El-Hadj Omar Tall, par sa personnalité et son action, a profondément bouleversé l’histoire du Soudan occidental .En effet, de toutes les personnalités célèbres de l’Afrique en général et de l’Afrique subsaharienne en particulier, El-Hadj Omar est celui qui inspira le plus les chercheurs . Dés lors, El-Hadj Omar est devenu l’objet d’une riche et très vaste littérature orale et écrite. La vie et l’œuvre notamment le jihad de Cheikh Omar sont devenus incontestablement une source d’inspiration pour les intellectuels et les griots. Ce qui suscita très vite la naissance d’une épopée vivante qui se traduit par des récits et des versions significatifs et assez controversés, liés à la vie et à l’action d’El-Hadj Omar.
Pour une bonne appréhension des versions, il est nécessaire de rappeler certaines données historiques. Notons à ce sujet que la vie d’El-Hadj Omar Tall se résume en trois phases. La première période qui dura presque trente ans est dominée par la naissance, l’enfance et l’initiation. Puis la deuxième période vingt ans fut occupée par des va et vient aux différents Lieux Saints de l’Islam, notamment la Mecque. Après le pèlerinage, Cheikh Omar mena en fin la guerre sainte, le jihad qui dura aussi une vingtaine d’années c’est la troisième période de sa vie.
Ainsi Omar, fils de Saïdou Tall et d’Adama Ayssé naquit à Alwar, un village qui se situe à quelques kilomètres de Podor. Sa date de naissance reste cependant imprécise même si « le Cheikh lui-même, son biographe Toucouleur Mohamed Aliou Tyam, et l’Anonyme de fez ne se sont pas préoccupés de cette question. Fernand Dumont quant à lui donne dans l’Anti-sultan cette date : entre 1794 et 1797. L’Encyclopédie de l’Islam propose entre 1794 et 1795 alors que Mohamad EL Hafiz du Caire, Delafosse, De Lavignette et Mage retiennent 1797 ». En effet d’après de nombreuses sources orales et écrites, il est unanimement admis qu’Omar naquit entre 1794 et 1797 ce qui correspond à 1210 et 1213 de l’Hégire. Omar, le surnommé ‘’Kodda Adama Ayssé ’’ ce qui veut dire ‘’le dernier né d’Adama, est né dans une famille qui comptait déjà une dizaine d’enfants. Son père Thierno Saïdou Tall était un grand marabout .Quant à sa mère, elle était reconnue pour ses qualités morales et spirituelles. Elle était de ce fait surnommée Sokhna Adama, la femme qui n’a jamais été souillée. Ils appartenaient tous les deux à la famille Torodo. C’est dans ce contexte qu’Omar apprit le Coran avec succès et le mémorisa à l’âge de huit ans.
la vision des vainqueurs
El-Hadj Omar, un lettré
El-Hadj Omar a marqué les esprits par son intelligence, son instruction, ses connaissances dans le domaine des lettres. Il est un très grand connaisseur de la culture arabo-islamique. Pour Garan Kouyaté, dans ce domaine, il n’a pas d’égal, il est même au dessus des Arabes .C’est ainsi qu’il dit dans l’œuvre intitulée Sur les traces :
La preuve : quand il arriva à la Mecque on voulut l’humilier, on voulut montrer aux gens qu’il ne connaissait rien. On lui posa des colles à la Mecque et à l’Université Al-Azhar. Il montra à ces gens-là qu’il était instruit. Bien que nègre, il était plus instruit que les Arabes, dans leur langue et dans leur religion.
El-Hadj Omar qui fut un grand saint n’eut des relations qu’avec les marabouts, parce que ceux-ci sont considérés comme les détenteurs du savoir et les principaux propagateurs de l’Islam. Son savoir et ses ambitions ne lui permettent de composer qu’avec les marabouts. C’est ce que El hadj Makki Thiam a confirmé en disant : « El Hadj Omar vint dans le Labé et prit contact au moins avec trois marabouts, parce qu’il n’avait affaire qu’avec les marabouts. » Par contre il eut des divergences avec beaucoup d’entre eux. Ces marabouts ont voulu tester El-Hadj Omar pour savoir s’il était vraiment un érudit. C’est ainsi que Mamadou Bah affirme que :
Il paraît même un jour, lors d’une sortie avant de rencontrer un jeune qui avait une planchette sur laquelle était écrite une sourate du coran, Thierno Sadou DALIN dit : je sens le coran et El-Hadj de répliquer : oui, non seulement je le sens aussi mais il s’agit précisément de telle sourate. Lorsqu’ils rencontrent l’enfant, ils virent que c’était bien la sourate nommée par El hadj Omar.
