La famille des collagènes
Le collagène, molécule de la matrice extracellulaire, comporte de grands domaines organisés en triple hélice. Il existe 28 types de collagènes dont les différences se situent dans la composition des chaînes polypeptidiques, dans leur structure tridimensionnelle et dans leur répartition dans les tissus conjonctifs (Prockop et al., 1995). Dans la plupart des collagènes, les trois chaînes polypeptidiques qui forment une hélice α sont identiques. Si les chaînes sont différentes, les collagènes sont dits hétéro-trimères.
Les 28 types de collagènes sont répartis en sept familles qui regroupent des collagènes aux comportements structuraux semblables.
Il y a par exemple les collagènes fibrillaires, ceux qui sont assemblés en réseaux mais qui ne font pas de fibrilles ou encore ceux se trouvant à la surface des fibrilles (Fibril Associated Collagen with Interupted Triplehelix FACITs). Les collagènes FACITs sont des collagènes relativement petits qui présentent des interruptions dans le domaine en triple hélice. Un exemple de ce type de collagènes est le collagène IX qui se lie de façon covalente au collagène II (Wu et al., 1992). Le collagène IV est un exemple de collagène formant un réseau. Dans les tissus, il forme un réseau entrelacé avec les membranesbasales où il a un rôle biologique important. Le réseau est formé par l’interaction entreles deux domaines non collagéniques terminaux.L’hexamère formé est stabilisé par des liaisons covalentes entre une Méthionine et une Lysine (Than et al., 2002).
Certains collagènes sont spécifiques d’un type tissulaire et d’autres sont plus ubiquitaires. Le collagène le plus abondant est le collagène fibrillaire de type I et c’est celui qui va nous intéresser par la suite.
Le collagène I
La molécule de collagène de type I
Le collagène de type I est un collagène fibrillaire. Il est le constituant majoritaire des tissus conjonctifs tels que les os, la peau, les tendons, la cornée ainsi que la paroi des vaisseaux sanguins. Deux brins α1 ont une séquence identique de 1056 acides aminés alors que le troisième brin α2 a une séquence de 1023 acides aminés. Ces trois brins sont formés dans leur partie centrale par la répétition d’une séquence de trois acides aminés Glycine-X-Y. La glycine pointe vers le centre de la triple hélice alors que les résidus d’acides aminées X et Y, plus grands, pointent vers l’extérieur de la triple hélice, comme le montre la Figure 1-2, et sont donc disponibles pour des interactions avec d’autres molécules ou avec le solvant. La proline et l’hydroxyprolinesont les plus régulièrement rencontrés (30 % des cas) en position Xet Y respectivement. On peut également remarquer la présence d’agglomérats de résidus polaires tous les 234 acides aminés ce qui correspond à une distance de 67nm dont on verra l’importance lors de l’autoassemblage des molécules de collagène en fibrilles. La séquence d’acides aminéscorrespond à la structure primaire et c’est le repliement de la chaîne en hélice gauche dont le pas vaut 8,68 nm, qui forme la structure secondaire. Le repliement est entraîné par les répulsions stériques entre les résidus de proline qui se trouvent en position X et ceux d’hydroxyproline qui sont en position Y. Entre deux résidus, la distance axiale est de 0,286 nm. Ensuite, la structure tertiaire est formée par le repliement des structures secondaires dans l’espace et la structure quaternaire par l’association de monomères (les chaînes α)entre eux. En effet, la présence de nombreuses glycines le long des chaînes α leur permet de s’associer pour former une triple hélice droite. La triple hélice a alors une longueur de 300 nm et un diamètre d’environ 1.5 nm. Des liaisons hydrogènes entre la glycine d’une chaîne et les groupements carboxyles d’une autre chaîne assurent la stabilité de la triple hélice. Long et al. et Bella et al.,1996) ont d’ailleurs noté que le remplacement d’une glycine par un autre résidu empêche la formation des triples hélices (Long et al.,1993; Bella et al.,1996) ce qui peut conduire à certaines pathologies (Mottes et al., 1998; Wenstrup et al., 2006; Olague-Marchan et al., 2000). Les extrémités de la molécule de collagène I, appelées télopeptides, sont des régions non-hélicoïdales.
