Les soins palliatifs
Selon un constat de lโOrganisation Mondial de la Santรฉ (2015), actuellement une personne sur dix nรฉcessitant des soins palliatifs est prise en charge, chaque annรฉe, plus de vingt millions de personnes sont demandeuses de ce type de soins en fin de vie, 6% de ces personnes sont des enfants. En prenant en compte les personnes ร un stade prรฉcoce de leur maladie, on atteindrait un chiffre de 40 millions. 80% des besoins en soins palliatifs se situent dans des pays ร revenu faible, cependant la majeure partie des soins prodiguรฉs le sont dans des pays ร revenu รฉlevรฉ. En Suisse, ยซ le systรจme de santรฉ doit se prรฉparer ร une complexitรฉ croissante de la prise en charge des personnes en fin de vie ยป (Office fรฉdรฉral de la santรฉ publique (OFSP), 2012, pp. 4-5). Environ 40โ000 personnes en 2012 nรฉcessitaient des soins palliatifs pour 60โ000 dรฉcรจs de personnes de tous รขges.
LโOffice Fรฉdรฉral de la Statistique (OFS) estime quโen 2032, il y aura environ 53โ000 personnes en soins palliatifs pour 80โ000 dรฉcรจs par an. Une enquรชte sur les besoins en fin de vie rรฉalisรฉe en 2009, par lโinstitut de recherche GfK Switzerland SA, rรฉvรจle que 91 % des personnes interrogรฉes estiment que โles soins palliatifs doivent รชtre dispensรฉs ร toutes les personnes gravement malades et mourantes. Sโils รฉtaient eux-mรชmes atteints dโune maladie incurable, 77 % des participants ร lโenquรชte souhaiteraient avoir accรจs ร ce type de soinsโ (OFSP, 2015). Les soins palliatifs sont pris en considรฉration par les pouvoirs politiques pour amรฉliorer la qualitรฉ de vie des personnes, pour la continuitรฉ des soins, pour diminuer leur souffrance et pour soutenir leur dignitรฉ en fin de vie. Ils sโappuient sur des recommandations au niveau international par lโOMS (2015) avec le Global Atlas of Palliative Care at the End of Life et par le parlement europรฉen avec le Palliative care in the European Union (European Parliament, 2008). En Suisse, il existe plusieurs politiques communes et complรฉmentaires au niveau national comme au niveau cantonal : la Stratรฉgie globale Santรฉ 2020 (OFSP, 2012a), la Stratรฉgie nationale en matiรจre de soins palliatifs 2013 – 2015 (OFSP, 2012b), le Programme cantonal genevois de dรฉveloppement des soins palliatifs 2012-2014 (Ge.ch, 2015a), et la Planification mรฉdico-sanitaire du canton de Genรจve 2012-2015 (Ge.ch, 2015b).
En nous intรฉressant aux soins palliatifs en pรฉdiatrie, nous pouvons estimer ร lโaide des chiffres fournis par lโOFS quโil y aurait entre 2400 et 3100 enfants par an qui sont demandeurs de soins palliatifs en Suisse. Selon lโOMS, les soins palliatifs pour les enfants reprรฉsentent un domaine spรฉcial รฉtroitement liรฉ aux soins palliatifs adultes de par les traitements ; cependant ยซ lโenfant nโest pas un adulte en miniature ยป (Humbert, 2003). Les soins palliatifs appropriรฉs pour les enfants et leurs familles – regroupent l’ensemble des soins au niveau somatique, au niveau de l’esprit et de la spiritualitรฉ de lโenfant ; cela implique รฉgalement dโapporter un soutien ร la famille. Ils commencent lorsque la maladie est diagnostiquรฉe, et lโenfant continue de les recevoir quโil bรฉnรฉficie dโun traitement dirigรฉ contre la maladie ou pas. Les prestataires de santรฉ doivent รฉvaluer et soulager la dรฉtresse physique, psychologique et sociale de l’enfant. Des soins palliatifs efficaces nรฉcessitent une approche globale multidisciplinaire qui comprend la famille et qui fait usage des ressources communautaires disponibles : ils peuvent รชtre mis en oeuvre avec succรจs mรชme si les ressources sont limitรฉes. Ils peuvent รชtre fournis dans les รฉtablissements de soins, dans les centres de santรฉ communautaires et dans les foyers pour enfants (WPCA, 2014, traduction libre).
En Suisse, les soins palliatifs peuvent รฉgalement รชtre effectuรฉs ร domicile. Les maladies qui nรฉcessitent des soins palliatifs pour les enfants de moins de 15 ans sont multiples : 25% dues ร des anomalies congรฉnitales, 14.6% liรฉes au contexte nรฉonatal, 14% ร cause de problรจmes de malnutrition, etcโฆ, les cancers reprรฉsentent 5.7% de ces maladies (WPCA, 2014). Ces enfants ont de nombreux symptรดmes qui entraรฎnent de la souffrance. Au cours du dernier mois de vie de ces enfants, leurs parents ont rapportรฉ les symptรดmes รฉprouvรฉs et la souffrance ressentie ร cause de ceux-ci (Wolfe, 2000, traduction libre, p. 330), ร savoir : la fatigue, la douleur, la dyspnรฉe, lโanorexie, les nausรฉes et les vomissements, la constipation et les diarrhรฉes. Il apparaรฎt dโautre part que pour chaque symptรดme qui a รฉtรฉ traitรฉ spรฉcifiquement, lโeffet des traitements mรฉdicamenteux nโa pas permis de rรฉduire les symptรดmes (Wolfe, 2000, traduction libre, p. 330).
La douleur
La douleur est ressentie par environ 80% des enfants ayant des besoins en soins palliatifs, seul un tiers de ces enfants a pu bรฉnรฉficier dโun effet antalgique suite au traitement administrรฉ. ยซ Trop dโenfants endurent une douleur et une dรฉtresse inutiles ร cause dโune mauvaise gestion de la symptomatologie ยป (EAPC, 2009, p.28). La douleur est dรฉfinie par lโInternational Association for the Study of Pain (IASP, 1994) comme ยซ une sensation dรฉsagrรฉable et une expรฉrience รฉmotionnelle en rรฉponse ร une atteinte tissulaire rรฉelle ou potentielle ou dรฉcrite en ces termes ยป. La douleur a รฉtรฉ dรฉcrite de diffรฉrentes faรงons, selon Calvino (2011), la douleur est le rรฉsultat dโune expรฉrience subjective provenant de processus adaptatifs au niveau du systรจme nerveux central dont les caractรฉristiques dรฉpendent du stimulus, du sujet et de lโenvironnement. Elle est un ensemble de ยซ composantes sensori-discriminatives (localisation, intensitรฉ), cognitives (processus mentaux influenรงant la perception), sociales (modulation de lโexpรฉrience par la prรฉsence dโautrui) et une composante affective qui confรจre ร la douleur sa teneur dรฉsagrรฉable ยป (Grรฉgoire, M., Coll, M.-P., Eugรจne, F. & Jackson P.L., 2012, p. 212). La douleur ยซ marque un individu et dรฉborde sur son rapport au monde et ne peut se concevoir sans retentissement moral. Elle est donc souffrance… ยป (Le Breton, 2010, p.177).
La prise en charge de la douleur quโelle soit dโorigine iatrogรจne ou non, cโest-ร -dire induite par les soins ou par la maladie elle-mรชme, sโeffectue par le recours ร des traitements mรฉdicamenteux et/ou non mรฉdicamenteux (Wood, 2009). Selon Wanquet-Thibault (2015), depuis les annรฉes 2000 la douleur provoquรฉe par les soins est devenue une prรฉoccupation majeure de la santรฉ publique ; puisque cette douleur est prรฉvisible, elle se doit dโรชtre anticipรฉe par les รฉquipes soignantes. Les enfants sont particuliรจrement affectรฉs, ils font partie de cette population dite vulnรฉrable car ยซ dyscommunicante ยป : ils ne peuvent pas รฉvaluer leur propre douleur avant lโรขge de 5 ans (Thrane, 2016), ils ont des difficultรฉs ร protester et ร communiquer leur niveau de douleur. Une รฉtude รฉpidรฉmiologique canadienne rรฉvรจle quโen 2008 (Stevens et al., 2011, traduction libre, p. 407) : 78.2% des enfants hospitalisรฉs ont eu au moins une procรฉdure de soins douloureuse (6,3 actes douloureux par enfant), et que seulement 28.3% de ces enfants ont eu droit ร une intervention spรฉcifique de gestion de la douleur en lien avec le soin douloureux en question. Dans un service dโonco-hรฉmatologie, Moukhlissi (2015) fait le constat que 40% des douleurs ressenties par des enfants atteint dโun cancer sont induites ยซ par des actes invasifs ร visรฉe diagnostique ou thรฉrapeutique ยป.
La distraction versus le jeu
Les traitements non mรฉdicamenteux couvrent une grande variรฉtรฉ de stratรฉgies : de la diminution de stimuli stressant comme la lumiรจre et le son, ร la sollicitation des thรฉrapies complรฉmentaires et alternatives, ou en sollicitant les parents qui vont permettre dโattรฉnuer lโanxiรฉtรฉ de leur enfant et ainsi avoir un effet sur son ressenti de la douleur. ยซ Le but est de fournir des outils au patient afin quโil apprenne ร diminuer lโintensitรฉ de la douleur ainsi que la frรฉquence des crises douloureuses ยป (Wood & Wanquet-Thibault, 2014, p.39). Lโutilisation et lโefficacitรฉ de ces diffรฉrentes stratรฉgies sont dรฉpendantes de lโรขge des enfants traitรฉs en soins palliatifs (Kuttner, 2006, citรฉ par Wood, 2009). Ces stratรฉgies appartenant aux actions physiques, au domaine des distractions ou ร celui des techniques cognitivo-comportementales, doivent sโadapter au patient en fonction de son dรฉveloppement psychoaffectif et de ses connaissances prรฉalables ร lโutilisation de telles stratรฉgies. La distraction par des marionnettes sera plus indiquรฉe pour un enfant de trois ans, alors quโun jeu vidรฉo conviendra mieux ร un enfant de dix ans (Wood, 2009, p. 84). A ce stade, il est nรฉcessaire de distinguer le jeu et la distraction : le jeu est une distraction, alors que lโinverse nโest pas forcรฉment vrai (ex. : visionner une vidรฉo).
La distraction se dรฉfinit comme un ยซ ensemble de choses qui occupent agrรฉablement lโesprit, dรฉlassent et recrรฉent ยป soit quelque chose qui dรฉtourne momentanรฉment lโattention (Centre National de Ressource Textuelles et Lexicales, 2015a). Utilisรฉe en pรฉdiatrie ยซ la distraction consiste ร centrer lโattention de lโenfant sur autre chose que sur sa douleur en lui donnant quelque chose ร voir, ร faire ou ร entendre ยป (Marchand, 2009, citรฉ par HUG, 2014, p. 11). Ce qui amรจne ร se questionner sur lโattention, ร savoir la ยซ tension de l’esprit vers un objet ร l’exclusion de tout autre ยป (Centre National de Ressource Textuelles et Lexicales, 2015b). Selon Van Damme (2010), lโattention et la motivation ont un lien รฉtroit : lโattention priorise les motivations et les besoins innรฉs, elle est influencรฉe par lโimportance de lโobjectif ร atteindre pour lโindividu, et elle se focalise sur lโobjectif principal en inhibant les informations non pertinentes autour. De ce fait, lorsque la douleur surgit elle attire lโattention stoppant ainsi toute autre activitรฉ ; cette attention peut cependant รชtre modulรฉe en fonction de lโengagement cognitif de lโindividu. Le jeu est caractรฉrisรฉ comme ยซ une activitรฉ [divertissante et] ludique essentielle chez lโenfant, spontanรฉe, [dรฉsintรฉressรฉe,] libre et gratuite ยป qui peut avoir des rรจgles (Centre National de Ressource Textuelles et Lexicales, 2015c). Le jeu peut รชtre considรฉrรฉ comme un ยซ partenaire des soins ยป en pรฉdiatrie (Billot, 2014, p. 11). Selon Ferran, Mariet et Porchet (1978),
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Table des matiรจres
1. Introduction
1.1. Problรฉmatique
1.1.1. Les soins palliatifs
1.1.2. La douleur
1.1.3. La distraction versus le jeu
1.2. Les soins infirmiers face ร la douleur
1.3. Question de recherche
2. Mรฉthode
2.1. Sources dโinformation et stratรฉgie de recherche documentaire
2.2. Diagramme de flux
3. Rรฉsultats
3.1. Analyse critique des articles retenus
3.2. Tableau synoptique
4. Discussion
4.1. La personne : lโenfant et sa famille
4.1.1. Lโenfant
4.1.2. Les parents
4.2. Lโenvironnement
4.3. La santรฉ
4.4. Les soins
4.4.1. Le partenariat de collaboration
4.4.2. Le type de soin
4.4.3. La mรฉthode
4.4.4. Le type dโรฉvaluation
5. Conclusion
5.1. Recommandations
5.1.1. Recommandations pour la pratique
5.1.2. Recommandations pour la recherche
6. Rรฉfรฉrences
7. Annexes
7.1. Impact de la mรฉmoire
7.2. Facteurs influenรงant la mรฉmoire de la douleur des soins effractifs
7.3. Tableau des รฉvaluations de la douleur en fonction de lโรขge
7.4. Tableaux des รฉtudes retenues pour lโanalyse critique
7.5. Vocabulaire et dรฉfinitions
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