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Changement global, changement climatique et variabilité climatique
Le changement global désigne l’ensemble des changements du système Terre ayant des conséquences à l’échelle globale. Il intègre à la fois le changement climatique, les changements d’occupation et d’utilisation du sol, les changements anthropiques ayant des conséquences à l’échelle planétaire (Steffen et al., 2001).
La dynamique du système Terre résulte de l’interaction entre des processus physiques, biologiques, chimiques et humains. Le système climatique dépend de processus impliquant les océans, les terres émergées (sols et végétation), la glace et l’atmosphère. De nombreux changements intervenant dans le fonctionnement du système Terre impliquent des changements climatiques, ce qui explique la forte confusion qui est généralement faite entre changement global et changement climatique. Le réchauffement climatique qui est devenu une préoccupation actuelle est à la fois une cause et une conséquence du changement global (Ojima et al., 2005). Ainsi, le changement global ne doit pas être confondu avec le changement climatique, ce dernier étant restreint à l’étude du climat. Le changement climatique exprime, selon le GIEC, « une variation statistiquement significative de l’état moyen du climat ou de sa variabilité, persistant sur une période prolongée de plus d’une décennie » (Steffen et al., 2001).
La variabilité climatique fait, quant à elle, référence « aux variations de l’état moyen et d’autres variables statistiques (écarts-types, apparition d’extrêmes…) du climat à toutes les échelles temporelles et spatiales autres que les phénomènes météorologiques particuliers » (Steffen et al., 2001). Les échelles spatiales et temporelles de la variabilité climatique sont très diverses, de la saison à plusieurs millions d’années, de l’échelle globale à l’échelle locale. La variabilité climatique est, comme l’occupation et l’utilisation du sol, déterminée par des facteurs naturels ou des forçages dépendant des activités anthropiques.
Les facteurs et impacts des changements d’occupation et d’utilisation du sol
L’analyse du suivi de l’occupation et de l’utilisation du sol permet d’identifier les facteurs qui les expliquent et de déterminer les impacts de ces changements, notamment sur le plan environnemental.
Les facteurs de changement d’occupation et d’utilisation du sol
Les changements d’occupation et d’utilisation du sol sont le fruit de processus anthropiques et de processus naturels qui sont successivement présentés ci-après.
Les facteurs anthropiques des changements d’occupation et d’utilisation du sol
L’Homme aménage, exploite la majeure partie des terres émergées. L’occupation et l’utilisation du sol dépendent donc fortement des décisions humaines. L’Homme prend des décisions s’appliquant à différentes échelles, du global au local. Les facteurs humains de changement peuvent être directs, l’Homme modifiant directement l’occupation et l’utilisation du sol, ou indirectes, les causes du changement s’inscrivant alors dans un contexte plus large qui mettent en jeu des processus complexes dépendant du système social (Geist et al., 2002).
Les principaux facteurs directs de changements que l’on trouve à l’échelle globale émanant des activités humaines sont l’intensification de l’agriculture, la déforestation, et l’urbanisation (Lambin et al., 2006).
Les facteurs sous-jacents de changement d’occupation et d’utilisation du sol, peuvent être scindés en cinq catégories répertoriées dans le tableau 1-1 (Geist et al., 2002; Geist et al., 2004; Lambin et al., 2001).
Parmi les facteurs économiques, le cours sur les marchés des matières produites, les taxes, le prix des transports, le prix des différents investissements nécessaires à la production, la facilité d’accès au crédit contribuent à des changements d’occupation et d’utilisation du sol.
Les facteurs économiques sont liés aux facteurs technologiques du fait que la difficulté d’accès à certaines technologies augmente leur coût. D’autre part, l’accès à la technologie contribue à diminuer les coûts de production et par voie de conséquence au développement de certaines régions. Ainsi, l’accès à la technologie permet une intensification de l’agriculture, une baisse des coûts de production, une augmentation des profits et contribue donc à la spécialisation de certaines régions agricoles.
Les facteurs institutionnels et politiques sont nombreux et dépendent directement des décisions politiques, juridiques, économiques et de la structure des institutions. Parmi ces facteurs, on distingue notamment le droit de propriété, les politiques environnementales, la gestion des ressources naturelles, et les réseaux sociaux. De l’échelle locale à l’échelle globale, le contrôle institutionnel sur l’occupation et l’utilisation du sol augmente et le nombre d’institutions ainsi que le nombre d’interrelations existants entre elles sont démultipliées.
Les facteurs culturels et sociopolitiques au rang desquels la mémoire collective, l’histoire personnelle, les comportements, les valeurs, les croyances et la perception individuelle, l’accès à la culture, à l’information, et les liens sociaux ont une large influence sur la manière dont l’occupation et l’utilisation du sol est modelée.
Les facteurs démographiques, soient l’augmentation ou la diminution de la population, sa distribution spatiale, sa densité ont une large influence sur l’occupation et l’utilisation du sol. Le facteur démographique est entendu au sens large et s’inscrit de l’échelle locale avec la structure des ménages jusqu’à l’échelle globale, à travers la répartition de population à la surface de la terre. Les facteurs démographiques jouent notamment un rôle important dans l’urbanisation. Ils expliquent également la répartition des zones de production à l’échelle globale.
Les facteurs naturels des changements d’occupation et d’utilisation du sol
La variabilité climatique apparaît comme l’un des principaux facteurs naturels de changement d’occupation et d’utilisation du sol. Le climat agit sur la répartition de l’occupation du sol à plusieurs échelles temporelles, de plusieurs millions d’années à une échelle saisonnière. La répartition des végétaux à la surface de la terre ainsi que des sols dépend donc en grande partie de la variabilité climatique, à des échelles temporelles très diverses (Huntley et al., 1988; Wright et al., 1994).
A court terme, la variabilité climatique influence le développement de la végétation en fonction des saisons, de l’évolution des températures et des précipitations, de l’insolation. Les sécheresses, le gel peuvent avoir un impact direct à court terme sur l’occupation du sol et perturber le cycle phénologique des végétaux (Dickin et al., 2008; Ji et al., 2003; Kueppers et al., 2008; Lioubimtseva et al., 2005).
A long terme, la répartition spatiale de la végétation dépend du climat, de sa variabilité et plus particulièrement des changements climatiques (Colhoun et al., 1999; Prentice et al., 1991).
Un changement d’occupation et d’utilisation du sol ne dépend pas seulement d’un facteur mais est généralement lié à un ensemble de facteurs. La variabilité climatique a une influence sur les décisions humaines et entraîne des processus complexes menant à des changements d’occupation et d’utilisation du sol. Un changement d’occupation et d’utilisation du sol qui est déclenché par l’Homme peut être renforcé ou compensé par des facteurs naturels. Un changement ne dépend donc pas exclusivement d’un seul facteur mais d’un ensemble de facteurs dont il convient de déterminer le poids respectif dans le changement produit.
Les impacts environnementaux des changements d’occupation et d’utilisation du sol
Les changements d’occupation et d’utilisation ont un impact à la fois sur l’environnement et sur le climat. Ils contribuent aux variations de la biodiversité et au changement climatique global de différentes manières : à travers une modification du bilan radiatif, du cycle de l’eau, du cycle du carbone. Ces différents éléments déterminent le climat régional et l’évolution des climats régionaux expliquent pour partie les changements observés à l’échelle globale (Feddema et al., 2005; Pielke, 2005).
La biodiversité
Les changements d’occupation et d’utilisation du sol, notamment les conversions, ont un impact notable sur la biodiversité et les ressources naturelles (Sala et al., 2000). Ces changements affectent à la fois la faune et la flore. Les espèces menacées d’extinction sont de plus en plus nombreuses et ce principalement à cause des changements d’occupation et d’utilisation du sol d’origine anthropique (Foley et al., 2005). On estime que le pourcentage d’espèces en voie de disparition augmente particulièrement depuis les années 1960, leur taux d’extinction étant estimé entre 100 à 1000 fois supérieur au taux d’extinction naturel (May et al., 1995; Shaw, 2005). En 2004, entre 12 et 52 % des espèces étaient menacées d’extinction : 12 % des oiseaux, 23 % des mammifères, 35 % des amphibiens, 25 % des conifères et 52 % des cycadophytes (IUCN, 2004). Les actions de l’Homme sur l’écosystème et l’occupation et l’utilisation du sol ont pour conséquence de fragmenter spatialement les espèces animales et végétales et favoriser l’invasion d’espèces exotiques (Hanski, 2005).
Les écosystèmes dont l’évolution est préoccupante sont, pour l’essentiel, les forêts qui ont une diversité faunistique et floristique très importante et qui sont de plus en plus destinées à la sylviculture et affectées par la déforestation (FAO, 2001), et les zones agricoles subissant pour leur part une forte intensification (Bignal et al., 1996; Tscharntke et al., 2005).
