Du Paléolithique au Néolithique moyen
Le peuplement de l’espace égéen reste un point très controversé. Ainsi, vient-il de l’Asie centrale ou de l’Afrique ou des deux à la fois? Voilà un point très complexe. La première hypothèse soutient que « […] les nomades caucasiens des steppes de l’Asie Centrale ont émigré vers l’Europe ». Donc, selon les défenseurs de cette hypothèse, les premiers occupants de l’espace égéen furent des immigrés venus vers -6500 du Proche Orient, ce qui correspond à la période Néolithique (infra., p. 24)64. Cependant, certains auteurs ont opiné sur l’origine africaine des hommes de Cro-Magnon. En effet, l’un d’entre eux, indique que « la Grèce est pourtant une région importante : par sa situation, sur l’une des routes possibles de dispersion des premières humaines d’Afrique vers l’Europe». Actuellement les études scientifiques les plus récentes ont tenté d’expliquer la nature physique des hommes de Cro-Magnon. Du coup, elles montrèrent que ces derniers « […] ont tous des jambes beaucoup plus longues qu’ils ne devraient. Naturellement, ceci destiné à montrer qu’ils viennent d’Afrique »66. Donc, il semble que « […] la migration initiale doit avoir eu lieu d’ouest en est ». Néanmoins, l’auteur soulève un problème idéologique, car, selon lui « le seul problème dans ce cas, c’est qu’il est difficile d’imaginer pourquoi ils auraient choisi d’émigrer d’un climat chaud vers un climat froid ». En effet, cette interrogation, ressemble à celle qui demande, pourquoi l’aveugle est tombé dans le puits ? La réponse adéquate, c’est qu’il ne voit pas. Cela est tout à fait semblable à la question du déplacement des hommes de Cro-Magnon. En outre, comment pourraient-ils savoir l’écosystème que serait le lieu de leur destination. Puisqu’aucun moyen ne les aidait à le savoir. Donc leur destination ne serait choisie, du coup, ils sont condamnés à affronter seuls les conséquences. C’est dans ce sens qu’advient d’étudier l’importance des fouilles qui nous offrent une idée de cette occupation. La multiplication des fouilles durant la deuxième moitié du XIXème siècle, dans différents sites, ont une importance capitale. Par conséquent, l’occupation du monde égéen durant le Paléolithique ancien, fut avancée « à travers des outils isolés comme galet aménagé de la lagune de Korission, à Corfou, et le biface de Palaiokastro, en Grèce Occidentale, quelques pièces lithiques récoltées en Thessalie, en Argolide ou en Épire, et un crâne de pré-sapiens découvert en 1960 dans la grotte de Pétralona en Chalcidique […]69 ». De plus, les nouvelles découvertes faites à Palaikastro dans la région de Vermio, non loin de Kozani, nous ont livré des outils utilisés durant le Paléolithique ancien, comme ceux du type coup de poing. D’autres régions aussi ont été fouillées, comme celle de Rénée, plus particulièrement à Argissa Magoula. Mais également les fouilles de Higgs et ses collègues ont exhumé « dans la région de Paramythia […] des grottes et des abris sous roche ». Au Paléolithique moyen, la densité de la population fut mise en exergue par des « outils en pierre taillée », découverts dans ces mêmes régions. D’ailleurs, « en Grèce occidentale, ces sites, très abondants, sont associés à des dépôts de terra rossa qui sont des paléosols érodés très riches en industries lithiques et exempts de restes organiques ». Mais encore, les découvertes faites dans la région de la Macédoine orientale, singulièrement à Maara, à proximité de l’Angitis, ont montré que les gens habitaient dans des grottes à cette époque. Et elle fut marquée par « la chasse des animaux et la cueillette de mollusques, des fruits et de plantes sauvages ». Vaille que vaille, nous savons maintenant, grâce aux fouilles, que l’homme de Neanderthal avait séjourné dans certains sites durant le Paléolithique moyen. En effet, la véracité de cette hypothèse fut montrée par les fouilles faites dans la région de Pétralona en Chalcidique, plus précisément dans une grotte. Ces dernières ont mis en évidence un crane qui appartient à l’homme de Neanderthal. En outre, ces découvertes furent « étudié(es) par les spécialistes Kokkoros et Kanellis de l’université de Thessalique ». Archéologiquement, le Paléolithique supérieur a connu la pratique de la navigation. Ainsi, grâce aux outils de