Identifier les comportements dits « difficiles »
Comment définir « un comportement difficile » ?
Le dictionnaire Larousse définit le terme de comportement comme étant une manière d’être, d’agir ou de réagir. En psychologie, Jacques Van Rillaer défini ce terme de deux façons différentes : « pris au sens étroit, il désigne une action manifeste, directement observable. Au sens large, il désigne toute activité signifiante, directement ou indirectement observable, et il présente trois dimensions : une composante cognitive (perception, souvenir, réflexion, etc.), affective (plaisir, souffrance, indifférence) et motrice (action, expression corporelle)» (2003, p. 93). Pour mieux cerner ce terme, nous nous en tiendrons à son sens large, qui prend en compte les facteurs internes et externes qui agissent sur un comportement.
Selon le psychologue Rillaer, un comportement serait une forme d’action influencée par des stimuli externes et internes. L’Encyclopædia Universalis, défini les stimuli comme étant « des facteurs externes ou internes capables de déclencher une réaction donnée ». Le contexte d’une situation par exemple, peut avoir un impact sur le comportement d’un individu (stimuli externes). Les perceptions de l’individu sur ce qui l’entoure peuvent aussi engendrer un type de comportement pour répondre à la situation (stimuli internes). En réalité, pour comprendre un comportement, plusieurs variables doivent être prises en compte et elles ne sont pas toujours observables ni quantifiables. Définir un comportement est donc un cheminement complexe. Pourtant, dans le contexte de l’école, il n’est pas rare d’entendre des enseignants qu’un élève a un comportement « difficile » parce qu’il est « trop énergique », « désagréable », ou « agressif avec les autres».
Mais alors comment pouvons-nous identifier « un comportement difficile » ? Dans un premier temps, il est important d’identifier la difficulté en question. Le comportement peut être jugé difficile pour diverses raisons, selon les enseignants. Dans notre cas, cette expression fait référence à l’élève qui a un comportement « perturbant » le déroulement des activités en classe. Dans leur ouvrage, L’élève contre l’école, Jean-Marc Louis et Fabienne Ramond affirment que « ce sont souvent des traits de tempérament ou de caractère non compris ou exacerbés par unmal être qui vont conduire à des réactions qui désorientent les adultes » (2010, p.10). Les enseignants qui ne comprennent pas le caractère d’un élève vont réagir différemment avec eux. Cette citation souligne la réflexion selon laquelle un comportement est une forme de réaction, dû à des facteurs non-observables, tels qu’un « mal-être ». C’est souvent l’élève qui est jugé, car on suppose que ces comportements le définissent. Il est alors qualifié de « difficile » ou de «perturbateur ». Louis et Ramond donnent deux sens à ce terme : « perturbateur dans le sens négatif du terme, comme étant sujet au désordre, à l’inadéquation, mais aussi perturbateur dans le sens où l’élève déconcerte et bouleverse émotionnellement » (p.5). Nous utiliserons donc les deux sens de ce terme pour prendre en compte les élèves qui perturbent le déroulement des activités en extériorisant leurs émotions, mais aussi les élèves qui ont des comportements plutôt passifs.
Ainsi, décréter qu’un élève est « difficile » ne prend pas en compte les différents types de difficulté que peuvent avoir l’élève. La notion « d’élève difficile » est employée à tort et à travers par les adultes face à leurs angoisses, et cela résulte souvent à un étiquetage très rapide des élèves qui peut leur porter préjudice durant leur parcours scolaire.
Distinguer un comportement « difficile » d’un « trouble du comportement »
Dans la classe, l’enseignant peut être confronté à divers profils d’élèves, dont des élèves en situation de handicap. Il existe une catégorie de handicap qui prend en compte les troubles du comportement, ainsi une distinction doit être faite rapidement afin de mieux s’adapter aux besoins des élèves.
