Influence du degré de colmatage du filtre
Selon Ives (1980), la concentration de particules dans l’effluent du filtre varie en fonction du temps du fonctionnement du filtre. La figure 1.2 montre l’évolution typique de la concentration des particules dans l’effluent en fonction du temps. Il est observé que la concentration varie en trois étapes. Dans un premier temps, la concentration des particules diminue progressivement jusqu’à ce qu’elle atteigne sa valeur minimale. Dans la deuxième étape, la concentration se stabilise pendant un certain temps. Dans la troisième étape, la concentration augmente jusqu’à ce qu’elle atteigne une valeur inacceptable (Clim). À cet instant (tc), le filtre doit être arrêté pour qu’un lavage du filtre soit effectué. Selon James M. Montgomery Consulting Engineers (1985), dans plusieurs filtres réels, la turbidité des effluents subit des variations.
La variation de la turbidité est similaire à la variation de la concentration qui a été observée dans l’étude d’Ives (1980) citée au paragraphe précédent, sauf dans la première étape. En effet, dans la première étape, la turbidité subit une augmentation jusqu’à un pic avant de diminuer progressivement (figure 1.3). Cette étape est appelée l’étape de maturité (ripening).
Il peut y avoir plus d’un pic pendant cette étape. Les auteurs expliquent que ces pics sont causés par la présence de particules dans le filtre qui n’ont pas été retirées par les lavages précédents. Ces particules peuvent être détachées et entrainées dans le filtrat en raison de collisions avec les particules mobiles qui circulent à travers le filtre. Pour expliquer l’amélioration progressive du filtrat pendant l’étape de maturité, James M. Montgomery Consulting Engineers (1985), Desjardins (1990) et Ives (1980) ont supposé que les particules mobiles entrent en collision avec les particules retenues au fur et à mesure. Chaque collision peut donner lieu à un attachement des particules mobiles, ce qui engendre l’amélioration de la rétention des particules.
Ces hypothèses sont confirmées par l’étude de Benosman (2012). Cette étude a porté sur le processus du colmatage des filtres à sable et la rétention des particules. Deux phases de la capture ont été observées. Lorsque le filtre est propre, la capture des particules a lieu dans des macropores. Les macropores sont des pores qui sont situés entre les grains. Dans une deuxième phase, la capture a plutôt lieu dans des micros pores. Les micros pores sont formés par les agrégats de particules.
Ces agrégats sont formés par l’accumulation des particules dans un site de rétention. L’auteur conclut que la collision entre des particules mobiles et des particules retenues peut donner lieu à une capture. La capture des particules dans les micros pores engendre donc l’amélioration de l’efficacité de rétention. Comme mentionné dans le paragraphe précédent, les particules accumulées dans un site de rétention forment des flocs. Durant l’augmentation finale de la turbidité (breaktrough à la figure 1.3), l’accumulation des particules exercent des forces sur ces agrégats, ce qui les rend moins résistant. En effet, les agrégats tendent à se briser plus facilement (Desjardins, 1990). Il se peut qu’à cet instant, les agglomérats et les pontages formés par les particules dans les pores subissent des bris. Le bris des agrégats engendre le réentraînement des particules dans le fluide. Il en résulte donc une augmentation de la concentration des particules dans le fluide. Ce phénomène est observé dans la dernière phase de variation de la concentration en particules et de la turbidité des filtrats (figures 1.2 et 1.3).
Influence de la vitesse d’écoulement
La vitesse de filtration intervient souvent dans les relations théoriques des mécanismes de capture des particules. À l’échelle expérimentale, le taux de capture est inversement proportionnel à la vitesse de filtration. En effet, lorsque la vitesse d’écoulement est faible, le taux de rétention des particules dans le filtre augmente. Cette capture est plus importante à la surface du filtre. Par conséquent, un colmatage rapide de la surface est engendré. Dans ce cas, les particules retenues diminuent avec la profondeur dans le filtre. Lorsque la vitesse de filtration est élevée, la durée de contact entre la particule et le collecteur diminue. Cette diminution réduit l’importance des phénomènes d’attachement physico-chimique. Pour les vitesses plus élevées, la capture des particules est mieux distribuée le long du filtre (Bradford et al., 2007). Dans les conditions d’attachement fortement répulsives, l’effet de la vitesse est différent. Bradford et al. (2007) ont étudié les influences des interactions physico-chimiques sur la filtration physique (capture par effet des forces physiques). Ils ont essayé de filtrer des microsphères en latex par le sable dans des conditions fortement répulsives.
Les résultats ont montré que la capture est plus importante lorsque la vitesse augmente. L’auteur a expliqué ce phénomène par la provocation de collisions et le blocage des particules dans les petits pores, grâce aux forces hydrodynamiques. À l’opposé, dans le cas où les forces hydrodynamiques sont faibles (lorsque la vitesse est faible), la répulsion entre les particules et le milieu poreux prédomine. Ce phénomène permet aux particules fines de suivre les lignes d’écoulement et il empêche leur attachement. L’auteur conclut que l’augmentation de la vitesse favorise la filtration physique. Dans ce cas, la capture par entrainement dans l’un des sites de rétention est prédominante, alors que la capture par des forces physico-chimiques est faible.
Influence de la granulométrie des particules et le sable
Les théories de la filtration considèrent la taille des particules comme un paramètre important dans la filtration. En effet, une grande partie des mécanismes de transport dépendent de la taille des particules à filtrer. Les grandes particules tendent à décanter sur la surface du grain, ou bien elles sont interceptées entre les grains. Ces particules sont souvent influencées par les forces mécaniques de filtration. Quant aux petites particules, celles dont la taille est inférieure à 1 μm, elles tendent à s’attacher aux grains sous l’effet des forces de van der Waals. L’attachement des particules par interaction électrostatique dépend aussi de leur taille. Cette interaction est proportionnelle à la surface spécifique qui est elle-même inversement proportionnelle à la taille de la particule. En effet, plus la taille des colloïdes est petite, plus la surface spécifique et grande et donc l’attachement électrostatique est plus important (Robitaille & Tremblay, 1997). La capture est souvent inversement proportionnelle au diamètre des grains du sable. En effet, plus le diamètre des grains est faible, plus la rétention est efficace. La rétention mécanique est dominante dans ce cas (Desjardins, 1990).
Aussi, la rétention physico-chimique peut varier selon le diamètre effectif du matériau, en raison de la surface spécifique du grain. Bradford et al. (2007) a étudié le profil de capture des particules le long du filtre en variant le diamètre médian du matériau (D50). Ils ont constaté que lorsque le D50 du matériau est grand, la capture est mieux répartie le long du filtre. Au contraire, une diminution du D50 du matériau accentue la capture en surface et amène une décroissance exponentielle du piégeage avec la profondeur dans le filtre. Benosman (2012) a étudié le transport des colloïdes dans des milieux hétérogènes. L’auteur a utilisé du sable de silice non uniforme donc les grains sont non sphériques. Par conséquent, le milieu poreux avait une distribution porale hétérogène. Quatre granulométries différentes (diamètres allant de 0,3 à 0,6, de 0,63 à 1, de 1 à 2, et de 0,6 à 2 mm) ont été étudiées.
L’essai a été réalisé dans des conditions d’attachement défavorable pour isoler l’impact de la filtration mécanique. Des particules de kaolinite de même diamètre (1 μm) ont été utilisées. Les résultats ont montré que pour un même débit et une même concentration, le taux du colmatage ne varie pas entre ces filtres. De plus, la distribution des particules a eu lieu tout au long des couches hétérogènes. Lorsque le diamètre effectif du grain est donc entre 0,3 et 2 mm, et dans les conditions de cette étude, la capture des particules est peu influencée par le diamètre des grains.
Influence de la rugosité de la surface du collecteur Selon plusieurs références consultées, la rugosité de la surface des grains influence la capture. Selon Sefrioui Chaibainou (2012), la rugosité des grains favorise l’adsorption des particules. La rugosité de la surface est formée par des plots ou des cavités. Ces derniers constituent des microsites favorables à la rétention. Shellenberger & Logan (2002) ont effectué des essais de filtrabilité pour des microsphères en latex avec média filtrant composé de billes de verres. Deux types de billes de verres ont été testés : un premier type avec une surface rugueuse et un autre avec une surface lisse. À partir de leurs résultats, Sefrioui Chaibainou (2012) a constaté que l’efficacité de rétention a été augmentée de 50 % dans le cas des surfaces rugueuses. Yoon, Germaine & Culligan (2006) ont étudié l’effet de la rugosité des grains sur la filtration dans certaines conditions. Des billes de verre de 4 mm de diamètre ont été utilisées. Comme Shellenberger & Logan (2002), des billes de surface lisse ont été comparées avec des billes de surface rugueuse.
Des conditions physico-chimiques défavorables ont été imposées avec des forces nettes répulsives entre les particules. Ils ont observé que lorsque les grains sont lisses, la capture est similaire sur toute la longueur du filtre. Par contre, dans le cas des grains de surface rugueuse, la capture a principalement lieu près de la surface du filtre et elle diminue avec la profondeur. À l’échelle microscopique, la capture dans le cas des surfaces lisses a eu lieu dans les sites de contacts grain à grain, alors que dans le cas où la surface était rugueuse, les mécanismes de rétention dépendent de la vitesse de filtration. Quand la vitesse est élevée, la capture aux contacts grain à grain est prédominante par rapport à la capture à la surface des grains. À l’opposé, dans le cas où la vitesse est moyenne ou faible, la capture à la surface des grains devient plus importante. Rappelons que dans cette étude, l’adhésion entre les grains et les particules était diminuée, ou presque éliminée. Il semble donc possible que la capture à la surface en raison de la rugosité ne soit pas seulement par adsorption, mais aussi par effet mécanique.
|
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 Notions générales
1.2 La filtration à l’échelle microscopique
1.2.1 Mécanismes de capture
1.2.2 Forces exercées lors de la filtration
1.2.2.1 Forces mécaniques
1.2.2.2 Forces physico-chimique
1.3 Paramètres qui influent sur la capture des particules
1.3.1 Influence du degré de colmatage du filtre
1.3.2 Influence de la vitesse d’écoulement
1.3.3 Influence de la granulométrie des particules et le sable
1.3.4 Influence de la rugosité de la surface du collecteur
1.3.5 Effet de la chimie de la solution
1.3.6 Effet de la concentration initiale des particules dans le fluide
1.3.7 Effet de la température
1.3.8 Effet du balayage de la surface du filtre
1.3.9 Orientations et objectifs de recherche
CHAPITRE 2 MÉTHODOLOGIE
2.1 Dispositif de filtration
2.2 Plan expérimental
2.3 Détermination de la vitesse de balayage
2.4 Protocoles d’analyse
2.4.1 Analyse des matières en suspension
2.4.2 Analyse du kaolin total
2.4.3 Analyse de turbidité
2.4.4 Estimation de la teneur en kaolin du sable
2.4.5 Analyse granulométrique par diffraction laser
CHAPITRE 3 RÉSULTATS ET DISCUSSION
3.1 Granulométries du kaolin et du sable
3.1.1 Granulométrie du kaolin
3.1.2 Granulométrie du sable
3.2 Résultats de la série 250 mg/L
3.3 Série 750 mg/L
3.4 Comparaison entre les résultats des séries 250 et 750 mg/L et discussion
CONCLUSION
LISTE DE RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Télécharger le rapport complet