La fièvre catarrhale ovine
ANALYSE DES DONNÉES PUBLIÉES DEPUIS 2006
Depuis l’apparition des premiers cas, les données relatives à la fièvre catarrhale ovine se sont multipliées. L’AFSSA/ANSES s’est autosaisie et a été saisie à de nombreuses reprises par le gestionnaire de risque afin de l’éclairer sur les mesures à prendre et sur l’évolution de la situation. Parallèlement, l’Administration a publié de nombreux ordres de services (notes de service, notes d’information, lettres à diffusion limitée) et les textes réglementaires français et européens ont été remaniés à de nombreuses reprises. La presse professionnelle vétérinaire et agricole a par ailleurs relayé tous les évènements en lien avec cette crise. C’est sur cette base documentaire que s’est fondée notre étude afin de déceler les points clés ayant conduit à des difficultés et de mettre en lumière les conflits et les divergences d’opinion qui ont pu apparaître, dans le but d’établir un guide d’entretien afin d’éclairer ces questions en rencontrant les acteurs qui y ont pris part. Cette partie relate dans un premier temps les thématiques abordées par les avis de l’AFSSA/ANSES, puis par les ordres de service publiés par l’Administration et notamment ceux en lien avec les recommandations de l’AFSSA/ANSES. Enfin, l’analyse des articles publiés dans la presse professionnelle vétérinaire et agricole apporte un éclairage sur les sujets qui ont fait polémique tout au long de la crise.
AVIS DE L’AFSSA/ANSES
THÈMES ABORDÉS
De la fin de l’année 2006 au mois de décembre 2010, l’AFSSA/ANSES a publié 32 avis concernant la FCO à sérotype 8 en France continentale. Ils ont été collectés sur le site Internet de l’Agence (www.anses.fr) en mentionnant dans le moteur de recherche les mots clés « catarrhale » et « FCO ». Ces avis venaient en réponse à 24 saisines de la DGAl et à 4 auto-saisines de l’Agence. Les principaux thèmes, dont l’occurrence est présentée dans le tableau 2, concernaient les mesures de lutte : vaccins, mouvements, désinsectisation ; les mesures de surveillance : dépistage, inactivité vectorielle, déclaration des cas ; ainsi que des points sur la situation et les perspectives concernant l’émergence de nouveaux foyers.
Tableau 2 : Occurrence des thèmes abordés dans les avis de l’AFSSA/ANSES relatifs à la FCO BTV-8 entre septembre 2006 et décembre 2010
Ce sont essentiellement les mesures de lutte et les modalités de surveillance à mettre en place qui ont été évoquées dans les avis publiés par l’AFSSA/ANSES. La vaccination et les restrictions de mouvements d’animaux sont les thématiques qui ont été les plus présentes avec près de 40 % des avis publiés portant sur ces sujets.
Le nombre d’avis publiés annuellement sur la FCO à BTV-8 a régulièrement diminué comme le montre la figure 16, passant de dix en 2006 à trois en 2010. Cette répartition s’explique par l’importance des mesures à fixer en début de crise, avec la mise en place des méthodes de lutte et de surveillance qui, une fois fixées, pouvaient être modifiées sans nécessiter systématiquement l’intervention de l’évaluateur de risque.
Figure 16 : Répartition annuelle du nombre d’avis et de thèmes abordés dans les avis relatifs à la FCO à BTV-8 entre septembre 2006 et décembre 2010
Le délai moyen de réponse entre la date de la saisine et la publication de l’avis est de 22 jours pour l’ensemble des avis de l’AFSSA/ANSES relatifs à la FCO à BTV-8, publiés entre septembre 2006 et décembre 2010. Ce délai court montre l’urgence avec laquelle l’AFSSA/ANSES a répondu, notamment dans les premières années, de 2006 à 2008, où les avis étaient publiés en moyenne respectivement 18 jours, 14 jours et 15 jours après la saisine. Les années suivantes, ces délais moyens ont sensiblement augmenté, passant à 35 jours en 2009 et 44 jours en 2010. Cette augmentation du délai de réponse est sans doute corrélée aux thématiques moins urgentes des saisines après la mise en place des mesures spécifiques au cours des premières années.
