Les malformations de la charnière cervico-occipitale (MCCO) font partie des malformations dysraphiques, par trouble de fermeture du tube neural, souvent complexes, pouvant concerner les secteurs osseux et ou nerveux. Les malformations de Chiari représentent les principales anomalies des structures nerveuses et se traduisent par une position basse des amygdales cérébelleuses au sein de la partie haute du canal rachidien cervical [7]. Ils ont fait l’objet de nombreuses études, et ce depuis la première description détaillée du cas d’une femme de 17 ans, par Hans Chiari, rapportée dans sa première publication en 1891. Ainsi le terme « malformations de Chiari », regroupant quatre types, a été utilisé en reconnaissance à l’illustre pathologiste viennois qu’était Hans Chiari [7]. La malformation de Chiari la plus courante est le type I et se rencontre surtout chez l’adulte, mais aussi chez l’enfant et se caractérise par une élongation des amygdales cérébelleuses et de la partie interne des lobes inferieurs du cervelet. Le Chiari II est associé à des anomalies du tube neural, en particulier Myéloméningocèle, dans environ 90% des cas [4]. La malformation de Chiari de type III est un méningo encéphalocèle sous occipital, et la malformation de Chiari de type IV est une hypoplasie cérébelleuse sans hernie tonsillaire. Ces deux problèmes sont rares [8]. Les modalités thérapeutiques ne cessent d’évoluer, et toutes les techniques chirurgicales ont comme but une décompression de la région de foramen magnum qui est un substrat anatomique et hydrodynamique.
La malformation de Chiari type I
La malformation de Chiari type I se caractérise par un allongement des amygdales cérébelleuses et des divisions médiales des lobules inférieurs du cervelet en des projections sous forme de cône qui accompagnent la moelle allongée dans le canal rachidien. Une association avec, une compression de la jonction bulbomédullaire, une syringomyélie (dans 25 à 50% des cas), une hydrocéphalie (dans 15 à 25% des cas), ou une malformation osseuse de la CCO est possible.
La malformation de Chiari type II
La malformation de type II est une malformation complexe impliquant le cerveau postérieur, la moelle épinière et les structures mésodermiques. Ce type comprend le déplacement vers le bas de la moelle allongée, le quatrième ventricule et le cervelet dans le canal cervical, et l’allongement du pont et le quatrième ventricule. Cette malformation résulte d’une diminution chronique de la pression du LCR. La malformation de Chiari type II est presque habituellement observée chez le nourrisson et l’enfant, qui présentent toujours une myélocèle ou myéloméningocèle cervical, lombaire ou lombosacrée.
La malformation de Chiari III
C’est la plus rare des malformations de Chiari, et elle est associée à un pronostic plus grave (décès précoce ou handicap sévère chez les survivants à long terme). Il s’agit d’une hernie du contenu de la fosse cérébrale postérieure au-dessous du canal cervical et à divers degrés à travers une encéphalocèle cervico-occipitale, considérée par l’auteur comme une conséquence d’une hydrocéphalie. L’encéphalocèle doit être distinguée des myéloméningocèles cervicales hautes, qui peuvent avoir le même aspect superficiel.
La malformation de Chiari type IV
Correspond à une aplasie ou hypoplasie cérébelleuse, associée à une aplasie de la tente du cervelet. Chez les patients porteurs de malformation de Chiari type IV, la fosse postérieure est relativement normale et il n’y a pas de hernie cervicale.
La malformation de Chiari type 0
Elle se définit par la présence d’une syringomyélie qui se résout après la décompression de la fosse cérébrale postérieure en absence d’une ectopie amygdalienne. La malformation de Chiari de type 0 est caractérisée par une fosse cérébrale postérieure trop petite, ce qui va être à l’origine de cette descente des amygdales cérébelleuses dans le foramen magnum.
PYSIOPATHOLOGIE
La cause exacte de la malformation de Chiari est méconnue. On pense que la malformation se produit durant les premiers développements de l’embryon. L’étiopathogénie n’est pas claire étant donné qu’il existe différentes théories. Historiquement, elles ont été considérées comme étant des pathologies purement congénitales, mais au cours des dernières années, de très fréquentes publications décrivent une origine secondaire. Aucune théorie ne peut, par elle-même, expliquer toutes les altérations qui apparaissent cliniquement. C’est la raison pour laquelle il existe la possibilité de liens entre les différentes théories. En général, cinq théories possibles sont acceptées pour expliquer les formations congénitales :
La théorie de la traction
L’hypothèse la plus populaire déclare que la malformation est le résultat de traction sur les structures de la fosse postérieure, causé par la fixation de la moelle épinière à la colonne vertébrale sur le site d’un Spina bifida. La différence de taux de croissance de la colonne vertébrale et la moelle épinière crée la dislocation caudale de la moelle, des amygdales cérébelleuses, du vermis, et du quatrième ventricule. Une variante de cette conception est celle de Penfield qui soutient que dans la malformation de Chiari II, le tronc cérébral et les amygdales sont tirés vers le bas, à travers le foramen magnum, pendant la croissance, du fait que la moelle est attachée, chez les patients avec myéloméningocèle. L’absence de Spina bifida réfute cette hypothèse.
La théorie de la génétique moléculaire
La théorie de la génétique moléculaire postule que les malformations de Chiari résultent de défauts primaires dans la programmation génétique de la segmentation du rhombencéphale et de la croissance des structures osseuses et crâniennes associées.
La théorie de la pulsion hydrodynamique
Cette théorie postule que l’hydrocéphalie est responsable de la hernie des structures de la fosse postérieure. Dans les années 1950 et au début des années 1960, Gardner a présenté sa théorie hydrodynamique, qui a ensuite été modifiée par Williams [60]. La théorie de Gardner a déclaré que dans l’embryologie normale, les pulsations du LCR du plexus choroïde (précédemment décrites par Béring) jouent un rôle important dans l’expansion du tube neural [61]. Selon Gardner, ces pulsations contribuent au développement des voies arachnoïdiennes, ainsi que la modélisation de l’expansion cérébrale. Il croyait que l’équilibre entre le flux pulsatile du plexus choroïde dans le quatrième ventricule et en supra-tentoriel dirigeait la croissance du cerveau différemment. Par conséquent, si les pulsations du quatrième ventricule étaient hyperactives, la tente du cervelet serait poussée vers le haut, et une malformation de Dandy-Walker pourrait se développer. Inversement, si les pulsations supratentorielles étaient hyperactives, la migration tentorielle devient telle que la fosse postérieure est petite, ce qui permet le développement d’une anomalie de Chiari. En outre, les points de circulation de LCR du quatrième ventricule resteraient fermés, déviant la circulation du LCR vers l’obex et provoquant ainsi la syringomyélie. Basé sur des données expérimentales en utilisant des mesures manométriques chez des patients normaux et patients atteints de MC-I, Williams a élargi la théorie de Gardner en suggérant que des manœuvres de Valsalva entraînait une congestion veineuse épidurale et intracrânienne ainsi que la pression intra spinale augmente, provoquant une circulation à la fois céphalique et caudale. Alors que l’écoulement dans le compartiment crânien ne rencontre aucune résistance, l’écoulement caudal est retardé par des adhérences du rhombencéphale et l’obstruction des points de sortie, créant ainsi une différence de pression entre les compartiments crânien et spinal. Cette différence de pression peut durer quelques secondes et entraîner une aggravation de l’impaction du rhombencéphale et la syringomyélie. Des mesures répétées sont été effectuées après décompression chirurgicale, montrant l’équilibre des pressions dans les deux compartiments, ce qui est, à son tour, en corrélation avec une amélioration clinique. Williams pense que le traumatisme obstétrical est un facteur étiologique de la malformation de Chiari I. Il a comme conséquence un œdème tonsilaire et des adhérences arachnoïdiennes, probablement favorisés par une déformation excessive du crâne. Ceci conduit à un blocage de la circulation et impaction secondaire des amygdales cérébelleuses dans le foramen magnum. Des études antérieures ont suggéré qu’une syringomyélie dans le cadre de CM-I se produit à partir de LCR obstrué au niveau du foramen magnum en raison d’une hernie amygdalienne. Selon Gardner et Goodall et Williams, bien que différents mécanismes proposés, cette obstruction entraine l’entrée du LCR dans le canal central et le développement d’une syrinx spinale. Selon Oldfleld et Coll, une obstruction du foramen magnum crée un effet piston des amygdales sur le LCR spinal, ce qui augmente la pression sous-arachnoïdienne, entrainant le LCR dans la moelle épinière.
La théorie de l’altération du flux
La théorie du liquide oligocérébrospinal propose que la fermeture défectueuse du tube neural dans le développement précoce du fœtus entraine une fuite du LCR, et donc une insuffisance du volume cérébro-spinal pour distendre complétement le système ventriculaire embryonnaire, qui conduit à une petite fosse postérieure et à une désorganisation cérébrale.
La théorie du développement insuffisant de la fosse cérébrale postérieure
Des preuves suggèrent que certains patients atteints de CM-I ont une fosse postérieure hypoplasique congénitale ou développementale et un volume réduit de la fosse postérieure associée au sous-développement de l’os occipital, ou un os occipital épaissi ou élevé. Il est prouvé que cette petite fosse postérieure ne peut pas contenir le volume du cervelet, conduisant ainsi à une hernie amygdalienne à travers le foramen magnum et à l’obstruction du LCR. Les amygdales medialisées, l’obstruction du foramen de Magendie par une amygdale cérébelleuse et la descente inférieure des amygdales pourraient être le résultat direct de l’hypoplasie de la fosse postérieure.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. CLASSIFICATION
1. La malformation de Chiari type I
2. La malformation de Chiari type II
3. La malformation de Chiari III
4. La malformation de Chiari type IV
5. La malformation de Chiari type 0
II. PYSIOPATHOLOGIE
1. La théorie de la traction
2. La théorie de la génétique moléculaire
3. La théorie de la pulsion hydrodynamique
4. La théorie de l’altération du flux
5. La théorie du développement insuffisant de la fosse cérébrale postérieure
III. TRAITEMENT CHIRURGICAL
1. Installation
2. Voie d’abord
3. Craniectomie et laminectomie
4. Ouverture de la dure mère
5. Résection des amygdales cérébelleuses
6. Coagulation des amygdales cérébelleuses
7. Plastie durale d’agrandissement
NOTRE TRAVAIL
I. PATIENTS ET METHODES
1. Objectifs
2. Cadre d’étude
3. Type d’étude
4. Critères d’inclusion
5. Principe de la chirurgie
5.1. Installation du patient
5.2. Repérage et temps cutané
5.3. Temps osseux
5.4. Temps dure mérien
5.5. En post opératoire
II. RESULTATS
1. Epidémiologie
1.1. Répartition dans le temps
1.2. Age
1.3. Sexe
2. Clinique
2.1. Antécédents
2.2. Signes
2.2.1. Paraclinique
2.2.2. Traitement
2.2.2.1. Données opératoires
2.2.2.2. Données post-opératoires
3. Complications
3.1. Types de complications
3.2. Prise en charge des complications
3.3. Influence des complications sur le devenir post-opératoire
III. DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES