LA MYOPATHIE CENTRONUCLEAIRE

LA MYOPATHIE CENTRONUCLEAIRE

DEUXIEME PARTIE: ANALYSE FONCTIONNELLE DU TONUS URETRAL CHEZ LES LABRADORS CNM

Animaux, matériel et méthodes

Animaux utilisés

Choix et identification des animaux

Un pedigree de Labradors Retrievers dans lequel ségrègue la maladie est développé à l’ENVA depuis 1994. Les animaux utilisés dans l’étude sont uniquement des Labradors mâles et femelles issus de ce pedigree avec, d’une part des animaux « témoins » c’est -à-dire hétérozygotes pour le gène candidat (que nous noterons cnm+/cnm), et d’autre part des chiens atteints de myopathie centronucléaire, homozygotes pour l’allèle délétère au locus cnm et notés cnmcnm/cnm. Le pedigree est schématisé à la Figure 11.
Les Labradors étudiés ont été identifiés par leur numéro de tatouage ou par un numéro unique de transpondeur implanté en région sous-cutanée. Une bandelette urinaire a été réalisée avant chaque examen. Aucun animal ne présentait de signes d’inflammation ou d’infection.
Nous avons choisi de considérer les hétérozygotes comme des animaux témoins car les cnm+/+ et les cnm+/cnm sont phénotypiquement identiques (ceci est vérifié sur des critères cliniques et l’observation de coupes histologiques de muscles biopsiés sur des chiens cnm+/+ et cnm+/cnm: l’allèle cnm n’est responsable de modifications structurales et de signes cliniques que lorsqu’il est en deux exemplaires au niveau du génome, donc chez les homozygotes cnmcnm/cnm). En outre, les cnm+/cnm présentent l’avantage par rapport à des chiens cnm+/+ d’appartenir au même pedigree et d’être élevés dans les mêmes conditions que les cnmcnm/cnm (en chenil, alimentation et suivi clinique identiques,…)
Au total, nous avons inclus dans cette étude 37 Labradors non castrés répartis en (Figure 11 et Annexe 1):
– 16 mâles dont 8 cnm+/cnm et 8 cnmcnm/cnm
– 21 femelles dont 16 femelles cnmcnm/cnm et 5 femelles cnm+/cnm
Les animaux sont âgés au moment de l’étude de 5 mois et demi à 9 ans, ils pèsent de 15 à 37 kilogrammes.
Les animaux inclus ici ne rentrent pendant le temps de l’étude dans aucun autre protocole expérimental. Le suivi médical des animaux est assuré durant toute l’étude.

Préparation des animaux

Comme chez l’Homme, les profils ont pu être réalisés chez les chiens sans anesthésie. Les animaux sont restés dociles et immobiles lors des mesures et n’ont montré aucun signe de douleur.

Traitement anti-inflammatoire et prophylaxie antiseptique

Deux injections d’amoxicilline et acide clavulanique (Clamoxyl LA N.D.) et de kétoprofène (Kétofen N.D.) ont été systématiquement faites par voie intra-musculaire en fin d’examen pour prévenir tout risque d’infection secondaire à l’examen et limiter l’inflammation consécutive à l’introduction de la sonde.

Dosage de la progestéronémie

Au moment de la réalisation des premiers profils urétraux, l’ensemble des chiennes s’est révélé être en chaleur (gonflement de la vulve, nombreux plis dans le vestibule et parfois pertes sanguinolentes). Ainsi, afin de déterminer avec exactitude la phase du cycle chez toutes les chiennes et afin de prendre en compte d’éventuelles interactions du cycle sexuel des chiennes sur les paramètres étudiés, des dosages de progestérone ont été réalisés. Les prises de sang nécessaires aux dosages hormonaux ont été faites sur tube hépariné, le sérum étant prélevé le plus précocement possible après centrifugation des prélèvements. Les dosages par « Radio Immuno Assay » ont été réalisés au CERCA à l’Ecole Nationale Vétérinaire d’Alfort.

Profilométrie urétrale

Principes de l’urétromanométrie

L’urétromanométrie consiste en l’enregistrement de la pression intraluminale de l’urètre au repos (c’est-à-dire au cours de la phase de remplissage vésicale) sur toute sa longueur, par mise en place puis retrait progressif d’une sonde urétrale du col vésical jusqu’au méat urinaire. Le graphe obtenu représente le tonus et la résistance urétraux, et permet ainsi de déterminer la localisation de zones de résistance maximale et minimale de l’urètre. Cependant, il ne donne pas d’information sur l’activité urétrale lors de la contraction du détrusor ou sur le réflexe de miction. En outre, contrairement à l’urétromanométrie pratiquée chez l’Homme, il s’agit de mesures réalisées uniquement en statique.
Les profils de pression urétrale sont réalisés à l’aide d’un appareil appelé « Chaîne urodynamique Vermed ». Cet appareil est composé de quatre compartiments :
– l’enregistreur à deux voies : il permet d’obtenir deux tracés de couleurs différentes (rouge et bleu) correspondant aux pressions vésicale et urétrale et enfin une troisième courbe (verte) représente le différentiel entre les deux tracés. L’opérateur possède le choix de la vitesse du défilement,
– les modules de mesure de pression permettant de mesurer la pression intra-vésicale et la pression urétrale,
– les capteurs de pression : au nombre de deux, chaque capteur de mesure de pression est en contact avec la sonde d’un côté, et avec le soluté de perfusion de l’autre côté,
– le module d’urétro-profilométrie, équipé d’un moteur entraînant le retrait progressif de la sonde urétrale, à une vitesse choisie par l’opérateur, après sa mise en place dans les voies urinaires.

Description des sondes et mise en place

Les sondes urinaires utilisées sont du matériel pédiatrique, elles doivent être suffisamment souples pour ne pas être traumatisantes lors du sondage, et le matériau utilisé ne doit pas être expansible pour la fiabilité de la mesure (38).Deux types de sondes sont utilisées pour enregistrer les pressions urétrales.Chez les sujets de sexe masculin, des sondes Dynacath 3 (Prince Médical, 60530 ERCUIS) à trois voies (CH/FR 7) ont été choisies. Deux voies sont reliées aux capteurs de pression: l’une s’ouvre par un orifice situé à l’extrémité de la sonde, l’autre s’ouvre à 5 centimètres en retrait. La première voie mesure les pressions vésicales, la seconde les pressions urétrales (Figure 12). La voie urétrale est perfusée à faible débit (2ml/minute) afin de maintenir le diamètre de l’urètre dans les valeurs usuelles et éviter ainsi que les orifices de la sonde ne se plaquent contre les parois de l’urètre et afin de prévenir un remplissage et une distension trop importants de la vessie (26). La dernière voie sert à la vidange de la vessie. Le soluté de perfusion est du sérum physiologique salé isotonique stérile.Chez les chiennes, des sondes « Porgès » (Le Plessis Robinson) en PVC à 2 voies (sondes CH/FR 6) ont été utilisées: une voie enregistre les pressions vésicales et assure à la fois le remplissage et la vidange vésicale, tandis que l’autre enregistre les pressions urétrales.

Capteurs de pression, traitement du signal

Après sa mise en place dans les voies urinaires, la sonde est connectée aux capteurs de pression qui assurent la mesure des pressions.Le capteur de pression est un capteur électronique caractérisé par:
– la cellule de pression, à la source d’une tension appliquée à la jauge de contrainte (membrane déformable),
– et la transmission des pressions se faisant jusqu’au capteur de pression par un système de tubulure renfermant du soluté physiologique.
Deux voies sont en général reliées aux capteurs de pression.
Une unité électronique correspondant à un amplificateur de signal, permet l’affichage numérique des valeurs de pression.

Retrait de la sonde

Le retrait de la sonde doit être fait par une machine de retrait de préférence à un retrait manuel pour 2 raisons (38):
– le retrait doit être suffisamment lent pour que le temps de réponse du système ne soit pas inférieur à la vitesse des variations de pression devant être enregistrées;
– la mesure des longueurs sur le profil ne peut se faire que s’il existe une synchronisation dans l’échelle de temps entre la vitesse d’enregistrement et la vitesse de retrait.
Le dispositif est représenté à la Figure 13.