Les troubles du comportement sont présentés comme « une pathologie parfois reliée à des facteurs biologiques et environnementaux et se présentent différemment, selon l’âge et le sexe de la personne, et peuvent aussi varier, en fréquence et en intensité, selon le contexte » (Curonici, Joliat et McCulloch, 2006, p.151-199). Mais la limite entre les troubles du comportement et les difficultés d’ordre comportemental peut être difficile à tracer, surtout sans un diagnostic. Lise Saint-Laurent cite des recherches du Ministère de l’éducation et de l’enseignement supérieur au Québec, et de la Convention Collective des Enseignants, qui distinguent deux types de troubles (2008, p. 98). Selon le MELS, les troubles du comportement varient selon leur intensité et leur fréquence. Il définit les troubles du comportement dits « graves », qui sont « des comportements agressifs ou destructeurs de nature antisociale dont la fréquence est élevée depuis plusieurs années », ils sont répétitifs, persistants, et « violent manifestement les droits des autres élèves ou les normes sociales propres à un groupe d’âge », ces comportements peuvent se traduire par des agressions verbales ou physiques, l’individu cherche à se confronter à l’autorité par « des actes d’irresponsabilité et de défi » (p. 98). Les troubles graves révèlent donc des comportements qui persistent depuis plusieurs années et qui sont plutôt de nature agressifs. D’un autre côté, la Convention Collective des Enseignants (2007) définit les troubles dits « légers » comme des « comportements sur-réactifs en regard des stimuli de l’environnement (paroles et actes injustifiés d’agressions, d’intimidation, de destruction, refus persistant d’un encadrement justifié) », ou «des comportements sous-réactifs en regard des stimuli de l’environnement (manifestations de peur excessive à l’égard de personnes et de situations nouvelles, comportements anormaux de passivité, de dépendance et de retrait) » (2008, p. 98). Ainsi, il existe un aspect diagnostique qui ne peut être posé que par des professionnels de la santé pour reconnaître un trouble du comportement, notamment par la maison départementale des personnes handicapées, la MDPH. C’est cet aspect médical, qui permet de distinguer les troubles des difficultés.
Par ailleurs, selon Saint-Laurent, il existe certaines caractéristiques communes aux élèves présentant des troubles du comportement : des difficultés d’apprentissage, et des difficultés sur le plan sociocognitif (difficulté à comprendre les émotions des autres, impulsivité et rejet social) (2008, p. 102). Certains comportements seraient alors plus fréquents que d’autres en primaire :
– L’hyperactivité : l’élève qui bouge constamment, très énergique, il est très vite distrait, et désorganisé dans son travail. Il agit aussi sur le coup de l’impulsivité.
– Le retrait social : la timidité extrême et la peur du contact avec les autres caractérisent ces élèves. Ils ne s’expriment pas, sont très renfermés sur eux-mêmes, ne jouent pas et ont une image négative d’eux-mêmes. Leur relation aux autres est donc quasi inexistante.
– Les troubles de conduite : ce sont les troubles les plus difficiles à gérer pour un enseignant. L’élève se montre agressif, défie l’autorité, et se met en colère facilement ou bien alors, il commet des actes plus « cachés », il vole et ment.
On retrouve par ailleurs un système de classification utilisé par les médecins et les psychologues cliniciens dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, publié en 1994 par l’association américaine de psychiatrie où sont recensés des troubles mentaux dont les troubles de conduite, d’attention et d’hyperactivité.
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Table des matières
Introduction
Cadre théorique
1. Identifier les comportements dits « difficiles »
1.1. Comment définir « un comportement difficile » ?
1.2 Distinguer un comportement « difficile » d’un « trouble du comportement »
1.3 Les profils des élèves aux comportements difficiles
2. Comprendre les comportements de l’élève pour mieux intervenir
2.1 La pyramide des besoins selon Abraham Maslow
2.2 Les causes des comportements
2.3 Les interventions permettant de minimiser les comportements perturbateurs
3. La motivation
3.1 Définition de la motivation
3.2 La dynamique motivationnelle selon Rolland Viau
3.3 Les activités motivantes
4. Les stratégies mises en œuvre par l’enseignant
4. 1 Les stratégies d’enseignement pour susciter la motivation des élèves
4. 2 Le rôle de l’enseignant
4. 3 La relation de confiance
5. Problématique et hypothèses
6. Présentation du cadre méthodologique
6.1 L’observation directe
6.2 L’entretien
6.3 Présentation des résultats
7. Analyse croisée et discussion
7.1 La place de la motivation dans les stratégies d’enseignement
7.2 Le rôle de l’enseignant et son impact sur le comportement des élèves
Conclusion
Bibliographie/sitographie
Annexes