La guerre du golfe persique fragilise les écosystèmes

La guerre du golfe persique fragilise les écosystèmes

Le cas spécial des chevaux Lippizans

L’élevage et la sélection de chevaux Lippizans noirs ou blancs était une activité historique de la région de Lipik depuis plus de 400 ans. Un grand nombre de chevaux fut tué pendant les hostilités qui ont frappé les régions de Lipik, Dakovo et Zupanja d’août à septembre 1991, régions riches en haras nationaux ou privés. Plusieurs actions furent entreprises pour sauver des animaux de grande valeur, et notamment des juments au dernier stade de gestation, qui furent rapatriées à l’école vétérinaire de Zagreb épargnée par les bombardements d’artillerie lourde (photo 10). On ne peut qu’applaudir le courage et la ténacité des corps enseignant et étudiant de l’école vétérinaire constituant une équipe de 150 bénévoles environ qui mirent leur vie en danger dans les zones bombardées et sur des routes dangereuses pour réaliser le sauvetage de 160 à 200 chevaux (Gomercic, 1993).Il semble évident que l’agression subie n’avait pas seulement un but militaire mais aussi la volonté à peine voilée de détruire en Croatie tout ce qui ne pouvait pas être pillé, puisque de nombreuses cibles furent civiles, notamment les équipements agricoles les plus précieux. Les autorités croates ont voulu notamment rendre public le rapport d’une commission indépendante sur la destruction des chevaux Lippizans du haras national de Lipik, rassemblant des observateurs étrangers. Ce rapport (Stephen et al., 1993), qui a pour but d’établir les causes de la disparition des chevaux par des exhumations, autopsies et interrogatoires de témoins, vise aussi à récupérer de l’agresseur la réparation des dommages, des chevaux et des documents volés pendant le conflit, et enfin à mettre en place un embargo sur la vente ou le transfert des chevaux disparus ou de leurs descendants (photo 13). Les autopsies des chevaux retrouvés montrèrent qu’il succombèrent à des tirs d’armes automatiques, à des blessures par des éclats d’obus, mais aussi par l’ensevelissement sous les décombres de leurs écuries ou par suffocation pendant les incendies (photos 11 et 12). Une grande partie des chevaux dont les corps ne furent pas retrouvés ont probablement été enlevés et transportés en régions serbes ou bosniaques (environ une cinquantaine sur un total de 120 chevaux), même si tous les lieux d’enfouissement de cadavres ne sont pas connus des autorités croates. En effet les dirigeants du haras national étaient serbes (dans une région où 98 % de la population est croate) comme dans tous les organismes d’état où les populations locales de l’ancienne Yougoslavie avaient de grandes difficultés à être embauchés.

L’impact de la guerre sur la faune sauvage

Évacuation des zoos
Le zoo d’Osijek, fondé en 1954, abrite environ 65 espèces animales dont un élevage de 500 cerfs. Au mois de septembre 1991 les combats se rapprochaient de la ville et il fallut évacuer les animaux, ce qui posa un sérieux problème de transport sur les routes encombrées et dangereuses, mais aussi un problème d’accueil. Heureusement les zoos de Ljubjana et de Zagreb fournirent les éléments nécessaires et la majorité des espèces furent sauvées, grâce à un séjour de plusieurs mois dans les régions les plus sûres de la Croatie, mais aussi dans les pays voisins (Slovénie, Hongrie). Un petit nombre seulement mourut dans les transports qui occupèrent le personnel du zoo pendant un mois et demi (Knjaz, 1993) (photo 14). Au moment du cessez-le-feu dans cette région au début de 1992, la majorité des bâtiments du zoo était endommagée par les bombardements et 300 cerfs avaient périt.

Dommages subis par la faune sauvage

Une des caractéristiques de la guerre est de provoquer toutes sortes de destructions et de pollutions de l’environnement sur de larges surfaces. Les opérations militaires ont de manière directe ou indirecte les conséquences suivantes : • dérangement et intimidation des animaux sauvages • destruction des plantes et des animaux • contamination et destruction des habitats. Le dérangement des animaux pendant la période de reproduction met en péril la génération suivante, notamment chez les oiseaux migrateurs comme les Ansériformes. Le bombardement et l’incendie de zones étendues ont détruit des parties entières de forêt comme dans le parc national de Krka, des lacs Plitvice et de Velebit, classés patrimoine mondial de l’Unesco. Les grands mammifères comme les cerfs et les ours sont tués involontairement par les bombardements, les tirs croisés, et les mines antipersonnel (Frkovic, 1993) (photos 15 et 16). Parmi les pollutions recensées, 130 000 tonnes de produits pétroliers furent déversées dans les régions possédant des raffineries, avec les conséquences maintenant bien connues de ce genre de catastrophe. D’autres produits toxiques (propylène dichlorhyde, diméthyl sulfide) polluèrent les rivières. Il est pratiquement impossible de mesurer les pertes parmi la faune sauvage, mais il faut considérer qu’elles sont très importantes puisque les réserves précitées étaient parmi les dernières à abriter la faune sauvage européenne déjà raréfiée par l’activité humaine en Europe. Les estimations arrivant dès le ralentissement du conflit prévoient une période d’au moins 40 ans pour retrouver la situation d’avant 1990 en termes de quantité et de diversité de la faune sauvage.

