La langue des signes française (LSF)

La Langue des Signes Française (LSF)

Histoire d’une langue

L’évolution des LS, dont la reconnaissance en tant que langue n’est par ailleurs pas identique selon les pays, alterne entre périodes d’interdiction et périodes plus fastes. Nous nous proposons ici de revenir sur les évènements les plus remarquables, et ayant marqué un tournant dans l’histoire des LS.

Origine et développement
S’il est difficile de pointer et dater avec précision les débuts des LS, il est néanmoins possible de retracer ponctuellement des états de la langue au travers la représentation des personnes sourdes au fil des époques.

Pour ce qui est de l’Antiquité, c’est au travers des réflexions d’Aristote quant au «logos» que l’on dégage une première tendance. Selon le philosophe, la parole est le seul moyen d’accéder à la pensée, et par extension à la logique. De ce fait, les personnes ayant recours à la modalité visuo-gestuelle pour s’exprimer ne sauraient y accéder, et se voient de fait incapable de raisonner — et ce bien qu’Artistote observe et reconnaisse leur usage de la langue des signes (Aristote, IV siècle av. J-C, cité par SaintLoup, 1989). Les sourds, selon les réflexions d’Aristote, sont donc relégués dans la catégorie des animaux (à savoir celle des êtres qui ne sollicitent que la vue, en opposition aux hommes qui eux sollicitent également l’ouïe et la parole). Le Moyen-Âge marque une première évolution notable dans la considération des personnes sourdes et donc sur les regards portés sur leur usage des LS. L’influence de l’Église catholique sur la société a favorisé l’intégration de plusieurs minorités, y compris celle des personnes sourdes (Saint-Loup, 1989). On trouve mention d’ouvriers ou d’artisans sourds, puisque contrairement aux autres formes de handicaps comme la cécité ou d’autres pathologies physiques, ils peuvent apprendre en observant. C’est également à cette époque que l’on trouve la première trace en ce qui concerne la France, d’une interprétation (par des personnes qui ne sont pas des professionnels rémunérés, à l’époque) entre français et langue des signes (Cantin, 2021). Les sourds semblent à l’époque mener une vie identique à celle des entendants de leur rang. Par exemple, la princesse Jeanne Stuart dite aussi la « Muta Domina » (1428-1493), fille sourde de Jacques Ier d’Écosse, fait un bon mariage et apporte descendance et honneur à son royaume.

Si la situation des sourds semble s’améliorer au fil du temps, ce n’est véritablement qu’à la Renaissance que les LS connaissent leur essor : elles ont maintenant leur place dans l’éducation et l’enseignement. La méthode est alors oraliste : les enfants sourds doivent parler, on les entraîne donc à la langue vocale. Ironiquement, cet entrainement repose sur l’utilisation de signes (code gestuel, des combinaisons de gestes manuels, de la tête et d’expressions du visage). C’est l’engagement de Charles-Michel Lespée (1712-1789), dit Abbé de l’Épée, qui porte la LS au rang de langue d’éducation pour les sourds. Pour ce faire, il complète les signes d’usage en France par une série de signes qu’il appelle « méthodiques », dont le but est de représenter des éléments de la grammaire du français, tels que le genre ou le nombre, les déterminants… La méthode de l’abbé se démocratise en Europe durant le 18é siècle. C’est Roche-Ambroise Auguste Bébian (1789 1839) qui reprend le flambeau, en repensant une méthode sans signes méthodiques cette fois. Il favorise l’éducation bilingue, basée à la fois sur l’usage des signes naturels de la LSF pour l’oral, et sur l’apprentissage du français écrit. On le retrouve notamment à la tête de l’Institution Nationale des Jeunes Sourds de Paris de 1819 à 1821. Il était également le premier à s’atteler à la description de la LSF dans le but d’élaborer un dictionnaire LSF/français.

100 ans de césure
S’il n’était qu’un seul événement à garder en mémoire quant à l’histoire des Sourds et la pratique des LS, il s’agirait sans doute du Congrès de Milan. C’est effectivement à Milan, en 1880, que se déroule le troisième congrès international pour l’amélioration du sort des sourds. Nombre de spécialistes européens (entendants) de la surdité et de l’éducation des jeunes sourds se réunissent dans le but de réviser et uniformiser le système éducatif des enfants sourds. L’assemblée ne compte que trois personnes sourdes, et aucun des débats menés n’a été interprété en LS malgré les interprétations prévues en anglais, français, espagnol et autres langues vocales.

Le congrès est organisé par des défenseurs de la méthode oraliste, qui consiste à éduquer les enfants sourds à la parole et à délaisser les LS. Il débouche sur l’interdiction en Europe de l’usage des langues des signes dans l’éducation des enfants sourds, favorisant de fait le recours à la méthode purement oraliste. Les arguments en faveur de cette décision sont aussi nombreux que variés. On citera “une facilité d’intégration à la société” pour les sourds oralisant, ou encore que, sur l’aspect religieux ou médical, l’oralité permet non seulement « d’élever l’esprit là où les signes ne transmettent que les passions », mais aussi de « donner la vie » aux sourds.

Citons l’Abbé Tarra, qui préside alors le Congrès:

« Le sourd-muet […] n’a en quelque sorte qu’une respiration incomplète […] en les habituant à la respiration provoquée par l’émission de la parole, ce n’est donc pas seulement la parole qu’on leur donne, c’est la vie. ».

On ne voit donc la personne sourde que comme une personne malade qu’il faut guérir. Les motions adoptées pendant ce congrès sont lourdes de conséquences pour le siècle à venir, et plus encore puisque leurs répercussions peuvent encore s’observer aujourd’hui.

Le Réveil Sourd 

Faisant suite à l’interdiction de la LSF dans les écoles françaises pendant presque 100 ans, méprisée et marginalisée, c’est dans les années 1970 que se produit en France “le Réveil Sourd”. La rencontre de Jean Grémion, écrivain, journaliste et metteur en scène français, avec un artiste Sourd américain, Alfredo Corrado, donne naissance en 1976 à l’IVT : l’International Visual Theatre, à Paris. La scène permet de requalifier la LSF, et d’en redorer l’image auprès du public si bien qu’en 1977, la LSF est de nouveau « autorisée ». Avec le théâtre comme vecteur principal, l’IVT encourage également les travaux linguistiques sur les LS. Les associations culturelles et militantes Sourdes se multiplient, tout comme les actions pour que les sourds retrouvent une place légitime dans la société. C’est le début des cours de LSF proposés aux entendants, notamment, et les jalons posés d’une culture Sourde renouvelée.

Législation

L’impact du Réveil Sourd conduit à la parution en 1991 d’une première loi quant à la reconnaissance de la LSF et son importance dans l’éducation. Un amendement à la loi du 8 Janvier 1991 permet alors aux parents d’enfants sourds de choisir entre une communication dite bilingue (LSF et français écrit) et une communication oraliste. S’en suivront d’autres lois concernant l’évolution du statut juridique de la LSF en France, présentées ci-après.

Statut
La loi du 11 février 2005 , pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, reconnaît la LSF comme une langue à part entière:

« Art. L. 312-9-1. -La langue des signes française est reconnue comme une langue à part entière. Tout élève concerné doit pouvoir recevoir un enseignement de la langue des signes française. Le Conseil supérieur de l’éducation veille à favoriser son enseignement. Il est tenu régulièrement informé des conditions de son évaluation. Elle peut être choisie comme épreuve optionnelle aux examens et concours, y compris ceux de la formation professionnelle. Sa diffusion dans l’administration est facilitée. » .

Elle n’est cependant pas reconnue comme langue officielle de la République au même titre que le français. L’accessibilité pour les personnes sourdes demeure elle aussi encadrée par d’autres textes de loi.

Accessibilité
Cette même loi du 11 février 2005, renforcée par la Convention relative aux droits des personnes handicapées adoptée par les Nations Unies en 2008, stipule également que chaque citoyen doit pouvoir jouir d’un accès total à l’information du domaine public (administrations et services, lieux publics, transports…).

Elle fait également obligation “aux chaînes de télévision publiques et aux chaînes privées dont l’audience nationale dépasse 2,5 % de l’audience totale des services de télévision de rendre accessibles aux personnes sourdes ou malentendantes la totalité de leurs émissions, en dehors des messages publicitaires et de quelques programmes dérogatoires.” Elle ne détermine cependant pas les méthodes d’accessibilité à employer, et beaucoup de chaînes concernées optent plus facilement pour du sous-titrage que pour la LSF. D’après le site de la CSA, il existe actuellement un journal d’informations quotidien accessible en LSF et trois journaux sous-titrés sur chacune des trois chaînes d’information de la TNT, du lundi au vendredi. Les week-ends et jours fériés, seuls les journaux sous-titrés demeurent.

