La luxation congénitale de la hanche est une affection bien connue de l’appareil locomoteur (1). C’est une pathologie relativement fréquente, variable en fonction des régions, des pays et des ethnies. C’est toujours une pathologie d’actualité et reste l’un des thèmes les plus intéressants de l’orthopédie pédiatrique. Elle constitue un problème important de santé publique, psychologique, et socio-économique, du fait de ses fréquences et des implications diagnostiques et thérapeutiques. La luxation congénitale de la hanche soulève encore de problème de la terminologie de conception pathogénique, de séméiologie clinique et de prise en charge thérapeutique (2), même si la terminologie a cherché à évoluer ces dernières années. Le dépistage et la prise en charge précoce sont primordiaux dans cette pathologie car une fois la rétraction musculaire installée, le traitement devient difficile et plus coûteux alors que son efficacité est incertaine. Plus le diagnostique de la L C H est précoce, plus son traitement est efficace, plus simple, plus facile à être supporté par le malade et plus économique (3). La maladie luxante de la hanche de l’enfant concerne alors quotidiennement un grand nombre des médecins praticiens, pédiatres, orthopédistes, radiologues, obstétriciens, des infirmiers et des sages femmes (les accoucheurs). Le problème réside dans les cas détectés tardivement car plus le traitement est institué tardivement, plus il devient plus agressif, moins efficace, plus coûteux (4) (5). Il persiste, cependant, un certain nombre d’enfants ne bénéficiant d’un dépistage qu’au-delà du troisième mois, ce qui est considéré, selon les normes actuelles, tardif pour un dépistage qui réclame à présent d’être obtenu en période strictement néonatale. Dans les pays développés, le dépistage précoce s’est généralisé et de nouvelles méthodes diagnostiques et thérapeutiques sont apparues ; il est en effet, devenu exceptionnel, chez un enfant né en France par exemple de ne découvrir sa pathologie qu’au moment où il commence à marcher c’est-à-dire entre douze et dix huit mois (1). A Madagascar il n’existe pas encore un consensus sur le dépistage et la prise en charge de la luxation congénitale de la hanche même si ce dépistage doit être fait à la naissance à la maternité.
HISTORIQUE
La LCH est une des plus fréquentes déformations congénitales du squelette connue dès l’antiquité, à l’époque d’ Hippocrate qui affirma que la déformation pourrait se développer in utero.
– En 1678, Ambroise Pare étudia la nature héréditaire de cette maladie;
– En 1784, Camper a observé que les filles étaient plus souvent affectées ;
– En 1883, Paletta a fait la première description anatomo-pathologique de la LCH ;
– En 1878, Roser postula que la LCH était causée par la position fœtale anormale ;
– Avant 1910, Froelich est un des premiers partisans du diagnostic et du traitement précoces ;
– En 1921, Putti publia les résultats de son traitement par abduction avant l’âge de un an ;
– En 1935, Ortolani s’efforça de faire appliquer le principe du diagnostic et du traitement précoces ;
– En 1912, Le Damany a décrit la méthode de dépistage ;
– En 1950, Palmen a initié le début de l’examen néonatal de routine pour le dépistage de la LCH au niveau des maternités ;
– En 1962, Barlow développa encore une méthode de dépistage en complétant l’examen d’Ortolani.
Embryologie
Période embryonnaire
C’est la mise en place des tissus qui aboutiront à la formation de tous les éléments parfaitement individualisés de la hanche au terme de dix semaines. Dès la troisième semaine de la vie embryonnaire, le bourgeon qui donnera le membre inférieur est visible. Vers la fin de la septième semaine (embryon de 22 mm) que paraît la fonte articulaire (figure. 1) ; c’est une période du début de la séparation des ébauches de la tête fémorale et de l’acétabulum. A la fin de la période embryonnaire, il présente aussi une transformation du tissu mésenchymateux en tissu cartilagineux cependant que se mettent en place les nerfs, les vaisseaux et les muscles.
