LA PERSONNE
Ce travail a pour objectif de comprendre l’entrepreneur, en tant que personne. Il convient tout d’abord de réfléchir sur le concept de personne. Mais qu ‘est-ce donc qu ‘ une personne? Dès qu ‘on en entreprend sérieusement l’étude, l’évidence disparaît et la « chose » nous apparaît comme de moins en moins aisée de compréhension. En français, il y a deux acceptions du mot personne:
– un nom féminin dési gnant un être (je suis une personne)
– un pronom, signifiant l’ absence d’ être (il n’ y a personne).
Être personne et être une personne sont deux expressions qui ont, en français, des significations diamétralement opposées. Et ce n’est pas l’étymologie qui nous éclaire, car il y a controverse de ce côté aussi. Pour les uns. le terme « personne » vient du grec prosôpon (TCpOO’CDTCWV) . qui est à la fois la face. la chose ou l’individu qui se présente en personne. et l’individu concret qui se maintient dans un rôle (Housset. 2007). Ce mot « prosôpon » vient du grec « pros », qui signifie « auprès r; v de » ou « venant de », ct d’ « opè » , qu i est l’action de voir ou « ops » (0\1′), dans le sens de l’ aspect, de l’air, de la vue (Bailly, 1963). Alors que pour d’ autres, « personne » vient du latin « persona », terme lui-même dérivé du verbe « personare », qui veut dire « résonner », « retentir », et désigne le masque de théâtre, le masque équipé d’un dispositif spécial pour servir de porte-voix. Cette étymologie est généralement attribuée à Boèce (V Ie siècle). En réalité, elle est déjà attestée chcz Au luGe ll e, Il e siècle (Duméri et Sindzingre, 20 12). En langue truque, le « phersu » est le masque de dieu psychopompe, et ce mot de « person » aurait depuis le lat in, traversé la Manche avec le sens anglais de « parson », « person », au sens de l’être humain. En anglais, les deux sens du français « personne » sont rendus d’ un e part par l’opposition « anybody » à « nobody » … et pour la présence humaine par le terme, « character » ou « human being ». Voici la définition de Boèce, qui est restée classique durant tout le Moyen Àge « Persona propri e dicitur naturae rationalis individua substantia » (Substance individuelle de nature raisonnable). Ce serait chez les stoïciens que le mot personne aurait pris son sens le plus riche philosophiquement. Pour eux, il ne suffit pas de faire des choix dans l’indétermination, de pratiquer la liberté d’indifférence pour être une personne, ce choix doit être fondé , conforme au logos, la raison qui est au centre du monde. Dans cette perspective, la personne c’est le rôle assigné à chacun par la Providence; le mot englobe le devoir de chacun et le sujet qui accomplit ce devoir (Dufresne et Laberge, 1999). Dufresne et Laberge ( 1999) expliquent, se référant à Scheler ( 195 1), que l’idée de personne en ferme l’idée d’une manifestation, d’ un faire paraître. La personne commence déjà avec la personnalité. La personne se manifeste dans la raison ou I »esprit. Le lieu de cette manifestation n’est pas un simple individu, c’est un centre d’ actes. Les actes font partie de la manifestation. En droit romain, la personne c’est le citoyen qui jouit de la totalité des droits et est pleinement responsable de ses actes.
LA GESTION DES PERSONNES EN MILIEU DE TRAVAIL
Ce mémoire fait partie d’ une formation en Gestion des personnes en milieu de travail, qui s’ inscrit dans la conception éthique du développement durable, visant à vivre et travailler ensemble pour le bien commun (Garriga et Melé, 2004), tenant compte à la fois des limites de l’environnement et des aspirations au développement des individus et des organisations (Beaupré el al., 2008). Les travaux sur la gestion des personnes se positionnent comme option qui implique une gestion humaniste de la personne s’appuyant sur les principes de la responsabilité sociale et donc du développement durable ct sur une conception différente de l’ être humain (A lbert el a!., 20 10 ). Cette gestion, humaniste et non naïve, n’est ni une gestion des individus, ni des collectifs, mais des personnes, qui ont leur uni cité et qui partagent certains buts et traits, quipartagent aussi un e même communauté, c’est-à-d ire qu e non seulement elles ont des relations mutuelles, mais qu ‘ elles forment une uni cité, un « nous » (Me lé, 2003). Cette gestion favorise le bien commun plutôt que les intérêts particuliers et n’omet pas
qu e les organisations ont besoin d’ un ensemble de mécanismes formels pour permettre un développement durable à la fois éthique et stratégique (A lbert el al., 20 10).
L’ENTREPRENEUR
Les définitions concernant l’entrepreneuri t sont loin de faire l’un animité. Il y aurait dans l’ entrepreneuriat l’acte de création d’ une entreprise (Verstraete, 2000) et une certaine manière de diriger (Falmholtz, 1990). Ce serait, par conséquent, le processus de concrétisation de l’action individuelle de l’entrepreneur (Bayad, Boughattas et Schmitt, 2006). Comme discipline de recherche, on peut considérer que l’entrepreneuriat est une affaire de management, même s’il est souhaité qu ‘ il se prête à des lectures différentes (politique, sociale, psychologique, économique, etc.), les différentes sc iences sociales n’étant pas considérées comme étanches, mais susceptibles de se fertiliser (Messeghem et Verstraete, 2008). Selon Tounès (2006), le mot entrepreneur serait apparu en France au XV Ie siècle. Il ajoute que la compréhension du mot et du concept auraient évolué au fil des cycles de l’histoire économique, suivant les différentes phases du capitalisme. Passant de « parfait négociant », à « celui qui se charge d’ un ouvrage », à « aventurier» et personnage mythique dans sa première acception. Ce serait Cantillon, vers 1755, qui lui aurait fait faire son entrée dans la théorie économique. Smith, en 1776, lui attribue l’accumulation du capital, comme fonction principale, et la bonne marche de son affaire comme seul objectif (Smith, 1991 ). L’intérêt pour le concept d’entrepreneur se serait atténué au profit du « manager » durant le dernier tiers du X IXe siècle, quand la taille de s organisations a augmenté, entraînant la séparation entre les fonctions de propriété et de gestion. L’entrepreneur est donc presque absent des théories néoclassiques, mais Schumpeter reste en marge en le décrivant comme le moteur du progrès technique. Il avance qu e seuls ceux qui sont capables d’innovation méritent d’être qualifié s d’entrepreneurs. Ces innovations seraient l’aboutissement de processus pour la farication d’un bien nouveau, l’introduction d’une méthode de production nouvelle, la conquête d’un nouveau débouché, la maîtrise d’une source nouvelle de matière première ou l’ implémentation d’ une nouvelle organisation de la production. Par ailleurs, Schumpeter ( 1942, réédité en 1979) avait prévu la disparition progressive des petites entreprises au profit d’immenses conglomérats, ce qui n’ est évidemment pas survenu à ce JOUI ».
LA PERSONNALITÉ
Lorsqu’il s’agit d’étudier l’ entrepreneur, le concept de personnalité est souvent mis à contribution. Le terme personnalité est amplement employé dans la psychologie actueIle et sa signification a subi plus d’une variation. Déjà en 1937, Allport, considéré comme le « père» de la psychologie de la personnalité scientifique moderne, en a énuméré pas moins de cinquante significations différentes. Et ses successeurs ne sont pas en reste. Pour Allport ( 1937), « la personnalité est l’organisation dynamique interne de l’ individu des systèmes psychophysiques qui détermine son adaptation unique à son environnement ». Bien qu ‘ il n’y ait toujours pas d’ unanimité, il semble qu’encore aujourd’ hui , la majorité des chercheurs se réfèrent à cette définition. Il semble qu e l’ être humain ait besoin de cohérence et de consistance pour faire face au monde et à son environnement. De façon générale, quelle est notre réaction face à l’abondance d’ informations à laquelle nous sommes soumis? Dans l’ incapacité d’envisager chaque renseignement individuellement, nous avons recours à un processus simplificateur : la catégorisation. Appliqué au domaine de la personnalité des gens qu e nous rencontrons ou dont nous entendons parler, ce processus prend le nom de théories implicites de la personnalité. À contrario, ces théories impliquent les préjugés ou les stéréotypes. Face à trop peu d’ information, nous aurons tendance à extrapoler pour nous fa ire un e idée générale. Ain si, si on nous informe qu ‘ un inconnu est généreux, nous lui attribuerons tout de suite les qualités de sympathique et chaleureux, ces caractéristiques font, croyons-nous, partie de la même catégorie (Leyens, 1983).
