La guerre de sanctions entre l’UE et la Russie

La sanction, une arme économique

« La guerre est la chose du monde qui demande le moins de réflexion », écrit Emmanuel Kant dans son Projet de paix perpétuelle. Bien sûr, le philosophe parle de la guerre menée par un despote, peu concerné par les conséquences néfastes d’un conflit (famine, destruction, mort) ; néanmoins, n’est-il pas permis de généraliser cette affirmation au regard des trésors d’ingéniosité mis en œuvre par les sociétés humaines pour tenter de résoudre leurs différends sans recourir à la guerre ? Avant de prendre les armes et de s’élancer les uns contre les autres, armée contre armée, les clans, les tribus, les nations, les États ont à disposition une multitude de solutions, temporaires ou pérennes, à leurs conflits : mariage, partage de terres, alliance, procès, amende, boycott de compétition sportive, etc.
De nos jours, la concurrence entre les États et les rapports de force sur la scène internationale entraînent le recours, la plupart du temps, à l’arme économique, définie comme « l’utilisation par un État, à des fins de politique étrangère, des rapports économiques qu’il entretient avec un autre État. Il s’agit, soit de punir celui-ci pour une action jugée inacceptable – on parlera alors de « bâton » (sanction économique) –, soit de le récompenser pour une évolution que l’on considère positive (sic) – on parlera alors de « carotte » (avantages commerciaux ou financiers) ».
Les sanctions économiques « constituent des mesures coercitives à l’encontre de certaines personnes, entités ou État », prises en réaction à une décision ou à une action désapprouvée par l’entité qui sanctionne. Leurs finalités sont diverses et vont du maintien de la paix à la promotion de la démocratie, en passant par la prévention de la prolifération nucléaire. La politologue Marie-Hélène Labbé propose de les classer selon cinq objectifs stratégiques:
obtenir un changement limité de la politique du pays-cible ; déstabiliser le gouvernement du pays-cible ; briser une aventure militaire de faible envergure ; affaiblir le potentiel militaire du pays-cible ; obtenir des changements importants dans la politique de l’État-cible.

Efficacité des sanctions

Une sanction économique doit représenter un désavantage pour le pays-cible sur lequel le pays sanctionnant souhaite exercer une pression. Il peut s’agir de lui faire perdre un avantage en réduisant ou en supprimant des crédits, ou de détériorer sa situation économique ou politique en l’empêchant, par exemple, d’exporter les matières premières qui constituent sa principale source de revenu. C’est pourquoi la notion de sanction économique renvoie, dans la plupart des cas, à celle d’embargo qui, au sens strict, désigne la suspension des exportations en direction du pays ciblé. Dans un sens extensif, l’embargo inclut le boycott, c’est-à-dire la suspension des importations en provenance du pays sanctionné. Lorsque les sanctions visent des biens susceptibles de renforcer le potentiel militaire du pays-cible, l’embargo est dit «stratégique». Il ne doit pas être confondu avec le blocus, qui définit un ensemble de mesures plus larges et plus contraignantes dont le but est d’interrompre toutes les relations économiques, commerciales et financières d’un pays avec le reste du monde. Ainsi, l’embargo ne concerne que deux pays, celui qui sanctionne et celui qui est sanctionné, alors que le blocus a un effet sur les pays tiers, empêchés par le pays sanctionnant de commercer avec le pays sanctionné.
La question de l’efficacité d’une sanction dépend d’abord du lien entre l’objectif recherché et le type de sanction choisi. « Le choix de l’objet peut jouer pour beaucoup dans la réussite d’une sanction, écrit Marie-Hélène Labbé. Il faut d’abord avoir la plus grande maîtrise possible de l’offre de l’objet visé, mais il faut aussi choisir un objet qui fasse « mal » à l’État-cible, au moins ponctuellement, et plus sûrement à long terme.» Afin d’être efficace, l’embargo doit, premièrement, porter sur un produit nécessaire ou indispensable à l’économie du pays visé et, deuxièmement, porter sur un produit dont le pays sanctionnant maîtrise au moins le commerce international.

