La ligne segmentée de la broderie

LE MOTIF FLORAL

Quand la saison des fleurs commence, c’est à ce moment, où je suis la plus enthousiaste à l’idée de sortir mon appareil photo. En effet, les pommiers sont en fleurs, il s’agit d’un arbre que je suis incapable de m’empêcher de photographier. Souvent en petites agglomérations, ces fleurs semblent vulnérables, soumisses au fort vent vu le peu de feuilles qui les protègent. Elles n’ont en général pas trop de pétales, ce qui rend le motif de la fleur facilement distinguable, en plus de posséder des lignes naturellement sinueuses.
Partant seule de longues heures, je photographie sous plusieurs angles les fleurs, les branches et les bourgeons. Ce qui me permet aussi de donner un peu vie à la fleur puisqu’elle a plusieurs stades dans les œuvres, elle n’est pas toujours en parfait état. En quête de motifs floraux, je préfère prendre une journée ici et là pour partir à l’aventure, plutôt que d’attendre patiemment de les voir évoluer, surtout que je dois avouer que je fais mourir toutes les plantes que je possède. C’est pourquoi je me retrouve dans les parcs, les jardins et même dans les espaces horticoles, où je demande l’autorisation de photographier leurs fleurs. Bien que celle de pommiers soit ma préférée, je suis sensible à toutes les fleurs en grappe qui sont ondoyantes et délicates.
Comme le climat n’est pas favorable à tous les mois de l’année pour prendre des photos de fleurs, je dois m’assurer d’avoir suffisamment de matériel intéressant pour que ma production ne soit pas interrompue en hiver. J’ai donc une banque d’images étendue dans laquelle je puise mon inspiration. Parfois ce n’est qu’avec le temps qu’une image révèle son potentiel esthétique.

LE DESSIN

Lorsque je suis satisfaite des éléments choisis, et de leur interrelation, je fais imprimer les photographies en noir et blanc dans la dimension adéquate en vue de la réalisation de mes broderies. Ces impressions seront mes guides jusqu’à la toute fin du processus. Je ne peux plus m’en séparer, il s’agit d’outils primordiaux. En effet, je viens dessiner directement sur le papier que j’ai fait imprimer, une série de lignes représentant les contours de la fleur, les feuilles, les branches, les pistils, les ombres et les lumières, afin de créer un dessin en amalgames de lignes sinueuses, dont la composition respecte celle de la photo. Ce dessin deviendra mon patron; il me permettra de savoir où perforer mon acrylique puisque je l’y superpose, mais aussi à m’orienter à travers ces centaines de trous, lors de la broderie. Poursuivant une mise en présence de la ligne, je joue sur la limite entre le schématisme et le naturalisme. Le schéma est, selon le Larousse, un tracé où ne figurent que les éléments essentiels afin que l’on puisse reconnaître l’objet; tandis que le naturalisme, c’est un dessin très détaillé dans lequel on reconnaît les traits particuliers d’un objet ou d’une personne spécifique. Mes dessins se situent entre les deux, voici pourquoi.
Comme je me base sur des photographies, ce n’est pas une idée générale de la fleur que je produis, mais bien une fleur en particulier. Cependant, la perte volontaire de détails lors de l’élaboration du dessin, et surtout l’élimination des ombres due à la mise en valeur de la ligne, qui, par le fait même, résulte en la perte des volumes de la fleur, donne au dessin un aspect de schéma. Il ne reste plus que le squelette de la fleur exprimé par quelques lignes de contour. Comme expliqué ci-haut, le schématisme a pour but de révéler, dans un croquis le moins détaillé possible, l’essence de son sujet. Or je me permets le détail afin de représenter mon sujet pour que, si on voyait la broderie en même temps que la photographie, il soit évident qu’il s’agit de cette fleur et non pas d’une autre. En plus de ne pas me conformer à cette première règle, j’ai déjà mentionné que je ne cherche pas systématiquement à révéler la nature de mon sujet dans chacune de mes œuvres, alors que c’est ce que cherche à faire cette tendance dite naturaliste.

LA LIGNE SEGMENTÉE DE LA BRODERIE

Le processus demande ensuite une étape préalable à la broderie, celle de la perforation du support, puisque depuis maintenant plusieurs années, j’ai choisi de me diriger vers des matériaux trop rigides pour être piqués naturellement.
Au début de mon engouement pour la broderie, on m’interrogeait constamment sur mes motivations à utiliser le motif de la fleur à des fins esthétiques en broderie. C’est en repensant à mon père et ses amis, que j’ai émis l’hypothèse que pour travailler le motif de la fleur en broderie en Arts, les matériaux servant de support pouvaient se révéler une bonne piste d’innovation esthétique.
Les pères ont cette habitude de raconter leur gloire de jeunesse pour se remémorer l’époque ou simplement pour faire rire leur entourage. Malgré tout, certaines de ces histoires finissent par marquer de façon inespérée et influencer le processus intuitif de la création. Celle qui a joué un rôle dans cette recherche est toute simple.
Entre les cours, la bande de copains de mon père s’amusaient avec du fil et des aiguilles. Sous forme de concours, ceux-ci n’avaient que le temps consacré à la récréation pour broder, à même la peau de la paume de leur main, la broderie la plus complexe et la plus jolie. Il y a là une mince couche de peau de surface qui est tout à fait indolore.

LE SUPPORT TRANSPARENT

Un nouveau défi m’a amené à réorienter mes choix de matériaux pour les dernières œuvres. Toujours en conservant cette idée de rigidité du matériau, l’acrylique m’a permis de rompre le lien unique entre la ligne brodée et son support, et ainsi permettre un dédoublement du support. Effectivement, la transparence de l’acrylique permet l’utilisation d’un deuxième support placé à une certaine distance en dessous du premier. Comme c’est aussi un matériau avec une certaine épaisseur, il permet non seulement d’observer le point de broderie de manière latérale, c’est-à-dire en laissant glisser notre regard sur le support, mais il permet d’observer le mouvement de la broderie sur le sens de l’épaisseur, à travers le support, soit en laissant pénétrer notre regard dans le matériau dont l’opacité est nulle. La limpidité de l’acrylique, l’exploitation du mur et l’ombre sont devenues des éléments importants que je n’avais aucunement envisagés avant mes recherches. La possibilité de laisser certaines perforations non brodées est aussi devenue une option à cette étape. Bien que l’absence semble prendre de l’importance dans mon travail, lorsque l’on regarde les œuvres c’est, au plan esthétique, un état de présence soutenu que l’on ressent.

LA BRODERIE DU MOTIF LINÉAIRE

Une fois que toutes ces étapes sont terminées, il me reste encore à broder. Je dois donc choisir la couleur du fil utilisé, ou plutôt des fils utilisés, puisque je fabrique mes propres couleurs à l’aide d’un mélange de plusieurs couleurs de fils, afin de me constituer une palette. Lors de mes explorations, j’ai eu l’impression que la couleur, alors que je l’avais toujours énormément appréciée et défendue dans mes œuvres, était aussi à l’origine d’un certain frein entre le spectateur et mon travail. C’est pourquoi je tends vers une exposition plus sobre dans les tons de gris colorés, accompagnés de couleurs pastel assez délicates.
Puisque j’utilise des matériaux rigides et inorganiques comme l’acier et l’acrylique, on pourrait penser que mes créations en seraient le reflet et seraient ainsi froides et distantes. Cependant, le résultat n’égale pas l’addition de ses composantes, mais plutôt la transformation de ses éléments. C’est donc dire que je réussis à créer des ensembles vivants et dynamiques malgré ces éléments qui y sont totalement contraires. C’est grâce à la ligne ornementale ondoyante, aux compositions ouvertes des œuvres, mais également grâce aux rythmes que j’instaure pour interrelier les différents motifs, que mes tableaux semblent fluides malgré la rigidité de l’acier ou de l’acrylique.
Bien que je ne puisse pas voir le résultat d’une œuvre avant qu’elle ne soit complètement terminée, j’ai souvent une bonne idée du résultat que j’obtiendrai, puisque toutes les étapes sont minutieusement réfléchies pour m’assurer que l’œuvre soit à la hauteur de mes attentes.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 :LE PROCESSUS CRÉATIF 
1.1 LE PROCESSUS DE CRÉATION
1.1.1 LE MOTIF FLORAL
1.1.2 LE DESSIN
1.1.3 LA LIGNE SEGMENTÉE DE LA BRODERIE
1.1.4 LE SUPPORT TRANSPARENT
1.1.5 LA BRODERIE DU MOTIF LINÉAIRE
CHAPITRE 2 :ANCRAGE THÉORIQUE
2.1 ALOÏS RIEGL
2.2 WILHELM WORRINGER
2.3 À CONTRESENS DE LOOS
CHAPITRE 3 :ANCRAGE ARTISTIQUE 
3.1 GHADA AMER
3.2 SEVERIJA Inčirauskaitė Kriaunevičienė
3.3 PHILIP TAAFFE
3.4 MON EXPOSITION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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