|
Table des matières
INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1 DÉFINITIONS DES CONCEPTS ET RECENSION DES ÉCRITS
1.1 LA PERSONNE
1.2 LA GESTION DES PERSONNES EN MILIEU DE TRAVAIL
1.3 L’ENTREPRENEUR
1.4 LA PERSONNALITÉ
1.4.1 LES TYPES
1.4.2 LES TRAITS
1.5 LEBICFIVE
1.6 LA TRÈS PETITE ENTREPRISE (TPE)
1.7 L’ARTICULATION VIE PROFESSIONNELLE/VIE PRIVÉE
1.7.1 L’APPROCHE DE L’ INTERFÉRENCE BIPOLAIRE
1.7.2 LES MODÈLES DE L’INTERPÉNÉTRATION
1.7.3 L’APPROCHE DE LA DIVERSITÉ ET DE L’INTERACTlON
CHAPITRE 2 CADRE ÉPISTÉMOLOGIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
2.1 L E CADRE PHISIOLOGIQUE
2.2 L A RECHERCHE AUTOBIOGRAPHIQUE
2.2.1 REGLES DE LA RECHERCHE AUTOBIOGRAPHIQUE
2.2.2 MISE EN PRATIQUE DE LA RECHERCHE AUTOBIOGRAPHIQUE
CHAPITRE 3 ENTREPRENEUR: UNE PERSONNE, DES CIRCONSTANCES
3.1 L’ENTREPRENEUR, EN TANT QUE PERSONNE
3.1.1 G ÉNÉRATION, ANTÉCÉDENTS, EN VIRONNEMENT
3.1.2 L A PERSONNALITÉ D’ ENTREPRENEURE
3.1.3 AUTO-ÉVALUATION
3.2 L’ENTREPRISE
3.3 CONCLUSION : UNE PERSONNE, DES CIRCONSTANCES
CHAPITRE 4 L’ENTREPRENEUR ET L’ENTREPRISE
4.1 L A NA ISSANCE DE L ‘ IDÉE
4.2 L A CONSTRUCTION DU PROJ ET
4.3 L A NÉCESSITÉ DE REVOIR LE PROJET
4.4 UN PROCESSUS D’ INTÉGRATION PAR L ‘ENTREPRENEUR
4.5 L ‘ENTREPRENEUR ET L ‘ENTREPRISE, DEUX RÉALITÉS DISTINCTES
CHAPITRE 5 L’ENTREPRENEUR ET LES TRA VAILLEURS
5.1 GRI-I OU GESTION DES RESSOURCES FAMILIA L ES?
5.2 L E TRAVAIL DE MAMÈRE
5.3 L E TRAVAIL DE MON Épou x: UN RÔLE PLUS FLOU, UNE GESTION DES GENRES
5.4 UNE CONCLUSION DE CETTE EXPÉRIENCE : V ERS UNE GESTION DES PERSONNES
CHAPITRE 6 L’ARTICULATION VIE PROFESSIONNELLE PRIVÉE
6.1 ARTICULATION VIE PROFESSIONNE LLE/vIE PRIV ItE : UN REGARD DANS LE TEMPS
6.1.1 L’EPOQUE TRADITIONELLE
6.1.2 LA GRANDE TRANSITION – 1740-1960
6.1.3 LES 30 GLORIE lJS~S – 1945-1975
6.1.4 DEPUIS LE PREMIER CHOC PITTROLIER – 1972 À CE JO UR
6.2 PRINCIPALES CONCEPTIONS SCIENTIFIQUES PROpOSItES
6.3 GESTION DES RELATIONS ENTRE LES DIFFItRENTES SPHÈRES DE VIE
6.4 ATTITUDES ORGANISATIONNELLES
6.4.1 POST URE DE TYPE STRATÉGIQUE
6.4.2 POSTURE À CARACTÈRE INSTITUTIONNALISTE
6.4.3 POSTURE CULTU RALISTE
6.5 ARTICULATION VIE PROFESSIONNELLE-VIE PRIVÉE, UNE RESPONSABILITE PARTAGITE
6.5.1 R ESPONSABILITÉ PERSONNELLE
6.5.2 RÔLE DE L’ÉTAT
6.5.3 RÔLE DES ORGANISATIONS
6.5.4 RÔLE DES SYNDICATS
6.6 DE L’ EXPERIENCE ENTREPRENEURIALE VERS LE FAMILIALISME
6.7 INTÉGRATION DES SPHÈRES PROFESSIONNELLES ET PRIVITES
6.8 MODÈLE SUGGÉRÉ
CONCLUSION GÉNÉRALE
LIMITES DE LA RECHERCHE
PERSPECTIVES DE LA RECHERCHE
ANNEXE 1
SOMMAIRE DU PLAN D’AFFAIRES
ANNEXE 2
ÉTAT DE LA SITUATION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Télécharger le rapport complet