La douleur chez le nouveau-né prématuré

La douleur chez le nouveau-né prématuré

En matière de reconnaissance de la douleur chez le nouveau-né, le docteur Kanwaljeet Anand est un pionnier. Paru en 1987 dans la revue médicale New England Journal of Medicine, son article décrit la douleur et ses effets chez le prématuré et le nouveau-né tout en tenant compte des éléments anatomiques, neurochimiques, physiologiques, métaboliques, hormonaux et comportementaux (Lombart, 2013, p.11). Il insiste également sur l’importance de l’évaluation de la douleur du prématuré au moyen d’échelles adaptées, afin de mieux le soulager (Anand, 2007). Plus récemment, les recherches ont démontré que « les voies de sensibilité à la douleur sont en place à la 25e semaine » (Ecoffey & Annequin, 2011, p.7).

La douleur du nouveau-né n’est donc actuellement plus remise en question. Mais si la douleur de l’enfant est aujourd’hui une évidence scientifique et prouvée, les croyances selon lesquelles celui-ci ne la ressent pas ou la tolère mieux que les adultes persistent (Muller, Metzger, Schwetta & Walter, 2011, p.271).

Une étude a été réalisée en Finlande dans le but d’explorer les connaissances des infirmières sur l’importance de l’évaluation de la douleur du prématuré. Sur 257 infirmiers, près du quart ignorait le phénomène d’hyperalgésie3 du prématuré (Pölkki et al., 2010). Or, des études ont été menées quant à l’intensité de la douleur chez le nouveau-né, révélant qu’elle engendrerait une hyperalgésie chez le prématuré (Spicher, 2002, p.214).

En effet, le développement du système nerveux se poursuit durant le dernier trimestre de grossesse et les premiers mois de vie, période durant laquelle le seuil de la douleur est diminué et les réponses physiologiques augmentées (Ecoffey & Annequin, 2011, p.7-8), car le cerveau ne possède pas encore la maturité nécessaire pour contrôler les stimulations nociceptives (Kuttner, 2011, p.22). Fitzgerald et al. (1988) ont étudié le seuil du réflexe de retrait en flexion qui correspond de très près au seuil de la douleur. Ce seuil était d’autant plus bas que le nouveau-né était prématuré (p.47-57).

En raison de cette immaturité des mécanismes inhibiteurs de la transmission des stimuli douloureux, le nouveau-né prématuré a une période d’hypersensibilité (Spicher, 2002, p.165). De plus, il est d’avantage vulnérable, en raison de l’exposition à de nombreux agents nocicepteurs en néonatologie (Ecoffey & Annequin, 2011, p.7).

Par ailleurs, les douleurs subies par le nouveau-né prématuré durant la période néonatale ne sont pas sans conséquences à court et long terme. Ainsi, on remarque chez le prématuré une augmentation de la fréquence cardiaque, de la fréquence respiratoire et de la sudation palmaire. Il présente également une « diminution du tonus vagal, de la saturation d’oxygène ou de la pression partielle transcutanée d’oxygène », ainsi que des « modifications du système autonome (couleur cutanée, nausées, vomissements) » (Carbajal, 2007, p.2).

Les indicateurs comportementaux comprennent l’expression faciale, les pleurs, les mouvements du corps et les modifications de l’état de veille ou de sommeil et de l’appétit (Carbajal, 2007, p.2). Dans l’expression faciale douloureuse du nouveau-né prématuré se distinguent le froncement des sourcils, du sillon naso-labial et le serrement des yeux (Pediadol, 2010). Par ailleurs, une exposition répétée du nouveau-né prématuré à des stimuli douloureux peut provoquer une modification des mécanismes de transmission de la douleur, de leur développement et de leur comportement sur le long terme (Carbajal et al., 2008). Ainsi, il peut également présenter une hyperalgésie ultérieure, s’il est soumis à des procédures douloureuses répétées (Pédiadol, 2015). Une allodynie peut également apparaître suite à une lésion tissulaire (Fitzgerald, 2014).

Il est donc important d’éviter autant que possible les stimuli douloureux, ou au moins de les soulager au mieux afin de prévenir les effets à court et long terme, délétères pour le prématuré (Périnatalité, 2013). Dans ce travail, la douleur traitée est celle induite par les soins, et plus spécifiquement, celle induite par un prélèvement sanguin.

