La molécule de collagène

Les protéines sont des macromolécules biologiques tridimensionnelles constituées d’un enchaînement linéaire d’acides aminés (structure primaire) qui se replie par la suite en une structure secondaire et tertiaire. Ces sous-unités vont ensuite s’agencer dans l’espace pour former la structure quaternaire d’une molécule plus complexe. La structure tridimensionnelle spécifique confère aux protéines leur activité biologique. Si la machinerie génétique est responsable de la biosynthèse de la structure primaire, les processus de repliement et d’auto-assemblage subséquents sont essentiellement guidés par des réactions enzymatiques et/ou simplement par des interactions relevant de la physico-chimie. Enfin, de nombreuses modifications posttraductionnelles peuvent avoir lieu.

D’une façon générale, les termes « autoassemblage » et « auto-organisation » se réfèrent à “l’intégration d’éléments isolés dans une structure fonctionnelle émergente” , une structure « autoassemblée » se rapportant plutôt à une structure à l’équilibre et l’auto-organisation décrivant plutôt un processus loin de l’équilibre. Les phénomènes d’auto-assemblage moléculaire décrivent donc l’organisation spontanée des molécules en des arrangements stables et de structures bien définies, dans des conditions d’équilibre thermodynamique via des interactions non covalentes. Ces interactions sont typiquement des liaisons hydrogènes, des interactions électrostatiques et de van der Waals. Quand elles gagnent en taille, les protéines gagnent en stabilité . L’auto-assemblage de sous-unités identiques semble être une caractéristique commune à l’organisation de nombreux organismes. Ce mécanisme permet d’utiliser efficacement l’information génétique dans la construction de grands édifices intra- ou extracellulaires. En effet, il est plus économique de ne coder que les premières « briques » (ou sous-unités élémentaires), la suite de la construction à grande échelle étant induite par les propriétés physico-chimiques. Un très bon exemple de système biologique auto-assemblé est celui du cytosquelette constitué principalement des filaments d’actine, de microtubules et de filaments intermédiaires. Chacun de ces éléments est constitué de petites protéines de quelques nanomètres formant des édifices pouvant s’étendre sur plusieurs microns. Si les phénomènes d’auto-assemblage moléculaires sont bien établis, les phénomènes d’auto-assemblage pour former des structures à une échelle supramoléculaires (des tissus, par exemple) le sont beaucoup moins. Notamment, des analogies avec les cristaux-liquides ont été proposées pour expliquer ce type de mise en ordre. C’est dans ce cadre particulier que se situe le travail présenté dans ce manuscrit en s’intéressant plus spécifiquement au cas du collagène.

Le collagène est la protéine la plus abondante chez les mammifères . C’est une protéine structurale majeure des tissus conjonctifs, dans lesquels il remplit le rôle d’armature. En effet, les types de collagène les plus abondants s’assemblent sous la forme de fibrilles dont la résistance, à poids égal, surpasse celle de l’acier. Ils sont associés au sein d’édifices supramoléculaires à de nombreux autres types de collagène  et ainsi qu’à d’autres macromolécules partenaires. Les fibrilles de collagène sont non seulement responsables de la rigidité des tissus, mais aussi de leur architecture spécifique qui leur confère des propriétés particulières. Ainsi, suivant les tissus considérés, le collagène sera organisé de façon spécifique, de manière à répondre de façon optimale à ses fonctions. Les exemples les plus spectaculaires sont ceux de la structure hélicoïdale de l’os compact  , du « contreplaqué » ultra régulé de la cornée  et de la directionnalité des tendons . En revanche, dans les viscères et le derme, les fibrilles de collagène sont enchevêtrées irrégulièrement dans tous les sens.

Une mauvaise conformation du collagène peut ainsi provoquer des dysfonctionnements dans les phénomènes d’assemblage à l’origine de graves pathologies, souvent d’origines génétiques . Parmi les plus connues, citons le scorbut, l’ostéogenèse imparfaite (ou maladie des « os de verre ») ou encore les syndromes d’Ehler-Danlos qui se signalent par une hyperélasticité des tissus (d’où le syndrome de « l’homme caoutchouc »).

La molécule de collagène 

Rôle structural du collagène

Le collagène est une protéine omniprésente dans le règne animal. Chez les vertébrés, il représente un tiers des protéines de l’organisme et, dans une bien moindre mesure, on le rencontre aussi chez les insectes, les arthropodes ainsi que dans de nombreuses sécrétions. Il est localisé dans les tissus conjonctifs qu’il contribue à structurer en se déployant en un réseau fibrillaire. Ce réseau participe à la constitution d’une matrice extracellulaire spécifique sécrétée par les cellules qui confère à ces tissus leur forme, leur résistance mécanique et leur flexibilité. Les tissus conjonctifs relient les organes et constituent des barrières mécaniques et fonctionnelles entre eux. Ces tissus sont faits de cellules dispersées dans une matrice que ces dernières ont ellesmêmes sécrétées. La matrice en question est en grande partie constituée de fibrilles de collagène associées à d’autres types de collagènes non fibrillaires, de nombreuses autres protéines comme la fibrine et l’élastine, et les protéoglycanes. Cet ensemble, de composition très variable suivant les tissus considérés, est baigné dans du fluide interstitiel qui contient de l’eau, des ions et différentes macromolécules circulantes. Enfin, dans le cas des tissus minéralisés, des cristaux de phosphate de calcium (apatite) sont aussi associés à la composante organique de la matrice extracellulaire.

On trouve les collagènes fibrillaires principalement dans la peau (40%), les os et la dentine (10-20%), le cartilage et les tendons auxquels ils confèrent leurs propriétés mécaniques spécifiques . Le collagène joue aussi un rôle primordial dans l’œil, puisqu’il contribue aux propriétés optiques de la scléra et de la cornée , respectivement l’opacité et la transparence.

La famille des collagènes 

Le nom « collagène » est en fait utilisé comme terme générique pour les protéines formant une triple hélice caractéristique de trois chaînes α ; tous les membres de la famille des collagènes  forment des structures supramoléculaires dans la matrice extracellulaire même si leur taille, leur fonction et leur distribution dans les tissus peuvent varier considérablement. Jusqu’à présent, 28 types de collagènes ont été identifiés et classés dans sept familles différentes suivant leur structure et leur organisation supramoléculaire (Cf. Tableau 1 et Tableau 2). Les différents types de collagènes sont caractérisés par la complexité et la variété de leur structure, et la présence de domaines non hélicoïdaux additionnels. Par la suite, nous nous concentrerons sur les collagènes fibrillaires (« famille A »), et plus particulièrement sur le collagène de type I, le plus abondant, puisqu’il représente 90% des collagènes. Néanmoins, la description du domaine hélicoïdal principal est valide pour tous les autres types de collagène, à quelques variations de séquence près.

La structure du collagène de type I

Structure primaire – La structure primaire d’une protéine correspond à la séquence des acides aminés dont elle est constituée. Une chaîne α de collagène est constituée d’un millier d’acides aminés, dont un sur trois est une Glycine. La séquence peut donc être schématisée comme une suite de triplets (Gly-X-Y)n, où X et Y peuvent être n’importe quel acide aminé, mais qui le plus souvent est la proline ou l’hydroxyproline, qui constituent 30% des résidus X et Y. Suivant le type de collagène considéré, les chaînes α peuvent être différentes. Elles sont donc indexées par un chiffre romain correspondant au type de collagène et un chiffre arabe pour les différencier à l’intérieur d’une même molécule. Ainsi, une molécule de collagène de type V est composée de trois chaînes α différentes : α1(V), α2(V) et α3(V). Les séquences de la plupart des types de collagène sont disponibles dans des bases de données sur les protéines telles que Swissprot .

Dans de nombreux cas, ce qui est réellement connu est la séquence de nucléotides plutôt que la séquence d’acides aminés. Aussi, compte tenu des nombreuses modifications posttraductionnelles, la correspondance entre les nucléotides et les acides aminés n’est pas triviale. En particulier, il a été montré que l’hydroxylation des lysines et des prolines joue un rôle structurel et fonctionnel non négligeable.

L’analyse minutieuse de la structure primaire fait apparaître différents motifs , notamment la répétition périodique de certaines séquences caractéristiques. En particulier, la distribution de certains acides aminés (Lysine, Glutamine et Arginine) présente chez les collagène fibrillaires une périodicité de 18 résidus, tandis que l’agglomération de résidus polaires et hydrophobes apparaît tous les 234 résidus (= D = 67 nm). Nous verrons plus tard que ces motifs périodiques jouent un rôle dans l’organisation particulière des molécules de collagène à l’intérieur des fibrilles. Enfin, notons que du fait de l’asymétrie de la séquence d’acides aminés et de la polarité de ces derniers, qui pointent tous dans la même direction de par la nature de la liaison peptidique, la molécule de collagène présente une polarité ; aussi distingue-t-on les extrémités N-terminale et Cterminale.

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Table des matières

Introduction
Références de l’Introduction
Chapitre 1 : Le système étudié : les phases denses de collagène in vitro
1.1 La molécule de collagène
1.1.1 Rôle structural du collagène.
1.1.2 La famille des collagènes
1.1.3 La structure du collagène de type I
Structure primaire
Structures secondaire et tertiaire
Structure quaternaire
Modifications co- et post-traductionnelles
1.1.4 Propriétés physico-chimiques du collagène de type I
Charge nette portée par le collagène
Flexibilité
1.1.5 Dénaturation du collagène en gélatine
1.2 Préparation des solutions de collagène
1.2.1 Extraction du collagène
Sources de collagène
Protocole d’extraction
Effet des ultrasons
Extraction à pH basique
1.2.2 Caractérisation
Caractérisation de la pureté
1.2.3 Concentration des échantillons
Concentration par évaporation
Concentration par osmose inverse
Dosage/Titration des concentrations
Conditionnement des échantillons
1.3 Techniques
1.3.1 Microscopie optique à lumière polarisée
La biréfringence
1.3.2 Diffusion des rayons X
Principe
Ligne de lumière ID02
Montages de laboratoire
Analyse des clichés
1.3.3 Microscopie électronique à transmission
Fixation chimique
Inclusion
Ultramicrotomie
Coloration
Observation
1.3.4 Microscopie électronique à balayage
Séchage supercritique
Observatione
Références du Chapitre 1
ANNEXE 1 : Protocole d’extraction du collagène de type I de tendons de queues de rat
ANNEXE 2 : Protocole de dosage de l’hydroxyproline
ANNEXE 3 : Protocole de préparation des gels d’électrophorèse
ANNEXE 4 : Protocole de fixation pour la microscopie électronique
Chapitre 2 : Etude de la transition isotrope/cholestérique dans les solutions denses de collagène
2.1 Le collagène : un exemple de cristal liquide lyotrope
2.1.1 Généralités sur les cristaux liquides
2.1.2 Macromolécules biologiques formant des phases cristal liquides
2.1.3 Aperçu théorique de la transition ordre-désordre : mécanique statistique
2.2 Résultats
2.2.1 Textures et séquences de phases
Texture en bandes
Séparation de phases
Influence du solvant sur la transition
2.2.2 Diffusion des rayons X aux petits angles
Solutions isotropes concentrées
Solutions anisotropes
Mesure du paramètre d’ordre
Loi de dilution
2.3 Comparaison aux modèles théoriques
2.3.1 Théorie de volume exclu (Onsager-Lee) en régime électrostatique
Formalisme
Calcul de Deff
2.3.2 Prise en compte de la flexibilité des molécules
Modèle numérique de Chen
Largeur du fuseau biphasique
Addendum juillet 2007
2.4 Conclusion
Références du Chapitre 2
ANNEXE 5 : Influence du cisaillement sur le signal de diffusion nématique
ANNEXE 6 : Exemple de calcul avec le modèle de Chen
Chapitre 3 : Caractérisation rhéologique de solutions de collagène – gélification
3.1 Généralités
3.1.1 Comportement rhéologique et structure microscopique : modèle moléculaire
Ecoulement de solutions de polymères linéaires
Gélification/Transition sol-gel
Propriétés rhéologiques des polymères cristaux-liquides nématiques
3.2 Résultats et discussion
3.2.1 Observations visuelles
3.2.2 Expériences en cellule de Couette
Matériel
Rhéogrammes
Influence de la force ionique
Conclusion
3.2.3 Géométrie cône-plan
Préliminaires
Protocole expérimental
Précisaillement, test en fluage et recherche du domaine linéaire
Vieillisement en fonction du temps
Balayage en fréquences
Influence de la concentration
Expériences en régime permanent
Application de la loi de superposition de Cox-Merz
Influence de la température
3.3 Conclusion
Le collagène, un fluide complexe
Compétition entre organisation cholestérique et la gélification
Références du Chapitre 3
Chapitre 4 : La fibrillogenèse in vitro en milieu dense
4.1 Les fibres de collagène/rappels bibliographiques
4.1.1 Structure des fibres de collagène
Organisation axiale des triples hélices dans les fibrilles
Organisation latérale des triples hélices dans les fibrilles
Conclusion sous forme d’avertissement
4.1.2 La fibrillogenèse in vivo
4.1.3 Etude de la fibrillogenèse in vitro dans la littérature
Précipitation induite thermiquement (Heat precipitation)
Concentration
Quelques mots de terminologie
Modèle mécanistique de la fibrillogenèse in vitro
Thermodynamique de la fibrillogenèse
Rôle des télopeptides
La réticulation du collagène
Autres « arrangements fibrillaires »
Rôle de molécules biologiques annexes
4.1.4 Fibrillogenèse in vitro par clivage du procollagène
4.2 Préparation des échantillons / Protocole expérimental
Préparation des solutions acides
Diffusion de vapeurs
Dialyse contre un tampon
Évaluation de l’absorption de la lumière
4.3 Résultats et discussion
4.3.1 Diffusion des rayons X
Pic de corrélation latéral (signal équatorial)
Réflexions périodiques axiales (signal méridional)
Comparaison avec les fibres natives de collagène
Dégâts d’irradiation
4.3.2 Microscopies électroniques
Microscopie Electronique en Transmission
Microscopie Electronique à Balayage
4.3.3 Influence de la concentration en milieu acide
Observations optiques
Diffusion des rayons X
Microscopie électronique
Discussion
4.3.4 Influence de la concentration en milieu neutre et basique
Observations optiques
Diffusion des rayons X
Microscopie électronique à transmission
Discussion
4.3.5 Influence du pH
Observations optiques
Diffusion des rayons X
Microscopie électronique
Conclusion
4.3.6 Influence de la force ionique
Observations optiques
Diffusion des rayons X
Microscopie Electronique
Conclusion
4.3.7 Quelques remarques sur la cinétique
Cinétique à court terme
Observations optiques
Diffusion des rayons X
Cinétique à long terme (vieillissement des gels)
Réticulation
4.4 Conclusion
Implications biologiques
Implication dans les sciences des matériaux
4.5 Perspectives
Références du Chapitre 4
Conclusion

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