La politique extérieure de l’UE : les grands principes

L’Union européenne trouve sa source dans la volonté d’unir les peuples d’Europe afin qu’ils ne se fassent plus la guerre, et dans l’idée que la réalisation de ce projet passe par la création d’un espace économique commun. Cette double inspiration, à la fois idéaliste et pragmatique, marque encore aujourd’hui la politique de l’UE, à l’intérieur comme à l’extérieur de ses frontières. Ainsi, en vertu de l’article 3 du Traité sur l’Union européenne « l’Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples » et elle « établit un marché intérieur ». L’action extérieure de l’UE, définie à l’article 21, s’articule autour, d’une part, des grands principes que sont la démocratie, l’État de droit, les droits de l’homme et les libertés fondamentales, et, d’autre part, d’objectifs participant de l’organisation de la sécurité collective : respect du droit international et des principes de la charte des Nations unies, développement durable, intégration de tous les pays à l’économie mondiale, etc. « Même si l’Union européenne n’est pas en elle-même une organisation de sécurité collective (contrairement à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui regroupe cinquante-six États* membres, de Vancouver à Vladivostok), écrit le diplomate et politologue Maxime Lefebvre, elle s’articule avec cette idée d’un monde en paix régi par le droit et les institutions multilatérales. » Les premiers concernés par les velléités pacificatrices de l’UE sont ses plus proches voisins : « pour assurer sa propre stabilité, l’UE [doit] s’entourer de voisins stables ».  La Politique européenne de voisinage (PEV) est créée en 2004 avec pour objectif de stabiliser les États et les sociétés de l’espace proche (pourtour méditerranéen, frontières orientales de l’Europe, Caucase) en les incitant à effectuer des réformes pour accéder au grand marché intérieur, à se doter d’institutions responsables devant les citoyens et à s’acheminer ainsi vers la démocratie. Elle repose sur un système d’échange de bons procédés : l’UE octroie des avantages économiques pour récompenser des réformes politiques. L’accord de libre échange à l’origine des bouleversements que connaît actuellement l’Ukraine s’inscrivait dans ce cadre : la signature de cet accord, qui incluait notamment la libéralisation de l’octroi des visas et une mise aux normes des produits ukrainiens afin de leur permettre l’accès au marché européen, devait venir récompenser l’Ukraine pour la réforme de son système judiciaire, imposée par l’UE.

La politique étrangère et de sécurité commune (PESC)

Si l’UE donne parfois l’impression « [d’additionner] les mesures, voire les gestes politiques sans jamais les inscrire dans une ambition et des perspectives à moyen et long terme », ce manque de cohérence ou de perspective est sans doute imputable au caractère composite d’une union à vingt-huit pays dont chacun conserve sa propre politique extérieure.
En la matière, c’est aux chefs d’États et de gouvernements réunis en Conseil européen qu’il revient de s’accorder : « Sur la base des principes et objectifs énumérés à l’article 21, le Conseil européen identifie les intérêts et objectifs stratégiques de l’Union. » Le processus décisionnel relevant de la méthode dite «intergouvernementale», les décisions sont prises à l’unanimité. Différents acteurs interviennent en matière de politique extérieure. Le Conseil européen définit les lignes stratégiques, il s’exprime par des conclusions et des déclarations qui orientent la politique étrangère et de sécurité commune. Le président du Conseil est l’interlocuteur privilégié des États tiers et s’exprime sur des dossiers touchant à différents domaines, telles les sanctions économiques (à la fois politique étrangère, économique et commerciale). De son côté, le Haut représentant pour les affaires étrangères et la politique de sécurité conduit la PESC et préside le Conseil des affaires étrangères, tout en assurant la cohérence de l’ensemble de l’action extérieure de l’UE en sa qualité de vice-président de la Commission européenne. Enfin, le Parlement européen n’est pas absent. Certes, il n’a aucun pouvoir de décision, mais il débat, il vote des résolutions, il exprime des avis, il adopte des rapports, il auditionne des responsables politiques et il se tient informé des opérations de l’Union : il joue son rôle de représentant de l’ « opinion européenne ».