Évaluation de la douleur chez le nouveau-né prématuré

Afin de soulager au mieux la douleur, il importe à l’infirmière d’évaluer la douleur du nouveau-né. En effet, celui-ci n’est pas capable de l’exprimer. Il est ainsi dépendant de son entourage (professionnels de santé et parents) pour repérer et évaluer sa douleur, son inconfort et ses modifications comportementales et physiologiques (Périnatalité, 2013). L’hétéroévaluation est donc la plus appropriée pour le nouveau-né prématuré. Elle consiste en une évaluation objective de la douleur s’appuyant sur les manifestations physiologiques et comportementales de l’enfant qui souffre. Elle est ainsi effectuée par une autre personne, le plus souvent par un professionnel de la santé (Pédiadol, 2009).

Il existe une quarantaine d’échelles validées pour évaluer la douleur du nouveau-né (Pédiadol, 2013). Cependant, l’échelle PIPP (Premature Infant Pain Profile) est spécifique au prématuré (Pédiadol, 2013). Cette échelle comporte deux items contextuels (âge gestationnel et état de veille & sommeil), deux items physiologiques (fréquence cardiaque et saturation d’oxygène) et trois items comportementaux (froncement des sourcils, plissement des paupières et plissement du sillon nasolabial).

Elle est également recommandée pour évaluer l’efficacité d’un traitement antalgique lors d’un soin invasif (Stevens, Johnston, Taddio, Gibbins & Yamada, 2010). Une autre échelle de la douleur adaptée au nouveau-né prématuré est le score bernois. Cette échelle d’évaluation suisse a été élaborée par des thérapeutes bernois, notamment la doctoresse en soins infirmiers, Eva Cignacco. Elle évalue la douleur au moyen de neuf items comportementaux et physiologiques: « pleurs, mimiques faciales, langage corporel, sommeil, temps d’endormissement, couleur de la peau, rythme respiratoire, rythme car-diaque et mesure du taux d’oxygène » (Strebel, 2008).

L’évaluation de la douleur du nouveau-né prématuré lors d’une prise de sang par l’infirmière est primordiale. En effet, elle lui permet d’assurer la qualité de ses soins en mettant en place un traitement antalgique en étroite collaboration avec le médecin, et d’utiliser les interventions non pharmacologiques.

Intervention non pharmacologique : le regroupement en flexion Cette revue de la littérature s’intéresse plus spécifiquement à la prise en charge non mé-dicamenteuse de la douleur du prématuré. Aussi les traitements médicamenteux ne se-ront pas développés. Cependant, il ne faut pas oublier que les moyens non pharmacolo-giques sont complémentaires aux traitements médicamenteux (Muller, Metzger, Schwetta & Walter, 2011, p.279). Pour ce travail de bachelor, il a été décidé d’étudier l’efficacité du regroupement en flexion. Cette intervention consiste en un positionnement où les 4 membres du bébé sont repliés sur la ligne médiane et la tête est légèrement fléchie (Fournier-Charrière et al., 2012, p.70). Ce positionnement est effectué par une personne autre que celle qui prélève le sang. Cela peut-être un parent notamment (Axelin, Salantera & Lehtonen, 2006). Le nou-veau-né est allongé en décubitus latéral ou dorsal. Une main est posée sous sa tête et l’incline vers l’avant, tandis que l’autre est placée sous ses fesses et exerce une légère pression.

Le bébé se trouve ainsi en flexion, imitant la position foetale dans l’utérus de sa mère et il est important de l’y maintenir jusqu’à la fin du soin (Hartley, Miller & Gephart, 2015, p.207). Selon Cignacco et al. (2010), cette méthode est difficile à appliquer cliniquement.

En effet, le regroupement en flexion nécessite l’intervention d’une deuxième personne qui n’est pas toujours disponible. Dans cette étude, les infirmières préféraient utiliser les autres interventions non pharmacologiques considérées comme plus facilement réalisables, telles que « la méthode kangourou », l’emmaillotage, la succion non nutritive ou l’administration de sucre. Cependant, les auteurs d’une revue de la littérature ont élaboré un protocole du regroupement en flexion dans lequel ils donnent des points clés (Hartley, Miller & Gephart, 2015). Ainsi, ils recommandent d’utiliser des coussins de positionnement si aucune aide n’est disponible.

Mais dans la mesure du possible et avec leur consentement, il faudrait impliquer les parents au soin. Par ailleurs, le regroupement en flexion fait partie des soins de soutien au développement. Ceux-ci se définissent « par l’ensemble de stratégies comportementales et environnementales visant à réduire le stress du nouveau-né prématuré et à améliorer le développement de ses compétences » (Cevey-Macherel et al., 2011, p.61). Les soins de développement comprennent des stratégies environnementales, comme la diminution des bruits et de la lumière, et des stratégies environnementales, comme le regroupement en flexion (Franck & Lawhon, 2011). Ainsi, le regroupement en flexion aurait non seulement un effet sur la douleur, mais permettrait également au prématuré de mieux s’adapter au stress du service de néonatologie et de la prise de sang.

Le rôle autonome infirmier

Lors de l’évaluation de la douleur et la mise en place du regroupement en flexion, l’infirmière exerce son rôle autonome (Muller, Metzger, Schwetta & Walter, 2011, p.181). Selon le dictionnaire des soins infirmiers et de la profession infirmière, le rôle autonome est la « faculté de l’infirmière à prendre des initiatives et des décisions dans le cadre de la compétence spécifique reconnue par le diplôme requis et les textes officiels régissant la profession » (Alba et al., 2005). Ainsi, parmi les compétences qui sont développées lors du Bachelor en Soins Infirmiers, la Haute Ecole de Santé (HES) cite notamment le jugement clinique et l’autonomie (HES.SO Valais, 2014). Selon l’ASI (2015), les soins infirmiers visent le confort et la sécurité des patients.

Aussi, lorsqu’elle met en place des stratégies non pharmacologiques, l’infirmière de néonatologie cherche à soulager la douleur du nouveau-né prématuré, ce qui est sa priorité et relève des ses compétences professionnelles (Piguet, 2008, p.57). « Les soins infirmiers recensent les ressources et les besoins en soins des personnes soignées, fixent des buts, planifient des interventions de soins, les appliquent (en mobilisant les capacités relationnelles et techniques nécessaires) et évaluent les résultats » (ASI, 2011).

L’infirmière agit donc de manière autonome lorsqu’elle évalue la douleur du nouveau-né prématuré au moyen d’une échelle adaptée, et lorsqu’elle met en place une intervention non pharmacologique pour la soulager. Elle exerce son autonomie en utilisant le regroupement en flexion lors d’une prise de sang, afin de soulager le nouveau-né prématuré.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1 Résumé
2 Remerciements
3 Déclaration
4 Introduction
4.1 Problématique
4.2 Question de recherche
4.3 But de la recherche
5 Cadre théorique
5.1 La douleur
5.1.1 La douleur chez le nouveau- né prématuré
5.1.2 La douleur induite par une prise de sang
5.1.3 Évaluation de la douleur chez le nouveau-né prématuré
5.2 Intervention non pharmacologique : le regroupement en flexion
5.3 Le rôle autonome infirmier
6 Méthode
6.1 Devis de recherche
6.2 Collecte des données
6.3 Sélection des données
6.3.1 Critères d’inclusion et d’exclusion
6.3.2 Études retenues
6.3.3 Considérations éthiques
6.4 Analyse des données
7 Résultats
7.1 Description de l’étude 1
7.1.1 Validité méthodologique
7.1.2 Pertinence clinique et utilité pour la pratique professionnelle
7.2 Description de l’étude 2
7.2.1 Validité méthodologique
7.2.2 Pertinence clinique et utilité pour la pratique professionnelle
7.3 Description de l’étude 3
7.3.1 Validité méthodologique
7.3.2 Pertinence clinique et utilité pour la pratique professionnelle
7.4 Description de l’étude 4
7.4.1 Validité méthodologique
7.4.2 Pertinence clinique et utilité pour la pratique professionnelle
7.5 Description de l’étude 5
7.5.1 Validité méthodologique
7.5.2 Pertinence clinique et utilité pour la pratique professionnelle
7.6 Description de l’étude 6
7.6.1 Validité méthodologique
7.6.2 Pertinence clinique et utilité pour la pratique professionnelle
7.7 Synthèse des principaux résultats
8 Discussion
8.1 Discussion des résultats
8.2 Discussion de la qualité et de la crédibilité des évidences
8.3 Limites et critiques de la revue de la littérature
9 Conclusion
9.1 Propositions pour la pratique
9.2 Propositions pour la formation
9.3 Propositions pour la recherche
10 Références bibliographiques
11 Annexes
12 Annexe I – Tableaux de recension des études
13 Annexe II – Pyramide des preuves
14 Annexe III – Glossaire méthodologique

La douleur chez le nouveau-né prématuréTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *