LA PERTE D’ENERGIE DES PARTICULES LOURDES CHARGEES DANS LA MATIERE

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La décroissance alpha

Certains noyaux, particulièrement les plus lourds, vont émettre un noyau He2+ lors de leur décroissance, c’est la décroissance alpha. Ce noyau He2+, composé de 2 protons et de 2 neutrons, va être émis avec une certaine énergie cinétique dépendant des caractéristiques du noyau initial émetteur et du noyau fils.
Avec X le noyau radioactif émetteur alpha, sa décroissance peut s’écrire comme (1.1) où Y est le noyau résultant de cette émission. Le noyau Y est appelé noyau fils et X le noyau père. ZAX → Z−A−24Y + 24He (1.1)
Les particules alpha sont émises avec une énergie de l’ordre de plusieurs MeV. Cependant, compte tenu de sa charge, doublement positivement, la particule alpha va être très peu pénétrante et va rapidement déposer toute son énergie dans la matière. Typiquement, une feuille de papier ou la couche externe de la peau suffit pour l’arrêter. Ce fort dépôt d’énergie sur une distance courte (quelques dizaines de µm dans l’eau) peut être particulièrement destructeur sur des cellules.

La décroissance bêta et la capture électronique

La décroissance bêta concerne les noyaux radioactifs capables de transformer un neutron en proton ou inversement. Cette décroissance laisse invariant le nombre de nucléons, décroissance isobare. La décroissance bêta est différenciée suivant l’émission d’un électron ou d’un positon et est appelée respectivement bêta- et bêta+.

La décroissance bêta –

Dans le cas de la décroissance bêta-, le neutron est transformé en proton. Ce mécanisme s’applique pour les noyaux riches en neutrons. Pour conserver le nombre de charges, un électron est expulsé du noyau et est accompagné de l’émission d’un antineutrino pour conserver le nombre leptonique. La réaction associée à ce mécanisme peut s’écrire sous la forme : AX → AY + e− +   ̅ (1.2)
La différence d’énergie entre le noyau père et le noyau fils va être répartie entre l’électron et l’antineutrino sous forme d’énergie cinétique. Le partage variant d’une désintégration à l’autre, nous avons une distribution continue en énergie des électrons émis. L’énergie cinétique des électrons émis peut varier de quelques dizaines de keV à plusieurs MeV. Compte tenu de leur charge -1 et de leur faible masse, les électrons ont un grand parcours dans les tissus (jusqu’à quelques mm). En termes de radioprotection, une couche d’aluminium de quelques millimètres permet de s’en prémunir.
La décroissance bêta +
Cette décroissance correspond à la transformation d’un proton en neutron via l’émission d’un positon, l’antiparticule de l’électron, et d’un neutrino. Cette décroissance s’écrit sous la forme : AX → AY + e+ +ZZ−1 (1.3)
La différence d’énergie entre le noyau père et le noyau fils va être répartie entre le positon et le neutrino sous forme d’énergie cinétique. Le partage variant d’une désintégration à l’autre, nous avons une distribution continue en énergie des positons émis. Le positon émis va très rapidement perdre son énergie dans la matière puis s’annihiler avec un électron du milieu donnant naissance à deux photons gamma de 511 keV émis dans des directions opposées.
La capture électronique
La capture électronique est un mécanisme de décroissance qui est en compétition avec la décroissance bêta+. Ces deux modes de désintégrations sont observés pour des noyaux possédant un excès de protons. Ils partent du même noyau père et arrivent sur le même noyau fils. La capture électronique transforme un proton en neutron, elle s’écrit sous la forme : AX + e− → AY + ZZ−1(1.4)
Une lacune est créée dans le cortège électronique qui va se combler via l’émission de rayons X ou l’émission d’électrons Auger. Le noyau fils peut être dans un état excité à l’issue de la capture électronique et il va descendre vers l’état fondamental par transition interne ou par conversion interne.
