La lecture à voix haute dans le système scolaire

La lecture à voix haute dans la pratique

Lors de nos stages réalisés dans le cadre de notre formation professionnelle, nous avons souvent été confrontée à des leçons de lecture à voix haute. Toutes ces leçons étaient similaires. Elles consistaient à faire lire aux élèves un passage du livre en commun, chacun leur tour. Très souvent, les enseignants demandaient à l’élève qui venait de lire de reformuler ce qu’il avait lu. Dans la plupart des cas, les enfants rencontraient de grandes difficultés à résumer le passage qu’ils venaient de lire. Charmeux dans son ouvrage (1987), insiste sur le fait « qu’il faut avoir lu pour pouvoir lire à haute voix, il faut savoir ce que l’on a compris et ce que l’on veut faire comprendre » (p.54). Lire est avant tout comprendre et donc réussir à donner du sens à ce que nous lisons. Les élèves, en lisant à haute voix, n’arrivent pas forcément à comprendre ce qu’ils lisent puisqu’il existe, selon Bentolila, Chevalier & Falcoz-Vigne (1991), un réel décalage entre les yeux et les mots qui sont écrits.

Les enfants se retrouvent alors pénalisés lorsque l’enseignant demande de reformuler. Les élèves en difficulté de lecture le sont encore davantage. Suite à ces diverses leçons de lecture à voix haute, nous avons pu constater que beaucoup d’élèves n’apprécient pas ces moments. Lorsque nous leur annonçons cette leçon, les enfants rechignent et ne montrent aucun enthousiasme à sortir leur livre. Le problème que nous avons pu remarquer est que, bien souvent, les élèves n’écoutent pas ce qui est en train de se lire. Ils lisent alors la suite du livre afin de s’assurer d’être plus fluide et de comprendre l’histoire, pour pouvoir ensuite reformuler si l’enseignant le demande ou lorsqu’il pose des questions de compréhension. Suite à nos stages et à notre expérience, l’hypothèse que nous pouvons faire est que certains élèves subissent ces moments et peuvent être angoissés. Un manque de confiance peut donc s’installer au fil des questions de l’enseignant. Il sera donc intéressant d’identifier les raisons qui poussent les enseignants à enseigner la lecture à voix haute.

L’utilité de la lecture à voix haute

Nous avons choisi avant tout de réaliser cette recherche, car elle nous sera utile pour notre futur professionnel. Nous nous sommes toujours demandée si le fait de faire lire les élèves à voix haute, chacun leur tour, était très bénéfique. Suite à nos divers stages réalisés au sein de la HEP1 et également à notre expérience d’élève, nous sommes arrivée à la conclusion que cette méthode n’était certainement pas la plus adéquate. C’est pourquoi, nous nous sommes posée les questions suivantes: notre ressenti est-il partagé ? Si oui alors comment faire pour rendre cet enseignement plus attrayant pour les élèves et plus bénéfique pour leur apprentissage ? Nous nous demandons également quelles sont les stratégies que les élèves mettent en place lors d’une leçon de lecture à voix haute. Du point de vue de l’enseignant, nous nous demandons si ce dernier se rend compte que les élèves n’écoutent pas forcément la personne qui est en train de lire à voix haute, mais s’exercent plutôt à lire silencieusement la suite du livre afin d’être prêts si l’enseignant les interroge. Mais aussi, quelles représentations les enseignants ont-ils de cette lecture ? Pourquoi pratiquent-ils cette méthode ? Dans quel but ? Que pensent-ils que cela apporte aux apprentissages des élèves ? Afin de répondre à ces questions, il est d’abord nécessaire de voir l’évolution de la lecture à voix haute à travers le temps.

La lecture à voix haute à travers le temps

Afin de bien comprendre l’évolution de la lecture, il est primordial de faire un bref retour historique. La lecture à voix haute est une pratique ancienne. Du temps des Grecs et des Romains, la majorité des lectures étaient orales et collectives. Le but de ces lectures était de partager et de communiquer un texte avec d’autres personnes. Une personne lisait à voix haute tandis que les autres écoutaient. Comme nous l’explique Chauveau (1998), parfois il arrivait que tout le monde oralise le texte, répète et commente en même temps. A cette époque, la transmission de la culture s’est alors faite essentiellement de manière orale. Jean (1999), nous relate que chez les Grecs, c’est un esclave spécialisé qui s’occupait de la lecture à voix haute non pas pour lui mais bien pour un auditeur. Il avait alors un rôle de traducteur. Pour que le message du texte paraisse clair, l’esclave devait lui-même comprendre le sens des mots et donc du texte écrit. Chez les Romains, l’art de la rhétorique est au coeur des apprentissages.

Celui qui pratiquait la lecture à voix haute se nommait le rhéteur. La lecture silencieuse ne se pratiquait pas, car pour comprendre un texte il fallait l’écouter et non le lire. La lecture à voix haute de cette époque a alors permis un certain héritage de la langue et ainsi la transmission de la culture. On comprend mieux en observant ce que représentait la lecture à haute voix pour ces sociétés qui nous ont transmis, notre langue, notre alphabet et les éléments fondateurs de notre culture (philosophie, droit, sciences politiques, mathématiques, fictions romanesques, poésie, etc.) que la lisibilité des écrits doit encore aujourd’hui beaucoup à l’oralisation de l’écrit. Car c’est par la lecture à haute voix que la langue parlée orale a pu s’inscrire, en distinguant ces unités que sont les mots, dans la continuité et les modulations intonatives de son énonciation (Jean, 1999, p. 34).

Au Moyen-Âge, les documents écrits étaient rares et principalement des textes sacrés. Cette pratique était réservée à la haute société et donc seulement aux gens cultivés. Les lectures se faisaient oralement car elles étaient destinées à s’adresser à un public. A cette époque, les textes ne comportaient pas de blancs. Les mots n’étaient donc pas séparés, c’est-à-dire que l’unité graphique n’existait pas. L’oralisation des textes permettait alors de retrouver certaines unités de la langue (Bentolila, Chevalier & Falcoz-Vigne, 1991). La lecture silencieuse naît grâce à l’invention de l’imprimerie. Le statut du lecteur change radicalement. Il lit alors pour lui, seul et sans bruit. Postman (1983), dit que l’oralité est « réduite au silence » ou encore que le lecteur « se retire dans le secret de son esprit » et que la lecture devient « un acte antisocial » (p.18). Concernant la lecture du XXème siècle, Charmeux (1987), met l’accent sur le fait que le livre, à l’école, joue un rôle primordial dans le processus de l’enseignement et dans l’apprentissage de la lecture. Chaque type de document à lire possède sa propre mise en page.

C’est une contrainte pour le lecteur, car il doit connaître ces divers types afin de pouvoir adapter correctement ses conduites de lecture. Cette adaptation lui permettra alors de trouver l’information souhaitée. La lecture doit être adaptée au niveau des élèves, sinon nous risquons de les mettre dans des situations délicates et de les dégouter. Le but principal est bien sûr, la compréhension du texte lu, mais pour atteindre cet objectif complexe, l’élève doit avoir un projet de lecture. Les élèves ont souvent leur propre projet mais ne sont pas forcément à l’aise avec ce dernier. C’est à l’enseignant de proposer aux enfants des activités qui développeront progressivement les compétences qui leur manquent. Cet auteur (1987), insiste principalement sur le fait « qu’apprendre à lire, c’est apprendre à construire du sens, tout ce qui ne conduit pas directement à ce résultat ne peut prétendre être un apprentissage de la lecture » (p.99). Concernant la lecture à voix haute, il faut que les enfants passent par la lecture silencieuse avant de lire le texte à haute voix. Cette méthode leur permet de trouver du sens et ainsi pouvoir, par la suite, transmettre un message clair. (Charmeux, 1987). Nous pouvons alors nous interroger sur la signification de ce que veut dire lire à voix haute.

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Table des matières

CHAPITRE 1. PROBLEMATIQUE
1.1 DEFINITION ET IMPORTANCE DE L’OBJET DE RECHERCHE
1.1.1 Notre expérience
1.1.2 La lecture à voix haute dans la pratique
1.1.3 L’utilité de la lecture à voix haute
1.2 ETAT DE LA QUESTION
1.2.1 La lecture à voix haute à travers le temps
1.2.2 Que signifie lire ?
1.2.3 Définition de la lecture à voix haute
1.2.4 La reformulation suite à la lecture à voix haute
1.2.5 La lecture à voix haute dans le système scolaire
1.3 QUESTION DE RECHERCHE ET OBJECTIF
1.3.1 Question de recherche et objectif
CHAPITRE 2. METHODOLOGIE
2.1 FONDEMENTS METHODOLOGIQUES
2.1.1 Type de recherche
2.1.2 Enjeux et objectif
2.1.3 Type de démarche
2.2 NATURE DU CORPUS
2.2.1 Récolte des données
2.2.2 Procédure et protocole de recherche
2.2.3 Echantillonnage
2.3 METHODES DE COLLECTE DES DONNEES
2.3.1 Transcription
2.3.2 Traitement des données
2.4 DEMARCHE D’ANALYSE
CHAPITRE 3. ANALYSE ET INTERPRETATION DES RESULTATS
3.1 INTERPRETATION ET ANALYSE DES REPONSES DES ENSEIGNANTS
3.1.1 La lecture suivie (annexe 1, p.I et II, questions 1 et 4)
3.1.2 Le projet de lecture une pratique plus judicieuse ?
3.1.3 Les élèves en difficulté et la lecture à voix haute
3.1.4 Les méthodes utilisées pour aider les élèves
3.1.5 Les stratégies mises en place par les élèves (annexe 1, p.I et II, questions 2 et 3)
3.1.6 Le comportement de l’enseignant (annexe 1, p.II, question 3)
3.2 LES BUTS RECHERCHES DE CET ENSEIGNEMENT (ANNEXE 1, P.II, QUESTION 5)
3.2.1 Une affaire de plaisir
3.2.2 Les apports de la lecture à voix haute (annexe 1, p.II, question 6)
3.3 LA LECTURE A VOIX HAUTE DANS LE PER (ANNEXE 1, P.II, QUESTION 7)
3.3.1 La fluidité et la compréhension de la lecture (annexe 1, p.II, question 8)
3.3.2 Interdisciplinarité et transversalité (annexe 1, p.II, question 9)
3.3.3 Quelle évaluation ? (annexe 1, p.II, question 10
3.3.4 La différenciation en lecture à voix haute
3.4 L’IMPORTANCE DE L’ENSEIGNEMENT DE LA LECTURE A VOIX HAUTE (ANNEXE 1, P.II, QUESTION 11)
3.4.1 La confiance au sein de la classe
3.4.2 Donner l’envie de lire à voix haute (annexe 1, p.II, question 12)
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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