de sensibilité sur papier imprégné selon le protocole OMS
2. Test de toxicité aigüe du fipronil par gorgement des puces sur les espèces de Rattus
3. Test de toxicité aigüe du fipronil par gorgement artificiel des puces
4. Récapitulation des valeurs de DL50 et DL90 calculés suivants les différents tests effectués
5. Détection des états de gorgement des puces par la technique ELISA
E. Discussions
1. Limite de la méthode OMS pour tester un insecticide systémique
2. Efficacité du fipronil pour contrôler Xenopsylla cheopis par traitement oral de Rattus sp
3. Efficacité du dispositif adopté pour le test de toxicité aigüe par gorgement sur les espèces de Rattus
4. Méthode gorgement artificiel
5. Test ELISA pour la détection de l’état de gorgement des puces
6. Les avantages et limites de l’utilisation des insecticides systémiques
F. Conclusion

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