l’Aurignacien, les archéologues ont su montrer l’existence incontestable de l’homo-sapiens dans certains sites, durant cette période. Cependant, comme dans les phases précédentes, le manque de document qui intéresse cette fois le Paléolithique supérieur fut une entrave. Néanmoins, le peu que nous naturalisons, surtout ceux provenant « de la caverne Franchti en Argolide […] (montrèrent) une continuité des dernières étapes du Paléolithique récent au Mésolithique et au Néolithique ancien ». Quoi qu’il en soit, « le Paléolithique supérieur témoigne des changements les plus fondamentaux dans le comportement humain, jamais enregistrés par l’archéologie ». La période Mésolithique nous est connue par des découvertes récentes faites « dans les grottes de Franchthi (phase VII-VIII), de Théopétra, de Klissoura n°1 (couche 3 et 6), du cyclope, dans l’ile de Youra, et dans le site de Maroulas, à Kythnos ». Ces découvertes semblent déceler l’existence de la pêche durant cette période. Toutefois, notons bien que la période Mésolithique fut un passage progressif du Paléolithique vers le Néolithique ancien, sans pour autant avoir « la même durée dans toutes les régions de Grèce et qu’ (elle) fut plutôt là où la civilisation néolithique naquit très tôt ». C’est ce qui est à l’origine du débat sur le début du Néolithique ancien. Nonobstant, « le passage de la technique du débitage leptolithique à celle des microlithes, de la chasse des petits animaux à la pêche et les balbutiements de l’économie de production (mais également l’apparition), sans aucun doute, (des) établissements de l’Isthme, de la Mégaride, que Marcovitch avait exploré bien avant »80, exhibent l’évolution progressive de ce peuple. De plus, durant cette période, il semble que les gens se groupaient en tribus, du fait qu’ils se considéraient comme les membres d’une seule lignée. Ce voyage dans le passé, est rendu possible grâce aux fresques rupestres, aux tombes, aux vases et aux figurines. De façon générale, le Mésolithique fut une période intermédiaire entre les chasseurs du Paléolithique et les agriculteurs du Néolithique.
Les théories sur le début de l’âge du bronze dans le monde égéen
La première fait intervenir la théorie de l’évolution. Ainsi, après une longue cohabitation, les gens ont commencé à avoir des liens très forts. Selon les auteurs qui la soutiennent, les différents progrès furent le résultat « du pouvoir de l’homme de s’adapter à son environnement, mais et surtout le pouvoir de transformer cet environnement de manière à arriver aisément à ses fins. Et le degré de culture comme la richesse augmentant sans cesse plus rapidement par la création de nouveaux systèmes et sous-systèmes qui structurent de plus en plus finement l’activité dans les domaines ». Il y a quelques siècles, cette théorie pouvait être considérée comme plus cohérente. Mais à l’état actuel de la question, cette évolution ne pouvait se sentir qu’en Crète. La seconde fait intervenir la théorie des immigrations. Pour certains chercheurs les principales mutations qui ont eu lieu durant cette période, sont dus à l’établissement des éléments étrangers. Dans cette même hypothèse, nous voyons affronter un univers d’hypothèses. De ce fait, pour les uns, ces immigrants sont venus du Proche-Orient. Ainsi, selon Friedrick Matz, il y a eu bel et bien l’invasion des peuples étrangers venus de l’Est, c’est-à-dire dans des régions septentrionales du Proche-Orient. Mais la Crète ne fut pas touchée par cette vague. D’ailleurs, cette invasion était pacifique, et cela s’explique par le fait que ces peuplades avaient un lien de parenté avec la population autochtone. En suivant la chronologie de cette histoire, l’implantation pacifique de ce nouveau peuple semble logique. Car ce nouveau peuple ne peut être que les Pélasges, dont l’origine africaine semble incontestable (infra, p. 68). Donc le vague migrateur ne semble pas venir du Proche-Orient. La troisième est la dernière thèse fait intervenir la théorie des influences. Ainsi, le principal défenseur de cette théorie fut Gordon Childe126. En effet, selon ce dernier « […] les progrès extraordinaires réalisés par les civilisations des grands fleuves furent à l’origine d’une diffusion secondaire dans les régions limitrophes, dont la plus importante fut le monde égéen. La diffusion ne se limita pas là, mais, grâce à d’autres influences, gagna une troisième région, plus éloignée ; par conséquent, aucune des civilisations périphériques ne peut être considérée comme originale ». Si cette hypothèse se révèle vraie, l’influence égyptienne semble plus probable. Car les objets égyptiens sont attestés dans tous les domaines. Durant les derniers siècles du Néolithique, une forte influence égyptienne fut notée dans quelques sites égéens. En se basant sur les outils égyptiens trouvés sur place, certains chercheurs soutiennent une forte influence du Nord de l’Afrique, comme lieu de départ. De la sorte, la force de cette influence peut s’apercevoir dans le domaine artistique. En effet, Ginouvés le souligne en ces termes : « pourtant quelques sites de l’Est et du Sud bénéficient d’une vie plus active ; d’admirables vases de pierre semblent inspirés par la technique égyptienne et une belle poterie flammée en imite les mouchetures […] ». En somme, nous pouvons noter que toutes les trois hypothèses sont avancées pour expliquer le passage du Néolithique récent vers l’âge du bronze. Par conséquent, la première et la troisième s’appliquent pour la Crète, tandis que la deuxième semble plus dirigée vers le continent grec et les Cyclades. Quoi qu’il en soit, « ce ne sont pas seulement le travail du métal et de nouvelles techniques qui firent ainsi leur apparition ; mais c’est le caractère fondamental de la civilisation qui fut radicalement transformé, et cela sur presque toute l’étendue du monde égéen ». Donc pour mieux suivre l’évolution de la société égéenne dans la vie sociopolitique, nous allons essayer de suivre par ordre, les différentes civilisations qui ont épanoui dans cette région, en commençant par celle des Cyclades.
Le rôle des sources dans la connaissance du monde créto-mycénien
La portée des textes littéraires dans la connaissance du monde créto-mycénien a été primordiale. Ainsi, nous pouvons affirmer, que si ce n’était pas « […] Iliade, Heinrich Schliemann (1822-1890) n’aurait pas fouillé le site supposé de Troie et les tombeaux de Mycéniens seraient restés enfouis à jamais »143. De plus, depuis l’antiquité, les auteurs grecs, en parlant de la Crète, la décrivaient comme étant le pays « […] de Minos, roiprêtre crétois et l’un des trois juges des Enfers, celui de Dédale, architecte du labyrinthe, celui du Minotaure, monstre à tête de taureau […] » 144. Mais la découverte de ces civilisations nous la devons à des Archéologues pleins d’ambition. Pour renforcer la véracité de ces récits, Arthur Evans s’était lancé à la quête du monde crétois, et « […] il n’hésita pas à qualifier [….] minoenne, en référence au roi Minos »145; cette civilisation n’avait rien à envier aux autres civilisations contemporaines, si l’on en croit Homère dans l’Odyssée : Dans la sombre mer est une terre belle et fertile, au milieu des flots : c’est l’île de Crète où habitent d’innombrables hommes, avec quatre-vingt-dix villes. On y trouve différents langages et hommes Achéens, Kydoniens, braves Etéocrétes, trois tribus de Doriens et de divins Pélasges. Ils sont dominés par Cnossos, la grande ville du roi Minos, celui qui s’entretenait tous les neuf ans avec le grand Zeus […] 146. Les indices libérés par Homère ont été reconstituées en partie grâce aux fouilles archéologiques. Grâce à ces fouilles, nous avons pu avoir un aperçu de la civilisation minoenne et celle dite mycénienne dont la grandeur arpentait, arpente et arpentera le monde. Le travail des archéologues a été primordial dans la mesure où ils ont pu mettre en lumière les constituants de la légende grecque et ceux de la littérature homérique, qui restèrent mystérieux pendant plusieurs siècles. Il y a eu avant tout et de manière massive Heinrich Schliemann. Ce dernier en « partant du principe que les poèmes homériques ont une valeur historique, et donc qu’ils décrivent les lieux, des hommes et des objets qui ont réellement existé, il se fixe pour but de les retrouver »147. Endossant un tel objectif, il développa une obsession pour le travail, et il décida de suivre les dits d’Homère. Pour y arriver, il commence à fouiller, d’abord, en 1868 à Ithaque. Puis deux ans plus tard, en 1870, il fouilla Hisarlik, avant de fouiller en 1874 Mycènes, et enfin, en 1876, il fouilla Tirynthe148. De toutes ces fouilles, celles de Mycènes furent les plus importantes en matière de découverte d’objets correspondant à la description de la littérature homérique. De plus, les fouilles à Mycènes ont mis en lumière la porte des lions149 (infra, p. 91). En conséquence, ce que nous connaissons de la partie de la civilisation (1600-1400) est indiqué principalement par « deux cercles de tombes à fosse découverts (par l’Allemand Heinrich Schliemann) près de l’acropole de Mycènes, le cercle B (1650-1550 environs), livre des vases en or et en argent, des perles d’ambre et le premier masque funéraire en métal précieux, annonçant ainsi les objets encore plus riches du Cercle A, un peu plus tardif (1600-1500)150 ». Sa mort subite, survenue en 1890, a eu des conséquences néfastes sur la mise en ordre de ces idées, mais également, sur la chronologie de ces fouilles. Cependant, son dilettantisme en archéologie a eu comme conséquence la dégradation de quelques vestiges. Malgré cela, il est parvenu à trancher le chemin de la nouvelle découverte. Du coup, durant la fin du XIXème siècle, une orientation systématique des fouilles « […] de F. Noack et d’A. De Ridder à Gla (1893) et surtout après (celles) […] de Christos Tsountas (1880-1902) à Mycènes […] » ont permis une orientation constante, dans le continent grec, mais également à l’endroit des Cyclades 153. C’est à partir de ces découvertes, que d’autres chercheurs vont s’orienter vers l’île de Crète. Peu de temps après les fouilles de Mycènes, l’île de Crète fut le siège de Minos Kalokairinos (homme d’affaire crétois originaire d’Héraklion) et de l’Américain W. J. Stillman, qui avaient auparavant entrepris des fouilles en Crète vers 1878154, bien avant l’archéologue britannique, à savoir, Arthur Evans entre 1900 et 1905155. Ainsi, durant ces fouilles, Evans avait découvert non seulement le palais de Knossos, capitale de la monarchie crétoise, mais également une multitude de tombeaux et de bâtiments divers. De fil à aiguille, il mit en lumière, d’abord, « la salle de trône […]. En 1901 fut découverte la fresque de la tauromachie. L’année suivante, Arthur Evans découvrit des pièces polychromes en faïence qui représente des maisons à étages et à fenêtres ; elles attestent d’un urbanisme et d’une maîtrise architecturale dès l’époque préhistorique ». Dans le domaine religieux, la découverte durant la campagne de 1903, de « […] deux fosses qui révélèrent un grand nombre d’objets précieux en or, en ivoire et en cristal ; parmi ces objets, une pièce exceptionnelle : une déesse aux serpents (fig.1) (explication, supra, p. 28) élégante représentation féminine tenant dans ses mains deux reptiles », fut un pas en avant vers l’exhumation d’un nouveau monde, dont la grandeur avait largement dépassé la mer Égée. C’est une organisation systématique qui avait permis aux fouilles d’Arthur Evans de prendre de la patine à tel point que l’histoire du monde minoen est devenue authentique. « Toutefois, le principal mérite de ses travaux est d’avoir matérialisé la complexité de la structure de ce vaste palais et d’avoir ainsi rendu bien vivante les dénominations de Labyrinthe et de dédale attribuées au palais de Cnossos ». Par le fait, à partir de ce moment, l’île de Crète fut le siège de pas mal de savants, plus particulièrement des archéologues. Les nouvelles découvertes faites au Sud de l’île, singulièrement à Phaistos et à Haghia Triada, par les Italiens, montrèrent que ces palais avaient eu pratiquement la même histoire que Cnossos. Assurément, « à l’égard de Cnossos, Phaistos était, au sud de l’île, le siège d’une dynastie de princes aisés: la mythologie grecque voit en Rhadamanthe, le frère de Minos, le fondateur de Phaistos ». Simultanément, les spécialistes français occupaient Malia, situé sur la côte septentrionale, et qui renfermait la même structure et la même histoire que Cnossos et Phaistos. Là aussi, « force nous est de contenter des indications de la légende grecque, selon lesquelles Sarpédon, le frère de Minos et de Rhadamanthe, aurait été roi de la troisième résidence minoenne. La dénomination actuelle de Malia n’est pas d’origine minoenne; elle dérive du grec omaos, omalion, qui signifie plat et se rapporte à la nature géographique de cette région de la côte ».
Qui était Minos et quel était son système politique ?
Beaucoup de débats, des discussions personnelles et contradictoires, ont tourné autour de l’épineuse question, à savoir l’existence de Minos : sur son nom, mais également sur son statut. Du grec Mίνως, ce dernier est considéré par la tradition comme un roi législateur de Cnossos. Étymologiquement le nom Mίνως ressemble au Manou ou Manu des Hindous, qui était considéré comme l’ancêtre des humains. D’autre part, il peut être également tiré du nom du premier pharaon et législateur de l’Égypte vers 3200 av. J.-C., à savoir Mènes185. C’est cette dernière ressemblance mystérieuse que nous avons entrepris d’expliquer. Pour plus de clarté les pensées proposées ont été classées en fonction des hypothèses avancées sur ce sens. Attiré par la beauté d’Europe (la fille du roi de Tyr), Zeus s’était métamorphosé en un taureau magnifique. Ainsi, Europe accompagnée par ses amies, fut enjôlée par cette beauté. Suite à cela, elle eut l’idée d’aller chatouiller le taureau et finit par grimper sur son dos. Zeus la kidnappa et la transporta jusqu’en Crète. En effet, c’est de cette union entre Europe et Zeus que naquit Minos. De plus, c’est de l’union entre Europe et Astérios, ou Astérion (roi de Cnossos) que les frères de Minos (Sarpédon et Rhadamanthe) naquirent. En outre, après la mort du roi de Crète Astérion qui élevait Minos et ses frères, un sérieux problème de successeur s’était senti au sein de la famille royale. Par conséquent, Minos se déclare comme étant le vrai successeur choisi par les dieux. Partant de cette assertion, il formula un vœu, immédiatement un taureau surgit de la mer. Ce geste lui valut le trône. En partant de cette allégation, l’origine asiatique de Minos semble incontestable. Cela montre, peut-être, la ressemblance entre le nom Minos et celui de Manou ou Manu. Malgré cela, d’autres spécialistes se sont orientés vers l’origine africaine de Minos. Ainsi, pour mieux appréhender le monde minoen, nous avons pris l’initiative de dresser l’arbre généalogique du roi ou de la dynastie Minos. En effet, selon la tradition, au tout début, il y avait Zeus qui s’était uni à Io et ensemble ils donnèrent naissance à Épaphos. De l’autre côté, Nilos était si fertile qu’il arriva seul à donner naissance à Memphis. Puis, l’union entre Épaphos et Memphis donna vie à Libye. Ensuite, de l’union entre Libye et Poséidon naquit Agénor. Après Agénor s’unit à Téléphassa ensemble ils eurent Europe. Enfin, de l’union entre Europe et Zeus, mais également entre Europe et Astérion, naquirent Minos, Sarpédon et Rhadamanthe 188 (fig.2). En somme, nous voyons que tout part de l’Afrique vers l’Asie avant d’atteindre le monde égéen. Du coup, il semble que Minos était un Noir, car même Hérodote avait identifié Epaphos comme Apis (un dieu égyptien) qui épousa Memphis. À ce propos, Hérodote nous dit que: « Ce jeune taureau que l’on appelle Apis présente les signes que voici: il est noir, il porte sur le front une marque blanche triangulaire ». Donc, dans cette problématique, la dimension asiatique reste secondaire. Du reste il est important de consacrer une réflexion sur les confusions entre Asie et Afrique. Dans l’arbre généalogique de Minos, les racines se trouvent bel et bien en Afrique. En effet, « la royauté palatiale minoenne n’est qu’une réplique de la royauté égyptienne, et le nom même de Minos semble n’être qu’une légère altération du nom du premier roi semilégendaire égyptien: Mènes »190. C’est pourquoi, en ce référant aux influences l’Égypte sur