La dystrophie de Becker : une forme de dystrophie musculaire
Dans le cadre de ce travail, l’élève que j’ai rencontré est atteint de myopathie et présente plus précisément une dystrophie musculaire. Au sein des dystrophies musculaires, il existe neuf formes d’atteintes différentes, soulignant ainsi le caractère polymorphe de cette pathologie. Parmi ces formes, la plus commune est la dystrophie musculaire facio-scapulo-humérale. Elle se caractérise par une atteinte musculaire débutant par la face et se propageant progressivement aux autres muscles. Pouvant toucher aussi bien les hommes que les femmes, cette dystrophie se manifeste généralement à l’adolescence mais peut également survenir jusqu’à l’âge de 60 ans.
Parmi les myopathies musculaires, la myopathie de Duchenne constitue la forme la plus grave de par les atteintes quelle engendre et sa rapidité d’évolution. Ne pouvant atteindre uniquement les personnes de sexe masculin, les premiers signes de cette pathologie apparaissent vers l’âge de 3 ans et se caractérisent par des difficultés de déplacement. Progressivement l’atteinte va s’étendre des muscles des membres et du tronc à l’ensemble de l’organisme jusqu’à toucher le myocarde et les muscles respiratoires.
Charles est lui atteint d’une dystrophie musculaire de Becker. Il s’agit d’une maladie rare, environ un garçon sur 35000 en serait atteint. Touchant uniquement les hommes, cette forme de dystrophie peut toucher l’ensemble des muscles et se manifeste généralement par une faiblesse musculaire centrée sur les membres inférieurs. La dystrophie de Becker, à l’instar de la grande majorité des myopathies, se manifeste différemment d’une personne à l’autre : la gravité de l’atteinte ainsi que la rapidité de son évolution peuvent ainsi varier considérablement. D’une façon générale, la personne atteinte éprouve une grande fatigue lors de la marche et d’importantes difficultés dans la réalisation d’actions motrices telles que courir, sauter et monter des escaliers.
Cette myopathie apparaît lors de l’enfance ou de l’adolescence et déclenche de vives douleurs musculaires et des crampes. Dans un second temps, la dégénérescence se généralise jusqu’à atteindre le muscle cardiaque qui perd alors en souplesse et en efficacité (AFM, 2010). Face à cette pathologie, la pratique physique peut être conseillée mais doit faire l’objet d’un encadrement et d’une attention toute particulière (AFM, 2009).
Expression de la dystrophie musculaire de Becker chez l’élève
L’élève sur lequel porte notre recherche présente une dystrophie musculaire de Becker.
Comme nous avons pu le voir auparavant, l’expression de cette pathologie ainsi que celle des myopathies en général, évoluent de manière spécifique et propre au sujet. L’évolution et le développement d’une telle maladie ne pouvant être prédictibles, il est donc nécessaire de prendre connaissance des capacités propres à l’élève. Dans le cas présent, l’atteinte est assez importanteet se rapproche d’une myopathie de Duchenne. Ainsi, Charles se déplace en fauteuil roulant électrique au sein de l’école afin de se préserver d’une trop grande fatigabilité. Au fils des années ses capacités motrices ont diminué de façon significative. Concernant les membres inférieurs, la posture debout est envisageable mais engendre une grande fatigue. Lorsqu’il est dans son fauteuil il est capable de bouger ses jambes et de donner des coups de pied vers l’avant. Le tonus musculaire de la ceinture abdominale lui permet de maintenir une posture droite lorsqu’il est en position assise. Au niveau des membres supérieurs, sa motricité fine est déficiente ce qui entraîne des difficultés dans laréalisation de gestes graphiques. Il arrive cependant à tenir un stylo et rédiger quelques phrases.
L’amplitude des épaules, sans être optimale, est suffisante pour parvenir à lancer un objet sur une courte distance et à une hauteur limitée. La mobilité au niveau de la nuque est intacte tout comme sa vue et son ouïe. Afin de l’aider dans la réalisation des tâches sc olaires, et notamment pour l’écriture, il bénéficie de l’aide d’une AVS pendant la moitié du temps scolaire.
Ces différentes connaissances sur la myopathie et plus précisément sur les capacités de l’élève, nous permettent d’appréhender avec plus de finesse l’élaboration des séances d’EPS correspondant à ses besoins et à ses capacités. Il faudra ainsi composer avec ses possibilités de déplacements, qui sont réduites de par l’utilisation dufauteuil roulant électrique, etses possibilités d’action avec ou sans ballon. Il sera également nécessaire de limiter l’intensité des exercices proposés et d’arrêter l’activité en cas de fatigue de l’élève afin de préserver son capital musculaire. L’aspect sécuritaire fera également l’objet d’une attention particulière, dans la mesure où la présence d’un fauteuil et le manque de connaissances des autres élèves sur handicap de Charles constituent un risque supplémentaire de blessure. Nous allons à présent voir quelles sont les éléments et difficultés à prendre en compte pour la pratique de l’EPS dans le cas d’un élève présentant un handicap moteur.
EPS et handicap
Le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisé en milieu ordinaire a augmenté significativement ces dernières années, et notamment depuis la loi du 11 février 2005 « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ».
Nous allons maintenant voir l’évolution de l’intégration des élèves en situation de handicap dans le système scolaire. Puis nous verrons les conditions de cette intégration aux séances d’EPS avant de nous pencher sur les difficultés et les obstacles que cela génère dans le cas d’un handicap moteur.
Ecole et handicap : vers une politique d’intégration et de lutte contre l’exclusion
Charles est atteint de myopathie, il est en situation de handicap. Selon la loi du 11 février 2005, constitue un handicap « toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vieen société subie dans son environnement par une personne, en raison d’une altération substantielle durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives, ou psychiques, d’un poly-handicap ou d’un trouble de santé invalidant». Cette défintion met en évidence le lien qu’il existe entre handicap et environnement. Le fait de ne pouvoir s’adapter, ne serait-ce que partiellement à son environnement constitue donc un handicap.
L’Histoire de l’humanité regorge d’actes et de politiques de ségrégation à l’encontre des personnes handicapées. Au cours des années, les mentalités ont évolué etla place des personnes handicapées s’est affirmée. Cette évolution se retrouve également dans la construction et l’évolution du système éducatif en France. Initialement, les enfants handicapés étaient exclus de ce système et laissés au soin de leur famille. Dès le XVIIe siècle, les internats se développent et proposent une certaine éducation à leurs résidents, puis progressivement les établissements et instituts spécialisés se multiplient. La promulgation de la loi du 15 avril 1909 pour la création des classes deperfectionnement marque un véritable tournant. En effet, cette loi instaure la création de « classes de perfectionnement annexées aux écoles élémentaires, pour l’accueil des enfants arriérés « . La création de ces classes constitue une avancée dans l’in tégration des enfants handicapés au seindu système éducatif. Désormais, depuis la loi de 2005, le Ministère de l’Education Nationale (2006) avance dans le bulletin officiel du 31 août 2006 que « l’accueil des enfants handicapés se fait en priorité en milieu ordinaire. Chaque enfant doit donc être inscrit dans l’établissement quicorrespond à son lieu de résidence (“son établissement de référence”) et bénéficier d’un p rojet personnalisé de scolarisation. ». Cette nouvelle directive souligne la volonté de l’Etat et celle de l’Education Nationale, de mettre en œuvre une politique d’intégration et d’inclusion des personnes handicapées au sein de notre société.
Cette politique d’intégration est désormais opérante avec un nombre toujours croissant d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire. Nous allons maintenant voir comment s’organise l’intégration d’un élève en situation de handicap dans une classe ordinaire et notamment pour la pratique de l’EPS.
L’EPS: une pratique conseillée
En fonction du handicap et de sa gravité, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) oriente l’élève vers un établissement médico-social, un dispositif collectif ou en classe ordinaire. Dans le cas d’une scolarisation en milieu ordinaire, la pratique de l’EPS, à l’instar des autres élèves, l’élèvehandicapé doit prendre part aux séances sauf en cas de dispense médicale. Les éventuelles contre-indications et préconisations pour la pratique sportive doivent être inscrites dans le projet personnalisé de scolarisation (PPS) qui définit les modalités d’accueil de l’élève. De plus, les auteurs s’accordent sur les bienfaits d’une pratique sportive et notamment de l’EPS sous réserve d’un encadrement adapté.
D’une manière générale, et selon le Ministère de l’Education Nationale (2008), l’EPS «vise le développement des capacités motrices et la pratique d’activités physiques, sportives et artistiques.
Elle contribue à l’éducation à la santé en permettant aux élèves demieux connaître leurs corps, et à l’éducation à la sécurité, par des prises de risques contrôlées. Elle éduqueà la responsabilité et à l’autonomie, en faisant accéder les élèves à des valeurs morales et sociales (respect de règles, respect de soi-même et d’autrui) ». Ainsi, par le biais de l’EPS, les élèves vont pouvoir développer des connaissances et des capacités relevant de la dimension physique, morale et sociale. L ’EPS s’impose donccomme étant un outil d’intégration sociale, de reconnaissance de soi et qui véhicule des valeurs telles que le respect et le dépassement de soi. De surcroît, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) (2010) préconise une activité physique régulière et modérée à raison d’au moins trente minutes par jour. Cette recommandation s’adresse au plus grand nombre, incluant ainsiles personnes en situation de handicap.
Sur le plan physique, la Commission Régionale Sport et Handicap Midi‐Pyrénées (2010) préconise la pratique d’une activité physique pour des enfants en situation de handicap moteur.
Cette dernière permet non seulement d’optimiser les capacités physiques et musculaires, mais aussi d’accroître et de maintenir l’autonomie, d’améliorer la coordination, l’habileté gestuelle et l’équilibre, et enfin d’éviter les méfaits de la sédentarité (excès de poids, problèmescardiovasculaires, ostéoporose…). D’une manière plus spécifique, l’AFM (2010) recommande lapratique d’une activité physique ou sportive pour les personnes atteintes de myopathie de Becker.
Celle-ci est d’autant plus nécessaire que les muscles dystrophiques diminuent en volume et en force rapidement s’ils ne sont pas mobilisés. De ce fait la pratique physique permet de retarder l’amyotrophie musculaire qui s’installe progressivement. Cependant, elle doit se réaliser selon certaines conditions : l’intensité ne doit pas atteindre un seuil maximal ; il est déconseillé de forcer sur les muscles les plus fragiles ; il est préférable de s’arrêter avant de ressentir de la fatigue et/ou des douleurs musculaires.
Sur le plan socio-cognitif, les auteurs s’accordent sur le fait que la pratique de l’EPS permet à l’élève en situation de handicap moteur de développer l’estime de soi. Selon Gaillard (2007),l’EPS permet à l’élève d’avoir un rôle et une fonction spécifique au sein d’un groupe. Elle contribue ainsi à la construction de la conscience de soi et d’une reconnaissance sociale au travers du regard des autres. Pour Lavisse (2009), l’EPS, de par sa capacité à accroître l’autonomie d’un individu handicapé, permettrait le développement de la construction sociale. En effet, face à leur manque d’expérience motrice, la pratique de l’EPS tend à construire l’autonomie. L ’élève prend alors conscience de ses capacités physiques et découvre ainsi de nouvelles possibilités qu’il peut réinvestir dans la vie quotidienne. Cette découverte inscrit l’élève dans une nouvelle perception de lui : celle d’un enfant moins dépendant qui s’affirme en tant qu’individu. LaCommission Régionale Sport et Handicap Midi‐Pyrénées (2010) distingue les apports de la pratique physique sur le plan cognitif et sur le plan social. Ainsi, au niveau cognitif, la pratique physique permet, au-delà du développement de l’estime de soi, la diminution de l’anxiété, l’épanouissement, le dépassement de soi et l’émergence d’une certaine fierté. L’ensemble de ces apports conduit à un état de bien-être cognitif. Au niveau social, elle permet l’élargissement des capacités de communication et d’interactions positives avec les autres, une meilleure insertion dans un groupe et dans la société, s’imposant comme un moyen de lutte contre l’isolement. Enfin, selon Postic (2002) l’élève maîtrisera davantage ses appréhensions, ses peurs et ses complexes ce qui lui permettra de développer une meilleure image de lui-même.
Comme nous venons de le voir, la pratique de l’EPS est donc conseillée dans le cas des myopathies et plus généralement pour les élèves en situation de handicap moteur. L’EPS s’imposecomme un outil contribuant à l’amélioration de la santé de l’élève que ce soit sur le plan physique,mental ou social. De plus, dans le cas de Charles, le PPS ne mentionne pas d’interdiction depratique de l’EPS. Cependant, il y est stipulé qu’il demeure nécessaire de ne pas dépasser uncertain seuil d’intensité, d’arrêter la pratique en cas de fatigue et que l’activité doit se réaliser le moinspossible en dehors du fauteuil. Malgré le fait qu’elle soit conseillée, l’intégration d’un élève en situation de handicap moteur aux séances d’EPS est souvent confrontée à une source variéed’obstacles et de difficultés. Nous allons à présent passer en revue les facteurs qui constituent un frein à la participation de l’élève.
Concept de motivation : point de vue théorique
Nous avons identifié le manque de motivation comme étant la principale cause de la non pratique de Charles. Dans cette partie, il s’agira de mieux comprendre le concept de motivation et de passer en revue l’ensemble des connaissances apportées par les différents auteurs et chercheurs.
L’objectif est de savoir comment se construit et s’opère le processus de motivation afin de pouvoir adopter une démarche d’enseignement propice à la pratique de l’élève : éviter les éléments qui freinent, et mobiliser ceux qui favorisent, la construction d’un comportement motivé. Plus précisément, l’objectif est d’identifier ces éléments en vue de construire des séances suscitant chez l’élève l’envie de pratiquer régulièrement l’EPS.
L’EPS présente une entrée particulière quand à l’étude de la motivation. Cette discipline présente une certaine ambivalence : un versant que l’on peut qualifier de pratique physique et un versant plus cognitif accès sur l’apprentissage.Dans ce travail de recherche, nous nous placerons essentiellement dans une approche pédagogique axée sur l’apprentissage de compétences. Très peu d’études ont été réalisées sur la motivation scolaire des élèves en situation de handicap moteur.
Cependant, comme nous avons pu le voir auparavant, ces élèves présentent les mêmes besoins que les autres et un même mode de fonctionnement. Bien qu’ils nécessitent une attention particulière, il faut éviter le sur-protectionnisme et ne pas agir différemment. Ainsi, l’ensemble des théories que nous allons aborder, bien qu’elles ne s’adressent pas spécifiquement à des élèves en situation de handicap sont transférables pour ces derniers qui sont avant tout des élèves comme les autres.
En premier lieu, nous verrons les différentes approches autour du concept de motivation pour en retenir une définition particulière. Par la suite, nous nous intéresserons plus précisément au concept de la motivation en milieu scolaire avec une approche cognitive de la motivation. Il s’agira alors de passer en revue les différentes théories disponibles dans ce domaine afin de mieux appréhender cette notion et de percevoir comment celle-ci s’organise et agit sur l’élève. Enfin, nous focaliserons notre attention sur la théorie des buts d’accomplissement qui accorde un rôle majeur aux interactions qui s’opèrent entre un individu et son environnement dans la construction de la motivation et qui semble ainsi la plus adaptée à notre sujet d’étude.
Différentes approches de la motivation
Du latin movere, qui signifie « mettre en mouvement », la motivation est un concept qui a fait l’objet de nombreuses études et recherches depuis le début du 20 ème siècle. Ainsi, plusieurs auteurs ont fait de cette notion de motivation un objet d’étude, et ce suivant diverses approches et théories. Face à l’importance des travaux réalisés, nous verrons dans cette partie un panel non exhaustif de ces différentes approches et théories.
