La maladie de Parkinson chez le primate non-humain

Histoire de la maladie de Parkinson

                La maladie de Parkinson (MP) a été observée et partiellement décrite dès 1000 ans avant JC dans le système médical ayurvédique indien. Elle était appelée « Kampavata », Kampa voulant dire tremblement en sanskrit. Les indiens utilisaient alors les graines broyées de la plante tropicale pois mascate (mucuna pruriens) pour traiter cette maladie. Depuis, il a été démontré que cette plante contient entre 4 et 6% de L-DOPA qui n’est autre que le précurseur de la dopamine utilisée de nos jours comme traitement symptomatique (Ovallath & Deepa, 2013). Ce n’est que bien plus tard, en 1817, que la maladie de Parkinson fut cliniquement décrite par le médecin londonien James Parkinson. Après avoir observé six patients lors de leurs promenades, il publie une description médicale précise de cette maladie dans son essai “An essay on the shaking palsy”. Il y décrit les principaux symptômes de ce qu’il appelle la paralysie agitante, à savoir le tremblement, l’instabilité posturale, l’akinésie ou encore la rigidité musculaire (Parkinson, 2002). Cinquante ans plus tard, Jean-Martin Charcot, un neurochirurgien français, établit une description plus détaillée de la maladie. Il fait la différence entre la rigidité et la bradykinésie, qu’il ajoute à la liste des principaux symptômes. Il précise que le tremblement est un tremblement de repos uniquement et fait alors la différence entre plusieurs types de maladies à tremblement (Charcot, Œuvres complètes – Leçons sur les maladies du système nerveux, 1872). Il renomme cette maladie « Maladie de Parkinson » en hommage au travail de James Parkinson. La compréhension de la physiopathologie de la MP commença avec le médecin français Edouard Brissaud en 1895. Il découvre que la pathologie a pour épicentre une région du cerveau appelée la substance noire. Ceci sera confirmé en 1919 par l’analyse post-mortem de cerveaux de patients atteints de la MP par Konstantin Tretiakoff (Goetz, 2011). Dans les années 50, Arvid Carlsson caractérise la dopamine (DA) comme neurotransmetteur et identifie sa déplétion dans la MP (A. Carlsson & Waldeck, 1958). Puis, en 1961, l’équipe d’Adams identifie la dégénérescence de la voie nigrostriée comme une caractéristique anatomopathologique de la MP (Adams, Van Bogaert, & Van Der Eecken, 1961). En 1912, le neurologiste Fritz Jacob Heinrich Lewis décrit pour la première fois des inclusions compactes sphériques dans les neurones du noyau dorsal du nerf vague et de la substance noire (Lewy, Pathologische anatomie Handbuch der neurologie, 1912). Ce n’est que 7 ans plus tard, lorsque Konstantin Tetriakoff observera également ces inclusions dans diverses régions de cerveaux de patients parkinsoniens, qu’elles seront nommées corps de Lewy (Tretiakoff, Theses de Paris, 1919). Dans les années 90, Maria Spillantini observe que le composant majeur de ces corps de Lewy est la protéine alpha-synucléine (Spillantini et al., 1997). En 1953, Greenfield et Bosanquet ont décrit pour la première fois la progression clinique de la MP en différents stades. Ils observent que la pathologie est d’abord unilatérale (stade I), puis devient bilatérale (stades II-V), et enfin que l’instabilité posturale se développe (stade III) (Greenfield & Bosanquet, 1953). Ceci est une stratification par la symptomatologie mais il existe également une stratification par la progression de la pathologie alpha-synucléine décrite par Braak et qui sera évoquée plus tard (Introduction 2.2.2).

Épidémiologie de la maladie de Parkinson

              La maladie de Parkinson est la deuxième maladie neurodégénérative la plus fréquente après la maladie d’Alzheimer et est le trouble du mouvement le plus commun. La prévalence de la MP est de une à deux personnes pour 1000 (Tysnes & Storstein, 2017), ce qui représenterait en 2020 9,4 millions de personnes dans le monde et 157 000 personnes en France (N.Maserejian, Estimation of the 2020 global of Parkinson’s disease abstract Mov Disord 2020). Elle ne fait qu‘augmenter au fil des années. Par exemple, il a été estimé que le nombre de patients parkinsoniens à travers le monde allait quasiment doubler entre les années 2015 et 2050 (Rocca, 2018). Le premier facteur explicatif de cette augmentation du nombre de cas est le vieillissement général de la population. La prévalence de la maladie est de 1% chez les personnes de plus de 60 ans et atteint 4-5% chez les personnes de plus de 70 ans (Zafar & Yaddanapudi, 2021). Le deuxième facteur est l’amélioration des outils de diagnostic qui permettent de diagnostiquer plus de patients qu’auparavant.

Les facteurs génétiques

                   Lorsque la maladie est associée à une atteinte génétique, cela peut être dû à des mutations sur un, ou plusieurs gènes. On parle de formes monogéniques ou multigéniques. Les mutations peuvent avoir lieu au niveau de gènes dominants ou récessifs. Ces mutations peuvent être très pénétrantes et causer la MP ou bien être seulement un facteur de risque de développer la maladie (Blauwendraat, Nalls, & Singleton, 2020). Suite à la découverte de la première mutation génétique en 1997 (Polymeropoulos et al., 1997), plus de 30 mutations ont été répertoriées sur le gène SNCA comme impliqués dans la MP. Le gène SNCA, à transmission autosomique dominante, code pour la protéine alpha-synucleine (a-syn). Ces diverses mutations engendrent une mauvaise conformation de l’a-syn et son agrégation, ce qui est une caractéristique physiopathologique de la maladie de Parkinson. En plus des substitutions, il peut également y avoir des phénomènes de duplication ou triplication du gène. Cela engendre des copies supplémentaires du gène et un excès d’a-syn. Dans ce cas, il y a un effet dose du gène sur la sévérité et l’âge d’initiation de la maladie (Chartier-Harlin et al., 2004; Ibáñez et al., 2004). Par la suite, d’autres études ont pu mettre en évidence d’autres gènes impliqués dans la maladie de Parkinson dont les plus fréquents sont répertoriés dans le tableau 1. Pour le moment, plus d’une vingtaine de gènes ont été identifiés comme étant associés à la maladie de Parkinson (Blauwendraat et al., 2020). De plus, 900 mutations ont été identifiées comme étant des facteurs de risque dont les plus fréquentes impliquent le gène GBA codant pour l’enzyme lysosomale β-glucocerebrosidase (chez 5 à 10% des patients), le gène UCHL1 qui participe à la production de l’ubiquitine et le gène PARKIN (Sidransky & Lopez, 2012). La recherche de mutations s’est accélérée grâce à des avancées technologiques et bioinformatiques qui permettent des études d’association pangénomique. Ces études génétiques permettent de mieux comprendre la physiopathologie de la MP, d’identifier de nouvelles pistes pour générer des modèles animaux de la maladie mais aussi et surtout d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques (Sardi & Simuni, 2019). La MP ne peut pas être expliquée par la génétique de manière complète. Il faut également l’intervention de facteurs individuels, environnementaux et comportementaux.

Les ganglions de la base

                    Le terme de « ganglions de la base » ou de noyaux gris centraux décrit un ensemble de structures souscorticales dont le rôle est d’intégrer l’information provenant de différentes structures corticales (frontal, pariétal, temporal et limbique), de traiter ces informations dans différentes structures relais sous corticales, et de les redistribuer ensuite à différentes aires corticales. Les ganglions de la base sont ainsi constitués de quatre noyaux interconnectés (Figure 5) :
– Le striatum qui est lui-même composé du noyau caudé (Cd) et du putamen (Put). Il s’agit de la structure d’entrée des informations corticales. En plus des afférences glutamatergiques excitatrices du cortex, le striatum reçoit aussi des afférences glutamatergiques excitatrices du thalamus et modulatrices dopaminergiques en provenance de la substance noire pars compacta. Les neurones striataux sont majoritairement GABAergiques inhibiteurs et projettent au niveau du segment externe du globus pallidus (GPe) ou du complexe de sortie formé par la substance noire pars reticulata (SNpr) et le segment interne du Globus pallidus (GPi).
– Le pallidum (GP) qui est lui-même composé de son segment interne (GPi) et de son segment externe (GPe). Les neurones du GP sont majoritairement GABAergiques inhibiteurs. Les neurones du GPe projettent sur le NST alors que ceux du GPi projettent sur le noyau ventral antérieur et le noyau ventrolatéral du thalamus (VA/VL).
– Le noyau sous-thalamique (NST) dont les neurones sont majoritairement glutamatergiques excitateurs et projettent sur le complexe de sortie SNpr/GPi.
– La substance noire (SN) qui est subdivisée en substance noire pars reticulata (SNpr) et substance noire pars compacta (SNpc). Les neurones de la SNpr sont majoritairement GABAergiques inhibiteurs et projettent sur le thalamus, alors que ceux de la SNpc sont dopaminergiques et projettent au niveau du striatum (voie nigrostriée). En tout, seuls 3 à 5% des neurones de la SN sont de type dopaminergique (Chinta & Andersen, 2005).
Le thalamus (VA/VL) ne fait pas partie à proprement parlé des ganglions de la base mais reçoit de ceuxci d’importantes afférences inhibitrices. Ses neurones glutaminergiques excitateurs projettent à leur tour au niveau de différentes aires corticales. Ils constituent la principale voie de sortie des noyaux gris centraux. GPi = Globus pallidus intern, GPe = Globus Pallidus extern, SNr = Substantia nigra reticulata, SNc = Substantia nigra compacta, STN = sub-thalamic nucleus, VL = Ventral lateral, VA = Ventral anterior. Bleu = GABA (inhibiteur), Rouge = Glutamate (excitateur) et Vert= Dopamine (modulation). Les ganglions de la base reçoivent des informations de différentes aires corticales. Il existe donc plusieurs boucles fonctionnelles parallèles : motrices, cognitives et limbiques (Alexander, DeLong, & Strick, 1986) (Figure 6), ce qui en fait une structure intégratrice essentielle. Le striatum peut ainsi être divisé en trois territoires fonctionnels. D’abord le territoire sensori-moteur localisé au niveau du putamen dorsal et dont les afférences proviennent des cortex moteur et sensitif. Ensuite, le territoire associatif qui implique le noyau caudé et dont les principales afférences proviennent du cortex préfrontal. Enfin, le territoire limbique qui se trouve au niveau du noyau accumbens (partie antérieure et ventrale du striatum) et dont les afférences proviennent des cortex cingulaire, orbito-frontal, de l’hippocampe et de l’amygdale. La délimitation anatomique entre ces trois territoires fonctionnels n’est pas parfaitement définie et certaines parties peuvent se recouper. D’après (Macpherson & Hikida, 2019). Violet = circuit sensori-moteur, Jaune= circuit associatif et Vert = circuit limbique. Les flèches rouges représentent des afférentations glutamatergiques, les flèches bleues des afférentations GABAergiques et les flèches orange des afférentations dopaminergiques. DLS = Dorso lateral striatum, DMS = Dorso medial striatum, Nac = Nucleus accumbens, GPi = Globus pallidus intern, SNr = Substantia nigra reticulata, SNc = Substantia nigra compacta, VP = ventral pallidum, VTA =ventral tegmental area, VL = Ventral lateral, VA = Ventral anterior, MD = Medio dorsal. Il existe deux voies d’interconnexion entre la structure d’entrée (le striatum) et la structure de sortie (SNr/GPi) des ganglions de la base :
– La voie directe : qui projette directement vers les structures de sortie que constitue le complexe GPi/SNr.
– La voie indirecte : qui projette également vers le GPi et la SNr mais en transitant par deux noyaux (GPe et NST).
En fonction des neurotransmetteurs (inhibiteurs et excitateurs) mis en jeu, ces deux voies auront des effets opposés sur le complexe SNr/GPi, la voie directe l’inhibant via sa composante GABAergique, la voie indirecte l’activant via la composante excitatrice glutamatergique du NST. Le jeu de ces deux voies résulte en un équilibre entre inhibition et excitation du complexe SNr/GPi, lui-même inhibiteur des noyaux VA et VL thalamiques exerçant un effet excitateur glutamatergique sur les aires corticales de sortie. A noter, qu’une voie dite hyperdirecte a été décrite par laquelle des informations corticales transitent directement vers le NST. Comme évoqué précédemment, la dopamine, produite par les neurones dopaminergiques de la voie nigrostriée, joue un rôle de modulateur au niveau du striatum. En effet, la stimulation des récepteurs D1 par la dopamine active la voie directe ; celle des récepteurs D2 inhibe la voie indirecte. En résumé, l’action de la dopamine exerce donc un effet facilitateur sur l’activité corticale, notamment sur le cortex moteur (aire motrice supplémentaire, AMS).

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Table des matières

INTRODUCTION
1. Généralités sur la maladie de Parkinson : Histoire, épidémiologie et étiologie
1.1. Histoire de la maladie de Parkinson
1.2. Épidémiologie de la maladie de Parkinson
1.3. Étiologie de la maladie de Parkinson
1.3.1. Les facteurs génétiques
1.3.2. Les autres facteurs de risque
2. Physiopathologie de la maladie de Parkinson
2.1. La dopamine, la voie dopaminergique nigrostriée, et les ganglions de la base 
2.1.1. La dopamine
2.1.2. Les ganglions de la base
2.1.3. Les ganglions de la base dans la maladie de Parkinson
2.2. La pathologie liée à alpha-synucléine
2.2.1. L’alpha-synucléine
2.2.2. Les synucléinopathies
2.2.3. L’hypothèse « prion like »
3. Symptomatologie de la maladie de Parkinson
3.1. Les symptômes moteurs
3.2. Les symptômes non-moteurs
3.2.1. Les dysfonctionnements sensoriels
3.2.2. Les dysfonctionnements autonomiques
3.2.3. Les dysfonctionnements cognitifs
3.2.4. Les dysfonctionnements psychiatriques
4. Traitements de la maladie de Parkinson
4.1. Les pharmacothérapies
4.2. Les traitements chirurgicaux
4.3. Les thérapies géniques et cellulaires
4.4. Les autres types de thérapies
5. Les modèles animaux de la maladie de Parkinson
5.1. Les modèles induits par neurotoxines
5.1.1. Les pesticides et herbicides
5.1.2. La 6-OHDA
5.1.3. Le MPTP
5.2. Les modèles induits par modification génétique
OBJECTIF
PARTIE I : CARACTERISATION DES SYMPTOMES NON-MOTEURS DU MODELE MPTP CHEZ LE PRIMATE NON-HUMAIN
1. Contexte
1.1. Le mécanisme du MPTP
1.2. Le modèle primate MPTP
1.3. L’étude des symptômes non-moteurs chez le primate MPTP
1.3.1. L’étude des déficits cognitifs
1.3.2. L’étude des symptômes psychiatriques
1.3.3. L’étude des déficits autonomiques
2. Objectifs
3. Protocole expérimental
4. Matériel et méthodes
4.1. Sujets
4.2. Intoxication au MPTP
4.3. Évaluation du comportement moteur
4.4. Évaluation du comportement cognitif
4.4.1. Test de discrimination visuelle
4.4.2. Test de l’impulsivité
4.4.3. Test de gambling
partiE ii : évaluation d’une stratégie de thérapie génique régulable chez le modele mptp primate non-humain
1. Contexte
1.1. Généralités sur les thérapies géniques
1.2. Les thérapies géniques dans le cadre de la maladie de Parkinson
1.2.1. Modulation de l’activité des ganglions de la base par surexpression locale de l’enzyme GAD dans le NST
1.2.2. Stratégies de neuroprotection des neurones dopaminergiques
1.2.3. Augmentation du taux de dopamine
1.3. Évaluation d’une thérapie génique régulable chez le primate non-humain MPTP
2. Objectifs
3. Protocole expérimental
4. Matériel et méthodes
4.1. Sujets
4.2. Intoxication au MPTP
4.3. Chirurgie
4.4. Traitement au TMP
4.5. Imagerie IRM
4.6. Imagerie TEP
4.7. Évaluation du comportement moteur
4.8. Challenge L-DOPA
4.9. Évaluation du comportement cognitif
4.9.1. Test de mémoire
4.9.2. Test de mémoire spatiale
4.10. Évaluation du cycle activité/repos
4.11. Analyses post-mortem
4.12. Analyses statistiques
5. Résultats
5.1. Comportement moteur
5.2. Comportement cognitif
5.3. Suivi de la température
6. Discussion
PARTIE III : CARACTERISATION D’UN MODELE ALPHA-SYNUCLEINE CHEZ LE PRIMATE NONHUMAIN
1. Contexte
1.1. Les modèles transgéniques
1.2. Les modèles par surexpression virale
1.3. Les modèles par inoculation
2. Objectifs
3. Protocole expérimental
4. Matériel et Méthode
4.1. Sujets
4.2. Production des fibres d’alpha-synucléine
4.3. Production des extraits de LB
4.4. Chirurgie
4.5. Imagerie IRM
4.6. Imagerie TEP
4.7. Évaluation du comportement moteur
4.8. Collection des tissus
4.9. Analyses histologiques
4.10. Analyses biochimiques
4.11. Analyses statistiques
5. Résultats
5.1. L’impact fonctionnel induit
5.2. La neurotoxicité dopaminergique induite
5.3. La pathologie alpha-synucléine induite
6. Discussion
Conclusion
Bibliographie

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