Le bilan radiatif
Le bilan radiatif des surfaces terrestres dépend en grande partie de l’occupation et de l’utilisation du sol qui est déterminée pour partie par l’Homme (Forster et al., 2007). Le soleil est la principale source d’énergie et donc de rayonnement sur terre. Avant d’arriver sur les surfaces terrestres, le rayonnement est modifié par l’atmosphère. La part du flux énergétique arrivant aux surfaces terrestres dépend de la composition de l’atmosphère, laquelle varie en fonction des activités humaines ou de phénomènes naturels comme des éruptions volcaniques par exemple. L’énergie arrivant à la surface des terres dépend de la composition de l’atmosphère soit de la vapeur d’eau, des gaz à effet de serre. L’occupation et l’utilisation du sol influent sur la part du rayonnement réfléchi (l’albédo), la part du rayonnement absorbé et transmis par les surfaces terrestres (Davin et al., 2007; Matthews et al., 2003). Certains types d’occupation et d’utilisation du sol sont favorables à l’accumulation de chaleur et absorbent le rayonnement électromagnétique pour le transformer en chaleur, tandis que d’autres ont tendance à réfléchir le rayonnement et absorber une faible part de l’énergie reçue. Ainsi, la terre absorbe approximativement la moitié du rayonnement électromagnétique arrivant à sa surface (Figure 1-4)(Kiehl et al., 1997; Le Treut et al., 2007). Si la neige et la glace ont un albédo compris entre 60 et 85 %, les océans absorbent en grande partie le rayonnement et réflechissent 5 à 10 % du rayonnement reçu. L’albédo des surfaces agricoles est plus important que celui des forêts, ce qui influence le bilan énergétique de manière négative (Myhre et al., 2005). Ainsi, le climat de surface dépend du bilan énergétique qui lui-même dépend de l’occupation et de l’utilisation du sol (Denman et al., 2007).
Figure 1-4 – Estimation du bilan énergétique annuel à l’échelle globale. Source : Le Treut et al., 2007, d’après Kiehl et al., 1997
Le cycle de l’eau
Le cycle de l’eau dépend également de l’occupation et de l’utilisation du sol , qui a un impact sur un ensemble de processus : elles modifient l’évaporation, l’évapotranspiration, les écoulements de surface, l’humidité du sol, la recharge des nappes phréatiques (Rodriguez-Iturbe, 2000; Zhang et al., 2006). L’un des éléments clé contribuant à modifier le bilan de l’eau est la végétation (Cosandey, 1984; Laio et al., 2001).
L’occupation et l’utilisation du sol déterminent la quantité d’eau restituée à l’atmosphère. La végétation constitue un élément déterminant des échanges d’eau entre la terre et l’atmosphère, notamment via l’évapotranspiration. L’évapotranspiration est la somme de l’évaporation provenant du sol et de l’eau transpirée par les végétaux. On distingue l’évapotranspiration potentielle de l’évapotranspiration réelle. L’évapotranspiration potentielle (ETP) correspond d’après Thornthwaite (1948) à « l’évaporation d’un couvert végétal dense, en état de vie active et dont les besoins sont aisément satisfaits » (Thornthwaite, 1948). La mesure de l’ETP exprime donc la quantité d’eau nécessaire au développement optimal des végétaux. Toutefois, les besoins en eau des plantes ne sont pas toujours aisément satisfaits. On utilise donc la mesure de l’évapotranspiration réelle qui est alors définie comme la quantité d’eau réellement transpirée par la plante en tenant compte de son alimentation en eau. Les quantités d’eau évapotranspirées ont un impact notable sur le climat, de l’échelle locale à l’échelle globale.
De même, les écoulements de surface s’ils sont déterminés par les quantités et l’intensité de l’eau précipitée, le type de substrat, la pente, la configuration du bassin versant, sont aussi dépendants du type d’occupation et d’utilisation du sol. Ainsi, plus les couverts végétaux sont denses, plus l’écoulement de surface est ralenti. En conséquence, lorsqu’un couvert végétal dense est présent, l’eau alimente les nappes phréatiques. A contrario, un sol nu contribue à accélérer les écoulements de surface (Carroll et al., 2000; Li et al., 2007).
L’occupation et l’utilisation du sol déterminent à la fois les quantités d’eau restituées à l’atmosphère ainsi que la part de l’eau stockée sur les surfaces terrestres et restituée aux océans.