De la molécule de procollagène au collagène
In vivo, le collagène I est synthétisé par les cellules. La synthèse démarre par celle des chaînes α au niveau des ribosomes du réticulum endoplasmique rugueux dans lequel ont lieu des modifications post traductionnelles. L’hydroxylation de certains résidus de proline et de lysine, la glycolysation de certaines hydroxylysines et la formation de ponts disulfures entre les propeptides C-terminaux (qui provoque l’enroulement des trois chaînes dans la direction N-terminale) donnent une molécule appelée procollagène. Le procollagène est soluble en condition physiologique grâce aux propeptides non hélicoïdaux et chargés. A ce niveau, les molécules de procollagène se trouvent dans des vésicules dans l’appareil de Golgi avant d’être secrétées en dehors de la cellule.
A la fin du processus, un clivage enzymatique des propeptides N et C terminaux, domaines globulaires de la molécule a lieu, entrainant la formation des fibrilles.
Des fibrilles aux structures hiérarchiques
La perte des domaines globulaires entraîne une forte baisse de la solubilité en conditions physiologiques. Le clivage des extrémités expose les séquences télopeptidiques qui sont de petits domaines non hélicoïdaux. Ces télopeptides contiennent les sites de liaison pour la fibrillogenèse (Prockop & Fertala, 1998). Les fibrilles de collagène sont formées spontanément par les triples hélices de collagène, solubles à pH acide, mais non solubles en milieu physiologique lors de la fibrillogenèse. In vivo les fibrilles sont souvent formées par différents types de collagènes et sont alors appelées hétérotypiques. Dans l’os par exemple, on trouve des fibrilles formées par du collagène I et du collagène V. Autre exemple, la peau est constituée de molécules de type I, III et V.
|
Table des matières
Introduction générale
1 Introduction – Etat de l’art
1.1 La famille des collagènes
1.1.1 Le collagène I
1.1.2 Des fibrilles aux structures hiérarchiques
1.1.3 La fibrillogenèse in vitro
1.1.4 Les phases cristal-liquides et le collagène
1.2 Ingénierie tissulaire de la cornée
1.2.1 Anatomie et physiologie de la cornée
1.2.2 Développement des différentes couches de la cornée
1.2.3 Innervation de la cornée
1.2.4 Réactions de la cornée aux blessures
1.3 Etat de l’art : cornée artificielle
1.3.1 Cornées artificielles déjà utilisées ou en essai clinique
1.3.2 Matériaux basés sur l’auto assemblage par les cellules
1.3.3 Utilisation de cellules souches
1.3.4 Biomatériaux : matrice avec cellules
1.3.5 Matériaux biomimétiques comme supports pour la régénération
1.4 Conclusion
2 Matériaux et méthodes
2.1 Obtention des solutions de collagène
2.1.1 Extraction du collagène
2.1.2 Dosage de la solution de collagène
2.1.3 Pureté de la solution de collagène
2.1.4 Ajustement de la condition physico-chimique
2.2 Concentration du collagène
2.2.1 Pour la fabrication des matrices denses de collagène fibrillé
2.2.2 Pour l’étude des phases cristal-liquides en lumière polarisée
2.3 Techniques de caractérisation de la microstructure
2.3.1 Techniques classiques utilisant les rayonnements photoniques
2.3.2 Génération de seconde harmonique
2.3.3 Techniques utilisant le rayonnement électronique
2.3.4 Mesures mécaniques
2.4 Techniques de culture cellulaire
2.4.1 Cornées provenant des donneurs
2.4.2 Membranes amniotiques
2.4.3 Culture cellulaire
2.4.4 Coupes histologiques et colorations
2.5 Conclusion
3 Caractérisation des phases cristal-liquides
3.1 Protocole expérimental
3.1.1 Conditions analysées
3.1.2 Préparation des échantillons
3.2 Analyse par lumière polarisée
3.2.1 Imagerie en lumière polarisée
3.2.2 Discussion
3.3 Analyse par SHG
3.3.1 Introduction
3.3.2 Calculs analytiques et simulations numériques
3.3.3 Résultats numériques et expérimentaux
3.3.3.1 Calculs des images P-SHG pour une structure en contreplaqué
3.3.4 Discussion
3.4 Analyse par microscopie électronique
3.4.1 Introduction
3.4.2 Cryo-SEM FEG
3.4.3 Microscopie électronique à transmission
3.5 Caractérisation rhéologique des solutions organisées
3.5.1 Conditions donnant une organisation cholestérique
3.5.2 Condition 23 : solution organisée en contreplaqué
3.5.3 Comparaison des différentes conditions
3.6 Conclusions
Conclusion générale