La mise en valeur des archives

La mise en valeur des archives

État des lieux de la mise en valeur des AEG

La Loi sur les archives publiques (LArch) préconise la mise en valeur des fonds archivistiques (LArch 2000, ch. IV, art. 15). Elle passe donc par toute une série d’entreprises destinées à faire connaître les AEG du public. Les expositions restent une valeur sûre3. En moyenne, les AEG en montent deux par année. Ainsi, le « Temps restauré. Le monde fragile des archives », présentation consacrée à la restauration des documents, et les « 150 ans de l’église russe de Genève » se sont tenus à l’Ancien Arsenal4 en 2016. Malheureusement, l’espace est actuellement relativement réduit. Un projet futur devrait néanmoins améliorer considérablement cet état de fait (Rouchaleau 2017) et permettre une scénographie de plus grande ampleur. Palliant à cette problématique d’espace, les AEG proposent une visite virtuelle sous forme de storymap de l’exposition en cours « Côté chaire côté rue. La Réforme à Genève » (AEG 2017a). Outre les expositions, les AEG promeuvent également leur fonds par le bais de conférences, souvent en collaboration avec d’autres organismes comme l’Université de Genève ou la Société d’histoire et d’archéologie de Genève (AEG, 2017b). Ces événements sont importants. En effet, « [l]a participation à ce type d’événements donne aux AEG une meilleure visibilité et fait connaître l’institution à un public plus large que celui des chercheurs habituels » (AEG, 2016, p. 5). Et lorsque l’occasion se présente, elles concilient mise en valeur et actualité, comme dans le cas des portes ouvertes en 2012 à l’occasion de la Journée Suisse des archives (Tribune de Genève, 2012). Nous n’aborderons pas ici les cours proposés par les AEG pour les employés de l’administration cantonale ni les séminaires en collaboration avec l’Université de Genève (faculté des Lettres, département d’histoire), considérés ici comme trop spécifiques.

À l’heure de la communication 2.0, impossible de faire l’impasse sur les médias sociaux. Les AEG disposent de deux réseaux sociaux parmi les plus utilisés : Facebook et Twitter. Elles publient sur le premier en moyenne deux à trois articles par mois, moins pour le second. Ce type de vecteur d’informations reste donc encore fort peu exploité par le service car, pour une visibilité efficiente, il faudrait investir davantage de ressources. Et cela sans pour autant obtenir de garantie quant à un éventuel impact sur la fréquentation des archives. Venons-en enfin au jeune public. Ce n’est que depuis 2013 que les AEG s’ouvrent aux scolaires. Longtemps, les visites ont été organisées au coup par coup, allant de la chasse au trésor pour les 4-6 ans à la présentation des sources pour les autres (Dunant-Gonzenbach 2017). L’institution entame en 2017 une collaboration avec École et Culture, organisme mis en place par l’Office cantonal de la culture et du sport afin « [d’] assurer une équité de traitement à tous les élèves et [d’] impliquer les artistes et acteurs culturels dans la formation » (État de Genève 2014). L’origine de cette collaboration remonte à l’association de l’archiviste Anouk Dunant-Gonzenbach et de la danseuse et chorégraphe Manon Hotte dans le cadre de la mise en place d’archives chorégraphiques (Dunant-Gonzenbach 2016). Les écoliers mènent durant un stage de danse contemporaine, « Création, semis et palabres » (École et Culture, 2016), une réflexion, non seulement sur la transmission artistique, mais également archivistique. Ce partenariat lui assure enfin un certain ascendant sur les milieux éducatifs.