Notons cependant que, d’après le rapport Gillot de 1997, 70% de la population sourde française serait illettrée et donc peu à même de tirer profit du sous-titrage proposé. Accessibilité en demi-teinte donc, bien que les services publics et les administrations aient de plus en plus facilement recours à des services d’interprétation pour l’accueil des citoyens signant : ceux qui s’expriment en langue des signes. Cette faible maîtrise du français observée dans la communauté sourde se justifie sans doute par le fait que les LS sont des systèmes linguistiques qui diffèrent beaucoup du français. La section suivante expose plusieurs caractéristiques linguistiques des langues des signes, notamment celles qui la distinguent des langues audio-vocales.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 TRADUCTOLOGIE, LANGUE DES SIGNES : CONTEXTES ET PROBLEMATIQUES
1.1 LA LANGUE DES SIGNES FRANÇAISE (LSF)
1.1.1 Histoire d’une langue
Origine et développement
100 ans de césure
Le Réveil Sourd
1.1.2 Législation
Statut
Accessibilité
1.1.3 Description linguistique
Simultanéité
Iconicité
Spatialité
Ordre propre
Pas de forme écrite
1.2 TRADUCTOLOGIE
1.2.1 Traduire
Interprétation ou traduction ?
Traduction (processus) et traduction (produit)
Théorie de la traduction
1.2.2 Brève rétrospective : du parchemin à l’ordinateur
Traducteur, un des plus vieux métiers du monde
TAO : qu’est-ce que c’est ?
Impacts sur le métier
1.2.3 Traductologie des LS
Contexte
Déverbalisation
Nécessité des connaissances du monde
1.2.4 De la théorie à la pratique: la traduction français-LSF
Besoin grandissant pour du contenu accessible
Peu de traducteurs fr-LSF
Des outils mais pas pour les LS
Comment outiller la traduction des LS ?
CHAPITRE 2 ÉTAT DE L’ART CONCERNANT LA TAO ET L’EVALUATION DE LA TRADUCTION
2.1 TRADUCTION ASSISTEE PAR ORDINATEUR
2.1.1 Fondamentaux
Forme écrite éditable
Linéarité
Capitaliser sur les travaux précédents
Intégration de modules (pour tout avoir sous la main)
2.1.2 Et pour les LS ?
Les outils existants
Pourquoi la TAO telle qu’elle existe ne peut s’appliquer aux LS
Forme écrite éditable
Linéarité
Mémoire de traduction
2.2 ÉVALUER LA TRADUCTION ET LES OUTILS
Entre objectivité et subjectivité
2.1.1 Critères pour évaluer une traduction
Cohérence de la forme
Respect du message et de l’intention
Évaluation de la traduction automatique
2.1.2 Comment évaluer les outils d’aide à la traduction ?
Évaluation de la TAO
Impact de la TAO sur la profession
Synthèse du chapitre
CHAPITRE 3 PROPOSITIONS DE SPECIFICATIONS LOGICIELLES
3.1 COMPRENDRE LE METIER DE TRADUCTEUR : EXPERIENCES PRELIMINAIRES
3.1.1 Traducteurs du texte vers la LSF à l’œuvre
Méthodologie
Résultats
3.1.2 Brainstorming
Méthodologie
Résultats
3.1.3 Le processus de traduction
Synthèse des résultats
Discussion et limites
3.2 CAHIER DES CHARGES ET PROPOSITIONS
3.2.1 Non-linéarité assistée par des « Blocs »
Segmentation libre : la notion de Bloc
Contenu des Blocs
Organisation temporelle : l’axe vertical
Hiérarchie : la structuration des Blocs
Flexibilité : la mobilité des Blocs
3.2.2 Autres fonctionnalités
Gestion du texte source
Modules de ressources
Prompteur
Mémoire de traduction
CHAPITRE 4 REALISATION DES PROTOTYPES
4.1 CONCORDANCIER BILINGUE FRANÇAIS – LSF
4.1.1 Base de données d’alignements
Corpus utilisé
Anatomie d’un alignement
Annotation du texte avec Brat
Annotation des vidéos avec Elan
Création d’une fonction d’alignements
4.1.2 Implémentation
Interface
Fonction de recherche : mode d’emploi
4.1.3 Exemples d’usage
Explorer la langue
Mot sans signe standard correspondant, mais exemples de traduction similaires entre eux
Pas de signe standard correspondant, mais exemples différents
Relation de cause à effet
4.2 L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL INTEGRE
4.2.1 Zone d’édition
Création et mouvement des Blocs
Charger du contenu dans un Bloc
Opération sur les contenus
Menu et options
4.2.2 Modules et outils
Carte
Historique
4.2.3 Gestion du texte source
Texte et formatage
Traitement automatique du texte
4.2.4 Navigation dans l’arbre
CONCLUSION

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