En effet, il est possible d’identifier une évolution chronologique des thèmes abordés par les saisines des avis de l’AFSSA/ANSES relatifs à la FCO à BTV-8, pendant la période allant de septembre 2006 à décembre 2010. Plusieurs points ont été abordés lors de l’arrivée de la maladie et n’ont par la suite plus été discutés. C’est le cas par exemple des mesures générales de surveillance et de l’inactivité vectorielle qui, une fois définies en 2006, n’ont plus fait l’objet d’avis spécifiques. De même, les points sur la situation épidémiologique qui, bien que traités régulièrement, n’étaient pas spécifiquement mentionnés dans l’intitulé des saisines ; tout comme les perspectives quant à l’évolution de la situation.
De 2006 à 2008, plus d’un tiers des avis publiés ciblaient les mesures générales de lutte et les restrictions appliquées aux mouvements d’animaux. Les mesures générales de lutte ont été mises en place dans les premières années de la crise afin de modifier les textes qui étaient alors en vigueur. Jusqu’à l’élaboration et la mise à disposition du vaccin en 2008, les restrictions de mouvements et le zonage, qui étaient les seuls moyens de contrôle de l’extension de la maladie, ont été largement évoqués dans les avis jusqu’en 2008.
La vaccination n’a été traitée qu’à partir de 2007 et essentiellement en 2008 (la moitié des avis publiés à ce sujet). Cette problématique est récurrente depuis, puisque chaque année, l’AFSSA/ANSES a publié un avis concernant la stratégie vaccinale à mettre en place afin de lutter efficacement contre la maladie pour l’année à venir. D’autres questions comme le type de vaccin, son efficacité sur certains animaux ou les protocoles de vaccination ont aussi été abordées lors de la première campagne de vaccination.
D’autres thématiques telles que la désinsectisation ou le dépistage ont été plus récurrentes, avec des avis publiés entre 2006 et 2009. Les avis concernant la désinsectisation se sont heurtés à plusieurs reprises à l’absence de données scientifiques disponibles et ceux abordant le dépistage se sont intéressés avec de plus en plus de précision aux protocoles utilisés pour détecter la maladie et aux modalités d’interprétation des résultats d’analyses pouvant mener au dépistage de la maladie.
Cette chronologie des thématiques abordées met en lumière le déroulement des problématiques qui se sont succédées au cours de la période 2006-2010, avec une forte représentativité des méthodes de lutte et de surveillance qui ont constitué plus de 80 % des avis publiés.
PRINCIPAUX POINTS SOULEVÉS DANS LES AVIS DE L’AFSSA/ANSES RELATIFS À LA FCO BTV-8 ENTRE SEPTEMBRE 2006 ET DÉCEMBRE 2010
Cette partie présente succinctement les grands thèmes abordés dans les différents avis relatifs à la FCO sérotype 8 publiés par l’AFSSA/ANSES entre septembre 2006 et décembre 2010. Le contenu de ces avis est repris et développé dans l’annexe 1.
Les mesures générales de lutte ont été mises en place dès l’apparition de la maladie, avec la modification de l’arrêté fixant les mesures techniques et financières de police sanitaire relatives à la fièvre catarrhale ovine. Par la suite, différentes mesures de lutte ont été présentées : les conditions de limitation des mouvements d’animaux, les mesures de zonage et leur adaptation en fonction du contexte : en période d’activité ou d’inactivité vectorielle, en présence de foyers sur le territoire, en fonction de la disponibilité d’autres moyens de lutte comme les vaccins. L’abattage des animaux atteints a été envisagé, mais n’était prescrit que dans des situations très particulières qui n’ont jamais été réunies.
La remise en cause des mesures proposées par l’AFSSA/ANSES suite à la publication d’un rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments15 a poussé l’Agence à se prononcer sur l’intérêt des restrictions de mouvements dans la limitation de l’extension de la maladie et à proposer des évolutions de la réglementation, comme par exemple une adaptation du zonage. Les objectifs de la lutte ont aussi été discutés, notamment pour les mesures à mettre en place en 2007, suite à l’apparition du sérotype 1 dans le Sud-Ouest, afin d’éviter que les deux sérotypes ne se retrouvent dans une même zone et l’émergence éventuel réassortiment.
La stratégie vaccinale présentée dès 2007 et qui prenait en compte la disponibilité en doses vaccinales alors restreinte et la date de leur mise à disposition, proposait plusieurs options selon la quantité de doses de vaccin disponible. La première recommandation préconisait l’utilisation d’un vaccin inactivé en période d’inactivité vectorielle, dans un objectif d’éradication de la maladie, en concertation avec les autres pays européens touchés. Cette campagne de vaccination devait être obligatoire pour l’ensemble des ruminants domestiques sensibles des zones infectées et dans un périmètre tampon de 150km autour de ces zones. En cas de mise à disposition en période d’activité vectorielle, une stratégie combinant une vaccination centrifuge débutant dans les zones infectées et une vaccination centripète débutant en zone indemne périphérique était considérée comme optimale.
La réussite de cette vaccination dans un objectif d’éradication de la maladie était tributaire de nombreux facteurs, notamment du nombre de doses disponibles et d’animaux vaccinés mais aussi des conditions climatiques et du statut de la faune sauvage. Ainsi, la probabilité de réussite de l’éradication était jugée quasi-nulle dès la fin 2007 et l’objectif de limitation de la maladie semblait plus réaliste.
Les modalités générales de vaccination ont été précisées dans plusieurs avis et détaillées en plusieurs scénarii, dont la réalisation dépendait du nombre de doses disponibles :
– en cas de disposition suffisante, la création de zones tampons limitant l’évolution du front et la diminution de l’incidence avec une vaccination dans les zones touchées étaient préconisées ;
– en cas de disponibilité insuffisante, une vaccination ciblant certaines catégories d’animaux jugés prioritaires semblait plus intéressante ;
– en cas de disponibilité très limitée, une vaccination facultative selon le choix de l’éleveur était l’alternative proposée.
Suite à la proposition d’une vaccination facultative élaborée par la DGAl, l’AFSSA/ANSES s’était prononcée en défaveur du projet, arguant que pour être optimale, l’utilisation des doses devait être encadrée par l’État et qu’une vaccination obligatoire, immédiate et centripète de tous les ruminants domestiques, partant du front de la maladie, devait être envisagée.
Dans le cadre de l’évolution de la situation épidémiologique et de l’apparition du sérotype 1, l’AFSSA/ANSES s’était prononcée sur les zones devant être vaccinées obligatoirement contre les deux sérotypes, à savoir : la moitié méridionale du pays tout d’abord, puis selon l’objectif à définir :
– les zones non atteintes par le BTV-1 dans l’objectif d’une limitation de son extension ;
– l’ensemble du territoire pendant plusieurs années en concertation au niveau européen dans l’objectif d’éradication ;
– selon des zones à définir par une étude sur l’immunité naturelle dans l’objectif de réduction de l’incidence.
L’AFSSA/ANSES s’est par la suite prononcée en défaveur d’un passage à la vaccination facultative à deux reprises, en 2009 et 2010. En 2009, l’Agence expliquait qu’une seule année de vaccination obligatoire risquait de conduire à l’enzootie de la FCO et préconisait une vaccination généralisée contre les deux sérotypes afin d’optimiser les effets bénéfiques de la première campagne de vaccination obligatoire. En 2010, l’éradication de la maladie semblait possible au vu de la diminution du nombre de foyers, mais seulement si la couverture vaccinale restait élevée, ce qui n’était pas le cas pour les ovins. L’Agence préconisait le maintien d’une vaccination généralisée particulièrement soutenue dans les zones où étaient apparus les foyers l’année précédente.
D’autres considérations techniques relatives au vaccin ont été abordées comme l’intérêt et l’efficacité de la vaccination des caprins, les modalités de protection des veaux nés de mères vaccinées ou encore l’incidence d’un changement de vaccin d’une campagne à l’autre.
Les avis relatifs aux restrictions des mouvements d’animaux ont essentiellement porté sur les dérogations de sortie qui pouvaient être envisagées selon la situation épidémiologique, pour certaines catégories d’animaux, ainsi que les contrôles à effectuer sur ces animaux. De nombreux avis ont par ailleurs évoqué les conditions de zonage et les modifications qui pouvaient y être apportées en fonction de l’évolution du contexte. Les adaptations de ces règles suite à la mise en place de la vaccination ont aussi été soulevées.
L’efficacité de la désinsectisation a été évoquée à plusieurs reprises. L’absence de médicaments actifs contre les Culicoides disposant d’AMM16 et d’études sur l’efficacité des insecticides usuels sur les Culicoides a été soulignée. L’intérêt de l’obligation systématique de la désinsectisation, dans un contexte de vaccination généralisée, a été décrit comme non pertinent. Quelques exceptions où la désinsectisation peut être utile ont été présentées.
Les mesures générales de surveillance ont porté sur les objectifs et l’intérêt du protocole de surveillance FCO défini par l’Union européenne, ainsi que sur les programmes de surveillance clinique, sérologique et entomologique. L’importance de la surveillance clinique a été soulignée à plusieurs reprises, en insistant sur la nécessité de former les vétérinaires sanitaires et de sensibiliser les éleveurs. La mise en place d’un protocole de surveillance sérologique en zone réglementée et en zone indemne, conformément à la réglementation européenne, avait une sensibilité limitée, notamment lorsque le nombre de foyers diminuait, ce qui renforçait l’intérêt d’une surveillance passive performante par les vétérinaires. L’objectif de cette surveillance, défini par la DGAl, qui était de savoir où et quand les différents sérotypes de FCO circulaient en France continentale, ne semblait pas pouvoir être atteint avec ce protocole, du fait de la sous-réalisation des prélèvements et d’une exploitation insuffisante des résultats. Un objectif qualitatif de détection de la circulation virale était alors proposé par l’AFSSA/ANSES et paraissait plus pertinent que l’objectif quantitatif évoqué précédemment. La surveillance entomologique a été limitée à la détermination des périodes d’activité vectorielle.
L’évolution des procédures de dépistage individuel suite à la mise en place de la vaccination et l’impossibilité d’utiliser le dépistage sérologique ELISA a été évoquée. Par la suite, l’interprétation des résultats des analyses virologiques RT-PCR, notamment dans l’optique de la datation de l’infection a été développée.
Les modalités de définition de la période d’inactivité vectorielle ont été établies par des données climatiques et les résultats obtenus dans les piégeages mis en place sur le territoire.
Des définitions précises ont été apportées quant aux statuts des animaux, en vue de simplifier les modalités de déclaration des foyers. Ainsi, les « cas de FCO » ont été différenciés des « animaux infectés de FCO » par la présence de symptômes ou de lésions évoquant la maladie.
À de nombreuses reprises l’AFSSA/ANSES a été saisie sur les perspectives envisageables sur l’évolution de la maladie. Même si la situation était décrite comme plutôt favorable en France en 2006, trois scénarii étaient envisagés : une réémergence avortée, une persistance ou une extension de la maladie. En 2007, la mise en évidence expérimentale d’une circulation virale en Allemagne n’a pas été perçue comme indiquant un sur-risque significatif à la reprise de la circulation en France. Mais suite à la reprise précoce et plurifocale de la circulation, les scénarii les plus pessimistes ont été mis en avant. En 2008, le risque d’extension de la maladie vers le Sud-Ouest en l’absence de vaccination était très élevé pour l’Agence.
Des points sur la situation épidémiologique présentaient régulièrement l’évolution du nombre de foyers en France, mais aussi en Europe.
ORDRES DE SERVICE DE LA DGAL ET RÉGLEMENTATION
THÈMES ABORDÉS
Au cours de la même période (septembre 2006-décembre 2010), un nombre très important d’ordres de service et de textes réglementaires relatifs à la fièvre catarrhale ovine ont été publiés. Leur collecte s’est faite à l’aide du site Galatée qui répertorie tous les ordres de service et tous les textes réglementaires produits par la DGAl, ainsi que les textes réglementaires européens. Le mot clé « catarrhale » a été utilisé dans le moteur de recherche proposé par le site et a donné lieu à 970 occurrences : 703 étaient des ordres de service et 267 des textes réglementaires.
Les 196 textes réglementaires français (arrêtés ministériels) portaient principalement sur les mesures techniques et financières de police sanitaire, tout comme les 71 textes européens (décisions, règlements et directives).
Les thèmes des ordres de service (notes de service et notes d’information) sont présentés dans le tableau 3.
Tableau 3 : Thèmes abordés dans les ordres de service de la DGAl relatifs à la FCO entre septembre 2006 et décembre 2010
On voit que la thématique qui a le plus mobilisé l’Administration dès 2006 a été celle de la lutte contre la maladie, notamment concernant les mouvements d’animaux qui représentent 53 % des ordres de service publiés. Les éléments qui l’expliquent sont l’évolution des modalités d’échange et d’exportation suite à l’apparition de la maladie sur le territoire français, ainsi que les modifications des zones réglementées.
La deuxième thématique la plus génératrice d’ordres de service a été la vaccination, à partir de 2008. Les modalités logistiques de mise en œuvre de cette vaccination, avec les dates de mise à disposition des doses, ont été très présentes ; tout comme les notes stratégiques expliquant les zones où la vaccination devait être réalisée en priorité pour la première campagne.
La surveillance, avec les modalités logistiques des enquêtes sérologiques orchestrées par les services déconcentrés, complète le trio des thématiques qui ont fait l’objet d’importantes publications administratives. Le financement des mesures de surveillance a aussi pris une place importante, tout comme l’implication des laboratoires ou encore les modalités de diagnostic de la maladie.
Le financement des mesures était très largement présent dans les ordres de service publiés : qu’il s’agisse de la vaccination, de la surveillance ou plus largement de la répartition des budgets opérationnels de programme engagés (programme 206 : sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation) ou encore, de la conditionnalité des aides. Plus de 11 % des ordres de service y ont fait référence, ce qui montre l’importance de la prise en compte des facteurs économiques dans la gestion de cette crise.
Le traitement, par l’Administration, de la crise, suit la chronologie de cette dernière, avec une importance prononcée des mesures concernant les mouvements d’animaux et la surveillance dès 2006, puis une diminution de la part des ordres de service consacrés aux mouvements d’animaux suite au développement du traitement de la problématique de la vaccination, à partir de 2008. Le traitement des thématiques budgétaires et de surveillance ont perduré tout au long de la crise.
La partie suivante s’intéresse aux principales décisions de l’Administration en lien avec les avis rendus par l’AFSSA/ANSES.
ORDRES DE SERVICE ET TEXTES RÉGLEMENTAIRES LIÉS À DES AVIS DE L’AFSSA/ANSES
Les avis de l’AFSSA/ANSES ont parfois conduit à la publication de textes réglementaires ou d’ordres de service. Un comparatif a été effectué par l’AFSSA/ANSES entre les avis publiés dans le cadre de l’épizootie d’influenza aviaire et ceux rendus dans le cadre de l’épizootie de fièvre catarrhale ovine. Le résultat de ce comparatif est présenté dans la figure 17.
Figure 17 : Comparaison du suivi des recommandations des avis concernant l’influenza aviaire et la
fièvre catarrhale ovine
Source : AFSSA/ANSES
Il apparaît clairement que ces deux thématiques ont été suivies de façon très différente par les Ministères de tutelle. En effet, quand pour l’influenza aviaire, près de 90% des recommandations ont été totalement suivies et plus de 10% suivies pour la plupart, près de 50% des recommandations concernant la FCO n’ont pas été suivies et seulement l’ont été 40% en totalité.
L’annexe 2 présente les textes réglementaires et les ordres de service publiés suite aux recommandations données dans les avis de l’AFSSA/ANSES. On constate que pour la moitié des avis relatifs au BTV-8 publiés entre septembre 2006 et décembre 2010, il n’a pas été possible d’identifier une traduction réglementaire. Ceci peut s’expliquer par les thématiques de certains avis, pour lesquels, aucune réponse n’était attendue, comme par exemple les avis relatifs à la situation épidémiologique, aux perspectives d’évolution ou à l’évolution des connaissances. Pour les derniers avis publiés, le délai de traduction réglementaire peut expliquer une absence temporaire de textes réglementaires relatifs à ces avis.
Pour les avis ayant fait l’objet d’un suivi par l’Administration, les recommandations les plus marquantes qui n’ont pas été suivies sont celles relatives aux zones à vacciner en priorité lors de la première campagne de vaccination, ainsi que celles relatives aux modalités de vaccination, notamment son caractère obligatoire ou facultatif.