Description du déroulement d’un tracé de profil de pression urétrale

L’animal est placé en décubitus latéral gauche sur la table d’examen. Chez les femelles, la région vulvaire est nettoyée et désinfectée à l’aide d’Hibitan (N.D.) dilué, un speculum vaginal stérile est mis en place. Chez les mâles, la région prépuciale est également désinfectée à l’Hibitan N.D.dilué.
La sonde stérilisée au formol est rincée avec du sérum physiologique stérile pour éviter que les résidus de formol n’irritent les voies urinaires.
L’étalonnage de la sonde doit être pratiqué avant chaque mesure sur la sonde à l’air libre et à pression atmosphérique: la sonde, reliée à l’appareil enregistreur, est d’abord placée horizontalement à la même hauteur que la vulve de l’animal pour la mise à zéro de la pression au niveau des capteurs (correspondant à la pression atmosphérique)
Après détermination du « zéro de pression » sur l’enregistreur, la sonde est introduite dans l’urètre par le méat urinaire et poussée jusqu’à la vessie de façon à ce que l’orifice situé à 5 centimètres de retrait soit, si possible, au niveau du sphincter strié, puis le speculum est retiré.
L’urétromanométrie se réalise sur vessie vide. La vessie est vidangée de l’urine stockée et l’urine est récupérée par aspiration manuelle et est analysée à l’aide d’une bandelette urinaire afin de vérifier l’absence de tout signe d’infection ou d’inflammation.
Il est important que la vessie soit vidée intégralement pour la reproductibilité du protocole: il semble en effet que le volume vésical et la pression intra-vésicale puissent modifier les valeurs de longueurs fonctionnelles urétrales essentiellement, une vessie pleine diminuant nettement la longueur fonctionnelle urétrale par action au niveau du col vésical (16).
Une fois en place, la sonde est fixée sur le dispositif de retrait; elle est retirée à une vitesse constante de 5 centimètres par minutes et mesure ainsi la pression tout au long de l’urètre. La vitesse de défilement de l’enregistrement est identique à celle du retrait de la sonde, de façon à obtenir un profil urétral en vraie grandeur: les tracés de pression obtenus correspondent exactement en taille réelle aux structures anatomiques (38).
La présence des deux capteurs séparés de quelques centimètres donne deux tracés qui reflètent la pression dans l’urètre à quelques secondes d’intervalle mais les deux tracés diffèrent du fait que l’orifice distal est près du bout de la sonde où l’urètre se referme alors que l’orifice urétral est dans un système plus cylindrique et également du fait que la voie vésicale n’est pas perfusée.

Paramètres quantitatifs des profils obtenus

Les enregistrements des profils de pression urétrale donnent des courbes enregistrées puis traitées par un logiciel qui détermine plusieurs paramètres (16,47):
– la pression maximale de clôture de l’urètre ou pression de clôture (PC), exprimée en centimètres d’eau, qui correspond à la pression urétrale maximale diminuée de la pression intra-vésicale;
– la longueur urétrale fonctionnelle (LUF) en centimètres, qui correspond à la longueur d’urètre au niveau duquel la pression urétrale est supérieure à la pression intra-vésicale. Il est admis classiquement que la longueur fonctionnelle urétrale représente environ les deux tiers de la longueur anatomique de l’urètre, le calcul de la longueur fonctionnelle étant basé sur les valeurs des pressions mesurées dans le profil de pression urétrale.
– l’aire sous la courbe (AC) en centimètres carrés, calculée par le logiciel,
– la zone de clôture (ZC) en centimètres qui correspond à la distance entre le début de l’urètre au col vésical et la zone où se situe la pression de clôture.
La totalité des profils de pression urétrale a fait l’objet d’une analyse approfondie afin d’étudier la localisation du pic de pression de clôture au sein de la longueur fonctionnelle urétrale mesurée, déterminant ainsi la région de l’urètre jouant majoritairement la fonction de sphincter, primordiale pour la continence urinaire.

Interprétation des tracés de profils

Parmi les paramètres à étudier sur les courbes de profil de pression urétrale cités précédemment (PC, LUF, ZC, AC), nous avons décidé de ne pas tenir compte des ZC car il est difficile de délimiter de façon systématique et objective les zones de clôture sur les profils ce qui limite la reproductibilité de la manipulation. Nous nous limiterons donc aux trois autres paramètres mentionnés précédemment. De plus, l’aire sous la courbe nous semble être le paramètre le plus représentatif car il permet de minorer certaines erreurs: par exemple, il peut y avoir de fortes fluctuations des valeurs maximales des pressions , d’autant plus sur nos chiens qui n’ont pas été anesthésiés, ce qui augmente l’incidence des artéfacts (contraction musculaire, respiration, éternuements, etc.) qui peuvent créer un pic de pression très aigu. Le reflet le plus lissé au niveau des tracés semble donc être obtenu par l’aire sous la courbe.

Outils statistiques

Les données ont été analysées et comparées par le test de Anova (Analyse of Variance), à l’aide du logiciel StatView (©1992-95 Abacus Concepts, Inc). Les différences sont considérées comme significatives lorsque p est inférieur à 0,05 dans la table statistique PLSD de Fisher.
Les résultats numériques des figures sont exprimés en moyenne (mean) plus ou moins l’erreur standard moyenne (s.e.m.).
Nous avons aussi eu recours à des tests d’appariement lors de l’analyse des résultats des chiennes, toujours avec le logiciel StatView.

