LA NOTION D’ « INCONSCIENT » ENTRE APPROCHES PSYCHANALYTIQUES ET PHILOSOPHIQUES

La découverte de l’inconscient avant l’avènement de Freud et de la psychanalyse

   Il est important de souligner que nous employons l’expression « découverte de l’inconscient » non pas au sens de découverte scientifique confirmée par des preuves méthodiques, mais il s’agit bien de préciser sur ce qui, jusque-là était inconnu dans une culture donnée. La découverte de l’inconscient a été le résultat d’une diffusion de cette lumière intellectuelle que Descartes avait fait converger trop exclusivement sur un point. Cette découverte était inutile avant lui : c’est le prestige des idées cartésiennes qui a fait naitre le « problème de l’inconscient ». Par ailleurs, dans toute culture, il y eu probablement des hommes qui savaient que des facteurs dont nous ne sommes pas directement conscients exercent une influence considérable sur la pensée et le comportement. Et il est certain que dans la Grèce antique, à Rome et à travers le Moyen Age, de nombreux penseurs, certains de grandes autorités, ont su éviter cette erreur égocentrique qui consiste à traiter la conscience individuelle comme un fait premier dans le domaine axiologique ou philosophique. Pour ces penseurs, les expériences immédiates d’un individu dépendaient d’autres principes, divins ou matériels, qui dans une certaine mesure commandaient le destin de l’individu et exerçaient une influence sur sa conscience. D’ailleurs, c’est ce que semble bien attestaient ces propos : Les sources vivent de la natures humaine sont à chercher dans l’inconscient, car l’inconscient relie l’individuel à l’universel, ou du moins organique. Ceci est juste, qu’on y voie une union de l’âme avec le divin, ou ce qui relie les instants de conscience de l’homme à l’arrière-plan des processus organiques dont ils surgissent. […] Nous participons tous inconsciemment à une cette aventure à chaque instant de notre vie. Car dans toutes nos activités, qu’il s’agissent des travaux ménagers, du bureau, de l’usine ou des recherches intellectuelles, interviennent des facteurs de bases « physiques » et « psychiques » identiques à ceux qui ont guidé le développement de l’esprit de nos plus lointains ancêtres. Ce qui modèle mes pensées et les vôtres en ce moment même a modelé de même les toutes premières pensées de l’ « Homo sapiens ». » Il faut bien comprendre que nos idées ne sont pas que des inférences conscientes tirées de l’expérience, mais une mise en ordre de l’expérience, accomplie en grande partie inconsciemment. La conscience est certes, une chose très importante, mais nous ne savons pas encore dans quel domaine ni pour quelle raison. Cette aventure est l’histoire, qui se poursuit en chacun de nous actuellement, de la réalisation progressive de certaines de ces virtualités, grâce à l’interaction d’individus doués d’imagination qui modèlent des pensées neuves et d’une tradition qui conserve et préserve ce qui parait précieux. Dans la culture grecque classique, les sophistes parlaient d’un mouvement originaire de manière inerte, laquelle grâce à la transformation physique deviendra vitale. Platon refuse ce point de vue en signalant que la vie est la cause primaire du mouvement de la matière. Au sens large, le terme grec kinesis (mouvement ou plutôt en rapport avec l’activité motrice) inclut l’idée de transformation et de changement de chaque chose. Ce qui cause le mouvement est à son tour mu par un autre. La cause originaire est celle qui peut communiquer le mouvement parce qu’elle a en soi la source du mouvement. Pour Platon par exemple, l’homme est formé de soma (corps) et de psyché (esprit), et d’après lui, la cause primaire est la psyché, principe de vie. Toujours dans cette logique en revenant à une phénoménologie du monde interne, Jean François Marmion nous montre que Mélanie Klein restitue une image dynamique ou cinétique de la multiplicité