Les objectifs envisageables pour la première campagne de vaccination ont été définis par l’AFSSA/ANSES en décembre 2007 (AFSSA 2007i). Quatre principaux objectifs ont été dégagés : la limitation de l’extension de la maladie impliquant une vaccination obligatoire centripète à partir du front de la maladie ; la limitation de l’incidence de la maladie impliquant une vaccination obligatoire au sein des zones fortement touchées ; la protection de certaines catégories d’animaux ; et la vaccination facultative. Cette position a été complétée par la suite, dans un avis où l’AFSSA/ANSES recommandait la mise en place d’une vaccination obligatoire centripète (AFSSA 2008a).
Cependant, l’option choisie par le Ministère et annoncée par communiqué de presse le 14 février 2008, annonçait une vaccination facultative, en priorité dans les 16 départements touchés par la FCO l’année précédente. Ces mesures ont été précisées par une note d’information (DGAL/SDSPA/O2008-8005 du 17/03/2008) qui définissait précisément la répartition des doses vaccinales.
Malgré cela, l’AFSSA/ANSES a renouvelé ses recommandations en affirmant qu’une vaccination facultative ne répondrait pas aux objectifs épidémiologiques et qu’elle serait peu efficace (AFSSA 2008b). Mais la position de l’Administration, exposée précédemment, était confirmée en avril, par l’arrêté du 4 avril 2008 fixant les mesures techniques relatives à la fièvre catarrhale ovine.
Pour la campagne de vaccination 2010-2011, l’AFSSA/ANSES avait préconisé de maintenir une vaccination généralisée, afin d’envisager l’éradication de la maladie (AFSSA 2010c).
À ce titre, sans se prononcer sur le caractère obligatoire ou facultatif, elle faisait néanmoins remarquer qu’en l’état actuel, avec une vaccination obligatoire, seuls 37% des ovins étaient effectivement vaccinés. Ainsi, l’Agence soulignait le fait que si la vaccination devenait facultative, les taux de vaccination risquaient de chuter et donc que l’objectif d’une vaccination généralisée ne pourrait être atteint.
Toutefois, la DGAl a décidé de procéder à une vaccination volontaire pour la campagne de vaccination 2010-2011. Les modalités de cette campagne de vaccination ont été définies dans un arrêté daté du 3 novembre 2010 et exposées dans la note de service DGAL/SDSPA/N2010-8296, publiée à la même date. Ce passage à une vaccination volontaire permettait à l’éleveur de procéder lui-même à la vaccination de ses animaux, exception faite de ceux destinés aux échanges.
On voit ainsi que sur des points majeurs de la gestion de la crise définissant les modalités de lutte contre la maladie, les recommandations des experts scientifiques n’ont pas été suivies. D’autres éléments semblent avoir été privilégiés à l’évaluation scientifique des risques dans la prise de décision, notamment vis-à-vis de la vaccination. Il apparaissait donc important de s’intéresser aux facteurs pouvant expliquer cette situation, ainsi qu’aux répercussions qu’il pouvait y avoir concernant le statut de l’évaluateur de risque.
ARTICLES DE LA PRESSE PROFESSIONNELLE
THÈMES ABORDÉS
Très peu ébruitée dans la presse généraliste, la crise de la FCO a été fortement relayée par les médias professionnels. Entre septembre 2006 et décembre 2010, le nombre d’articles relatifs à la fièvre catarrhale ovine publiés s’est élevé à 349 dans la Semaine vétérinaire, à 402 dans la Dépêche vétérinaire et à 399 dans la France agricole. Leur collecte s’est faite à l’aide des moteurs de recherche disponibles sur les sites Internet pour la France agricole et la Semaine vétérinaire, en entrant le mot clé « catarrhale » et par consultation de la version imprimée pour la Dépêche vétérinaire. Le choix de ces publications s’est fait par la volonté de disposer des deux principaux journaux vétérinaires et d’un journal généraliste agricole.
La répartition du nombre de publications concernant la fièvre catarrhale ovine en fonction des différents types de presse (agricole ou vétérinaire) est représentée par la figure 18.
Figure 18 : Répartition annuelle du nombre d’articles portant sur la FCO à BTV-8 entre septembre 2006 et décembre 2010
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Table des matières
Introduction
1 Épidémiologie de l’épizootie de fièvre catarrhale ovine à sérotype 8 en Europe du nord depuis 2006
1.1 Généralités sur la fièvre catarrhale ovine
1.1.1 Épidémiologie analytique
1.1.1.1 Agent pathogène
1.1.1.2 Hôte vertébré, Réceptivité, Réservoir
1.1.1.3 Vecteur et transmission
1.1.2 Aspects cliniques, lésionnels et économiques
1.1.2.1 Ovins
1.1.2.2 Bovins
1.1.2.3 Caprins
1.1.2.4 Aspects cliniques atypiques de l’épisode à sérotype 8 dans le nord de l’Europe
1.1.3 Diagnostic
1.1.4 Traitement et prophylaxie
1.2 Évolution spatio-temporelle de l’épizootie de fièvre catarrhale ovine à sérotype 8 dans le nord de l’Europe depuis 2006
1.2.1 2006 : une émergence inattendue, la France faiblement touchée
1.2.2 2007 : une Réémergence de l’épizootie qui prend de l’ampleur
1.2.3 2008 : la France très fortement touchée malgré la mise en place de la vaccination
1.2.4 2009 : une diminution majeure des cas recensés suite à la vaccination généralisée
1.2.5 2010 et 2011 : quasi disparition de la maladie en France
1.3 Stratégies de lutte et de surveillance mises en place
1.3.1 Méthodes de lutte
1.3.1.1 Les zones réglementées
1.3.1.2 Désinsectisation
1.3.1.3 Campagnes de vaccination
1.3.2 Méthodes de surveillance
1.3.2.1 Surveillance active : les enquêtes sérologiques et virologiques
1.3.2.2 Surveillance passive ou évènementielle : détection des cas clinique
1.3.2.3 Surveillance entomologique
1.3.3 autres stratégies européennes
2 Analyse des données publiées depuis 2006
2.1 Avis de l’AFSSA/ANSES
2.1.1 Thèmes abordés
2.1.2 Principaux points soulevés dans les avis de l’AFSSA/ANSES relatifs à la FCO BTV-8 entre septembre 2006 et décembre 2010
2.2 Ordres de service de la DGAl et réglementation
2.2.1 Thèmes abordés
2.2.2 Ordres de service et textes réglementaires liés à des avis de l’AFSSA/ANSES
2.3 Articles de la presse professionnelle
2.3.1 Thèmes abordés
2.3.2 Mise en évidence des thématiques les plus polémiques
2.4 Synthèse et Problématiques
3 Enquête auprès des acteurs impliqués dans la crise
3.1 Objectif et méthode
3.1.1 Objectif
3.1.2 Méthodologie de l’enquête
3.1.2.1 Élaboration de la problématique
3.1.2.2 Échantillonnage
3.1.2.3 Technique et outils pour la collecte des données
3.1.2.4 Conditions de l’entretien
3.1.2.5 Analyse des données
3.2 Résultats et discussion
3.2.1 Présentation des résultats obtenus
3.2.2 Divergences entre l’AFSSA/ANSES et la DGAl
3.2.2.1 Des difficultés rencontrées par l’évaluateur
3.2.2.2 Le choix du vaccin
3.2.2.3 Modalités de vaccination
3.2.2.4 Choix des zones à vacciner en priorité lors de la première campagne de vaccination
3.2.2.5 Statut de l’évaluateur du risque
3.2.2.6 Prise en compte des effets secondaires dans le cadre de la pharmacovigilance
3.2.2.7 Gestion et évaluation différentes dans d’autres pays
3.2.3 Divergences entre les vétérinaires, les éleveurs et l’Administration
3.2.3.1 Des difficultés face à l’arrivée d’une nouvelle maladie
3.2.3.2 Les modalités de vaccination
3.2.3.3 Des relations avec l’Administration mises à l’épreuve
3.2.3.4 Une mobilisation importante des organisations professionnelles
3.2.3.5 Une crise génératrice de tensions entre organisations professionnelles, passant de la défense des intérêts d’une profession aux attaques personnelles
3.2.3.6 Une crise comme catalyseur des tensions préexistantes
Conclusion
Bibliographie
Annexes .
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