Période fœtale
La cavité articulaire est achevée à la neuvième semaine de la gestation lorsque le fœtus mesure 40 mm .Ainsi, tant que la cavité articulaire n’existe pas, il ne peut y avoir de luxation. L’organogenèse est achevée, la hanche dispose tous ses composants et va passer par la période fœtale de son développement qui est en rapport avec le développement neuro musculaire. C’est une phase de maturation et de croissance cartilagineuse. Durant le troisième mois, les artères centrales des maquettes cartilagineuses induisent un mécanisme de calcification puis d’ossification qui aboutit à l’apparition des noyaux osseux primitifs (type diaphysaire) : du coté fémoral, le noyau primitif de la diaphyse fémorale et du coté pelvien, les noyaux primitifs des trois constituants de l’os : l’iliaque, l’ischion et le pubis (figure 2). C’est à l’union de ces trois pièces que se situe le cotyle et plus particulièrement, le futur cartilage en Y.
Période avant la naissance
La cavité cotyloïde engaine complètement la tête fémorale au quatrième mois, laisse apparaître un découvert partiel : la profondeur du cotyle est réduite en effet dans les derniers mois de la vie intra utérine. Avant la naissance, le fémur est hyperfléchi sur le bassin et du fait de l’antétorsion fémorale, la tête regarde légèrement vers l’arrière et orientée vers le fond du cotyle qui est un peu antéversé. Si le fémur est en rotation externe ou présente une antétorsion fémorale ; la tête regarde directement en arrière au contact du rebord postérieur de l’ acétabulum et de la capsule. A terme, la tête fémorale mesure 17mm pour la taille globale de 50cm.
Anatomie
A la naissance
L’acétabulum (ou cotyle) est le point de jonction des os primitifs : ilion, ischion et pubis. Il a une structure complexe :
– Le cartilage articulaire présente une forme de croissant avec deux cornes : antérieure et postérieure développées laissant un arrière fond libre occupé par de la graisse et l’insertion du ligament rond, et fermé en bas par le ligament transverse.
– Le complexe du cartilage en Y correspond à la juxtaposition des zones de naissance de l’ilion, de l’ischion et du pubis. Il est formé de trois branches : une verticale, une antérieure ascendante et une postérieure horizontale.
– Le limbus correspond à la réunion d’un tissu fibrocartilagineux (labrum) au cartilage articulaire.
– Le périoste externe, le périchondre et la capsule réticulaire s’intriquent au-dessus du limbus.
– La capsule articulaire figure un manchon très résistant et particulièrement épais en avant où il est renforcé par le ligament de Bertin. Du coté fémoral, le col est très court et supporte la tête qui n’est pas parfaitement sphérique. L’angle cervico diaphysaire est de 135°-145°. La torsion fémorale qui oriente vers l’avant l’extrémité supérieure du fémur est habituellement de 25°-30° chez le nouveau né .
De la naissance à un an
On observe deux modifications dans l’architecture de la hanche :
– l’allongement du col fémoral ;
– la diminution de l’antétorsion fémorale qui passe progressivement de 30° à une dizaine de degrés.
De l’âge de la marche à l’adolescence
La hanche poursuit régulièrement sa croissance avec cependant une phase de développement préférentiel du cotyle vers l’âge de 3 à 5 ans en ce qui concerne la maturation osseuse radiologique. Au début de la puberté, s’achève la croissance avec apparition et la soudure de points d’ossification complémentaire, dans le cartilage en Y ainsi que dans le bord externe du toit du cotyle. La maturation définitive correspond à la fusion de tous les cartilages de croissance : cartilage en Y, cartilage sous capital, cartilage trochantérien.
Vascularisation de l’extrémité supérieure du fémur
Elle est importante à considérer car elle détient la vitalité da la tête fémorale et des zones de croissance. La circonflexe antérieure et la circonflexe postérieure représentent la voie d’égale importance pour l’extrémité supérieure du fémur sur son versant céphalique avec de nombreux rameaux pour l’épiphyse cartilagineuse (8).
LA LUXATION CONGENITALE DE LA HANCHE
Définition
La luxation congénitale de hanche est une perte complète plus ou moins permanente des relations anatomiques normales entre la tête fémorale et le cotyle. C’est une pathologie congénitale, héréditaire se produisant en période périnatale. Elle se traduit cliniquement soit par :
– Une luxation de la hanche : On dit que la hanche est luxée lorsque la tête fémorale est complètement sortie de la cavité cotyloïdienne.
– Une subluxation : La hanche est seulement subluxée lorsque la tête n’est pas normalement située au fond de la cavité cotyloïdienne mais à la fois latéralisée et ascensionnée, la tête fémorale et le cotyle n’ont pas perdu tout contact mais il n’y a pas de concentricité entre ces deux structures sphériques.
– Une dysplasie : il s’agit, en réalité, d’un défaut architectural du développement de la hanche.
Physiopathologie
Elle doit tenir compte de tous les faits qui viennent d’être exposés. En fait, les théories retenues actuellement sont :
Les facteurs endogènes ou génétiques
Cette théorie correspond à un défaut primitif de la hanche pouvant intéresser l’acétabulum, le fémur et la capsule articulaire. Les facteurs génétiques sont probables du fait de la fréquence de la maladie dans le sexe féminin, lorsqu’il y a des antécédents familiaux et dans un certain contexte racial ou géographique.
– Le seul défaut de l’acétabulum serait un manque de profondeur prédisposant à la luxation. Le cotyle peu profond est un facteur favorisant.
– L’hyperlaxité ligamentaire est également un facteur favorisant.
– L’excès d’antéversion fémorale est inconstant et correspond à une modification de la torsion diaphysaire qu’à un défaut de la hanche.
Facteurs exogènes ou mécaniques
Les facteurs mécaniques sont prépondérants. Eux seuls expliquent la fréquence de la L C H en cas de primiparité, en cas d’accouchement par le siège, en cas de césarienne. Chez les gros poids de naissance, lorsqu’il existe un oligoamnios, une disproportion fœto-maternelle. La luxation ou subluxation peut se constituer in utero sous l’effet d’une posture luxante avec abduction faible ou nulle et rotation externe et d’une contrainte mécanique sur la région du grand trochanter. Les facteurs mécaniques seraient déterminants et constitueraient en un appui direct prolongé sur le grand trochanter d’un fémur en adduction et rotation externe (posture luxante) entraînent facilement une luxation de la tête en arrière du cotyle.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I- HISTORIQUE
II- EMBRYOLOGIE ET ANATOMIE
1-Embryologie
1-1-Période embryonnaire
1-2-Période fœtale
1-3-Période avant la naissance
2-Anatomie
2-1-A la naissance
2-2-De la naissance à un an
2-3-De l’âge de la marche à l’adolescence
2-4-Vascularisation de l’extrémité supérieur du fémur
III- LA LUXATION CONGENITALE DE LA HANCHE
1-Définition
2-Physiopathologie
2-1-Les facteurs endogènes ou génétiques
2-2-Les facteurs exogènes ou mécaniques
3-Anatomie pathologie
3-1-Chez le fœtus et le nouveau né
3-2-Chez l’enfant
4-Clinique
4-1-Données de l’interrogatoire
4-2-Les examens cliniques
4-2-1-Chez le nouveau né
4-2-1-1-Recherche de l’instabilité de la hanche
4-2-1-2-Etude de l’abduction
4-2-1-3-Recherche de la posture fœtale et les déformations associées
4-2-2-Chez le nourrisson
4-2-3-Chez l’enfant à partir de l’âge de la marche
5-Les examens para cliniques
5-1-Etude radiologique
5-2-Arthrographique
5-3-Tomodensitométrie
5-4-Imagerie par résonance magnétique
5-5-Echographie
6-Traitement
6-1-Buts et principes
6-2-Méthodes
6-2-1-Méthodes orthopédiques
6-2-2-Méthodes chirurgicales
6-3-Indications
6-4-Complications du traitement
7-Evolution
8-Pronostic
DEUXIEME PARTIE : MATERIELS ET METHODES
CADRE DE L’ETUDE
QUESTIONNAIRES
TROISIEME PARTIE : RESULTATS
QUATRIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET COMMENTAIRES
SUGGESTIONS
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE