La maltraitance ( définitions et incidence )

Le placement de l’enfant maltraité peut être perçu à la fois comme un traitement (protéger l’enfant, optimiser son développement, soigner la relation d’attachement), ou encore comme un traumatisme supplémentaire de par la rupture du lien entre l’enfant et ses parents biologiques, en plus de la tâche colossale imposée à l’enfant d’avoir à nouer de nouveaux liens. Ainsi, est-ce que le placement réduit, empire, ou arrête la détérioration de la situation du jeune? Le placement en famille d’accueil est un sujet sensible, délicat et complexe, car il touche des enfants déjà fort mal en point, qui ont subi de la maltraitance et qui ont donc généralement développé un lien d’attachement perturbé/insécurisant avec leur donneur de soin principal, habituellement la mère biologique. Les conséquences de la maltraitance et du placement sont donc inter-reliées et se retrouvent souvent confondues dans la littérature. De plus, on retrouve souvent des études qui comparent des enfants placés ayant subi de la maltraitance à un groupe contrôle d’enfants non-placés n’ayant pas été victimes de maltraitance, ce qui ne permet pas de bien saisir l’effet du placement.

Bien qu’il existe différentes façons de conceptualiser la maltraitance, quatre formes de mauvais traitements sont généralement répertoriées par les chercheurs: abus sexuel (contact ou tentative de contact sexuel entre un adulte et un enfant), abus physique (coups infligés à un enfant de façon non accidentelle pouvant mener ou non à des blessures), négligence (incapacité à répondre aux besoins physiques, éducatifs et de santé de base de l’enfant) et maltraitance psychologique (rejet persistent et extrême des besoins émotionnels de base de l’enfant) (Cicchetti & Valentino, 2006; Wekerle, Wolfe, Dunston, & Alldred, 2014). Selon Trocmé et ses collaborateurs (2010), on dénombrait 235 842 enquêtes liées aux mauvais traitements envers les enfants au Canada en 2008 et, de ce nombre, 36 % étaient corroborées (85440 enquêtes). Selon le bilan annuel des Directeurs de la protection de la jeunesse (DPl) pour l’année 2014-2015, au Québec, on constate qu’un peu plus de 30 000 enfants ont fait l’objet d’au moins un signalement retenu (Association des Centres jeunesse du Québec, 2015). Les signalements les plus souvent retenus portaient sur la négligence et les risques sérieux de négligence (35,5 %), suivi de près par l’abus physique ou son risque sérieux (30,2 %). Les mauvais traitements psychologiques représentaient 14,5 %, les troubles de comportement sérieux 9,9 %, l’abus sexuel ou son risque sérieux 9,7 % et l’abandon 0,2 % (Association des Centres jeunesse du Québec, 2015). Parmi les diverses formes de maltraitance, la négligence est généralement la plus répandue. Cependant, ce type de maltraitance est le moins étudié dans la recherche scientifique, et ce, pour différentes raisons telles la difficulté à le définir et à prouver sa présence et ses impacts souvent sous estimés (Dubowitz & Bennett, 2007; McSherry, 2007; Stoltenborgh, Bakermans Kranenburg, & van IJzendoorn, 2013).

