LA NOTION DU MOI
Tous les philosophes ont, chacun, l’élaboration d’une pensée résultant d’un examen des actes ou des faits par un retour sur soi-même. Des analyses sur les vocabulaires, les termes et les notions spécifiques qui leur sont propres.
Chez Emmanuel Lévinas, la pensée s’accentue profondément sur la réflexion des expériences vécues, liées à son temps où tout était en désordre. Cela nous fait penser aux massacres et aux atrocités perpétrées par les nazis. Il voulait, surtout, redonner valeur à l’être humain d’avoir perdu son statut. C’est pour cette raison que l’auteur de l’Humanisme de l’autre homme, Lévinas, voulait protéger l’être humain en lui donnant l’importance capitale par rapport à soi. C’est justement en cela que sa pensée peut être considérée comme étant une défense et une restructuration de la subjectivité.
Il faut comprendre aussi que ces concepts capitaux de Lévinas ont, en effet, une partie de restructuration subjective comme nous l’avons déjà annoncé dans les lignes précédentes relatant des faits démonstratifs ou une réflexion sur un concept ou quelque chose d’autre. D’ailleurs, il est à noter que l’altérité n’est possible qu’à partir du moi. Parmi tant d’autres, nous pouvons citer le concept qui explique l’impersonnalité, l’anonymat de l’être ou encore le moi plongé dans une totalité. Dans ce concept, l’auteur parle de l’expérience d’un coquillage. Il emploie souvent le terme de « l’il y a ou le non sens » ou encore un autre terme qui montre une structure ou une modalité selon laquelle s’accomplit le rapport au monde de la subjectivité sensible et corporelle. Autrement dit, cette dernière phrase peut se résumer selon Lévinas par le concept de la jouissance.
LE MÊME
Etymologiquement, le même exprime une identité ou parité. Il est expressément la personne ou l’objet dont on parle, en bref, l’être en général. Le même se laisse essentiellement entendre ici comme une représentation de soi-même ou à soi-même.
Approche biographique de la pensée d’Emmanuel Lévinas
Né le 30 décembre 1905 dans une Lituanie encore Russe, à Kovno, dans une famille juive, Emmanuel Lévinas est l’une des figures centrales de la pensée contemporaine. Toutefois, nous faisons la remarque que la naissance de Lévinas est mentionnée de deux différentes façons dans ses ouvrages et articles, à Kaunas en Lituanie le 30 décembre 1905 selon le calendrier julien en vigueur alors que dans l’empire russe, c’est le 12 janvier 1906 selon le calendrier grégorien. Il est né d’un père libraire, Jehiel Levyne Lévinas et de Déborah Gurvic. Emmanuel Lévinas est l’aîné d’une famille de trois enfants dont Boris né en 1909 et Aminadab née en 1913. Toute sa famille parle la langue russe à la maison. Toutefois, à cette époque un maître particulier leur enseigne l’hébreu qui est devenu aujourd’hui la langue d’Israël. Emmanuel Lévinas est le premier dans la famille qui a lu, de très tôt, la Bible ainsi que quelques auteurs russes comme Dostoïevski, Pouchkine etc.
Après ses études, en 1914, à la déclaration de la première guerre mondiale, sa famille fuit l’avancée des armées allemandes. En 1915, il s’est installé longuement en Russie à Karkhov, là où il a suivi ses études scolaires. Ce n’est qu’en 1920, après les premières manifestations menaçantes révolutionnaires bolcheviques contre les juifs, que Lévinas retourne en Lituanie. Après tout ce temps là, Emmanuel Lévinas s’est décidé, en 1923, d’émigrer en France pour s’inscrire à l’Université de Strasbourg où il a effectué sa première réflexion sur les études de philosophie. En 1928, il s’inscrit, pour deux semestres, à l’Université de Fribourg où enseigne Edmund Husserl. E. Lévinas a été influencé par la phénoménologie de Husserl et l’ontologie de Martin Heidegger. Mais son apport propre consiste en une analyse approfondie de la signification du rapport à l’autre homme, qui apparaît comme absolument primordial. Aux yeux de Lévinas, le rôle de la philosophie n’est pas de constituer une théorie de la connaissance, ou une théorie politique, mais bien plutôt de comprendre le sens de la relation à autrui, comme originaire et fondatrice de toute autre relation à l’être. L’essentiel est d’être capable de respecter l’altérité d’autrui, et non plus de tenter de la résorber dans l’identité du même. C’est à partir du concept et du système de catégories que le philosophe croit pouvoir comprendre le monde dans la totalité de ses aspects.
A un moment donné, Husserl interrompt son enseignement pour se consacrer à la mise au point de ses œuvres ; quant à Emmanuel Lévinas, il s’inscrit dans les cours de Martin Heidegger. Il participe aux célèbres colloques de Davos où se rencontrent Casier et Heidegger. En 1930, il soutient sa thèse de doctorat sur la notion de « Théorie de l’intuition dans la phénoménologie de Husserl. » Emmanuel Lévinas est le premier à prendre l’initiative d’introduire en France la pensée d’Edmund Husserl et celle de Martin Heidegger. La même année, il s’est installé à Paris et est naturalisé Français. Il s’est aussi inscrit à la Sorbonne pour suivre les cours de Léon Brunschvicg. C’est là qu’il a rencontré Jean Wahl et Gabriel Marcel.
Au temps du nazisme, il accomplit son service militaire. Fait prisonnier et envoyé en captivité en Allemagne, il est protégé, quoique juif, par le statut de prisonnier de guerre. Toute sa famille est massacrée par les nazis ; toutefois, sa femme et sa fille se sont enfuies pour se réfugier près d’Orléans, chez les sœurs de Saint Vincent de Paul. La publication de ses écrits lui a ouvert les portes de l’Université et apporté la notoriété surtout sa thèse d’Etat, Totalité et infini publiée en 1961. Cette même année, il est nommé professeur à l’université de Poitiers, ensuite à la Sorbonne, de 1973 à 1976. Enfin, il part à la retraite effective en 1979. Emmanuel Lévinas meurt le 24 décembre 1995 à l’âge de quatre vingt dix ans. Paix à son âme.
« L’IL Y A » OU LE NON SENS
Partir du concept de « l’il y a » ou du non sens de Lévinas, sans un aperçu général sur l’être, nous paraît difficile pour la compréhension de cette notion. Toutefois, l’être que nous allons étudier, dans notre analyse, sera l’être dans la conception de Martin Heidegger. Il est le philosophe dont la pensée sur l’être se rapproche un peu de ce que nous voulons montrer sur « l’il y a » de Lévinas. En effet, il est question de souligner ce que c’est que l’être dans la philosophie de Heidegger. C’est d’ailleurs cette notion qui a beaucoup préoccupé Heidegger dès le départ de sa philosophie. Cette notion de l’être est, bel et bien, expliquée dans son ouvrage intitulé : De l’existence à l’existant qui est d’abord une existence, une essence, la nature d’une chose ou d’une personne. Nous voulons faire la remarque dès maintenant que l’être désigne ce qui est réel et absolu. Donc selon Heidegger, l’être est une réalité simple et déterminée par le temps.
Nous remarquons par là que l’être est un concept général qui ne désigne ni ceci ni cela car il est quelque chose d’indéfinissable et d’indéterminé. C’est dans cette perspective que nous pouvons souligner ici que l’être est ce qui permet à l’étant d’être ce qu’il est. Il ne peut pas y avoir d’existence de l’être sans la présence de l’étant. Il y va de même que l’étant ne peut pas être sans l’être.
Ce qu’on entend par étant, c’est ce que nous avons déjà vu dans les lignes précédentes, c’est-à-dire que Heidegger fait une nette distinction entre l’être et l’étant. L’être ne se définit pas. Il n’existe pas comme une entité de fait, pourtant il est à l’horizon de l’étant. L’étant chez Heidegger, c’est alors tout ce qui existe concrètement, réellement, visiblement, et d’une manière palpable ; il est le monde, l’homme, les objets et même Dieu. A la différence des autres étants, l’homme est capable de raisonner sur le monde, de s’y arracher, de dire ce qui n’est pas. Donc l’étant peut être une banalité d’êtres.
« Est étant tout ce dont nous parlons, tout ce que nous pensons, tout ce à l’égard de quoi nous nous comportons de telle ou telle façon, ce que nous sommes et comment nous sommes : c’est encore l’étant. » souligne Heidegger.
C’est de cela que Heidegger, lorsqu’ il se pose la question « que suis-je ? » il répond dans Sein und Zeit par « on le sait ». Heidegger répond toujours qu’il n’est pas ce qu’il est car il n’est pas ordinairement lui-même, dans la mesure où il est toujours et avant tout « On » qui se rapproche bien évidemment du concept de « l’il y a » de Lévinas. Qui est alors ce « On » qui ne désigne personne ? En ce sens, le « On » qui est un pronom neutre, a rapport à la majorité, à la totalité, l’être en général ou l’étant même. Alors, le terme étant est tout ce qui est visible, sensible, pensable, dicible, tout ce qui est plongé dans la totalité d’une manière ou d’une autre dans la conscience de l’homme mais d’une manière aussi indéterminée.
C’est pour cela que la philosophie moderne s’emploie à témoigner et à mettre en lumière le courant philosophique; presque toutes les figures de la fondation de la philosophie moderne et les philosophes de la totalité se divergent. Les philosophes de la totalité veulent totaliser dans une impersonnalité inadmissible la valeur de l’être comme étant. C’est justement dans cette perspective que l’être de l’étant se rapproche de « l’il y a » de Lévinas. Chez Emmanuel Lévinas, l’être connu par la philosophie occidentale relève du monde de « l’il y a ». Dans le Vocabulaire de Lévinas la notion de « l’il y a » est le pur fait d’être, le pur événement d’être, abstraction faite des choses qui sont des étants. L’auteur souligne encore dans ce livre que s’il a choisi de désigner l’être distinct de l’étant par l’expression « l’il y a », c’est afin, d’une part, de souligner que c’est le pur fait d’être qui se produit, et non telle ou telle chose, d’autre part d’insister sur le caractère impersonnel de l’être : « c’est impersonnel comme « il pleut » ou « il fait chaud » » .
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : LA NOTION DU MOI
INTRODUCTION PARTIELLE
CHAPITRE I : LE MÊME
I- Approche biographique de la pensée
II. – « L’IL Y A » OU LE NON SENS
CHAPITRE II : LA NAISSANCE DU MOI
I. – LA JOUISSANCE
II. – LA DEMEURE ET LE FEMININ
1. – Que représente la notion du féminin dans la conception lévinassienne ?
2.- Analyse du féminin dans l’érotique
III. – DESIR DE L’INFINI
1. – Qu’est-ce qu’alors le désir ?
2. – La conception sur l’idée de l’infini
3. – Désir métaphysique
CONCLUSION PARTIELLE
DEUXIEME PARTIE : LA RELATION A AUTRUI
INTRODUCTION PARTIELLE
CHAPITRE I : LA SIGNIFICATION DU VISAGE
I.- L’ACCUEIL DU VISAGE
1. – Qu’est-ce qu’on entend alors par visage chez Levinas ?
2. – Idée de l’accueil de l’autre en tant que visage
II – VISAGE ET COMMANDEMENT
1. – Qu’est-ce que le commandement chez Levinas ?
2. – Le commandement comme responsabilité réalisable de l’autre homme
CHAPITRE II : L’ALTERITE, RESPONSABILITE POUR L’AUTRE
I.- REPONDRE A AUTRUI
II.- L’ELECTION
1. – L’élection : la responsabilité pour autrui
CONCLUSION PARTIELLE
CONCLUSION GENERALE
I-OUVRAGE D’EMMANUEL LEVINAS
II- OUVRAGES SUR EMMANUEL LEVINAS
III-AUTRES OUVRAGES CONSULTES
IV-REVUES, ARTICLES ET ENTRETIENS
V-DICTIONNAIRES
VI-SITES INTERNET