Tout d’abord, l’approche biologique s’intéresse à la motivation en axant les recherches sur le rôle et les effets d’actions de neurotransmetteurs et d’hormones au sein de l’organisme (Andreassi, 1986). D’autre part, la psychanalyse considère la motivation comme une caractéristique propre à un individu qui repose sur des notions d’énergie, de besoin et de tension. Freud (1915) explique que la production d’un comportement est assimilée à une pulsion faisant passer l’organisme de l’état de repos à celui de mouvement. Cette pulsion est due à une accumulation d’énergie entrainant une tension désagréable au sein de l’appareil psychique. La décharge de ce trop plein d’énergie est source de plaisir, plaisir recherché par la suite par le sujet, conduisant ainsi à la reproduction du comportement. L’approche béhavioriste avec Skinner (1979, p.161), marque sa différence avec l’approche psychanalytique dans le sens où elle attribue l’origine d’un comportement aux facteurs externes. Selon ce dernier, « ce ne sont pas des processus psychiques qui se déroulent dans les profondeurs de l’esprit conscient ou inconscient ; ce ne sont que des effets de contingences de renforcement, presque toujours liés à une punition ». Dans le prolongement de ces travaux, Houssaye (1993, p. 224) propose une théorie du conditionnement qu’il résume ainsi : « le comportement des individus est modelé par les récompenses (ou leur absence) et les punitions (ou leur absence) qui en découlent ; il peut ainsi être renforcé positivement ou négativement ». De ce fait, la reproduction d’un comportement est due à la présence de renforcements positifs (récompenses ou encouragements), alors que la présence de renforcements négatifs (punitions et dépréciations) conduit à une non-reproduction ou une correction du comportement. L’approche humaniste, quant à elle, place la dynamique interne de l’individuau centre de la construction de la motivation. Elle se démarque de l’approche béhavioriste, qui en considérantles facteurs ex ternes comme seule origine du comportement, propose une vision erronée du processus de construction de la motivation. En effet, selon l’approche humaniste, ce sont les facteurs intrinsèques qui sont prédominants dans la construction de la motivation. Dans ce sens, Maslow (1954) propose une théorie des besoins. Selon cette théorie, le comportement d’un individu est réalisé dans l’optique d’assouvir cinq besoins qui sont des besoins physiologiques, de sécurité, d’appartenance, d’estime et de réalisation.
La motivation en contexte scolaire : une approche socio-cognitiviste
Comme nous avons pu le voir en introduction de ce chapitre, l’EPS présente une certaine ambivalence. En effet, cette discipline est partagée entre pratique physique et apprentissage, si bien que l’amalgame entre «sport» et « EPS » est fréquent. Les travaux concernant la motivation en contexte scolaire et en sport sont nombreux et divers. Cependant, dans ce travail de recherche, nous nous focaliserons sur la motivation scolaire car l’EPS, avant d’être une pratique physique, est avant tout une discipline scolaire. De plus, le sujet d’étude étant en situation de handicap moteur, il serait peu judicieux d’axer notre étude et future intervention sur la dimension physique qui lui fait défauten laissant de côté le versant des apprentissages. Nous allons donc aborder ces différents travaux à travers ses grandes théories avant de nous focaliser sur celle de la motivation d’accomplissement.
Les théories de l’expectation valence
Selon Famose (1997), « deux processus expliquent les comportements motivationnels : les expectations de succès et la valeur de la tâche ». Les expectations de succès correspondent aux probabilités subjectives d’un individu qu’il a de réussir. Ces probabilités dépendent de la comparaison établie par le sujet entre le résultat souhaité et le résultat anticipé. Les expectations de succès se révèlent alors liées au sentiment de confiance en soi. L a valeur de la tâche constitue le deuxième processus pouvant expliquer les comportements motivationnels. Il s’agit de l’intérêt qu’un individu perçoit à réaliser une tâche. Cet intérêt est lié aux conséquences positives ou négatives qui découlent de l’atteinte du résultat. En fonction de la mise en relation de l’expectation de succès et de la valeur de la tâche que perçoit l’élève, ce dernier prend la décision de s’investir ou non dans la tâche (déclenchement), détermine la nature de son investissement, vers quoi ce dernier va tendre (direction), quantifie les efforts à fournir dans la tâche (intensité), et choisit de poursuivreou non la tâche dans le temps (persévérance).