et de la diversité qui habite l’espace mental. En effet il dit : « Le concept de relation d’objet est pour moi une version intériorisée et transformée du monde rationnel qui trouve sa forme mentale dans l’inconscient de l’individu. » En plus, concernant le rapport entre psyché et soma, l’inconscient n’est pas seulement psychique, mais il est matière vivante, et le corps est son masque. Et c’est dans cette mesure qu’Aristote affirmait que le corps est un signe (sema) de l’existence de l’âme. De même, Saint Thomas d’Aquin (1224-1274) a élaboré une théorie systématique de l’esprit, soulignant notamment l’unité de l’âme et du corps, et de nombreuses fois l’importance de ce qui en nous est inconscient. Notamment, il a écrit : « je ne peux considérer mon âme en dehors de ses actes. Il y a donc dans l’âme des processus dont nous ne sommes pas immédiatement conscients. ». Et ce trait de la pensée mystique se retrouve tout au long des siècles jusqu’à Jacob Boehme, Schelling, Schopenhauer et Nietzsche, et son rôle a été grand dans l’histoire de l’idée d’inconscient. Paracelse (1493-1541), un médecin suisse, marque par ses idées une transition de l’attitude mystique à l’attitude scientifique. D’ailleurs, un grand nombre de ses conceptions supposent l’existence d’influences, biologiques et spirituelles en même temps, qui guident l’homme et dont il est rarement conscient. C’est pourquoi Carl Gustave Jung écrit : « De toutes les intuitions de Paracelse, celle de « l’Aquaster » est la plus proche de la conception moderne de l’Inconscient. » . Pour Paracelse, l’imagination est un pouvoir créateur qui prime toutes les autres facultés. Toutefois, il ne faut pas oublier Pascal (1623-1662). Certes, certains textes de ses Pensées (1669) ne sont pas établis avec certitude, et les termes qu’il emploie, en raison même de leur acuité, sont difficilement traduisibles. Cependant, il n’est pas douteux qu’il a su pénétrer bien souvent le secret de ce qui se cache derrière la raison consciente. Pour lui « le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas »21 et il était persuadé que derrière la raison consciente se cachait un grand secret. Il emploie ainsi le terme « cœur » pour désigner les profondeurs obscures de la nature humaine, le siège du savoir véritable et de la volonté. C’est ainsi qu’il pense qu’: Il ne faut pas se méconnaître : nous sommes automates autant qu’esprit ; et de là vient que l’instrument par lequel la persuasion se fait n’est pas la seule démonstration. Combien y a-t-il peu de choses démontrées ! Les preuves ne convainquent que l’esprit. La coutume fait nos preuves les plus fortes et les plus crues ; elle incline l’automate, qui entraîne l’esprit sans qu’il y pense. Baruech Spinoza (1632-1677) avait le sentiment aigu que l’individu était une partie de la nature. Il a souligné l’importance d’une mémoire inconsciente et de mobiles inconscients dans l’édification d’une personnalité inconsciente. Il a insisté par la suite sur la nécessité d’une connaissance de soi objective qui pénètre en profondeur sous le ressentiment et les conflits : « Les hommes se croient libres parce qu’ils ont conscience de leurs volitions et de leur appétit, et qu’ils ne penchent pas, même en rêve, aux causes qui les disposent à désirer et à vouloir, parce qu’ils les ignorent. ».John Norris (1632-1704), un Platonicien anglais, a affirmait déjà en 1690 que : « Nous pouvons avoir des idées dont nous ne sommes pas conscients. (…) Il y a infiniment plus idées imprimées dans notre esprit que celle que nous pouvons examiner ou percevoir. (…) Des idées peuvent s’imprimer à nous sans que nous n’en ayons aucune perception réelle. » Le véritable mystère réside peut-être dans le fait que Platon et ses disciples aient pu avoir tant d’intuitions justes, et les sciences exactes obtenir tant de résultats, sans que l’on parvienne cependant à identifier cette instance formatrice.

L’inconscient avec l’avènement de Freud et la psychanalyse

   L’on pourrait comprendre par état de conscience comme le fait d’avoir la connaissance de soi, de son existence et du monde extérieur. Etre conscient c’est donc bien d’abord penser, et la réflexion explicite sur cette pensée traduit un niveau supérieur de conscience, sans être la marque essentielle. Mais ceci prouve également que la pensée, pour être définie par la conscience, ne requiert pas cependant une prise de conscience claire, loin d’être toujours accompagnée d’une expresse réflexion. Ainsi la conscience comporterait donc une série de degrés et des phénomènes marginaux et évanescents autoriseraient à parler d’un quelconque inconscient. Dès lors, est-ce là une hypothèse purement théorique, exigée par la notion de la « substance pensante » selon les mots de Descartes, dont la permanence de l’attribut principal est une conséquence logique ? A partir de là, il est logique que nous nous intéressons à la question pour savoir donc à quoi sert « l’inconscient » ? S’il y a bien une notion primordiale en psychologie clinique et en psychopathologie c’est bien celle de l’inconscient. C’est une notion vielle comme le monde mais il y a bien une personne qui l’a vraiment théorisée et qui en a fait ce concept qui est l’objet de notre travail. Donc quoi de mieux pour répondre à ce concept que de s’appuyer sur celui qui a créé cette théorie. Il s’agit bien de Freud qui à la fin du XIXe et au début du XXe siècle a énormément travaillé pour pouvoir conceptualisé et modélisé le système inconscient et qui est encore travaillé aujourd’hui par de nombreux praticiens en psychologie, en psychanalyse et en psychothérapie. D’ailleurs, c’est à partir de là que la psychanalyse est comprise comme étant est une théorie de l’inconscient, mais c’est aussi une pratique à laquelle nous s’efforçons de connaitre les causes cachées de nos problèmes psychiques (névroses, mal-être, difficulté à supporter la dureté de l’existence, etc.) Le concept d’inconscient a été développé au cours de la période qui s’étend de 1895 à 1900 par ce dernier, qui a postulé que l’inconscient est constitué de souvenirs et de sentiments éprouvés au cours de l’enfance, y compris les pulsions sexuelles ou libido. Il en est venu ainsi à énoncer l’hypothèse d’un inconscient psychique lorsqu’il a été en présence de malades souffrant d’hystérie. Pour Freud l’inconscient n’est absolument pas un réservoir de souvenirs oubliés ou un déficit de conscience seulement comme nous l’avons pendant des siècles perçu.Il va voir, notamment par les rêves qui a tout un tas de pulsion chez l’homme et qui pour autant toutes ces pulsions ne sont pas toujours acceptables. Il va y avoir tout un tas d’énergies pulsionnelles qui va chercher à se manifester dans les actions et ou dans les pensées. Donc au départ, Freud va voir que les représentations inconscientes vont s’agencer en fantasme, en scénario imaginaire et en mise en scène de désirs. L’inconscient va également avoir recours à des mécanismes spécifiques comme l’ « indifférence à la réalité », l’ « absence de négation », la « condensation », le « déplacement », le « symbolisme » et enfin le « refoulement ». Le refoulement est le net ultra mécanisme de défense car sans lui nous pourrions même penser qu’il n’a pas d’inconscient. Et pour cause, en un moment donné Freud va imaginer qu’il y aura un refoulement imaginaire qui va créer un clivage entre la conscience et l’inconscient. Dès ses premières organisations de l’inconscient, Freud ne voit pas l’inconscient seulement comme le siège des pulsions et du refoulé mais aussi de tout ce qui va être instinctuel et inné. L’inconscient serait alors constitué des désirs refoulés et de l’ensemble des tendances organiques qu’on nomme pulsions ou instincts. Freud considère l’inconscient comme une zone psychique à part entière bien vivante animée par des pulsions plus ou moins refoulées et agitées par des conflits plus ou moins puissants. Par exemple les pulsions sexuelles, de peur, les expériences honteuses, les pensées immorales, les désirs les plus flous. Ces exemples montrent bien que ce qui fait problème ou plutôt ce qui pose soucis dans le conscient peut être complètement refoulé dans l’inconscient ou si nous pouvons dire ainsi dans le « carré psychique ». Toutefois, pour comprendre le fonctionnement du psychisme humain, Freud a élaboré des topiques. La topique au sens psychanalytique est un système théorique d’organisation du psychisme en fonctions hiérarchisées «c’est-à-dire des ensembles différenciées et imbriquées (lieux psychiques, (…) figurant une véritable architecture de l’esprit. ». De la première topique faite en 1900 qui est la première représentation spatiale de l’appareil psychique, Freud y définit trois instances c’est-à-dire des lieux psychiques. Ces trois instances sont le « Conscient », le « Préconscient » et l’ « Inconscient ». Le conscient est l’instance psychique qui fait interface avec l’extérieur. Il est donc du domaine du perceptif, il reçoit aussi les informations de l’intérieur du psychisme. Le conscient est également très interconnecté avec le préconscient. Le préconscient peut être définit comme une zone de stockage d’informations, de souvenirs mais des informations qui ne sont pas dans le conscient mais qui sont accessibles au conscient à n’importe quel moment. C’est cette partie de notre psychisme qui est presque consciente. Elle devient ou redevient consciente facilement, sans résister à nos efforts. Par exemple les milliers de mots que nous connaissons remontent en général sans effort à la surface de notre pensée quand nous en avons besoin pour parler : ils ne sont pas tout à fait conscient, mais presque. Notre préconscient permet donc à notre conscient de fonctionner sur des taches, sur des activités sans se faire parasiter par tout le reste de ce qui est stocké. Freud nous dit que notre préconscient permet d’adapter à la réalité du monde extérieur. Ce qu’il faut retenir c’est qu’il est régi par un principe de réalité. D’après Freud, le préconscient et ce principe de réalité nous permettent de remettre à plus tard des désirs, des envies et nous permettent de supporter dans une certaine mesure l’insatisfaction. L’inconscient quant à lui, est une troisième instance qui est séparée du préconscient et du conscient par une censure très forte. L’inconscient est constitué  de désirs, d’actes qui restent inaccessibles à la conscience. Ces éléments constitutifs de l’inconscient qui ont été donc refoulés par la censure sont comme en prison. C’est ainsi qu’ils vont être très actifs en ne cherchent qu’une seule chose, à savoir : « sortir de cette prison ». Freud le définit par rapport au principe de plaisir ; c’est-à-dire le but ultime de tous ces désirs, de toutes ces pulsions qui constituent l’inconscient c’est de sortir et de trouver une satisfaction totale. A ce propos Pierre Buser pense que : La première topique imagine donc une sorte de trajet allant du conscient à l’inconscient, à travers les chemins de la mémoire. (…) Elle introduit les premières instances phares de la psychanalyse avec, caché derrière le conscient, un inconscient déjà complexe puisqu’il est lui-même à deux degrés, le préconscient et l’inconscient proprement dit. Vingt ans plus tard c’est-à-dire à partir de 1920, Freud semble avoir préféré un autre ensemble d’instances structurant l’appareil mental et n’évoqua plus qu’épisodiquement le premier. Il décide ne plus employer le mot inconscient au sens systématique car cela ne permet pas de rendre compte des rapports dynamiques entre les diverses instances du psychisme. Il découvre dès lors que l’inconscient n’est pas seulement la caractéristique de ce qui est étranger au Moi dans la mesure où l’analyse des résistances révèle dans le Moi quelque chose d’inconscient et néanmoins de non refoulé. C’est ainsi qu’il enrichit alors sa première topique en introduisant ce qu’il est convenu d’appeler la « seconde topique », avec trois éléments, le « moi » ou conscience, le « surmoi » et le « ça » ou l’inconscient. Et là ce n’est plus la même chose pour Freud car pour lui l’inconscient sera en même temps dans les trois lieux, c’est-à-dire que même si il est principalement dans le ça, il sera aussi dans le moi et le surmoi. Pour le ça, nous allons simplement partir du principe que c’est l’inconscient en tant que tel donc le réservoir des pulsions et des instincts, la source première de nos désirs et de nos actions. Il est un pôle pulsionnel composé de productions psychiques refoulées qui ne peuvent pas parvenir à la conscience parce qu’elles se heurtent à des principes moraux et sociaux. Le ça est une instance dynamique cherchant à se satisfaire car obéissant au principe de plaisir. (…) Il comprend tout ce que l’etre apporte en naissant, tout ce qui a été constitutionnellement déterminé, avant toutes les pulsions émanées de l’organisation somatique (faim, soif, agressivité et déjà des désirs sexuels) et qui y trouvent, sous des formes qui nous restent inconnues, un premier mode d’expression psychique Et « c’est dans le ça que s’agitent nos pulsions primitives, et tous les processus qui s’y déroulent demeurent inconscient ». La résistance du ça résulte de la contrainte à la répétition des processus instinctuels objet du refoulement. Elle est responsable de ce que Freud appelle « la nécessité du bûcher ». Le moi est l’instance qui va jouer le rôle d’intermédiaire puisqu’ elle va devoir être régulatrice entre les exigences du ça et du surmoi. Il est donc cette partie du psychisme dont le rôle est de trouver un compromis entre le ça et le surmoi, autrement dit, il va devoir faire sans cesse le médiateur et va ainsi céder du « principe de réalité ». Le moi s’est formé dans un second temps à partir du ça au contact de la réalité extérieure. C’est l’instance consciente et volontaire de la personnalité psychique. […] il est le médiateur entre les exigences de satisfaction pulsionnelle provenant du ça et les interdits du surmoi (…)». Le moi est aussi « […] chargé de fonctions importantes ; grâce à ses rapports avec le monde de la perception, il règle la succession des processus psychiques dans le temps et les soumet à l’épreuve de la réalité  Le surmoi est en partie l’intériorisation, l’introjection, les codes sociaux, les interdits parentaux ou encore les limites personnelles que nous nous décidons de nous poser. Il se manifeste à nous par cette petite voix qui nous dit : « Ne fais pas ça, c’est mal ! », par la mauvaise conscience, ou par la censure qu’il exerce sur nos désirs (dans le rêve par exemple) Et nous verrons que ces limites n’auront pas le même sens une fois qu’elles seront transgressées par exemple par un névrosé, un psychotique ou un pervers. Le surmoi que nous venons de dire tiendra aussi une petite part d’inconscient mais cela se manifestera notamment par l’ « idéal du moi ». « En porte-parole des injonctions du surmoi, elle juge et condamne les conduites inconvenantes, anticulturelles ou antisociales. ». Le surmoi « […] est le dépositaire du phénomène que nous nommons conscience morale. »

La destinée et les répercussions de l’inconscient après Freud

   Nous partons donc de ce que Freud considère lui-même comme le moment névralgique de sa réflexion, de ce à partir de quoi, s’élabore sa construction sémantique, à savoir l’inconscient. C’est ce qui, à ses yeux, nous donne le signe de reconnaissance de la psychanalyse et permet d’y discerner un processus spécifique. La prémisse fondamentale de la problématique freudienne réside dans la distinction entre un psychique conscient et un psychique inconscient. Dans l’affirmation que le psychique ne se réduit pas au conscient, réside l’intuition freudienne et l’initial de la dynamique psychanalytique. Cette distinction dessine son champ épistémologique sur lequel se construit la réflexion freudienne. Il convient donc d’accepter cette nouvelle répartition du psychique humain comme le préalable de toute compréhension de la problématique psychanalytique. Car de cette nouvelle répartition sortira l’inconscient qui va devenir le sésame de toute l’herméneutique freudienne. Mais un sésame hypothétique tellement son maniement est complexe et fragile. Il ne faut surtout pas considérer l’inconscient comme un concept dont Freud n’a du reste pas la paternité, un concept qui serait la pierre d’angle de toute sa construction sémantique. Faire de l’inconscient un concept, même en soulignant sa nouveauté, revient à lui donner d’emblée un traitement philosophique, à l’analyser sans autre forme de procès comme un objet philosophique. On l’enferme ainsi dans une problématique définie par avance et on fait de Freud, tant bien que mal, un philosophe de la modernité. Une telle approche est inacceptable, car elle réduit d’emblée le spécifique freudien en cassant sa dynamique propre. Cette réduction consiste à intégrer la réflexion freudienne à l’histoire philosophique et à l’évaluer comme telle. Or l’inconscient est conceptuellement difficile à définir et à manipuler. Il devient, de ce fait, aux yeux de certains philosophes un concept détestable. On le traitera de « notion abstraite », de « pétition de principe » et même d’« entité fourre-tout ». Grâce à ce processus de réduction, la philosophie peut intégrer ce qui n’entre pas immédiatement dans sa schématique, mais de ce fait elle banalise ce qui lui paraissait trop innovant. C’est à coup sûr passer à côté de ce qu’il y a d’original dans la démarche psychanalytique et s’interdire une compréhension en profondeur. En fait, la philosophie a tout à perdre en s’adonnant à ces facilités d’interprétation. L’inconscient freudien mérite donc un traitement spécifique. Affirmer que le conscient ne définit pas à lui seul le champ du psychique, c’est se mettre délibérément en marge de la grande tradition philosophique et poser une différentiation dont il nous faudra mesurer les conséquences. Ainsi loin d’ajouter une conceptualisation nouvelle au kaléidoscope philosophique, Freud marque, en toute connaissance de cause, sa spécificité. Dans Abrégé de psychanalyse il reconnaît explicitement qu’en parlant comme il le fait de conscience inconsciente, il avance une problématique que les philosophes ne peuvent accepter : « La plupart des philosophes, écrit-il, et bien d’autres avec eux, s’insurgent contre cette idée et déclarent que postuler l’existence d’un psychisme inconscient est une absurdité » Certes, les philosophes peuvent à loisir débattre de cette scission qu’introduit Freud, et ils ne se priveront pas de le faire. Lui-même du reste leur en reconnaît explicitement le droit, tout en ajoutant immédiatement sur le mode de la restriction que la justification de son hypothèse ne relève pas d’une juridiction philosophique. Si justification il doit y avoir, elle ne peut qu’être d’ordre pragmatique c’est-à-dire non conceptuel. C’est à partir de ses résultats affirme Freud qu’il faut évaluer son hypothèse. Sans du reste préciser de quels résultats il s’agit en l’occurrence ; mais on est en droit de penser qu’il fait allusion à la cure analytique. Mais au-delà de cette hésitation, la remarque freudienne nous paraît signifier clairement que sa démarche sort du champ philosophique et qu’il faut la prendre comme telle. C’est du moins ainsi que nous le comprenons. Nous voyons alors immédiatement que l’inconscient dessine la ligne de démarcation qui sépare philosophie et psychanalyse. La différenciation est en fait un trait de culture qui brouille l’homme occidental avec son héritage grec, c’est-à-dire avec son assise culturelle. Nous serions alors devant un courant déstabilisateur aux incalculables conséquences. En effet, l’inconscient freudien doit être considéré comme l’élément de rupture avec la philosophie classique telle qu’elle s’est développée depuis la plus haute antiquité grecque. Sa manifestation la plus évidente réside dans l’incompatibilité entre le logos philosophique et l’inconscient psychanalytique. Si la philosophie consiste à produire un raisonnement qui repose sur la cohérence du logos c’est-à-dire qui en appelle de la pertinence rationnelle, alors à l’évidence l’inconscient ne relève pas de cette problématique. Entre l’évènement de Freud et le nôtre, il y eut un nombre impressionnant de praticiens et de théoriciens que la problématique psychanalytique a séduits et qui lui ont consacré leurs réflexions et leurs écrits. Freud et la première génération de disciples ont mis leurs marques pour indiquer le chemin de l’aventure avec des lois et des principes. Parmi leurs successeurs, deux figures se détachent par leur originalité. La première est celle du suisse Carl Gustave Jung (1875-1961), un dissident pugnace à la pensée obscure et contemporain de Freud. Et dans une période un peu plus récente, celle du français Jacques Lacan (1901-1980), dont les idées n’en finissent pas d’attirer les attentions et souvent d’exciter. C’est ainsi que nous pensons que l’un et l’autre méritent une mention dans notre travail. Nous soulignons que Jung nomma d’abord, sa propre méthode, qui se distinguait de la psychanalyse freudienne par une notion élargie de la libido. Ceci par l’importance donnée aux rêves et par l’introduction de ce qu’il appela « inconscient collectif », instance distincte et surajoutée à l’ « inconscient individuel » et qui y plonge ses racines. Il résulte que nous pouvons discerner dans l’inconscient une couche dite l’inconscient personnel. Les éléments de cette couche sont de nature personnelle, puisqu’ils ont des acquisitions de la vie individuelle et des facteurs psychologiques qui aurait pu tout aussi bien être conscients. « Celui qui avance le chemin de la réalisation de son moi fait nécessairement passer dans sa conscience le contenu de son inconscient personnel et ainsi élargit considérablement l’étendue de sa personnalité.»60 L’inconscient contient non seulement des éléments personnels, mais aussi des éléments impersonnels, collectifs, sous la forme de « catégories héritées ou archétypes.»

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE I : L’HISTOIRE MOUVEMENTE DE L’INCONSCIENT
CHAPITRE II : LES CONTENUS ET LES LOIS DE L’INCONSCIENT
CHAPITRE III : PORTEES ET LIMITES DE LA THEORIE DE L’INCONSSCIENT 
CONCLUSION

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