D’après Sur les traces, El-Hadj Omar comme tout grand marabout avait à sa disposition des talibés qu’il instruisait lui-même. Il était un enseignant qui participait à la propagation de l’Islam. Dans tous les territoires où il séjourna, il forma de nombreux disciples. Il tenait également des conférences religieuses avec ses talibés pour prêcher la religion musulmane. C’est ce qu’il fit à Dinguiraye, Mamadou Bah le confirme :
El-Hadj Omar a été un religieux à Dinguiraye. Il enseignait l’Islam et tenait surtout des conférences religieuses (…). C’est le Vendredi ou après la prière du crépuscule, selon les traditions qu’il tenait toujours à élargir l’éventail des connaissances de ses talibés en abordant tel ou tel aspect de l’Islam qu’il débattait avec eux .
El-Hadj Omar était un écrivain hors pair, un grand poète qui a réalisé de nombreux écrits. Le Cheikh durant son jihad a écrit des livres et des poèmes relatifs à l’Islam et à la Tidjaniyya. A ce propos, El Hadj Makki Thiam note qu’Alpha du Mali :
détenait des commentaires du coran portant l’écriture d’El hadj Omar. Ces manuscrits sont dans la région avec les Peuls (…). Alpha Omar Thierno Bayla se mit à réciter le Safinatou Saada, un livre composé par ElHadj Omar.
El-Hadj Omar, un saint
D’après Sur les traces, EL-Hadj Omar est un saint incontesté, une personne vénérée et sacrée. Partout où il passa, il impressionna par ses qualités morales et spirituelles. C’est un homme de DIEU qui vit aux services de son créateur pour promouvoir la religion musulmane et la Tarîqa Tidjane. Il fut un grand marabout qui était toujours aux services d’Allah et du Prophète Mohamed (PSL). C’est ainsi qu’il est perçu à Dinguiraye et Mamadou Bah confie :
El-Hadj Omar, pour les natifs et pour ceux dont les ancêtres sont venus avec lui du Fouta Toro, représente, est l’incarnation de…, je n’arrive pas à extérioriser ce que je pense. El-Hadj Omar est le symbole de la religion purifiée. A Dinguiraye, le nom d’El-Hadj Omar se confond avec l’Islam. Il n’y a pas de démarcation. Quand vous dites El-Hadj Omar, on pense aussitôt à la religion musulmane. Donc la personne d’El-Hadj Omar incarne entièrement la sainteté et ses aspirations sont essentiellement religieuses.
C’est ce que Boubou Sall pense d’EL-Hadj Omar. Pour lui El-Hadj Omar ne doit être qualifié que sur le plan religieux. C’est une personne dont il n’est pas permis de parler sur d’autres plans car pour lui, il ne peut être considéré que comme un saint qui a contribué à la conversion de beaucoup de personnes :
je ne parle d’El-Hadj Omar que sur le plan islamique. Sur ce plan c’est un saint qui a travaillé pour Dieu, qui a converti des foules et son action a servi. Je suis parmi les premiers bénéficiaires de la sainteté d’El-Hadj Omar.
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Table des matières
Introduction
Première partie : La vision des vainqueurs
Chapitre 1 : El-Hadj Omar, un lettré
Chapitre 2 : El-Hadj Omar, un saint
Chapitre 3 : El-Hadj Omar, un jihadiste
Deuxième partie : La vision des vaincus
Chapitre 1 : El-Hadj Omar, un conquérant
Chapitre 2 : El-Hadj Omar, un ambivalent
Chapitre 3 : El-Hadj Omar, un assoiffé de biens matériels
Troisième partie : Interprétations
Chapitre 1 : Des similitudes frappantes
Chapitre 2 : Des différences notoires
Chapitre 3 : El-Hadj Omar, un personnage complexe
Conclusion
Compte-rendu de lecture
Bibliographie