La directive e-commerce
L’essor de l’Internet a entraîné une véritable révolution au même titre que l’écriture ou l’imprimante. De sa naissance dans les années 60 et à sa démocratisation dans les années 90, le web n’a jamais cessé de s’étendre et de connecter toujours plus d’utilisateurs. Très vite, on se rend compte du potentiel quasi-illimité de cet outil formidable et de la nécessité d’élaborer un cadre légal propre à façonner une évolution et un usage sain d’Internet. C’est pourquoi le 8 juin 2000, le Parlement Européen adopte la «Directive 2000/31/CE relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur » plus communément connue comme la “Directive e-commerce”.
Au début des années 2000, Internet est loin d’être ce qu’il est aujourd’hui. La directive est adoptée plus dans une optique de protection que de régulation. Comme l’explique le premier considérant de la directive, Internet est un moyen essentiel pour rassembler les Etats et les peuples européens au niveau économique et social. L’objectif de la directive est donc d’établir un cadre juridique clair et uniforme caractérisé par une coordination entre les États membres afin d’éliminer les obstacles nationaux pour promouvoir la croissance d’Internet tout en le rendant le plus sécurisé possible pour ses utilisateurs.
Obligation de collaboration avec les autorités publiques compétentes
L’article 15 alinéa 2 de la directive quant à lui prévoit que : «2. Les États membres peuvent instaurer, pour les prestataires de services de la société de l’information, l’obligation d’informer promptement les autorités publiques compétentes d’activités illicites alléguées qu’exerceraient les destinataires de leurs services ou d’informations illicites alléguées que ces derniers fourniraient ou de communiquer aux autorités compétentes, à leur demande, les informations permettant d’identifier les destinataires de leurs services avec lesquels ils ont conclu un accord d’hébergement» .
Cette obligation impose aux intermédiaires de collaborer avec les autorités publiques compétentes lorsqu’une infraction est constatée et que ces dernières en font la demande. Les intermédiaires sont dès lors tenus de se comporter de manière responsable et de collaborer loyalement. Ils n’ont pas la possibilité de rester passifs et ne peuvent opposer leur rôle d’intermédiaire afin de ne pas donner suite aux demandes des États lorsqu’une infraction est constatée.
La mise en œuvre des procédures de retrait
L’article 14 de la directive pose les bases de la procédure de retrait en énonçant que «le prestataire, dès le moment où il a de telles connaissances, agisse promptement pour retirer les informations ou rendre l’accès à celles-ci impossible».
Selon le considérant 40 de la directive «les divergences existantes et émergentes entre les législations et les jurisprudences des États membres dans le domaine de la responsabilité des prestataires de services agissant en qualité d’intermédiaires empêchent le bon fonctionnement du marché intérieur, en particulier en gênant le développement des services transfrontaliers et en produisant des distorsions de concurrence. Les prestataires des services ont, dans certains cas, le devoir d’agir pour éviter les activités illégales ou pour y mettre fin. La présente directive doit constituer la base adéquate pour l’élaboration de mécanismes rapides et fiables permettant de retirer les informations illicites et de rendre l’accès à celles-ci impossible. Il conviendrait que de tels mécanismes soient élaborés sur la base d’accords volontaires négociés entre toutes les parties concernées et qu’ils soient encouragés par les États membres.
Il est dans l’intérêt de toutes les parties qui participent à la fourniture de services de la société de l’information d’adopter et d’appliquer de tels mécanismes. Les dispositions de la présente directive sur la responsabilité ne doivent pas faire obstacle au développement et à la mise en œuvre effective, par les différentes parties concernées, de systèmes techniques de protection et d’identification ainsi que d’instruments techniques de surveillance rendus possibles par les techniques numériques».
Responsabilité des fournisseurs de services intermédiaires
Les articles 3 et 4 du Règlement reprennent à l’identique le régime de la directive e-commerce mis en place pour les intermédiaires effectuant des activités de “simple transport” et de “mise en cache”. Ces activités n’ayant pas subi d’évolutions majeures sur le fond, il n’était pas nécessaire de revoir le régime leur étant applicable.
Au contraire, les articles 5 et suivant du Règlement apportent des nouveautés au régime applicable aux hébergeurs de contenus.
Tout d’abord, l’article 5 du Règlement reprend la formulation de l’article 14 de la directive e-commerce mais y ajoute un nouvel alinéa. Celui-ci prévoit que l’exonération de responsabilité ne peut s’appliquer lorsque l’hébergeur présente une information de sorte qu’un consommateur moyen et raisonnablement informé serait amené à croire qu’elle provient de l’hébergeur lui-même ou d’un prestataire sous son autorité. Dans une telle hypothèse, l’hébergeur ne satisferait plus à l’exigence de neutralité. Cet alinéa vise par exemple le cas d’une place de marché en ligne qui ferait la promotion sans le savoir de produits contrefaits en les faisant apparaître en évidence sur leur site.
Dispositions applicables à tous les fournisseurs de services intermédiaires
Les articles 10 à 13 du Règlement prévoient des obligations applicables à tous les intermédiaires techniques évoluant sur le marché numérique sans exception. Tout d’abord, afin d’assurer une communication fluide et efficace, les intermédiaires ont l’obligation de nommer un point de contact unique et de rendre publique les informations concernant ce point de contact en ce compris la ou les langues pouvant être utilisées pour le contacter.
Ensuite, les entreprises établies en dehors de l’Union européenne ont l’obligation de désigner des représentants légaux qui seront les interlocuteurs désignés de ces entreprises avec les autorités compétentes chargées d’assurer le respect du Règlement. Les informations concernant ces représentants légaux devront être rendues publiques. Ces derniers ne devront pas prendre leurs rôles à la légère car ils pourront être tenus pour responsable du non-respect des obligations prévues par le Règlement.
Dans le même souci de transparence, le Règlement affirme la pratique désormais courante des conditions générales. Les fournisseurs de services intermédiaires ont l’obligation d’indiquer les modalités d’application de leurs systèmes de modération. Il est également rappelé aux intermédiaires qui se livrent à des activités de modérations qu’ils doivent agir de manière diligente, objective et proportionnée en effectuant à chaque fois une mise en balance des intérêts en jeu.
|
Table des matières
I. Introduction
II. La directive e-commerce
Le régime de responsabilité allégé organisé par la directive e-commerce
Règles communes
Absence d’obligation générale de surveillance
Obligation de collaboration avec les autorités publiques compétentes
Première catégorie : Activités de transport, de fourniture et d’accès aux réseaux
Seconde catégorie : Forme de stockage dite ‘‘Caching’’
Troisième catégorie : Hébergement
Emergence et caractéristiques du web 2.0
L’interprétation évolutive de la directive e-commerce par la Cour de Justice
L’arrêt Google France du 23 mars 2010
L’arrêt Netlog du 16 février 2012
L’arrêt L’Oréal contre Ebay du 12 juillet 2011
L’arrêt Eva Glawischnig-Piesczek contre Facebook du 3 octobre 2019
Bilan de la directive e-commerce vingt ans plus tard
Le flou juridique autour de plusieurs notions clefs de la directive
Une réglementation en fonction des activités
La mise en œuvre des procédures de retrait
La nécessité d’une nouvelle intervention législative
III. Le Digital Services Act
Analyse du Règlement
Chapitre I – Dispositions générales
Objet et champ d’application
Définitions
Chapitre II – Responsabilité des fournisseurs de services intermédiaires
Chapitre III – Obligations de diligence pour un environnement en ligne sûr et transparent
Dispositions applicables à tous les fournisseurs de services intermédiaires
Dispositions supplémentaires applicables aux fournisseurs de services d’hébergement, y compris aux plateformes en ligne
Dispositions supplémentaires applicables aux plateformes en ligne
Dispositions supplémentaires applicables aux très grandes plateformes en ligne
Autres dispositions concernant les obligations de diligence
Tableau récapitulatif
Chapitre IV – Mise en œuvre, coopération, sanctions et contrôle de l’application des règles
Autorités compétentes et coordinateurs nationaux pour les services numériques
Comité européen des services numériques
Surveillance, enquêtes, coercition et contrôle concernant les très grandes plateformes en ligne
Quelles réponses amène le Digital Services Act aux limites du régime actuellement en vigueur?
Flou juridique autours de plusieurs notions clefs
Une réglementation en fonction des activités
La mise en œuvre des procédures de retrait
IV. Conclusion
Bibliographie
Télécharger le rapport complet