Résultats

Analyse des profils de pression urétrale chez le mâle

Nous avons étudié l’effet du génotype sur chacun des paramètres (PC, LUF et AC). Les résultats expérimentaux sont présentés à la Figure 14 et dans le Tableau 3. Les valeurs de p sont toutes supérieures à 0,05 dans le Tableau 3; ce qui se traduit au niveau des graphiques de la Figure 14 par des écarts très faibles entre les moyennes.
Il n’y a donc pas d’effet significatif du génotype chez les mâles sur les trois paramètres.
En outre, des tests de corrélation ont été réalisés entre les paramètres PC, LUF et AC et l’âge des animaux. Une corrélation négative entre l’âge et la longueur urétrale fonctionnelle chez les mâles a pu être mise en évidence.

Analyse des profils de pression urétrale chez la femelle

Si nous testons maintenant l’effet du génotype chez les femelles de la même façon que chez les mâles, c’est-à-dire en séparant d’emblée les femelles hétérozygotes et homozygotes, l’effet du génotype apparaît significatif.Cependant, nous suspectons des variations des paramètres en fonction du moment du cycle (ce que nous avions constaté empiriquement au cours des manipulations). Il est donc impossible de conclure aussi rapidement à un effet du génotype si le cycle exerce lui aussi un effet significatif sur les trois paramètres caractérisant les profils.Pour mettre en évidence un éventuel effet du génotype, il est donc nécessaire d’analyser les variations de PC, LUF puis AC aux différents moments du cycle.

Indépendance des profils au cours du cycle sexuel

En premier lieu, nous avons fait des tests d’appariement pour chacun des paramètres lorsque deux profils de pression urétrale ont été réalisés sur une même chienne à deux stades différents du cycle sexuel. Cette étude préalable doit permettre de conclure si les deux tracés de juillet et septembre doivent être considérés comme deux mesures dépendantes ou indépendantes, c’est-à-dire comme si chaque profil avait été réalisé sur des animaux distincts (voir Tableau 4).En consultant les données brutes de l’Annexe 1, nous constatons que sur les quatre chiennes testées en juillet puis en septembre, trois étaient en métœstrus en juillet et en fin de métœstrus en septembre. La quatrième chienne (Tania) était en prœstrus en juillet et en anœstrus en septembre. Nous avons donc décidé de réaliser un test d’appariement pour chaque paramètre en incluant puis en excluant Tania. Dans les deux cas, les différences sont significatives (cf. valeurs de p dans le Tableau 4).
Il est donc possible de considérer indépendamment les deux mesures dans la suite des analyses.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LA MYOPATHIE CENTRONUCLEAIRE
1. DONNEES MEDICALES SUR LA MYOPATHIE DU LABRADOR
1.1. Historique et épidémiologie
1.2. Tableau clinique
1.3. Examens complémentaires
1.4. Analyse histologique
2. CNM, UN MODELE SPONTANE DE MYOPATHIE HUMAINE
2.1. Le groupe nosologique des myopathies myotubulaires/centronucléaires humaines
2.2. Cnm, modèle canin de la forme autosomique récessive de la myopathie centronucléaire humaine
3. URETROMANOMETRIE : EVALUATION FONCTIONNELLE DU SPHINCTER URETRAL
3.1. Structure et innervation du bas appareil urinaire chez le Chien
3.2. Fonctionnement du bas appareil urinaire chez le Chien
3.3. Interprétation des profils de pression urétrale
DEUXIEME PARTIE: ANALYSE FONCTIONNELLE DU TONUS URETRAL CHEZ LES LABRADORS CNM
1. ANIMAUX, MATERIEL ET METHODES
1.1. Animaux utilisés
1.2. Profilométrie urétrale
1.3. Outils statistiques
2. RESULTATS
2.1. Analyse des profils de pression urétrale chez le mâle
2.2. Analyse des profils de pression urétrale chez la femelle
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
1. DISCUSSION SUR CERTAINS CHOIX DANS LE PROTOCOLE
1.1. Intérêt de la réalisation des examens sur les animaux vigiles
1.2. Statut des jeunes animaux dans l’effectif étudié
1.3. Spécificité du calcul de PC et AC chez le Chien
2. VARIATIONS DE PRESSION URETRALE EN FONCTION DU CYCLE SEXUEL CHEZ LA CHIENNE
2.1. Rappel sur le cycle menstruel chez la femme
2.2. A propos des récepteurs aux hormones sexuelles
3. ABSENCE D’EFFET DE LA MYOPATHIE CENTRONUCLEAIRE SUR LE TONUS URETRAL
4. PERSPECTIVES
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE.

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