Les échanges de carbone
Si l’eau est un élément important des échanges terre-atmosphère, les échanges de carbone suscitent de plus en plus d’intérêt. Le carbone est à l’heure actuelle un des principaux gaz à effet de serre responsable du réchauffement global des températures (Hegerl et al., 2007). Suivre l’évolution de la production de CO2 à l’échelle globale est un enjeu important pour déterminer l’évolution des températures pour les années à venir. Si sa production dépend majoritairement des activités humaines, son stockage est influencé par la végétation et plus généralement par l’occupation et l’utilisation du sol. Si la végétation permet de stocker du carbone, elle en rejette également. La connaissance des types d’occupation et d’utilisation du sol est donc primordiale pour analyser et simuler les échanges de carbone à l’échelle globale (Houghton et al., 1999; Schimel, 1995). La matière organique, composée pour l’essentiel de carbone, provient pour l’essentiel des plantes et racines mortes, des déjections animales, ainsi que de la rhizodéposition, soit la matière organique que les plantes transfèrent dans le sol (Arrouays et al., 2002)
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE 1 : LE SUIVI DES CHANGEMENTS D’OCCUPATION ET D’UTILISATION DU SOL A L’ECHELLE REGIONALE AVEC DES DONNEES SATELLITAIRES A MOYENNE RESOLUTION
CHAPITRE 1.1. LE SUIVI DE L’OCCUPATION ET DE L’UTILISATION DU SOL A L’ECHELLE REGIONALE EN REGION AGRICOLE INTENSIVE : QUELS ENJEUX ?
1.1.1. Les changements d’occupation et d’utilisation du sol
1.1.2. Le cas des régions agricoles intensives
Synthèse
CHAPITRE 1.2. LES OUTILS ET LES METHODES DE SUIVI DE L’OCCUPATION ET DE L’UTILISATION DES SOLS
1.2.1. Les outils
1.2.2. Les méthodes de suivi adaptées aux séries temporelles moyenne résolution
Synthèse
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
PARTIE 2 : METHODES DE TRAITEMENT DES DONNEES POUR LA DETECTION DES CHANGEMENTS D’OCCUPATION ET D’UTILISATION DU SOL A L’ECHELLE REGIONALE
CHAPITRE 2.1. SITE D’ETUDE ET DONNEES
2.1.1. Le site d’étude
2.1.2. Les données
Synthèse
CHAPITRE 2.2. PRETRAITEMENT DES SERIES TEMPORELLES D’IMAGES MOYENNE RESOLUTION
2.2.1. Prétraitements atmosphériques et géométriques
2.2.2. Reconstruction des séries temporelles
2.2.3. Amélioration du contenu radiométrique et de la résolution spatiale des images
2.2.4. Extrapolation des séries temporelles de réflectance
Synthèse
CHAPITRE 2.3. TRAITEMENT DES SERIES TEMPORELLES
2.3.1. Détermination de variables biophysiques
2.3.2. L’extraction de métriques temporelles
2.3.3. Classification des données
2.3.4. Extraction de profil moyens de variables biophysiques
Synthèse
CHAPITRE 2.4. METHODE DE VALIDATION DES DONNEES TRAITEES
2.4.1. Traitement des données de télédétection haute résolution
2.4.2. Validation des séries temporelles reconstituées
2.4.3. Les classifications
2.4.4. Distinction des facteurs climatiques de changement
Synthèse
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
PARTIE 3 : LA DYNAMIQUE DE L’OCCUPATION ET DE L’UTILISATION DES SOLS A L’ECHELLE REGIONALE PAR TELEDETECTION MOYENNE RESOLUTION
CHAPITRE 3.1. LES SERIES TEMPORELLES D’IMAGES MODIS : DE LA REFLECTANCE AUX CLASSIFICATIONS D’OCCUPATION DU SOL
3.1.1. Les séries temporelles de réflectance
3.1.2. Les variables biophysiques, du terrain à l’échelle régionale
3.1.3. Les classifications de séries temporelles, de l’échelle régionale à l’échelle locale
Synthèse
CHAPITRE 3.2. LA DYNAMIQUE SPATIO-TEMPORELLE DE L’OCCUPATION ET DE L’UTILISATION DES SOLS AGRICOLES EN BRETAGNE
3.2.1. L’évolution des surfaces cultivées
3.2.2. L’évolution de la couverture hivernale des sols
Synthèse
CONCLUSION DE LA TROISIEME PARTIE
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
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