Aspects cliniques et évolution de la maladie de Duchenne
La dystrophie musculaire de Duchenne (DMD) est la dystrophie héréditaire la plus sévère, elle a une transmission récessive liée au chromosome X ; ce qui implique qu’elle touche majoritairement les garçons et que les mères de ces enfants atteints sont porteuses du gène de la maladie.
L’incidence de la maladie est estimée à 1 naissance masculine sur 3500. Cliniquement, la maladie se caractérise par un affaiblissement de la ceinture pelvienne qui se traduit par une diminution progressive de la force musculaire débutant vers l’âge de 2 à 3 ans. À ce stade de l’enfance, les symptômes sont peu apparents, mais les signes cliniques sont présents. Progressivement, le jeune enfant développera une démarche pathologique et il est alors possible d’observer des pseudo-hypertrophies musculaires. Au stade juvénile, le patient aura recours au fauteuil roulant pour se déplacer, ses muscles étant incapables de fournir le support et la force pour le soutenir. Vers la fin de l’adolescence, l’apparition de problèmes respiratoires vont nécessiter l’utilisation d’un respirateur. L’espérance de vie des patients oscille entre 20 et 30 ans et la cause principale de décès est l’insuffisance au niveau respiratoire et cardiaque .La destruction progressive et diffuse des fibres musculaires entraîne le largage de marqueurs musculaires comme la créatine phosphokinase et la troponine dans le sang périphérique.
Génétique de la dystrophie de Duchenne
Le gène de la dystrophie est situé sur le bras court du chromosome X. Il est fait de 2.6 millions de paires de bases et de 79 exons, représentant ainsi l’un des gènes les plus longs connus. Seul 0,5% des paires de bases, qui, combinées les unes avec les autres, contiennent la séquence codante pour la dystrophine (Bieber and Hoffman 1990). L’ARNm pleine longueur transcrit à partir du site d’initiation de la transcription Dp427 (M) fait plus de 14 kb et permet la synthèse de l’isoforme musculaire pleine longueur de la protéine dystrophine.Cette isoforme est exprimée en prédominance dans les muscles squelettiques et cardiaque, dans le cerveau ainsi que dans les cellules de Purkinje localisées dans le cervelet. Des isoformes plus courtes sont présentes dans la rétine et les cellules de Schwann (Coffey AJ 1992). Environ 60% des mutations dans le gène de la dystrophine sont de grandes insertions ou délétions génétiques tandis que 40 % sont des mutations ponctuelles. La plupart de ces mutations conduisent à un changement du cadre de lecture qui introduit un ou plusieurs codons « stop » prématurés, résultant en une absence de protéine fonctionnelle . Dans environ 1/3 des cas, il n’y a pas d’antécédents familiaux de dystrophie et l’anomalie génétique n’est pas retrouvée chez la mère, on peut envisager la possibilité d’une néomutation survenue dans la gamétogénèse chez la mère.
La souris mdx et les modèles animaux de la DMD
La souris mdx (Muscular Dystrophy X-linked) est le modèle expérimental le plus utilisé actuellement pour l’étude de la DMD. En 1984 cette souris a été décrite, elle présente une élévation de créatine kinase plasmatique, ainsi que des lésions spécifiques de la DMD (Bulfield et al. 1984) ; ce qui fait de cette souris un candidat idéal pour l’étude de la maladie. Ce n’est que plus tard que l’on a démontré que cette souris n’exprime pas de dystrophine comme les patients DMD.
Le muscle de la souris mdx, comme les malades Duchenne, possède des propriétés contractiles altérées.
En effet, les études physiologiques effectuées sur plusieurs muscles de la souris mdx montrent une diminution de la force musculaire et une augmentation de la fragilité des muscles mdx par rapport aux muscles d’une souris normale. Ces anomalies physiologiques sont liées à l’absence de la dystrophine dans les muscles des souris mdx (Brussee, Tardif, and Tremblay 1997). Cependant, même si la dystrophine est absente, les souris mdx ne présentent pas d’anomalies dégénératives aussi graves que les malades Duchenne, on ne voit effectivement pas d’atteintes des muscles respiratoires ni de cardiomyopathies, et encore moins l’infiltration des muscles par le tissu adipeux et fibreux comme on peut voir chez les malades atteints de la dystrophie de Duchenne.
Régénération musculaire
La fibre musculaire se régénère suite à des bris. Lorsqu’il est soumis à différents stress (mécanique, ischémique…), le muscle squelettique subit des dommages et les cellules musculaires entrent dans différents cycles de dégénération et de régénération. Le muscle squelettique se régénère de façon autonome et identique quel que soit le type de traumatisme en cause (Allbrook 1981). La régénération musculaire est un processus très efficace qui se fait tout le temps en deux phases (Grounds 1991). Une phase non-inflammatoire qui survient après la rupture de la membrane de la fibre musculaire et une phase de dégénérescence inflammatoire, qui se caractérise par l’envahissement du muscle par des cellules inflammatoires comme les neutrophiles qui sont les premiers à arriver suivis des macrophages. Le rôle de ces cellules est de phagocyter les débris cellulaires et de produire des facteurs chémoattractants nécessaires pour attirer les cellules satellites qui vont réparer la fibre musculaire (Bischoff and Heintz 1994). La position du noyau dans la fibre musculaire indique si celle-ci a été rénovée récemment. En effet, la centronucléation indique qu’une fibre musculaire est en pleine régénération et le retour du noyau vers la périphérie constitue la dernière étape de cette phase chez l’humain. Chez les patients atteints de la maladie de Duchenne, on peut voir beaucoup de fibres musculaires avec des noyaux centraux, ce qui témoigne du processus intense de régénération secondaire à l’augmentation de la fragilité musculaire.
Thérapie génique sans transfert de gène : Le saut d’exon
Cette technique consiste à synthétiser des oligonucléotides antisens de façon à être chimiquement protégés contre la dégradation enzymatique et être complémentaires à une séquence particulière.
Ainsi, cet oligonucléotide se lie sur la séquence cible de l’ARN pré-messager, empêchant l’épissage d’un ou plusieurs exons. La protéine produite est tronquée, mais fonctionnelle. Les premiers essais cliniques faits avec deux types d’oligonucléotides antisens, le 2′-O-méthyl-phosphorothioate (2′OMe) et le morpholino phosphorodiamidate oligonucléotide (PMO), ont donné des résultats variables, allant jusqu’à 55 % de fibres positives pour la dystrophine chez un patient .
La compagnie GSK (GlaxoSmithKline) a abandonné un essai clinique en phase III, qui avait pourtant suscité beaucoup d’espoir pour cette stratégie. L’objectif fixé (améliorer la marche) était trop ambitieux et n’a pas été atteint. Il s’en suivi l’abandon de cet essai clinique. Malgré tout il se poursuit des essais cliniques sur cette stratégie mais en utilisant des oligonucléotides modifiés chimiquement différemment.
Afin d’obtenir une amélioration clinique significative, le taux de réexpression de la dystrophine doit être augmenté, d’autre part, le taux d’oligonucléotides antisens atteignant les cellules devrait lui aussi être augmenté impliquant un éventuel risque de toxicité, rénale entre autre, face à une thérapie qui devrait être administrée à long terme.
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Table des matières
Introduction
1. La dystrophie musculaire de Duchenne
1.1. Historique
1.2. Aspects cliniques et évolution de la maladie de Duchenne
1.3. Génétique de la dystrophie de Duchenne
1.4. La souris mdx et les modèles animaux de la DMD
2. Le muscle squelettique
2.1. Structure du muscle squelettique
2.2. Régénération musculaire
2.3. Les cellules satellites
3. Traitements et stratégies thérapeutiques
3.1. Thérapie pharmacologique
3.2. Thérapie génique sans transfert de gène : Le saut d’exon
3.3. Thérapie génique et livraison
3.3.1 Les vecteurs viraux
3.3.2 Les vecteurs non viraux
3.4. Thérapie cellulaire et greffe de myoblastes
3.5. Édition du génome
3.5.1 Méganucléase
3.5.2 Nucléases à doigt de Zinc (Zinc Finger Nucleases (ZFN))
3.5.3 Nucléases effectrices de type activateur de transcription (Transcription activator-like effector nucleases (TALENs))
3.5.4 Courtes répétitions palindromiques regroupées et régulièrement espacées (Clustered Regularly Interspaced Palindromic Repeats, CRISPR) cf Chapitre 4
4. Le système CRISPR/Cas9 et ses dérivés
4.1. Définition et mécanisme
4.2. Mutation de la Cas9
4.3. Modulation de l’expression des gènes
4.3.1 Répression de gène
4.3.2 Stimulation de gène
4.4. Les effets Hors cibles
5. La laminine
5.1. La lame basale
5.2. Les laminines
5.3. La laminine 111
5.3.1 Structure de la laminine 111
5.3.2 Gène LAMA1
5.3.3 Expression de la chaine a1 de la laminine
5.3.4 Rôles biologiques de la LM111
5.4. Hypothèse et objectifs
6 Increased expression of laminin 1 chain by dCas9-VP160, a potential treatment of Duchenne Muscular Dystrophy
6.1. Introduction
6.2. Materials and Methods
6.2.1 Expression vector
6.2.2 Construction and oligonucleotides synthesis
6.2.3 Phosphorylation, formation of double-stranded oligonucleotides and ligation
6.2.4 Transformation of competent bacteria
6.2.5 Transfection of Px330 plasmids in C2C12 myoblasts
6.2.6 Transfection of plasmid PAC154 VP160 in murine C2C12 myoblasts and extraction of cells for mRNA and protein analysis
6.2.7 Surveyor enzyme test on PCR products
6.2.8 Sequencing
6.2.9 Plasmid electroporation in Rag/mdx mouse muscles
6.2.10 RT PCR
6.2.11 Immunocytochemistry on C2C12 transfected or not with puro pAC154-dual-dCas9VP160-sgExpression
6.2.12 Detection of LAMA1 by immunohistochemistry
6.2.13 Western Blot
6.3. Results
6.3.1 Testing of gRNAs targeting LAMA1 promoter
6.3.2 gRNAs in combination with dSpCas9-VP160-2A-PURO increased expression of the LAMA1 mRNA
6.3.3 Combinations of 2 or 3 gRNAs and dCas9-VP160 further increased the expression of the LAMA1 mRNA
6.3.4 Combinations of 2gRNAs and dCas9-P300 further increased the expression of the LAMA1 mRNA
6.3.5 Detection of LAMA1 protein by immunocytochemistry
6.3.6 Detection of LAMA1 protein by Western blot
6.3.7 Increase of LAMA1 expression in rag/mdx muscles
6.4. Discussion and conclusion
6.5. Perspectives
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