La matière hadronique dans tous ses états

Notre compréhension de la matière soumise à différentes conditions thermodynamiques est devenue l’une des plus grandes motivations de la physique subatomique de notre époque. Les modèles issus de la ChromoDynamique Quantique (QCD), théorie décrivant l’interaction forte agissant entre les quarks et les gluons, prédisent que, sous des conditions thermodynamiques extrêmes, la matière hadronique existe dans un état de plasma de quarks et de gluons (QGP : Quark and Gluon Plasma) dont les constituant sont libres du phénomène de confinement. Avec le développement des techniques expérimentales, nous pouvons aujourd’hui atteindre des systèmes de très hautes températures et hautes densités d’énergies lors de collisions d’ions lourds ultra-relativistes. De telles collisions sont effectuées depuis les années 1980, à différentes énergies de centre de masse allant toujours croissantes, permettant la formation en laboratoire d’un QGP éphémère existant durant quelques fm/c à des températures supérieures au billions de degrés (∼200-300 MeV).

L’étude de ses propriétés est effectuée de manière indirecte à l’aide de sondes dont le comportement est affecté par les effets chaud du QGP. La sonde d’intérêt des travaux présentés dans cette thèse est le J/ψ, premier état excité (1S) de la famille des charmonia, états liés d’un quark charm et d’un anti-quark charm. Sa production est étudiée à l’aide de l’expérience ALICE lors de collisions Pb–Pb à √sNN = 5.02 TeV assurées par le complexe d’accélérateurs du CERN-LHC. Deux analyses sont présentées dans ce manuscrit. La première consiste à comparer le taux de production de J/ψ en collisions Pb–Pb à celui obtenu en collisions pp à la même énergie de centre de masse. Cette étude permet d’étudier l’impact des effets nucléaires chauds sur le taux de production en mesurant sa variation par rapport aux collisions références où l’énergie libérée lors de la collision est supposée insuffisante pour la formation d’un QGP. La deuxième analyse précise la mesure de J/ψ à très basse impulsion transverse en collisions hadroniques. Cette étude est motivée par la présence d’un excès dans la production de J/ψ à pT < 0.3 GeV/c mesuré pour la première fois lors de collisions hadroniques Pb–Pb à √sNN = 2.76 TeV. Attribué à la photoproduction de J/ψ, un mécanisme de production jusque-là réservé aux collisions ultra-périphériques pour les ions lourds du LHC, les nouvelles données à √ sNN = 5.02 TeV permettent, de par leur statistique, une mesure précise de la photoproduction de J/ψ en collisions hadroniques en fonction de la centralité de la collision.

La matière hadronique dans tous ses états

Introduction au modèle standard

En l’état des connaissances actuelles, la matière est constituée à son état le plus fondamental de fermions interagissant par le biais de bosons. Les fermions, de spin fractionnaire (±½), sont les briques élémentaires de la matière et peuvent être organisés en trois générations de quarks (u, d), (s, c), (t, b) et trois générations de leptons (e, νe), (µ, νµ), (τ, µτ ) . À chacune de ces particules est associée son anti particule de même masse et de nombres quantiques opposés. L’interaction entre ces constituants est assurée par les bosons de jauge, de spin entier (±1), médiateurs des forces électromagnétique (photon γ), faible (W±, Z0 ) et forte (gluon g) [1]. Enfin, cette classification comprend un boson scalaire, de spin nul, le boson de Higgs. L’action du champ de Higgs avec les autres particules élémentaires leur octroit une masse. Une des motivations principales à la construction du LHC au CERN fut la découverte du boson de Higgs, découverte effectuée en 2012 par les expériances ATLAS [2] et CMS [3].

Ces interactions sont décrites par le Modèle Standard, qui est une théorie quantique des champs avec trois interactions qui apparaissent à partir des symétries de gauge SU(3)C N SU(2)L N U(1)Y . Le Modèle Standard n’est pas une théorie complète et l’objectif le plus important du LHC est la mise en évidence d’une nouvelle physique qui permettrait de le compléter.

Dans cette thèse, nous portons un intérêt à l’interaction forte agissant entre les quarks et anti-quarks par l’intermédaire des gluons et dont l’interaction est basée sur le groupe SU(3)C. L’interaction forte est responsable de la formation des hadrons, états liés de quarks-antiquarks neutres en couleur. L’interaction forte est également responsable de l’interaction résiduelle entre hadrons et finalement de la cohésion des nucléons (protons et neutrons) dans les noyaux atomiques. La théorie la décrivant est la chromodynamique quantique (QCD : Quantum ChromoDynamic). À des température de l’ordre de T ∼ ΛQCD ∼ 10¹² K, elle prédit la transition vers un état de phase de la matière hadronique appelé plasma de quarks et de gluons (QGP : Quark and Gluon Plasma). Nous introduirons donc en premier lieu les bases théoriques de la QCD ainsi que la méthodologie permettant d’étudier le plasma de quarks et de gluons dans les collisions d’ions lourds (HIC : Heavy Ion Collisions).

L’interaction forte et la QCD

Depuis les années 1930, les protons et les neutrons étaient considérés comme des particules élémentaires au même titre que l’électron. Avec le développement des accélérateurs à la fin des années 1940 un grand nombre de ces particules « élémentaires » font leur apparition et ces résonances de courte durée de vie sont appelées hadrons. Ils sont classés en deux catégories, les baryons de masse lourde et de spin demi-entier et les mésons de masse moyenne et de spin entier. La mesure du rayon du proton dans les années 1950 avec les interactions élastiques électron-proton montre que celui ci n’est pas punctiforme. Cette découverte, ainsi que le grand nombre de hadrons, implique que ceux-ci peuvent difficilement continuer à être appelés « élémentaires » et doivent donc répondre à une classification et avoir une structure interne.

La première classification, la voie octuple, est fondée sur le groupe de symétrie SU(3), dit de saveur, et fut proposée en 1961 par Y. Ne’eman [5] et M. Gell-Mann [6]. Elle classe les hadrons de même spin (J) et de même parité (P) en multiplets (J P) dont les constituants se distinguent par leur composante d’isospin (I3) et d’hypercharge (Y ) . Cette classification organise les mésons, en représentations singulet 1 ou octet 8, tandis que les baryons sont des représentations octet 8 ou décuplet 10. En 1964, M. Gell-Mann [7], et indépendamment G. Zweig [8], étendent cette classification au « modèle des quarks », en introduisant la représentation fondamentale triplet 3 au groupe SU(3). Ces trois quarks correspondent aux saveurs up, down et strange (u, d, s) dont la représentaion conjuguée est le triplet d’antiquarks (¯u, ¯d, s¯). Tous les hadrons sont ainsi une représentation de produits directs de la représentation fondamentale, les mésons sont constitués d’une paire quark-antiquark et les baryons de trois quarks (ou trois antiquarks).

Enfin, en 1964 Oscar W. Greenberg introduit le nombre quantique de couleur porté par les quarks qui permet d’expliquer l’existence des 3 baryons du multiplet ³⁄₂⁺ qui violent le principe d’exclusion de Pauli en étant formés de 3 quarks de même saveur [9]. C’est en 1965 que Moo Young Han et Yoichiro Nambu associent à ce nombre de couleur un groupe de symétrie SU(3)couleur [10]. Avec cette nouvelle représentation, chaque saveur de quark peut exister sous 3 couleurs : rouge (R), vert (G) et bleu (B) ainsi que les anticouleurs associées. Cependant, les états de particules observables dans la nature sont dépourvus de couleur.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1 La matière hadronique dans tous ses états
1.1 Introduction au modèle standard
1.2 L’interaction forte et la QCD
1.2.1 Liberté asymptotique et confinement
1.3 Le diagramme de phase de la matière hadronique
2 Structure des hadrons
2.1 Le modèle des partons
2.2 Fonctions de distributions partoniques
2.3 Modification des distributions partoniques nucléaires
3 Etude expérimentale de la matière nucléaire
3.1 Variables cinématiques d’une collision nucléaire
3.2 Évolution d’une collision nucléaire : scénario de Bjorken
3.3 Signatures du QGP
3.3.1 Sondes molles : Q ≳ ΛQCD
3.3.2 Sondes dures : Q ≫ ΛQCD
4 Le J/ψ dans les collisions d’ions lourds
4.1 États liés quark-antiquark
4.2 Production hadronique de J/ψ
4.3 Photoproduction de J/ψ
4.4 Effets de la matière nucléaire froide
4.4.1 Etat initial de la collision nucléaire
4.4.2 Diffusions multiples et perte d’énergie
4.4.3 Absorption nucléaire
4.5 Effets de la matière nucléaire chaude
4.5.1 Dissociation séquentielle par écrantage de couleur
4.5.2 Régénération de quarkonia
4.5.3 Interaction avec les covoyageurs
4.6 Mesures récentes avec ALICE
4.6.1 Production de J/ψ en collisions pp
4.6.2 Production de J/ψ en collisions p–Pb
4.6.3 Production de J/ψ en collisions Pb–Pb
5 L’expérience ALICE au CERN
5.1 Large Hadron Collider
5.1.1 Les faisceaux au CERN
5.2 A Large Ion Collider Experiment
5.2.1 Les détecteurs globaux
5.2.2 Le tonneau central
5.2.3 Le spectromètre à muons
5.2.4 Le système d’acquisition des données
5.2.5 Traitement des données
6 Mesure inclusive de la production de J/ψ
6.1 Définition du facteur de modification nucléaire
6.2 Mesure de la centralité d’une collision
6.3 Sélection des évènements
6.4 Extraction de signal
6.4.1 Extraction de signal du J/ψ
6.4.2 Tests systématiques sur l’extraction de signal du J/ψ
6.4.3 Incertitude systématique sur l’extraction de signal du J/ψ
6.5 Corrections
6.5.1 Normalisation des données
6.5.2 Acceptance Efficacité du détecteur
6.6 Taux de production et facteur de modification nucléaire
6.6.1 Grandeurs et incertitudes associées
6.6.2 Résumé des incertitudes systématiques
6.6.3 Résultats
7 Mesure de l’excès de la production de J/ψ à bas pT
Conclusion

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *