Le contexte d’un objet est constitué de l’ensemble des connaissances relatives à l’objet et permettant de décrire son état ainsi que l’état de l’environnement dans lequel il évolue. Il permet d’analyser l’objet considéré, qu’il soit physique, logique, ou virtuel, tout en tenant compte des interactions et influences possibles qu’il peut avoir avec ce qui l’entoure. Etudier un objet dans son contexte, permet d’avoir une vision plus complète et de mieux comprendre son comportement (si l’objet existe) ou de mieux le concevoir (si l’objet est en cours de conception). Ce concept est utilisé aussi bien dans les sciences humaines que dans d’autres. Ainsi, dans l’analyse littéraire des textes, il est souvent fait référence au contexte d’un mot ou d’une phrase afin d’affiner sa compréhension. En linguistique, le contexte d’un mot inclut les mots qui l’entourent et permet de lui attribuer un sens en relation avec le sens global du texte. Certains mots peuvent en effet avoir plusieurs significations possibles et l’analyse de leur contexte permet d’en fixer une, la plus juste et à défaut la plus probable. Par exemple, le mot « tonneaux » sera interprété différemment dans les deux phrases suivantes et ceci grâce à l’analyse du mot et de ses interactions avec les autres mots de la phrase.
– Dans le village, l’eau de pluie est récupérée et conservée dans des tonneaux.
– Après avoir heurté un arbre, la voiture du chauffard a fait plusieurs tonneaux.
C’est donc le sens global de la phrase qui précise le sens du mot qui la compose. Alors qu’au même temps, le sens de la phrase est déduit du sens des mots qui la composent. En histoire et en archéologie, l’analyse des événements et des faits qui nous sont transmis oralement ou par écrits, ou les objets trouvés lors de fouilles archéologiques passe souvent par l’étude des contextes « historiques », «politiques» ou « économiques ». Ces analyses permettent de placer l’évènement dans son contexte, c’est à dire de le situer de façon plus précise dans le temps ou de déterminer le degré de fiabilité de l’histoire ou de l’événement relaté. L’étude du contexte permet ainsi de reconstituer une sorte de puzzle offrant une vue et une analyse plus globales, plus vraisemblables ou plus précises. Aujourd’hui, la notion de contexte est utilisée dans la quasi totalité des disciplines. Il est désormais admis que pour atteindre de meilleures analyses, il est nécessaire d’englober la notion de contexte.
La notion de contexte : définition et terminologie
Les informations quantitatives et qualitatives qui caractérisent un environnement donné, ses acteurs ainsi que leurs interactions, sont primordiales pour comprendre, analyser ou prédire le fonctionnement ou le comportement d’un système. Nous appelons l’ensemble de ces informations par informations de contexte. La détention et la maitrise de ces informations, sur lesquelles nous reviendrons plus tard dans ce chapitre, peuvent permettre également au système de s’autogérer par lui-même puisqu’elles peuvent faciliter l’auto-adaptation grâce à l’introduction possible de systèmes et de mécanismes automatisés pour la décision.
Dès 2001, Abowd a défini le contexte comme étant « l’ensemble des informations caractérisant (partiellement) la situation d’une entité particulière » [2]. Dourish et Chalmers ont ensuite introduit les notions de relativité et d’acceptabilité dans le contexte. « C’est une notion dont l’acceptation n’est ni absolue ni universelle, mais relative à une situation » [3], [4]. Cette situation peut être une situation physique la localisation spatio-temporelle d’une personne ou fonctionnelle comme la tâche en cours de réalisation. Le contexte n’est pas contraint à contenir toute l’information caractérisant une situation. Ceci n’est sans doute pas possible. Au contraire, pour une même situation, il y a place pour plusieurs contextes. D’autre part, comme ces contextes peuvent être comparables en fonction des ensembles d’information qu’ils contiennent, un contexte peut être considéré comme plus ou moins étendu qu’un autre. La différenciation et la hiérarchisation des contextes paraissent utiles et nécessaires. Ainsi, une application utilisatrice d’un Contexte A peut le quitter pour entrer dans un autre Contexte B. Par exemple, lorsqu’une personne entre dans un bâtiment, le contexte associé à la ville dans laquelle elle se situe doit passer en arrière-plan alors que celui concernant l’intérieur du bâtiment doit devenir principal, pour être de nouveau « oublié » lors de la sortie du bâtiment. La richesse du contexte est en général fonction du besoin des fonctions que l’on vise. Ainsi si on souhaite implémenter un service de thermomètre, le contexte peut se limiter à la température. Si on souhaite implémenter un thermostat ou un service de climatisation, on agrégera les informations de température, d’ensoleillement et de temps pour réguler la température. Enfin, le contexte d’un service de station météo regroupera les cinq informations qui sont la température, la pression, l’ensoleillement (luminosité), l’humidité et le temps (date et heure) [5]. Dans le domaine des TIC, bien que plusieurs travaux se soient penchés sur la notion de contexte, les points de vue sous lesquels cette notion est abordée sont différents. En informatique diffuse par exemple, on s’est beaucoup intéressé au contexte d’une application en termes des paramètres physiques qui caractérisent sa situation. Alors qu’en communication homme-machine, le contexte désigne le plus souvent la tâche que l’utilisateur désire accomplir et l’historique de l’interaction de l’utilisateur avec le système [3]. En intelligence artificielle, c’est encore différent, puisque le contexte est plutôt considéré comme l’ensemble des conditions qui font qu’une assertion soit valide ou non [6].
Mais commençons d’abord par introduire certaines notions et terminologies clés, que nous utiliserons tout au long de ce manuscrit de thèse.
– L’informatique diffuse (en anglais pervasive computing) est une notion qui fait référence à l’utilisation de composants et de capteurs communiquant les uns avec les autres [7]. Ces composants peuvent être intégrés à des objets de la vie quotidienne afin de faciliter les activités humaines dans l’environnement réel. L’idée est de fusionner les systèmes d’information et les objets du monde réel. La notion d’informatique diffuse est proche de celle de l’informatique omniprésente (en anglais ubiquitous computing).
– L’intelligence ambiante consiste à répartir le traitement de l’information sur tous les objets de l’environnement considéré. Les objets étant interconnectés par des réseaux. L’intelligence ambiante se base essentiellement sur :
o l’informatique diffuse,
o la notion de réseaux ambiants (en anglais Ambient Networks ou Ubiquitous Communication) qui offrent aux objets de l’informatique diffuse la possibilité de communiquer,
o et sur les technologies des interfaces homme-machine qui permettent aux utilisateurs d’interagir avec ces objets [8].
– Les réseaux ambiants consistent à introduire une infrastructure basée en grande partie sur des logiciels (software). Cette notion permet d’offrir les moyens pour interconnecter les objets et les faire communiquer de façon transparente.
– Dans ce qui suit, nous définirons la notion de contexte dans le domaine des TIC et plus particulièrement pour l’informatique diffuse, l’intelligence artificielle et le web sémantique.
– Nous nous focaliserons ensuite sur la notion de contexte dans les réseaux de télécommunications.
Classification du contexte
La richesse et la diversité des informations de contexte nous pousse naturellement à les structurer en catégories afin de mieux les cerner. Dans la littérature, différentes classifications ont déjà été proposées .
Globalement, on peut distinguer quatre catégories de contexte :
✦ Le contexte environnemental : tel que les personnes ou les objets voisins, la luminosité, la température, le bruit ou le temps, …
✦ Le contexte de l’utilisateur tel que la localisation de l’utilisateur, l’intérêt personnel et les préférences, l’activité, l’émotion, le handicap, …
✦ Le contexte informatique et réseau tel que l’URL, la bande passante du réseau, la mémoire disponible, le système d’exploitation, …
✦ Le contexte de temps tel que l’historique des actions, l’historique des endroits, l’heure courante et la date.
Nous pouvons remarquer dès à présent que ces informations ont des natures très différentes. Certaines sont objectives, facilement mesurables, quantifiables et peuvent être comparées entre elles. D’autres composantes doivent être paramétrées et numérisées comme par exemple les centres d’intérêt d’un individu, sa perception des choses, ses préférences en termes de services ou bien l’émotion qu’il ressent [11]. Certaines informations telles que les préférences devraient être saisies par les utilisateurs eux-mêmes ou bien déduites d’autres informations sur ces derniers. Enfin, certaines informations restent subjectives et difficilement quantifiables, donc difficiles à classifier ou à comparer entre elle.
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Table des matières
Chapitre 1 : Introduction Générale
I. Introduction
II. Cadre général et Motivation
III. Organisation et contributions de la thèse
Chapitre 2 : La Gestion de Contexte dans les TIC
I. Introduction
II. La notion de contexte : définition et terminologie
II.1. Classification du contexte
II.2. Le contexte dans l’informatique diffuse
II.3. Le contexte en intelligence artificielle
II.4. Un pont entre l’informatique diffuse et l’intelligence artificielle
II.5. Le contexte dans le web sémantique
II.6. Le contexte dans les réseaux
III. La gestion du contexte
III.1. Collecte des informations de contexte
III.2. Représenter et stocker le contexte
III.3. Le contexte et l’incertitude : le besoin d’enrichir et de compléter le contexte
III.4. Publier et fournir le contexte
IV. Architectures et approches pour faciliter la gestion du contexte
IV.1. Architectures et approches existantes
IV.2. Synthèse
V. Conclusion
Chapitre 3 : Ubiquity-Ont : Ontologie Générique dans un environnement de réseaux et de services hétérogènes
Partie 1 : De la sémantique aux Ontologies
I. Introduction
II. La sémantique : origines et signification
III. La notion d’Ontologie
III.1. Qu’est une ontologie ?
III.2. Types d’ontologies
III.3. Composants d’une ontologie
IV. Les langages utilisés pour la description sémantique
V. La logique de description
VI. Des règles pour une meilleure inférence
VII. Méthodologies de conception et de développement d’une ontologie
Partie 2 : Ubiquity-Ont : une ontologie pour les systèmes Ubiquitaires
I. Introduction
II. Méthodologie adoptée pour concevoir notre ontologie
II.1. Critères d’évaluation d’une ontologie
II.2. Première étape : identifier le domaine
II.3. Deuxième étape : Envisager l’éventuelle réutilisation des ontologies
II.4. Troisième étape : Enumérer les concepts de base de l’ontologie
II.5. Quatrième étape : affiner l’ontologie et ses concepts
II.6. Cinquième étape : Définir les propriétés des classes – attributs
II.7. Sixième étape : Définir les relations entre les concepts
II.7.1. Cardinalité des attributs
II.7.2. Type de valeur des attributs
II.8. Septième étape : créer les instances
III. Outils utilisés pour la conception de l’ontologie
III.1. Les moteurs d’inférence sur les ontologies
IV. Une base de données sémantique
Conclusions
Chapitre 4 : Conclusion Générale
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