l’Égée, Martin Bernal nous fait savoir que: La première grande vague d’influence dont nous avons la trace se situe au XIXe siècle. C’est à cette époque que l’Égypte s’est redressée après la crise de la Première Période Intermédiaire. Ce que l’on appelé le Moyen Empire fut alors instauré par la XIe dynastie. Celle-ci réunifia l’Égypte et attaqua le Proche-Orient. Et l’on sait par les vestiges archéologiques qu’elle a eu de larges contacts, certainement jusqu’en Crète, et peut-être jusqu’en Grèce continentale. La série des pharaons noirs de Haute-Égypte portant tous le nom de Mentouhotep avait pour divin patron le dieu faucon et taureau Mnṯw ou Montou. C’est au même siècle que les palais crétois furent érigés, et on retrouve là les débuts du culte du taureau qui apparaît sur les murs des palais et qui était central dans les mythes grecs liés à Minos et à la Crète. Il semblerait donc vraisemblable que ces développements crétois aient reflété, plus ou moins directement, l’ascension du Moyen Empire égyptien.
La chute de la civilisation minoenne
La destruction de la première civilisation européenne fait partie des mystères de l’histoire antique. Ainsi, d’Evans jusqu’à présent, les spécialistes ne se fondaient que sur des hypothèses pour tenter d’expliquer ce phénomène. En outre, pour certains l’éruption volcanique de l’île de Santorin fut la cause principale de cette chute. Selon ces derniers, c’est entre 1550 et 1500 avant notre ère, qu’a eu lieu cette éruption qui a mis fin la période Néo palatiale. En effet, Marinatos la décrit comme suit: « […] l’éruption a été accompagnée par des tremblements de terre et des pluies de cendres, qui ont causé des dégâts sérieux à la plupart des centres minoens, et par des raz de marée (tsunamis) qui ont ravagé la côte nord de la Crète; et cette catastrophe a entrainé un abandon général des sites habités pour une durée d’une génération au moins ». De surcroît, Marinatos avait voulu faire correspondre la destruction d’Akrotina à celle de Cnossos. Alors que la connaissance actuelle des deux faits nous permet d’observer une cinquantaine d’années entre l’éruption volcanique de Santorin et la chute de la civilisation minoenne vers 1450. Donc en se fiant aux fouilles, il semble que cette éruption n’a pas provoqué la fin définitive de cette civilisation dont l’existence s’est prolongée jusqu’à la fin de l’âge du bronze. À partir de ce constat, d’autres spécialistes considèrent la révolution interne comme hypothèse. Durant le rayonnement de la civilisation minoenne, les Minoens cohabitaient avec les Achéens. Donc en parlant d’une révolution interne, il ne peut être que celle organisée par les Achéens. Du coup, nous allons essayer d’expliquer cette hypothèse en la comparant avec celle qui soutient l’invasion des Mycéniens. Ainsi, Jean Drissen et Alexandre Farnoux les présentent comme suit : « Selon les uns, la présence des Mycéniens est repérable dès le MRII et jusqu’au MRIIIA1 ; elle disparait ou s’estompe au profit d’une renaissance des traditions minoennes au MRIIIA2-B ; pour les autres, le MRII-IIIAI conserve dans l’ensemble une allure très minoenne et il faut attendre le MRIIIA2-B pour que se manifeste clairement la domination continentale ». Quoi qu’il en soit, toutes ces deux hypothèses montrent une seule chose, à savoir la cohabitation entre ces deux peuples. De plus, chacune de ces deux hypothèses se base sur des faits ou bien sur la céramique pour appuyer son idée. Parfois aussi, elles corroborent avec la structure des tombes, mais également sur la manière