La médiation culturelle : origines et caractéristiques. Parler de médiation suppose d’avoir une idée de ce que cela sous-entend et implique. Le but n’est donc pas d’effectuer ici une étude exhaustive sur la médiation culturelle, son passé et son devenir. Nous ne sommes en effet pas destinés à être des médiateurs assermentés, nous laissons aux spécialistes le loisir d’aborder les tréfonds de cette « nouvelle » discipline. Néanmoins, avant d’aller plus loin, il importe de mentionner ici la différence entre action, animation, activité et médiation culturelle. Pour les uns, comme pour Anne Michellod, médiatrice culturelle, l’action culturelle revêt une dimension politique. Elle obéit à une ligne de conduite, souvent suite à une réflexion sur les publics et les nonpublics (Michellod 2017). Pour d’autres, les « actions de médiation » représentent la concrétisation de la médiation directe, soit en contact avec le public (Montoya 2009, p. 208). L’animation, elle, relève du domaine pratique, de la logistique. Elle « placerait l’accent sur la présence, l’accompagnement » (Menghini 2017, p. 2). Nous parlerons alors d’animations au sens global. Avec la médiation culturelle entre en scène l’aspect relationnel. « [L]a médiation, elle, insisterait sur la transmission, la création, la démarche créatrice » (Menghini 2017, p. 2). Il ne s’agit plus simplement d’une mise à disposition de la connaissance mais vraiment de la rencontre entre trois éléments, le médiateur, le public et l’objet (ou l’institution). Pourquoi somme toute faire de la médiation culturelle ? Quels en sont les bénéfices ? Eva Quintas cite, parmi d’autres, le fait de :

• « Développer une sensibilisation à l’art, au patrimoine et à la culture dans leur diversité

• Faciliter l’expression et l’autonomisation des personnes par l’activité culturelle

• Encourager la compréhension des disciplines artistiques et des champs culturels

• Renforcer la reconnaissance de la culture au sein de la société. » (Quintas 2014, p. 7)

Les retombées peuvent elles-mêmes être divisées selon les trois piliers de la médiation (public, médiateur et institution). Les impacts sur les participants sont de l’ordre de l’échange, de la création et de la découverte. En outre, il a été constaté qu’une médiation efficiente enracine le public dans un sentiment d’appartenance et d’estime de soi. Les plus jeunes, eux, « connaissent de meilleurs résultats scolaires, ont plus de chance de développer un intérêt pour les arts et la culture à l’âge adulte et démontrent une plus forte propension à devenir des citoyens actifs » (Jacob 2014, p. 53). Pour les artistes et les médiateurs, elle entraîne une réflexion sur leurs pratiques et stimule de nouvelles pratiques. Pour les institutions et les médiateurs, elle aboutit à la mise en place de nouveaux partenariats :

Au Québec L’émergence de la médiation culturelle résulte d’un bouleversement socio-économique (Lafortune 2013, pp. 1-2 et 11-13). Tirant parti des nombreuses crises des années 1980, crises économique, politique, culturelle et environnementale, le Québec, et plus particulièrement les municipalités, considèrent la médiation culturelle comme voie de la raison. Les accords de développement culturel avec le ministère de la Culture et des Communications inaugurées en 1995 aboutissent en 2011 à un résultat conséquent pour la politique culturelle puisque cent cinquante-quatre villes, soit 86% de la population de cet état, y ont souscrit (Lafortune 2012, p. 7). Ces rapprochements, qui visent en particulier à accroître « la vitalité culturelle des collectivités », à augmenter « la participation de la citoyenne et du citoyen au développement culturel des collectivités », à affirmer « l’identité et l’appartenance » et à assurer un « dynamisme économique, social et démocratique » (Ministère de la Culture et des Communications 2016), débouchent sur la mise à disposition des municipalités d’un large budget pour les dépenses culturelles (31% des dépenses totales). À l’instar des autres pays, notons que les premiers à mettre en place de la médiation culturelle sont essentiellement les milieux de l’art (musées), en réponse à « la fragmentation des publics et à la fracture sociale » (Lafortune 2012, p. 12). En archivistique, des initiatives émergent peu à peu. Citons pour exemple les journées « Rares et Précieux » tenues aux Musées de la Civilisation (Delrieu 2014). Certes, l’impulsion est donnée dans un cadre muséal. Cette institution a pourtant su également mettre en avant les collections sises en son centre d’archives. Avec ses « portes ouvertes », le musée propose de rebondir sur l’actualité pour présenter au public une partie de son fonds. Le lien avec les visiteurs fait partie des éléments-clefs de la médiation culturelle. Le point de contact, en quelque sorte. Car comme le rappelle Mallet, « [o]n ne s’approprie que ce dans quoi on peut se reconnaître, mais aussi ce qu’on peut transformer pour le rendre semblable à ce que l’on est » (Mallet cité dans Delrieu 2014, p. 63).

En Suisse L’émergence de la médiation culturelle en Suisse n’est pas aussi marquée par la politique que chez ses voisins, bien qu’il y soit également possible de retrouver les traces d’une volonté de démocratisation politique. Une des premières initiatives marquantes en la matière remonte à 1983 avec le Kunstmuseum de Berne. Ce dernier, en collaboration avec l’éducation, met en place un « service pédagogique muséal institutionnalisé » (Association suisse des médiateurs culturels de musée [2014], p. 10). Introduire un public scolaire dans un tel milieu ne s’est pas fait sans heurter certaines sensibilités, supputant le manque d’intérêt d’une telle population. Néanmoins, la persévérance a su payer puisque les dernières années de 1970 voient naître un département « Schule und Museum » (Ibidem, p. 10) au Pestalozzianum de Zürich pour collaborer étroitement avec le Kunsthaus. Mettre en place des enseignants dans le rôle de médiateur nécessite inévitablement l’instauration parallèle de formation continue. Ainsi, quasi systématiquement, la création d’une médiation culturelle en Suisse alémanique va de pair avec l’appui de l’éducation. Du côté romand, le développement de la médiation culturelle prend une autre tournure. Trop peu nombreux, les médiateurs optent pour l’association à diverses institutions, comme les maisons de quartiers. Non seulement le travail et l’approche des expositions s’en trouvent renforcés, mais encore les publics touchés augmentent. La démocratisation culturelle se retrouve en arrière-plan :

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Table des matières

Déclaration
Remerciements
Résumé
Abréviations
Table des matières
1. Introduction
1.1 La médiation culturelle, une ou des définitions ?
1.1.1 La culture
1.1.2 La médiation
1.1.3 La médiation culturelle ?
1.2 Archives d’État de Genève (AEG)
1.2.1 État des lieux de la mise en valeur des AEG
2. Méthodologie : Modes de collecte
2.1 Recherche documentaire
2.2 Questionnaire exploratoire
2.2.1 Objectifs
2.2.2 Choix d’une technique d’enquête
2.2.3 L’univers de l’enquête et l’échantillonnage
2.2.3.1 Population ciblée
2.2.3.2 Echantillonnage
2.2.4 Rédaction du questionnaire et mode de collecte
3. La médiation culturelle : origines et caractéristiques.
3.1 Ses origines
3.1.1 En Belgique
3.1.2 En France
3.1.3 Au Québec
3.1.4 En Suisse
3.2 Médiation culturelle : ses principales caractéristiques
3.2.1 Le triptyque de la médiation culturelle
3.2.1.1 Le médiateur
3.2.1.2 Le public
3.2.1.3 L’objet
3.2.2 Les différents types de médiation
3.2.2.1 Médiation directe
3.2.2.2 Médiation indirecte
3.2.3 Ses outils
4. État de l’art de la médiation culturelle scolaire dans les services d’archives.
4.1 La mise en valeur des archives
4.1.1 La Belgique
4.1.2 La France
4.1.2.1 Un service bipartite
4.1.2.1.1 Enseignants
4.1.2.1.2 Institution
4.1.2.2 L’action pédagogique en quelques chiffres
4.1.3 Le Québec
4.1.4 La Suisse romande
4.1.4.1 Fréquence des accueils scolaires
4.1.4.2 Raisons au manque de médiation scolaire
4.2 Typologie des activités proposées
4.2.1 Intramuros
4.2.1.1 La visite
4.2.1.2 Ateliers thématiques
4.2.2 Extra-muros
4.2.2.1 Le prêt d’exposition
4.2.2.2 Animations en classe
4.2.2.3 L’archivobus
4.2.3 Supports pédagogiques
4.2.3.1 Dossiers et documents pédagogiques
4.2.3.2 Mallettes pédagogiques
4.2.3.3 Le numérique
5. Mise en place d’une visite scolaire générique aux AEG
5.1 Séquence pédagogique
5.1.1 Objectifs
5.1.2 Caractéristiques du public
5.1.3 Caractéristiques du lieu
5.1.4 Correspondance au PER
5.2 La visite
5.2.1 Le livret-jeux
6. Elaboration de la mallette pédagogique
6.1 Un outil au service de la culture
6.2 Deux publics, deux contenus
6.2.1 Dossier pédagogique pour les enseignants : quatre ateliers à choix
6.2.2 L’approche ludique
7. Evaluation
8. Conclusion
Bibliographie

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