Les radionucléides en médecine
Les émissions de photons
Le photon peut être un corpuscule élémentaire ou quantum d’énergie associé à une onde électromagnétique. Sur la figure 1.1 est présenté le spectre des ondes électromagnétiques couvrant un domaine de longueurs d’ondes allant des rayons gamma aux ondes radio. Le domaine du visible allant de 400 nm à 800 nm est agrandi sur la figure. L’énergie des rayons X varie de l’eV à quelques dizaines de keV et les photons gamma ont une énergie au-delà de la dizaine keV. Les photons gamma sont très pénétrant, ils interagissent peu avec la matière. En radioprotection, des couches épaisses de plomb (plusieurs centimètres) ou de béton (de l’ordre du mètre) sont utilisées pour réduire ces rayonnements.
Un noyau possédant un surplus d’énergie sous forme d’excitation interne peut l’évacuer sous forme d’émission de photons, c’est le mécanisme de la transition interne. Ces émissions accompagnent souvent les décroissances radioactives pour lesquelles le noyau fils est dans un état excité.
Les électrons de conversion interne et électrons Auger
En compétition avec l’émission de photons, un noyau possédant un surplus d’énergie sous forme d’excitation interne peut libérer cette énergie par conversion interne. L’énergie excédentaire est transférée à un électron du cortège électronique. Cet électron est alors éjecté et il est appelé électron de conversion interne.
Lorsqu’un électron est éjecté, un trou est laissé dans le cortège électronique. Un électron d’une couche supérieure va venir combler ce trou et peut, soit entrainer l’émission d’un photon X dont l’énergie correspond à la différence d’énergie de liaison entre les deux couches, soit donner cette énergie à un électron périphérique du cortège électronique ce qui lui permet d’être éjecté sous la forme d’un électron Auger, principe présenté en figure 1.2.
A chaque radiation sont associées une énergie caractéristique (keV) et une intensité (%). L’intensité correspond au nombre de rayonnements d’un type à une énergie donnée émis pour 100 désintégrations. Il arrive dans certain cas que ce chiffre soit supérieur à 100 comme par exemple pour l’émission de photons de 511 keV lors de la décroissance bêta+. La somme des probabilités d’émission des rayonnements émis peut aussi dépasser 100 % puisqu’il peut y avoir plusieurs radiations émises pour assurer le passage d’un état excité à l’état fondamental.
La classification des noyaux par leurs propriétés physiques
Les nucléides, c’est à dire les noyaux caractérisés par un nombre de protons et de neutrons, sont classés dans la charte des nucléides, présentée en figure 1.3. Sur cette figure, en ordonnée nous avons le nombre de protons et en abscisse le nombre de neutrons constituant le nucléide. Chaque carré représente un noyau. En noir, les noyaux stables présents dans la nature forment la vallée de stabilité, correspondant grossièrement à Z=N pour les noyaux légers. Les noyaux, représentés par une couleur différente du noir, sont radioactifs et vont chercher à retrouver la vallée de stabilité par décroissance. Les couleurs définissent le mode de décroissance dominant du noyau : en bleu pour la décroissance bêta+/capture électronique, rose la décroissance bêta- et jaune la décroissance alpha.
Les noyaux radioactifs vont mettre plus ou moins de temps à décroître. La grandeur physique caractérisant ce temps de décroissance est le temps de demi-vie qui correspond au temps au bout duquel une population initiale de noyaux a décru de moitié. Le temps de demi-vie est propre à chaque espèce nucléaire. Nous pouvons connaitre l’évolution de la population en utilisant l’expression de la loi de décroissance radioactive présentée en (1.5).
N(t) = N0 e−λt (1.5)
Avec λ =ln(2) (1.6)
Où N(t) est le nombre de noyaux d’un radionucléide à l’instant t, N0 est la population initiale à t = 0, λ la constante radioactive du radionucléide en s-1 donnée par l’expression (1.6) et T1/2 le temps de demi-vie en seconde.
La charte des nucléides peut aussi être représentée en utilisant un code couleur associé aux valeurs de temps de demi-vie, figure 1.4. Nous pouvons voir en noir les noyaux stables ou à durée de vie très longue. Les nucléides en périphérie ont des durées de vie extrêmement courtes (vert clair, jaune, rose…) c’est-à-dire ceux possédant un grand excès de protons ou de neutrons.
Une population de radionucléide va induire un nombre de désintégrations par seconde donné appelé « activité » et exprimé en Becquerel (Bq). La relation entre le nombre de noyaux, N, et l’activité, Act, est donnée par : Act = λ N (1.7)
Les radionucléides en médecine
Les effets des rayonnements dépendent du type de rayonnement, de la quantité d’énergie déposée par unité de masse (dose absorbée) et de l’organe. La dose absorbée a pour unité le Gray (Gy). Un Gray correspond au dépôt de 1 Joule dans un 1 kilogramme. Cette dose absorbée sera simplement appelée dose par la suite.
Les effets se classent suivant deux catégories : les effets stochastiques et les effets déterministes. Les effets déterministes sont par définition ceux se produisant de manière certaine à partir d’une dose seuil. A contrario, les effets stochastiques ne dépendent pas de la dose et arrivent de manière aléatoire.
En médecine, il est possible d’utiliser les rayonnements/particules émis lors de la décroissance des radionucléides pour effectuer un diagnostic ou un traitement, par exemple des cellules cancéreuses. Ces rayonnements/particules doivent être émis à proximité des cellules cancéreuses afin de les localiser et/ou de les détruire.
Le radiopharmaceutique
Un radiopharmaceutique est un médicament radioactif. Dans certains cas, un radionucléide possède des affinités naturelles avec le milieu et peut être utilisé seul. C’est le cas de l’iode 131I qui est utilisé sans vecteur en thérapie pour le traitement de la thyroïde. Dans la plupart des cas, le radionucléide est couplé avec un vecteur. Le vecteur possédant des affinités avec les cellules ciblées va transporter le radionucléide jusqu’à celle-ci. L’émission de rayonnements/particules va donc être concentrée sur l’organe souhaitée. Le radionucléide possède les propriétés physiques permettant son utilisation dans le domaine médical de l’imagerie ou de la thérapie et le vecteur va permettre d’acheminer le radionucléide dans la région souhaitée.
Par exemple, le 18F largement utilisé en imagerie médicale est couplé avec un analogue du glucose. Les cellules cancéreuses consommant davantage de sucre que les cellules saines vont capter une grande quantité de 18F qui sera visible à l’image.
Grâce à la vectorisation, qui s’appuie sur un mécanisme biologique particulier, nous allons obtenir une imagerie fonctionnelle par opposition aux images morphologiques qui sont obtenues avec un scanner X, IRM ou l’échographie.
L’imagerie médicale
Les photons gamma sont très pénétrants et interagissent peu avec la matière. Ils sont utilisés pour l’imagerie médicale car ils pourront traverser le patient et atteindre les détecteurs placés à proximité du patient. A partir des rayonnements collectés, une image va être construite qui fournira des informations diagnostiques précieuses pour le médecin. Il existe deux types d’imagerie nucléaire en fonction de l’énergie des photons détectés et du traitement de ces photons pour la reconstruction de l’image.
La tomographie par émission mono-photonique (TEMP)
La tomographie par émission mono-photonique, abrégée par TEMP, consiste à construire une image à partir des photons gamma d’énergie comprise entre 100 keV et 400 keV qui sont issus de la désintégration d’un radionucléide. Un détecteur tourne autour du patient et collecte les photons gamma émis. Des collimateurs sont mis devant la tête de détection permettant de fixer la direction des photons gamma collectés et de limiter la collection de photons gamma parasites. Ces rayonnements « parasitaires » peuvent venir de l’interaction des photons gamma initiaux avec le milieu impliquant la diffusion de photons gamma dans une direction non souhaitée. Les données acquises autour du patient permettent à l’aide d’un algorithme, la construction d’une image où il est possible de visualiser les sources des émissions gamma.
Le radionucléide 99mTc (6 h) est un émetteur de photons gamma de 140,5 keV à 89 %. Ce radionucléide est obtenu grâce à un générateur 99Mo/ 99mTc (66 h/6 h) [2]. Il est très utilisé en imagerie TEMP notamment pour l’évaluation du fonctionnement du cœur (fraction d’éjection ventriculaire –FEV-) [3]. Le 99mTc est le radionucléide le plus utilisé dans le monde.
La tomographie par émission de positon (TEP)
La tomographie par émission de positons (TEP) se base sur la décroissance bêta+ qui induit la création de deux photons gamma de 511 keV émis dans la même direction mais dans des sens opposés (cf. 1.2.2). Le patient est placé au centre d’une couronne de détecteurs qui vont collecter les photons gamma et sélectionner ceux détectés en coïncidence à 180°. Ainsi, une image est construite permettant de visualiser la ou les sources émettrices et donc, entre autres, les cellules ciblées par le vecteur.
Le radionucléide 18F (110 min) est un émetteur bêta+ largement utilisé en imagerie TEP grâce au FDG (analogue du glucose), il permet de visualiser les cellules qui consomment plus de sucre que la normale comme les cellules cancéreuses [4].
Le temps de demi-vie du radionucléide utilisé en imagerie doit être suffisamment long pour le produire, effectuer le radio-marquage et l’acheminer au centre médical. Mais il doit être suffisamment court pour limiter les émissions de rayonnement dans le temps afin d’éviter l’hospitalisation et l’accumulation de dose sur le personnel médical et les proches. Afin d’obtenir une image de bonne qualité, une activité minimum est nécessaire c’est-à-dire qu’il faut un certain nombre de désintégrations par seconde pendant l’acquisition de l’image. Un temps de demi-vie court permet d’administrer moins de noyaux radioactifs, d’acquérir une image de bonne qualité et de limiter la dose reçue par le patient. Typiquement, les radionucléides aux temps de demi-vie compris entre plusieurs minutes à quelques heures sont utilisés.
La thérapie
La radiothérapie interne vectorisée
La thérapie se base sur l’apport d’une dose brève, localisée et élevée permettant d’obtenir un effet déterministe maîtrisé c’est-à-dire la mort des cellules ciblées. Pour cela, les particules ionisantes peuvent être utilisées (particules alpha, électrons issus de la désintégration bêta-, électrons de conversion interne ou électrons Auger). Le radiopharmaceutique est injecté au patient, il est acheminé par la molécule vectrice sur les cellules ciblées. Le radionucléide va décroître et émettre une particule qui va déposer son énergie lors de son parcours. On parle de transfert linéique d’énergie (TLE) décrivant l’énergie transférée par une particule ionisante dans la matière par unité de distance exprimé en MeV.cm-1. En médecine, nous nous intéressons au parcours de ces particules ionisantes dans l’eau puisque le corps humain est constitué essentiellement d’eau (~65 %). Plus le TLE est élevé, plus nous nous attendons à une efficacité biologique importante c’est-à-dire une application de dose localisée et élevée. Le TLE varie en fonction du type de radiation.
Les particules alpha ont un TLE moyen dans l’eau de l’ordre de 100 keV.µm-1 correspondant à plusieurs dizaines de µm de parcours. La taille d’une cellule étant de l’ordre de quelques dizaines de µm, nous pouvons voir l’intérêt de l’utilisation des particules alpha dans le cas de cellules isolées. Il existe déjà quelques produits utilisant des émetteurs alpha. Ainsi, le 223Ra (11,4 j) est un émetteur alpha utilisé pour le traitement des métastases osseuses et du cancer métastatique de la prostate [5]. L’211At (7,2 h) en phase finale de recherche est un radionucléide très prometteur pour la thérapie [6].
Les électrons issus de la désintégration bêta- ont des énergies variables (cf. 1.2.1) et ont un TEL dans l’eau de l’ordre du keV.µm-1 ce qui correspond à un parcours de l’ordre du millimètre. Dans le cas de cellules isolées, ce genre d’émission est moins adapté mais l’est pour un amas de cellules où la dose reçue par les cellules correspond à la somme des doses déposées par les différents rayonnements via la technique de feux croisés. La technique de feux croisés est présentée figure 1.5 où les émissions bêta-représentées ne sont que celles mettant en évidence la technique. Dans la réalité, les émissions sont isotropes.
L’131I (8 j) émetteur de bêta- est utilisé dans le traitement du cancer de la thyroïde. Son émission bêta- principale avec 89,6 % d’intensité correspond à une énergie moyenne de 191,6 keV et une énergie maximum de 606,3 keV.
Les électrons Auger et de conversion interne ont des énergies fixes ce qui présente un certain avantage à leur utilisation. Les énergies des électrons de conversion interne varient de la dizaine de keV à plusieurs centaines de keV et pour les électrons Auger de quelques keV à une dizaine de keV. Les électrons de conversion interne pourraient être utilisés pour des applications similaires à celles utilisant l’émission bêta-. Un exemple est le 117mSn dont les électrons peuvent être utilisés dans le traitement des plaques vulnérables en cardiologie. Les électrons Auger ayant des parcours très faibles (< 10 µm) pourraient être utilisés mais demandent d’être acheminés dans le noyau de la cellule pour un dépôt de dose efficace. L’utilisation des électrons Auger et de conversion interne est encore en phase de recherche.
La curiethérapie
La curiethérapie consiste à venir placer des sources radioactives à proximité d’une tumeur. Cette thérapie s’applique lorsque la zone à traiter est en surface ou à proximité d’une cavité. Cette zone est analysée par une étude dosimétrique permettant de définir l’emplacement des sources radioactives. Ces sources, d’une taille s’approchant de celle d’un grain de riz, sont généralement émettrices de photons (125I -59,4 j- [7]) ou bêta-(192Ir -73,8 j- [8]) par nécessité d’avoir un long parcours.
Le temps de demi-vie des radionucléides utilisés en curiethérapie est souvent plus long que celui des isotopes qui sont utilisés en imagerie et en thérapie interne vectorisée. Par exemple, les radionucléides 213Bi (46 min), 212Pb (10,6 h), 225Ac (10 j), 211At (7,2 h), 67Cu (2,6 j) sont utilisés ou en phase de recherche pour la radiothérapie interne vectorisé et les radionucléides 131Cs (9,7 j), 125I (60 j), 103Pd (17 j), 223Ra (11,4 j), 90Y (2,7 j), 137Cs (30 a), 60Co (5,3 a) sont utilisés en curiethérapie [9], [10]. Cela est dû au fait que nous cherchons à obtenir un effet dosimétrique déterministe et que les sources sont dans certains cas placées pendant le temps nécessaire pour délivrer la dose prescrite (2 à 5 jours) puis retirées par la suite.
L’approche théranostique
Un même élément peut avoir plusieurs isotopes possédant des caractéristiques physiques permettant une utilisation pour des applications médicales. Dans le cas, où l’un d’entre eux peut être utilisé pour de l’imagerie et un autre pour une application thérapeutique, il est possible de mettre en place une approche théranostique qui couple l’utilisation de ces deux isotopes afin d’identifier les patients répondeurs à travers l’imagerie puis réaliser le traitement avec l’isotope thérapeutique. Nous pouvons parler d’une paire théranostique. Cela est rendu possible grâce au fait que ces radionucléides possèdent les mêmes propriétés chimiques ce qui permet de les coupler au même vecteur. C’est le cas pour l’yttrium avec les isotopes 86Y/90Y [11]. Le 86Y (14,7 h) est émetteur bêta+ et peut être utilisé en imagerie TEP. Le 90Y (2,7 j) est émetteur bêta- et peut avoir des applications en thérapie.
Nous pouvons avoir une approche un peu plus étendue de l’approche théranostique en couplant des isotopes qui ont de propriétés chimiques similaires sans être des isotopes du même élément. C’est par exemple le cas de la paire 68Ga/177Lu [12].
La production de radionucléides
Les radionucléides peuvent être produits par l’interaction de particules ou noyaux avec la matière (cf. chapitre 2 partie 3.2) c’est-à-dire d’un faisceau de particules et d’une cible. Le faisceau de particules apporte l’énergie nécessaire pour que la réaction nucléaire puisse avoir lieu.
La production peut être effectuée à partir de l’interaction de particules chargées avec la matière, pour cela des accélérateurs de particules sont utilisés. Il existe plusieurs types d’accélérateur : linéaire, synchrotron ou cyclotron…
Le principe de fonctionnement des accélérateurs de particules
L’accélérateur linéaire permet d’accélérer des particules chargées grâce à l’application d’un champ électrique généré par un courant alternatif. Les particules chargées vont traverser dans le vide une série de tubes. La tension appliquée aux tubes alterne entre positif et négatif. Les tubes adjacents possèdent des tensions opposées créant une différence de potentiel et donc un champ électrique entre ces tubes. Les particules acquièrent de l’énergie, composante électrique de la force de Lorentz (1.8), lorsqu’elle passe d’un tube à l’autre. Le courant alternatif synchronisé avec les particules permet d’obtenir un champ électrique « accélérateur » maximal lors du passage des particules d’un tube à un autre. L’énergie des particules en bout de ligne dépend de la longueur de l’accélérateur linéaire et du champ électrique appliqué.
Le cyclotron est un accélérateur circulaire constitué d’électro-aimants, les « Dees », dans lesquels le champ magnétique est fixe au cours du temps. Les premiers cyclotrons possédaient deux « Dees » ayant la forme de demi-disques. Un courant alternatif, appliqué sur des électrodes placées entre les « Dees », accélère les particules lors de chaque passage entre les électrodes (composante électrique de la force de Lorentz (1.8)). A l’intérieur des « Dees », le champ magnétique va dévier les particules et la trajectoire va correspondre à un demi-cercle permettant de faire faire un demi-tour à la particule. La particule va alors re-subir une accélération entre les deux aimants. La vitesse variant d’un passage de « Dee » à l’autre, la particule va avoir un rayon de courbure de plus en plus grand (1.9) ce qui entraine une trajectoire en forme de spirale. Une fois l’énergie souhaitée atteinte, la particule doit être extraite pour être guidée jusqu’à la cible. La méthode d’extraction dépend du signe de la charge de la particule accélérée :
• Si la particule accélérée a une charge négative, nous utiliserons une feuille de « stripper » pour extraire la particule. En passant dans la feuille, les électrons sont arrachés de la particule qui se trouve alors avec une charge de signe positif. L’effet du champ magnétique sur la particule va faire sortir la particule de la machine. Le rendement de cette technique est proche de 100 % mais tous les ions ne peuvent pas être chargés négativement.
• Si la particule accélérée a une charge positive, nous utilisons un septum électrostatique. Le rendement est de l’ordre de 70 %. Cette technique peut être appliquée à tous les ions.Le synchrotron comme le cyclotron est circulaire et fonctionne sur les mêmes principes. La différence est que le synchrotron va adapter le champ magnétique de façon à garder le même rayon de courbure tout au long de l’accélération. Plus on est capable d’appliquer un champ magnétique élevé plus il est possible d’accélérer les particules. ⃗ ⃗ ⃗ (1.8) F = q (E + ⃗v  B) R =m v(1.9)
Où q est la charge de la particule, ⃗E le champ électrique, v la vitesse de la particule, ⃗B le champ magnétique, R le rayon de courbure et m la masse de la particule.
Les voies non-conventionnelles de production
Les voies usuelles de production des radionucléides utilisés dans des applications médicales sont celles mettant en jeu des protons de 20 MeV ou des flux de neutrons. Les flux de neutrons sont délivrés par des réacteurs comme par exemple le HFR (Pays bas), Br-2 (Belgique), OPAL (Australie), Safari-1 (Afrique du sud), etc. Les principaux radionucléides produits par les voies neutroniques sont le 99Mo, le 177Lu et le 131I. Pour la production du 18F, ce sont des accélérateurs de protons (20 MeV) qui sont utilisés. Dû à son court temps de demi-vie du 18F (110 min), ces accélérateurs sont généralement placés à proximité ou dans les centres hospitaliers afin de limiter le temps d’acheminement.
Les voies non-conventionnelles sont celles ne s’inscrivant pas dans les précédentes. Elles peuvent mettre en jeu des protons de haute énergie ou d’autres particules chargées comme des particules alphas, des deutons… Des flux de neutrons générés indirectement par des accélérateurs peuvent également être utilisés pour la production de radionucléides d’intérêt. D’autres voies comme la fission de certains noyaux, l’utilisation d’ions lourds ou de photons constituent des voies de productions non-conventionnelles.