Les facteurs de risque
La maltraitance n’apparait pas par hasard et semble générée par la présence et l’interaction de plusieurs facteurs de risque. Tout d’abord, certaines caractéristiques chez l’enfant peuvent participer à l’installation et au maintien de la maltraitance, comme un tempérament difficile (très forte irritabilité ou réactivité émotionnelle), un handicap au plan physique ou cognitif, ou encore une naissance prématurée (Jones et al., 2012; Milot, Éthier, & St-Laurent, 2009; Sedlak et al., 2010). Certaines caractéristiques des parents sont également considérées comme des facteurs de risque de maltraitance, parmi lesquelles on retrouve: des problèmes de santé mentale (particulièrement la dépression), des problèmes de toxicomanie/alcoolisme, une faible estime de soi, un niveau de stress parental élevé, un historique de maltraitance vécu par le parent lui-même durant l’enfance et la grossesse à l’adolescence (Burke, 2003; Christensen, Brayden, Dietrich, & McLaughlin, 1994; Dixon, Browne, & Hamilton-Giachritsis, 2005; Egeland, Bosquet, & Chung, 2002; Scott, 1992; Windham et al., 2004). De plus, les parents maltraitants démontrent des difficultés dans leurs interactions avec leur enfant, ont souvent une perception plus négative de ce dernier, des attentes irréalistes à son égard et un manque de connaissances concernant les soins à donner (Erickson & Egeland, 2002). Finalement, certains aspects de la famille et de son milieu de vie peuvent entrer en ligne de compte, comme la présence de violence conjugale, la pauvreté, la monoparentalité, l’instabilité du mode de vie (ex. : déménagements à répétition), l’isolement social, et le manque de ressources dans la communauté (services offerts, logements salubres et sécuritaires) (Berger, 2004; Cicchetti & Valentino, 2006; Egeland, Bosquet et al. , 2002; Trocmé et al., 2005 , 2010; Windham et al., 2004).

Maltraitance et attachement
La présence de maltraitance perturbe la qualité de la relation d’attachement entre le parent et son enfant. Les recherches sur l’attachement démontrent que la majorité des enfants maltraités développent un attachement insécurisant avec leur donneur de soin principal, habituellement la mère biologique (Cicchetti & Bamett, 1991; Cyr, Euser, Bakermans-Kranenburg, & van IJzendoorn, 2010). Le parent maltraitant incarne à la fois une source de réconfort et une source de danger pour l’ enfant. Cela engendre généralement un attachement insécurisant de type «désorganisé/désorienté », où aucune véritable stratégie d’attachement organisée n ‘ est utilisée par l’ enfant pour gérer sa détresse (Barnett, Ganiban, & Cichetti, 1999; Cyr et al., 2010). L’attachement désorganisé peut se manifester par des comportements contradictoires d ‘ approche et d’évitement, de la désorientation, des comportements atypiques (ex. : enfant prostré), ou encore de l’ appréhension à l’égard du parent (Cyr et al. , 2010; Main & Solomon, 1990).

Chez les enfants d’âge préscolaire et scolaire, on peut également observer un renversement des rôles parent-enfant (Moss et al., 2000). Ces réactions peuvent être adaptées sur le moment, mais seront lourdes de conséquences dans les relations interpersonnelles futures (Cicchetti, Toth, & Maughan, 2000). Ainsi, l’attachement désorganisé/désorienté est associé à un risque accru de présenter des difficultés d’adaptation importantes comme des problèmes de comportement intériorisés et extériorisés (Dubois-Comtois, Moss, Cyr, & Pascuzzo, 2013; Lyons-Ruth, 1996; LyonsRuth, Dutra, Schuder, & Bianchi, 2006; Moss, Cyr, & Dubois-Comtois, 2004).