dont ils (Minoens et Mycéniens) enterraient leurs morts. D’autres par contre, voient le changement dans l’architecture des habitats, mais aussi l’évolution de la céramique offrait une vision nette sur ce point. Bref Selon cette théorie (celle d’Evans) le mythe de Thésée qui tua le Minotaure, symboliserait la victoire sur l’État minoen des peuples qui lui avaient été autrefois soumis. Mais le déchiffrement des tablettes de Cnossos a prouvé que l’écriture linéaire B est du grec. Ainsi les Achéens avaient déjà occupé Cnossos vers 1450 avant J.-C. et la raison de sa destruction définitive après 1400 ne fut pas l’invasion des Achéens, mais bien plutôt une guerre entre les Achéens de Cnossos et les Achéens de Grèce. La troisième interprétation selon laquelle la catastrophe ayant provoqué la fin de Cnossos aurait été un soulèvement des Minoens contre les conquérants achéens n’est pas bien fondée car, depuis la destruction de 1450, les autres centres crétois avaient été pour la plus grande partie réduits à l’état de ruines, abandonnés ou totalement privés de puissance. Il convient ici de rappeler la thèse de Blegen et Palmer, d’après laquelle le palais de Cnossos aurait été définitivement détruit non en 1400 mais seulement en 1200 avant J.-C., en même temps que les palais mycéniens du Péloponnèse. Donc deux faits successifs majeurs furent la cause de la dégringolade de cette civilisation. Il s’agit du tremblement de terre qui surprit les Minoens à tel point que les Mycéniens n’avaient pas éprouvé beaucoup de difficultés pour les anéantir. D’ailleurs, quelques indices plaident en faveur d’une catastrophe. En effet, « […] la présence d’amphores non terminées, dans les ateliers Est du Palais (Cnossos), a laissé penser à une soudaine catastrophe ». Donc, le passage du monde minoen vers celui des Mycéniens peut se situer vers le Minoen récent I. II, marqué par la venue d’une dynastie plus militariste ».
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Table des matières
Introduction
PREMIÈRE PARTIE : Un survol historique : du paléolithique jusqu’à l’émergence des Cyclades
Premier chapitre : Les origines de la civilisation égéenne
1) Protohistoire du monde égéen
a) Du Paléolithique au Néolithique moyen
b) Le néolithique récent
2) L’âge du bronze
a) Les théories sur le début de l’âge du bronze dans le monde égéen
b) Le rôle des Cyclades à l’âge du bronze
DEUXIÈME CHAPITRE : La civilisation minoenne
1) La période Paléo palatiale
a) Le rôle des sources dans la connaissance du monde créto-mycénien
b) Le mystère de l’écriture minoenne et la chute des premiers palais
2) La période néo palatiale et la fin définitive de la civilisation minoenne
a) Qui étais Minos et quel était son système politique ?
b) La religion minoenne
c) La chute de la civilisation minoenne
DEUXIÈME PARTIE: Les traits saillants de la civilisation mycénienne
Troisième chapitre: Les premiers Grecs
1. Questions sur l’origine des Achéens et celle l’écriture mycénienne
a) La question sur l’origine des Achéens
b) L’écriture mycénienne
2. La structure sociale
a) Anthropologie physique des Mycéniens
b) Composition de la société mycénienne
Quatrième chapitre : Apogée et chute des royaumes mycéniens
1. L’organisation politique des royaumes mycéniens
a) La politique à l’intérieur des palais mycéniens
b) L’organisation administrative
2. Déclin de la civilisation mycénienne
a) La théorie des invasions
b) Les facteurs naturels et les tensions internes
Conclusion
Annexes
Bibliographie
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