La glande mammaire
Les œstrogènes
Les œstrogènes jouent un rôle important dans le développement de la glande mammaire au cours de la vie. Ces hormones sont fabriquées au cours de la première partie du cycle menstruel, après les menstruations. Elles pénètrent par voie passive dans la cellule, se fixent sur leurs récepteurs cytoplasmiques ou nucléaires, RE alpha et RE bêta. Les oestrogènes stimulent également la prolifération des cellules épithéliales, favorisent la croissance des canaux galactophores, augmentent la vascularisation du tissu conjonctif palléal et favorisent la croissance et la pigmentation de la plaque aréolomamelonaire. Ils n’ont pas d’effet prolifératif direct mais stimulent la production d’un certain nombre de facteurs de croissance (TGF alpha, IGF1, PDGF) par les éléments de la matrice extracellulaire. Cependant, cette matrice extracellulaire, abondante au repos est très réduite autour des cellules des bourgeons en croissance.
Ceci suggère un autre mécanisme d’action sans doute prépondérant des oestrogènes : la matrice extracellulaire a un rôle inhibiteur sur la croissance du sein, les oestrogènes agiraient en favorisant sa destruction locale permettant aux bourgeons mammaires de proliférer. L’action stimulante des oestrogènes pourrait comporter son propre frein en permettant la synthèse d’éléments tel que le collagène IV inhibant la multiplication cellulaire (LESUR et al., 2004). Les oestrogènes existent en trois formes : E1 ou l’estrone, E2 ou le 17 oestradiol (la forme active) et E3 ou l’oestriol (MANGELSDORF et al., 1995). Dans la glande mammaire, les oestrogènes régule, suite à la liaison de 17 oestradiol, la croissance cellulaire et la différenciation tout en contrôlant l’expression de ses gènes cibles. Cette liaison favorise le recrutement des corégulateurs: les coactivateurs/les corépresseurs pour activer/inhiber la transcription des gènes cibles.
Le mécanisme classique génomique de l’oestrogène implique sa liaison à l’ADN soit directement via un ERO (Elément de Réponse aux OEstrogènes), localisé sur des régions régulatrices des gènes cibles, soit indirectement via des facteurs de transcription, AP-1 (Activator Protein-1), Sp1 (Specificity Protein1), NF-κB (Nuclear Factor κβ), C/EBPβ (CCAAT/Enhancer Binding Proteinβ) et STAT5 (Signal Transducer and Activator of Transcription 5) (BJORNSTROM et SJOBERG, 2005 ; THOMAS et GUSTAFSSON, 2015). L’oestrogène peut activer la transcription même en absence de 17 oestradiol via les récepteurs des facteurs de croissance EGFR (Epidermal Growth Factor Recepteur) et IGFR (Insulin-like Growth Factor 1 Receptor). Ces récepteurs stimulent les cascades des protéines kinases qui phosphorylent et activent les oestrogènes (BRITTON et al., 2006). Le récepteur d’oestrogène (RE) est exprimé dans 70 % des cancers de sein à un niveau d’expression plus élevé que le récepteur d’oestrogène (RE) Cette caractéristique permet de considérer les RE comme une cible thérapeutique privilégiée dans le cancer du sein et la variation de son expression a un impact sur la réponse au traitement. Les RErégulent l’expression des gènes liés au développement de la glande mammaire et toute altération de l’expression de ces gènes est associée à une progression de cancer de sein (WELBOREN et al., 2009).
REstimule la prolifération et la survie des cellules cancéreuses mammaires tout en induisant l’expression des gènes myc et CCND1 (GIULIANELLI et al., 2013). Les RE sont retrouvés à la surface ou à l’intérieur des cellules normales du sein et de certains types de cellules du cancer du sein. C’est sur ces récepteurs que les hormones se fixent aux cellules. Une fois qu’elles s’y sont fixées, les hormones peuvent affecter le comportement ou la croissance des cellules. Les cellules du cancer du sein qui ont des récepteurs RE ont besoin de cette hormone pour croître et se diviser. Le statut des récepteurs hormonaux indique aux médecins si l’hormonothérapie risque de ralentir ou d’interrompre la croissance des cellules cancéreuses. Les tumeurs RE positives sont souvent traitées par hormonothérapie (HAMMOND et al., 2010). Le cancer du sein hormono-dépendant est lié à un dérèglement du fonctionnement des oestrogènes et leurs récepteurs. En effet, près de 60 % des tumeurs cancéreuses mammaires présentent initialement une croissance dépendante des oestrogènes. En revanche, alors que les effets prolifératifs des oestrogènes semblent clairement impliquer RE, REβ exercerait plutôt des effets anti-prolifératifs. Paradoxalement, les tumeurs RE-positives sont souvent moins invasives que les tumeurs RE négatives et leur pronostic est généralement meilleur (ELWOOD et CRAIG, 2003).
La progestérone
La progestérone a une action complémentaire à celle des œstrogènes. Elle est principalement secrétée pendant la deuxième partie du cycle, avant les menstruations. Elle est nécessaire à la différentiation lobulo-alvéolaire du sein. In vivo et contrairement à ce qui se passe au niveau de l’endomètre, l’index mitotique des cellules épithéliales est maximal en phase lutéale. En fait, l’action de la progestérone n’est probablement pas univoque, elle a un effet mitogène sur les cellules dont la prolifération dépend de l’EGF, un effet anti-mitogène sur celles dont la prolifération ne dépend pas de l’EGF. Elle est dotée également d’une action antiproliférative sur l’épithélium canalaire et acineux, et une action proliférative sur les terminaisons ductulo-lobulaires. Elle exerce un effet biphasique dans le temps : prolifératif en phase lutéale précoce puis antiprolifératif (LESUR et al., 2004). Le récepteur de la progestérone (RP) est une protéine de la superfamille des récepteurs nucléaires et de la famille des récepteurs des stéroïdes, liant naturellement la progestérone, qui est la principale hormone progestative dans l’organisme.
Le RE est exprimé dans les tissus des organes reproducteurs, particulièrement dans les ovaires, car la progestérone est avant tout un stéroïde ovarien et placentaire (LEE et al., 2006). Il se présente sous la forme de deux isoformes, PRA et PRB, qui diffèrent en taille et poids moléculaire. Dans une cellule dite normale, PRA et PRB coexistent selon un ratio de 1 afin de permettre le contrôle physiologique de l’action de la progestérone. Cependant, il existe un lien entre le récepteur de la progestérone et la cancérogenèse mammaire. En effet, il peut survenir un débalancement de ce ratio où PRA prédomine. Cette situation fût observée chez des patientes porteuses d’une mutation sur les gènes BRCA1/BRCA2 ou d’hyperplasies mammaires qui sont des lésions précancéreuses. De plus, une augmentation de PRA par rapport à PRB provoquerait une diminution de l’adhésion cellulaire, donc une perte d’inhibition de contact des cellules. Le débalancement du ratio PRA/PRB s’avère une situation observée dans 50% des tumeurs. De plus, si l’expression de PRA/PRB augmente, la résistance au tamoxifène, sera plus forte (JACOBSEN et al., 2012).
Action combinée des hormones stéroïdiens sur le sein Les deux hormones, œstradiol et progestérone, agissent en synergie et sont nécessaires au développement de la glande mammaire apte à la lactation (REID et al., 1996). Au cours du cycle menstruel, la phase proliférative (première moitié du cycle sous l’effet des oestrogènes) est marquée par une multiplication des cellules épithéliales, une augmentation de la synthèse d’ARN et de la production protéique, une réduction de la lumière des acini et un afflux de lymphocytes dans le tissu conjonctif (VOGEL et al., 1992). La phase lutéale (seconde moitié du cycle sous l’effet de la progestérone) est caractérisée par une dilatation de la lumière des acini (différenciation des cellules épithéliales en cellules sécrétoires), un épithélium quiescent, une vacuolisation des cellules myoépithéliales et un oedème du tissu conjonctif. Toutes ces modifications entraînent une modification du volume du sein qui apparaît généralement plus tendu voire sensible ou douloureux (LONGACRE et BARTOW, 1986). Pendant la grossesse, période d’inflation oestrogénique, progestative et prolactinique, la glande mammaire est modifiée considérablement. Les oestrogènes ont une action proliférative sur l’épithélium qui débute dès le premier trimestre de la grossesse.
La progestérone a également une action proliférative, permet la différenciation de l’épithélium mammaire et s’oppose à l’action sécrétoire de la prolactine avant l’accouchement. Ainsi, en fin de grossesse, les cellules épithéliales des acini sont pleinement différenciées en cellules sécrétrices (RUSSO et al., 2004). Pendant la lactation, les effets inhibiteurs de l’oestrogène et de la progestérone sur la prolactine disparaissent après l’accouchement, permettant la lactation. Les acini sont distendus par un matériel de sécrétions à la fois dans les cellules et dans la lumière des unités ductulo-lobulaires. Après la fin de l’allaitement, le sein retrouve son état latent antérieur tout en conservant un réseau canalaire plus développé, prolongé par des unités terminales ductulo-lobulaires (CLEVENGER, 2003). A la ménopause, la chute des taux d’oestrogène et de progestérone provoque une raréfaction des acini (TAVASSOLI, 1992). Les cellules épithéliales et myoépithéliales s’atrophient alors que la membrane basale s’épaissit. Le tissu conjonctif subit aussi une évolution avec altération des fibres élastiques et collagènes aboutissant à une ptôse mammaire. Le sein de la femme ménopausée devient essentiellement constitué de tissu adipeux.
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Table des matières
INTRODUCTION
REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
Le cancer du sein
La glande mammaire
I.1 Anatomie de la glande mammaire
I.2 Hormones et sein
I.2.1 Les oestrogènes
I.2.2 La progestérone
I.2.3 Action combinée des hormones stéroïdiens sur le sein
I.2.4 La prolactine
II.Le cancer mammaire
II.1 Le processus de cancérisation
II.1.1 Indépendance vis-à-vis des signaux de prolifération :
II.1.2 Insensibilité aux signaux anti-prolifératifs
II.1.3 Acquisition d’une résistance à l’apoptose :
II.1.4 Potentiel illimité de réplication :
II.1.5 Stimulation de l’angiogenèse :
II.1.6 Pouvoir d’invasion et de dissémination (métastases) :
II.2 Les gènes impliqués dans la cancérisation
Cycle cellulaire et Cyclines
I.Le cycle cellulaire
I.1 Les étapes du cycle cellulaire
I.2 Régulation du cycle cellulaire
I.2.1 CCND1 et cycle cellulaire
Les Cyclines
I.Les cyclines D
I.1 La Cycline D1
I.1 Cyclines D2 et D3
I.2 CycD1 et oestrogène
I.1 CycD1 et cancer
II.Cycline E
III. Les cyclines mitotiques :
III.1 La Cycline A
III.2 Les cyclines B
IV.Les Cyclines virales
V.Les Kinases Dépendantes des Cyclines (CDK)
MATERIEL ET METHODES
I.Matériel biologique
II.Méthodes
II.1 Préparation des échantillons
II.2 Échantillonnage
II.3 Reconnaissance des antigènes : principe et méthodologie
II.3.1 Quantification du marquage
II.4 L’hybridation chromogénique in situ (CISH)
II.4.1 Réalisation de la technique
II.4.2 Évaluation des signaux
II.4.3 Évaluation de l’état du gène CCND1
II.5 Analyse statistique
RESULTATS
I.Résultats descriptifs
II.Résultats qualitatifs
II.1 Expression des marqueurs détectés par immunohistochimie
II.2 Amplification du gène CCND1 détectée par CISH
III. Résultats quantitatifs
III.1 Expression des marqueurs
III.2 Amplification du gène CCND1
Relation CycD1-paramètres clinicopathologiques
Relation gène CCND1-paramètres clinicopathologiques
Relation CycD1-gène CCND1
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
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