Les théories de l’attribution causale
Selon Cury et Sarrazin (2000), « les théories de l’attribution centrent leurs analyses sur la manière dont un individu perçoit, interprète et traite les informations associées à son propre comportement ou au comportement d’autrui. Les causes de ces comportements n’étant pas toujours observables ni identifiables, cet individu impose sa propre perception de la causalité » Au regard de cette défintion, les attributions causales s’intéressent essentiellement aux explications fournies par l’élève pour expliquer son comportement même si celles -ci ne correspondent pas à la réalité de l’événement passé. Par exemple, un élève en situation de réussite scolaire peut expliquer sa réussite par le travail fourni, la chance ou autre. Plusieurs théoriciens se sont penchés sur les attributions causales. Dans le cadre de la motivation scolaire, la théorie de Weiner (1986) semble la plus adaptée. Il distingue ainsi quatre causes pour expliquer le résultat d’un événement : l’effort, l’habileté, la difficulté de la tâche et la chance. Il caractérise ces différentes causes en fonction detrois dimensions : le lieu de la causalité (interne ou externe), la stabilité (stable ou instable), lacontrôlabilité (contrôlable ou incontrôlable).
La théorie des buts d’accomplissement
Selon Murray (1938), il existe une autre forme de motivation que celles abordées précédemment : la motivation d’accomplissement. Cette motivation d’accomplissement se caractérise par le besoin que ressent un individu « d’accomplir quelque chose de difficile; de maîtriser, de manipuler ou d’organiser des objets physiques, des êtres humains ou des idées ; de faire cela aussi rapidement et aussi indépendamment que possible ; de surmonter des obstacles et d’atteindre un haut standard ; d’exceller; de rivaliser et de surpasser les autres ; d’accroître son amour propre par la mise en œuvre efficace du talent». Cette définition met en avant le lien de dépendance qui existe entre motivation d’accomplissement et les dimensions de difficulté et de comparaison sociale. En effet, la production du comportement est soumise au besoin d’être supérieur par rapport à une certaine norme : « atteindre un haut standard […] surpasser les autres ».
Dans la continuité de cette définition, de nombreux théoriciens s’accordent sur le fait qu’un individu, s’engage dans une tâche dans l’optique de poursuivre un but précis, d’où le nom de théorie des buts d’accomplissement. Plus précisément, selon Pintrich (2000), un but représente une construction cognitive qui rend compte de ce que l’individu cherche à atteindre ainsi que les r aisons qui le poussent à agir. La théorie des buts d’accomplissement s’intéresse ainsi aux raisons de l’engagement d’un individu dans une activité. Selon les différents théoriciens, ces buts influent sur la participation de l’individu et donc sur sa motivation. Ils soulignent également l’importance de l’environnement qui serait enclin à privilégier l’émergence et l’orientation de ces buts. En effet, des auteurs comme Heckausen (1974), Epstein (1989) et Ames (1992), attribuent une placeimportante à l’environnement et proposent les critères permettant de construire un «climat motivationnel »
orienté vers un but spécifique.
Cette théorie des buts d’accomplissement, en se centrant sur les composants nécessaires à l’aménagement d’un climat motivationnel adapté, constitue une théorie intéressante dans le cadre de notre travail de recherche. Alors que les différentes théories abordées auparavant, restent centrées sur le sujet et sa façon d’aborder une tâche, la théorie des buts d’accomplissement en s’intéressant davantage aux facteurs qui composent le climat motivationnel , offre une solution d’intervention supplémentaire. Au-delà du discours et de la persuasion, l’aménagement d’un climat motivationnelpeut donc constituer un champ d’intervention pour conduire l’élève vers un comportement motivé.
La théorie des buts d’accomplissement
Comme nous venons de le voir, la théorie des buts d’accomplissement semble la plus adaptée au domaine scolaire et à notre recherche. En effet, elle met en avant la possibilité d’intervenir sur la motivation d’un élève en agissant sur le climat proposé. L’enseignant étant le garant du cadre d’apprentissage, il est de sa responsabilité d’aménager un climat motivationnel propice. Cette théorie stipule qu’un individu s’engage dans la réalisation suivant des buts précis . Nous allons voir quels sont les différents buts que poursuit un individu lorsqu’il s’engage dans une tâche, lesquels sont les plus adaptés à l’émergence d’un comportement motivé et commentaménager un climat motivationnel adapté.
Les buts d’accomplissement : définition et influence
D’après Nicholls (1984), en accord avec la définition de Murray (1938), être compétent constitue la principale source de motivation d’un individu. La compétence peut alors prendre plusieurs aspects : d’une part il s’agira de maîtriser la tâche demandée, de s’améliorer et de faire des progrès ; d’autre part, il s’agira de rivaliser et de se montrer supérieur aux autres. Ainsi, les auteursdistinguent dans un premier temps deux buts : le but de maîtrise et le but de performance (Ames et Archer, 1988 ; Dweck et Leggett, 1988 ; Elliott et Dweck, 1988 ; Ames, 1992 ;Harackiewicz et Elliot, 1993 ; Utman, 1997).
Le but de maîtrise, également appelé but d’implication dans la tâche (Nicholls, 1984), représente le désir que manifeste un individu de progresser. Ce dernier s’engage dans la réalisation d’une tâche avec pour objectif d’apprendre, de comprendre ou d’acquérir de nouvelles compétences. Ce but de maîtrise reste essentiellement centré sur la tâche mais aussi sur l’individu.
En effet, le sentiment de compétence est perçu à travers la perception de progrès personnel. En revanche, le but de performance, également appelé but d’implication de l’égo (Nicholls, 1984), correspond au désir manifesté par un individu de se montrer supérieur et d’exposer ses capacitéset compétences aux autres. L’individu réalise la tâche dans le but d’obtenir une certaine reconnaissance voire une admiration sociale. Ce type de but accorde une importance particulière au regard d’autrui et met en avant la notion de comparaison sociale. Le sentiment de compétence estperçu, non plus à travers la perception de progrès personnel, mais à travers la production d’unemeilleure performance par rapport à un groupe social référant.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. REVUE DE LITTERATURE
I.1. Myopathie
I.1.1. Myopathie : une maladie au caractère polymorphe
I.1.2. La dystrophie de Becker : une forme de dystrophie musculaire
I.1.3. Expression de la dystrophie musculaire de Becker chez l’élève
I.2. EPS et handicap
I.2.1. Ecole et handicap : vers une politique d’intégration et de lutte contre l’exclusion
I.2.2. L’EPS: une pratique conseillée
I.2.3. Les obstacles à la pratique de l’EPS dans le cas d’un élève handicapé moteur
I.3. Concept de motivation : point de vue théorique
I.3.1. Différentes approches de la motivation
I.3.2. Définition retenue
I.3.3. La motivation en contexte scolaire : une approche socio-cognitiviste
I.3.3.1. Les théories de l’expectation valence
I.3.3.2. Les théories de l’attribution causale
I.3.3.3. La théorie de l’autodétermination
I.3.3.4. La théorie des buts d’accomplissement
I.3.4. La théorie des buts d’accomplissement
I.3.4.1. Les buts d’accomplissement : définition et influence
I.3.4.2. Climat motivationnel
I.4 Résumé de la partie théorique et annonce de la problématique
II. PROTOCOLE DE RECHERCHE
II.1. Le contexte
II.1.1. Présentation de l’école, de la classe et de l’élève
II.1.2. Cadre d’intervention
II.2. Présentation de l’expérimentation
II.2.1. Le questionnaire
II.2.1.1. Présentation du questionnaire
II.2.1.2. Conditions de passation du questionnaire
II.3. Présentation de la séquence d’enseignement
II.3.1. Déroulement de la séquence
II.3.2. Mise en œuvre d’un climat motivationnel adapté à partir du TARGET
II.3.3. Présentation d’une séance type
II.4. Résultats
II.4.1. Résultats des observations lors des matchs de fin de séance
II.4.2. Résultats des fiches d’auto-évaluation
II.4.3. Résultats du questionnaire
II.4.4. Analyse des résultats
II.4.5. Retour aux hypothèses
II.5. Limites du protocole et perspectives d’amélioration
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE I : Extrait d’entretien avec l’élève
ANNEXE II : Adaptation du Questionnaire d’Approche et d’Evitement en EPS (Schiano Lomoriello, Cury & Da Fonséca, 2005)
ANNEXE III : Fiches d’auto-évaluation
ANNEXE III : Fiches d’auto-évaluation (suite)