Les conséquences de la maltraitance
La maltraitance entraine de lourdes conséquences sur le développement de l’enfant, tant sur les plans physique, cognitif, comportemental que socioémotionnel (Cicchetti & Valentino, 2006; Wekerle et al., 2014). Les résultats de l’Étude canadienne d’incidence (Trocmé et al., 2010) rapportent plusieurs problèmes de fonctionnement chez les enfants maltraités: 23 % ont des difficultés scolaires, 19 % des problèmes de dépression/anxiétélisolement, 15 % de l’agressivité, 14 % des problèmes d’attachement et Il % présentent un déficit d’attention avec ou sans hyperactivité, une déficience intellectuelle ou un autre trouble du développement. Dans le cadre de cet essai, nous nous attarderons davantage aux impacts de la maltraitance sur le développement socioémotionnel de l’ enfant, soit sa capacité de réguler ses émotions et ses comportements. Selon Herman (1992), les enfants maltraités ont plus de difficultés de modulation (incapacité à diminuer l’intensité de leurs émotions par des stratégies d’auto-apaisement). Ainsi, ces enfants ressentent plus souvent des émotions extrêmes hors de leur contrôle (tristesse, crises de colère, parfois face à un incident mineur). Avec le temps, cette difficulté à réguler les émotions peut entrainer des troubles intériorisés (comme un sentiment de dépression, d’anxiété ou de crainte, du retrait social, de la somatisation) et/ou extériorisés (comme de l’agressivité ou de l’hostilité, surtout envers les figures d’autorité, de l’hyperactivité, de la délinquance) (Brensilver, Negriff, Mennen, & Trickett, 2012; Teisl & Cicchetti, 2008). Puisque l’enfant maltraité a de la difficulté à réguler ses émotions, il peut adopter des comportements mal-adaptés ou destructeurs afin de gérer ses émotions ou de les éviter, comme l’automutilation, l’exposition au danger ou l’abus de substance (Cicchetti & Valentino, 2006; Herman, 1992).

Ainsi, le développement des problèmes de comportement est reconnu comme une conséquence négative importante associée au fait d’avoir subi de la maltraitance (Brensilver et al., 2012; Cicchetti & Valentino, 2006; Dishion & Patterson, 2006; Liu, 2004; Manly, Cicchetti, & Barnett, 1994).

En milieu scolaire, les enfants maltraités présentent souvent des problèmes variés et sévères au plan émotionnel et comportemental (Wekerle et al., 2014). Même auprès de leurs amis proches, ils démontrent moins d’intimité, plus de conflits et plus de sentiments négatifs que les enfants non maltraités (Kim & Cicchetti, 2010; Parker & Herrera, 1996). Ceci peut s’expliquer, entre autre, par le développement chez les enfants maltraités d’un biais d’attribution hostile envers leurs pairs, c’est-à-dire que, dans les situations sociales ambiguës, ils présument que les autres leur veulent du mal (Dozier, Dozier, & Manni, 2002; Egeland, Yates, Appleyard, & van Dulmen, 2002; Wekerle et al., 2014). Ainsi, on observe deux tendances principales dans les relations des enfants maltraités avec leurs pairs : davantage d’agressivité physique et verbale, et le retrait ou l’évitement des interactions (Anthonysamy & Zirnrner Gembeck, 2007; Cicchetti & Lynch, 1995).

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Table des matières

Introduction 
Contexte théorique 
La maltraitance
Définitions et incidence
Les facteurs de risque
Maltraitance et attachement
Les conséquences de la maltraitance
Le placement en famille d’accueil
Le rôle du placement en famille d’accueil
Le portrait clinique des enfants placés
Problèmes médicaux
Problèmes de santé mentale
Problèmes développementaux
Les placements multiples
Les conséquences du placement
Relation mère-enfant et problèmes de comportement
Relation mère-enfant et problèmes de comportement dans la population
générale
Relation mère-enfant et problèmes de comportement chez les enfants
maltraités
Objectifs et hypothèses de recherche
Méthode
Participants
Déroulement
Instruments de mesure
Données sur le placement
Qualité des interactions mère-enfant
Problèmes de comportement intériorisés et extériorisés
Résultats 
Plan d’analyses
Données descriptives
Problèmes de comportement intériorisés et extériorisés en lien avec les variables
sociodémographiques, le placement et la qualité des interactions mère-enfant
Contributions du placement et de la qualité des interactions mère-enfant dans la
prédiction des problèmes de comportement
Relations entre les caractéristiques du placement et les problèmes de
comportement de l’enfant
Discussion 
Placement et problèmes de comportement
Qualité des interactions mère-enfant et problèmes de comportement
Caractéristiques du placement et problèmes de comportement
Contributions et limites
Conclusion

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