Table des matières

Introduction
Première Partie : Les animaux face aux risques d’une guerre conventionnelle moderne
1 Animaux victimes de la guerre en Croatie
1.1 Origine et développement du conflit
1.2 Quelques aspects de blessures animales occasionnées par les combat
1.2.1 Blessures par balles chez des chiens
1.2.2 Blessures par différents projectiles chez des chevaux
1.3 Dommages subis par le bétail et estimation des pertes
1.3.1 Durcissement du conflit et des souffrances animales
1.3.2 Estimation des pertes
1.4 L’impact de la guerre sur la faune sauvage
1.4.1 Évacuation des zoos
1.4.2 Dommages subis par la faune sauvage
2 La guerre du golfe persique fragilise les écosystèmes
2.1 Étude initiale du plan d’action des Nations Unies
2.2 Résultat de la croisière du Mt Mitchell
2.2.1 Effets de la marée noire
2.2.2 2.2.2 Effets de la pollution atmosphérique
2.2.3 Effets de la guerre sur l’écosystème terrestre
2.2.4 Conclusions
2.3 Effet des munitions à l’uranium appauvri
3 Les effets de la guerre sur le contrôle des maladies du bétail au Zimbabwe
3.1 Les maladies transmises par les tiques
3.2 La trypanosomiase
6 3.3 La fièvre aphteuse
3.4 La maladie du charbon
3.5 La rage
Deuxième partie : Un nouveau type d’arme permet de prendre pour cible directe les animaux : l’arme biologique
1 Définitions
1.1 Arme biologique
1.2 Biocrimes
1.3 Terrorisme, bioterrorisme et agroterrorisme
1.3.1 Terrorisme
3 1.3.2 Bioterrorisme
1.3.3 Agroterrorisme
1.3.4 La guerre biologique
2 Historique
2.1 Premières tentatives
2.2 L’ère de la microbiologie moderne et son application pendant les Guerres Mondiales
2.3 Le programme américain
2.4 Le programme russe
2.4.1 L’histoire du parapluie bulgare
2.4.2 La catastrophe de Sverdlovsk
2.5 Les terroristes aussi accèdent à l’arme biologique
2.5.1 1984 : Salmonellose
2.5.2 1995 : sarin
2.5.3 1996 : dysenterie
2.5.4 1997 : virus hémorragique du lapin
2.5.5 2001 : anthrax
2.6 Efforts de désarmement
2.6.1 Les conventions
2.6.2 Le désarmement ?
2.6.3 Situation actuelle.
2.6.4 Le cas de l’Irak
3 Agents
3.1 Les différentes classes d’agents biologiques
3.1.1 Les bactéries
3.1.2 Les rickettsies
3.1.3 Les virus
3.1.4 Les toxines
3.2 Agents zoonotiques ou non
3.3 Tous les agents ne représentent pas la même menace
3.3.1 Agents utilisés pour les biocrimes
3.3.2 Agents utilisables sur le champ de bataille
3.3.3 Agents utilisables contre les animaux
3.4 Le risque biotechnologique
3.4.1 Les toxines
3.4.2 Les biorégulateurs
3.4.3 Les virus génétiquement modifiés
3.4.4 Les armes ethniques
Troisième partie : Les nouveaux types de guerre font des animaux des cibles privilégiées
1 La filière agricole : une cible large et vulnérable
1.1 Une cible large
1.1.1 Attaques touchant les cultures
1.1.2 Attaques sur la filière agroalimentaire
1.1.3 Attaque sur les cheptels d’animaux d’élevage
1.1.4 Attaque sur les laboratoires de recherche
1.2 Une cible vulnérable
1.2.1 une vulnérabilité intrinsèque à l’agriculture
1.2.2 La vulnérabilité vis-à-vis de l’arme biologique
1.2.3 Les motifs des agroterroristes sont nombreux
1.2.4 La biodiversité en danger
2 La plus grande menace pour la France : l’introduction d’un virus hautement contagieux
2.1 L’élevage européen, indemne de nombreuses maladies
2.1.1 Situation épidémiologique des pays
2.1.2 Maladies qui seraient les plus néfastes
2.2 Facteurs de risque supplémentaires avec ce genre de virus
2.2.1 Proximité géographique du virus
2.2.2 Facilité de transport du virus
2.2.3 Contagiosité du virus
2.2.4 Mouvement des animaux
2.2.5 Transmission aérienne du virus de la fièvre aphteuse
2.3 Les épizooties récentes, les mesures prises et leurs effets
2.3.1 La fièvre aphteuse en Europe en 2001
2.4 Estimation du coût des épizooties
2.4.1 Les modèles prédictifs
2.4.2 Coûts directs
2.4.3 Coûts totaux
3 Moyens de lutte
3.1 Empêcher les attaques biologiques
3.1.1 Législation
3.1.2 Renseignement
3.2 Minimiser les effets des attaques biologiques
3.2.1 Contre-mesures
3.2.2 Acteurs de la lutte
3.2.3 Les missions
Conclusion
Bibliographie

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