Sanctions européennes, contre-sanctions russes

Ni l’UE ni l’ONU ne reconnaissent le résultat du référendum, jugé illégal, et le rattachement de la Crimée à la Russie. En réaction à cette « annexion », l’Union européenne adopte, le 6 mars 2014, des mesures restrictives (interdiction de pénétrer sur le territoire de l’UE et gel des avoirs dans les pays de l’Union) à l’encontre de vingt et une personnalités russes et ukrainiennes. La liste des personnes visées par ces sanctions s’élargit au cours des mois suivants. Le 23 juin, le Conseil européen décide d’interdire l’importation de marchandises en provenance de Crimée et, le 16 juillet, il demande à la Banque européenne d’investissement (BEI) et à la Banque européenne pour la recherche et le développement (BERD) de suspendre la signature de nouvelles opérations de financement dans la Fédération de Russie. La Commission est aussi invitée à réexaminer les programmes de coopération bilatérale entre l’UE et la Russie et, éventuellement, d’en suspendre la mise en œuvre.
Fin juillet, un nouveau train de mesures économiques est approuvé : restriction de l’accès de la Russie aux marchés des capitaux de l’UE (interdiction, pour les ressortissants et les sociétés de l’UE, d’acheter ou de vendre des obligations, des actions ou des instruments financiers similaires nouveaux dont l’échéance est supérieure à quatre-vingt-dix jours, émis par un certain nombre d’établissements financiers russes) ; embargo sur les importations et les exportations d’armements et de matériel connexe en provenance et à destination de la Russie ;
interdiction des exportations de biens et de technologies à double usage destinés à une utilisation militaire en Russie ou à des utilisateurs finaux militaires russes ;
restriction des exportations vers la Russie de certains équipements et technologies liés au domaine de l’énergie, désormais soumises à une autorisation préalable (les licences d’exportation étant refusées pour les produits destinés à l’exploration et à la production de pétrole en eaux profondes ou dans l’Arctique, ainsi que pour les projets dans le domaine du schiste bitumineux en Russie) ; interdiction de procéder à de nouveaux investissements en Crimée et à Sébastopol dans un certain nombre de domaines (infrastructures de transports, télécommunications, énergies, exploitation des ressources pétrolières, gazières et minières).
Lors des réunions suivantes du Conseil, certaines de ces mesures sont renforcées. Par exemple, l’échéance des produits financiers interdits est ramenée à trente jours et un certain nombre d’entreprises, en particulier dans le secteur de la défense et de l’armement, se voient interdire l’accès aux marchés financiers européens.

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Table des matières

I. EXPOSÉ
Introduction
Les sanctions économiques
La sanction, une arme économique
Efficacité des sanctions
Typologie des sanctions
Les acteurs des sanctions
La politique extérieure de l’Union européenne et les sanctions
La politique extérieure de l’UE : les grands principes
La politique étrangère et de sécurité commune (PESC)
Les sanctions de l’Union européenne
La guerre de sanctions entre l’UE et la Russie
La crise ukrainienne
Sanctions européennes, contre-sanctions russes
Conséquences économiques
Conclusion
II. TEXTE-SUPPORT ET TRADUCTION
III. STRATÉGIE DE TRADUCTION
Introduction
Problèmes rédactionnels
Problèmes ponctuels : compréhension, terminologie, reformulation, etc
Poésie de la traduction économique
Conclusion
IV. ANALYSE TERMINOLOGIQUE
Fiches terminologiques
Glossaire
Lexiques
Lexique français-russe
Lexique russe-français
V. BIBLIOGRAPHIE
Sources en français
Ouvrages
Articles
Sources en russe
Articles
Sources franco-russes
Source en anglais

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