L’objectif des études de cette thèse est d’explorer des voies de production non-conventionnelles. Pour cela, des expériences, effectuées durant la thèse, ont été réalisées avec le cyclotron C70 du GIP ARRONAX qui possède les caractéristiques données dans le tableau 1.2. Avec cette diversité des particules pouvant être extraites et les énergies disponibles, ce cyclotron, hors du commun, permet d’accéder à une large gamme de réactions et d’étudier des voies de production non conventionnelles. Ces voies de production non–conventionnelles permettent d’avoir un plus grand éventail de réactions, d’accéder à une plus large gamme de cibles et potentiellement à des taux de production du radionucléide d’intérêt plus élevés.

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Table des matières

CHAPITRE I. LES RADIONUCLEIDES EN MEDECINE
1. LA RADIOACTIVITE
1.1. LA DECROISSANCE ALPHA
1.2. LA DECROISSANCE BETA ET LA CAPTURE ELECTRONIQUE
1.2.1. La décroissance bêta –
1.2.2. La décroissance bêta +
1.2.3. La capture électronique
1.3. LES EMISSIONS DE PHOTONS
1.4. LES ELECTRONS DE CONVERSION INTERNE ET ELECTRONS AUGER
2. LA CLASSIFICATION DES NOYAUX PAR LEURS PROPRIETES PHYSIQUES
3. LES RADIONUCLEIDES EN MEDECINE
3.1. LE RADIOPHARMACEUTIQUE
3.2. L’IMAGERIE MEDICALE
3.2.1. La tomographie par émission mono-photonique (TEMP)
3.2.2. La tomographie par émission de positon (TEP)
3.3. LA THERAPIE
3.3.1. La radiothérapie interne vectorisée
3.3.2. La curiethérapie
3.3.3. L’approche théranostique
4. LA PRODUCTION DE RADIONUCLEIDES
4.1. LE PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT DES ACCELERATEURS DE PARTICULES
4.2. LES VOIES NON-CONVENTIONNELLES DE PRODUCTION
CHAPITRE II. LA MESURE DE SECTION EFFICACE : MATERIEL ET METHODE
1. LA SECTION EFFICACE, CALCUL DANS LE CAS DE CIBLES MINCES ET EPAISSES
1.1. LA NOTION DE SECTION EFFICACE
1.2. LA FORMULE D’ACTIVATION POUR DES CIBLES EPAISSES
1.3. LA FORMULE D’ACTIVATION POUR DES CIBLES MINCES
2. LA TECHNIQUE DES « STACKED FOILS »
3. LA PERTE D’ENERGIE DES PARTICULES LOURDES CHARGEES DANS LA MATIERE
4. LA MESURE DE L’EPAISSEUR DES CIBLES
5. LA MESURE D’ACTIVITE A L’AIDE D’UN SPECTROMETRE GAMMA
5.1. LE SPECTROMETRE GAMMA
5.2. LES INTERACTIONS PHOTON/MATIERE
5.2.1. L’effet photoélectrique
5.2.2. La diffusion Compton
5.2.3. La création de paires
5.2.4. Les processus sur un spectre gamma
5.3. L’ACQUISITION DE DONNEES
5.3.1. L’étalonnage en énergie du détecteur
5.3.2. L’étalonnage en efficacité du détecteur
5.3.3. L’acquisition de spectres dans la pratique
5.4. L’ANALYSE DES SPECTRES
5.4.1. Le calcul d’activité à partir d’une émission gamma
5.4.2. Le calcul d’activité lorsque plusieurs émissions gamma entre en jeu
6. LA DETERMINATION DE L’ENERGIE SEUIL DE REACTION
7. LA NOTION D’ACTIVITE SPECIFIQUE
8. L’ESTIMATION DE L’ACTIVITE PRODUITE PAR LE CALCUL DE RENDEMENT EN CIBLE EPAISSE
9. LA DETERMINATION DE SECTIONS EFFICACES A TRAVERS L’OUTIL TALYS
10. CONCLUSION SUR LE CHAPITRE
CHAPITRE III. LA MESURE DE COURANT
1. LA MESURE DE COURANT PAR LES REACTIONS MONITEURS
1.1. LA REACTION MONITEUR
1.2. LE CALCUL DE SECTION EFFICACE
1.3. L’INCERTITUDE DE LA METHODE RELATIVE
2. LA MESURE DE COURANT A L’AIDE DE LA « FARADAY CUP »
2.1. LA MESURE DU FLUX DE PARTICULES AVEC UNE « FARADAY CUP »
2.2. LE DISPOSITIF EXPERIMENTAL
2.3. ETUDE DE LA MESURE DE COURANT
2.3.1. La réponse du dispositif à un courant donné
2.3.2. Les expériences d’étude de la mesure de courant à l’aide de la « Faraday cup »
2.4. LA VALIDATION DU DISPOSITIF DE MESURE DE COURANT AVEC LA FARADAY A TRAVERS LES COURBES DE SECTION EFFICACE DITES DE REFERENCE.
2.4.1. Une réaction moniteur avec des protons
2.4.2. Une réaction moniteur avec des deutons
2.4.3. Une réaction moniteur avec des particules alpha
3. LES CONCLUSIONS DU CHAPITRE
CHAPITRE IV. LA PRODUCTION DU 197MHG SUR DE L’OR AVEC UN FAISCEAU DE DEUTONS
1. LE RADIONUCLEIDE 197MHG
1.1. L’INTERET DU 197MHG
1.2. LES VOIES DE PRODUCTION DU 197MHG
1.2.1. Les voies de production avec des protons
1.2.2. Les voies de production avec des particules alpha
1.2.3. Les voies de production avec des deutons
2. LES MESURES DE SECTIONS EFFICACES DE PRODUCTION 197AU(D,X)197MHG
2.1. LES EXPERIENCES « STACKED FOILS »
2.2. LA DETERMINATION DES POINTS DE MESURES EN ENERGIE
2.3. LA MESURE D’ACTIVITE DES FEUILLES IRRADIEES
2.4. LA MESURE D’ACTIVITE DU 48V
2.5. LE CALCUL DE LA SECTION EFFICACE DES NOYAUX A L’ETAT FONDAMENTAL
3. LES RESULTATS
3.1. LA REACTION MONITEUR : NATTI(D,X) 48V
3.2. LES REACTIONS D’INTERET : 197AU(D,2N) 197GHG & 197MHG
3.3. LA PRODUCTION DE CONTAMINANTS
3.3.1. Le radionucléide 195mHg
3.3.2. Le radionucléide 196m2Au
3.3.3. Les radionucléides 196gAu & 196m1Au
3.3.4. Le radionucléide 198mAu
3.3.5. Le radionucléide 198gAu
3.4. L’ESTIMATION DE L’ACTIVITE PRODUITE EN CIBLE EPAISSE
4. CONCLUSION DU CHAPITRE
CHAPITRE V. LA PRODUCTION DE 67CU SUR UNE CIBLE ENRICHIE EN 70ZN
1. LE RADIONUCLEIDE 67CU
1.1. L’INTERET DU 67CU
1.2. LES VOIES DE PRODUCTION DU 67CU
1.2.1. Les voies de production avec des protons
1.2.2. Les voies de production avec des particules alpha
1.2.3. Les voies de production avec des deutons
2. LES MESURES DE SECTIONS EFFICACES DE PRODUCTION 70ZN(D,X)67CU
2.1. LA FABRICATION DES CIBLES
2.2. LES EXPERIENCES DE « STACKED FOILS »
2.2.1. Les irradiations
2.2.2. La détermination des points de mesure en énergie
2.2.3. La mesure d’activité des feuilles irradiées
2.2.4. L’extraction des valeurs de sections efficace du 67Cu et prise en compte de la pollution de 67Ga
2.2.5. La mesure d’activité du 48V
3. LES RESULTATS
3.1. LA REACTION D’INTERET 70ZN(D,X) 67CU
3.2. LA PRODUCTION DE CONTAMINANTS
3.2.1. Le radionucléide 67Ga
3.2.2. Le radionucléide 61Cu
3.2.3. Le radionucléide 66Ni
3.3. L’ESTIMATION DE L’ACTIVITE PRODUITE EN CIBLE EPAISSE
4. CONCLUSIONS DU CHAPITRE
CHAPITRE VI. ETUDE DE LA VALORISATION DES PRODUITS DE FISSION
CONCLUSION ET PERSPECTIVES .

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