Soins palliatifs
Actuellement, en Suisse, l’espérance de vie augmente ayant pour conséquence le vieillissement de la population (OFSP, 2014). Selon les statistiques de l’Office Fédéral de la Santé Publique (OFSP) de 2014, l’espérance de vie pour les hommes est de 80,5 ans et pour les femmes de 84,8 ans. Avec une population plus âgée, l’incidence des cancers augmente, ainsi que la demande en soins palliatifs. Selon l’OFSP (2014), «l’incidence des cancers invasifs est estimée à environ 20’600 chaque année chez les hommes et 17’700 chez les femmes». Selon la Ligue Suisse contre le cancer (2013), les soins palliatifs sont ont pour but d’offrir à la personne atteinte d’un cancer une meilleure qualité de vie possible jusqu’au dernier moment de sa vie. Selon le Vademecum (2001), le cancer est une croissance désordonnée des cellules qui détruisent les tissus voisins. Le cancer devient grave et avancé avec la formation des métastases, qui peuvent affecter la survie de la personne (Ligue suisse contre le cancer, 2013).
Partant de ce constat, l’État s’engage dans le développement des soins palliatifs qui sont une priorité en santé publique. Ils s’inscrivent dans le plan cantonal 2012-2014. Celui-ci place au centre les droits de la personne en fin de vie. En outre, la loi genevoise sur la Santé de 2006 (LS ; K 1 03) encourage la promotion et le développement des soins palliatifs, ainsi que la formation professionnelle dans ce domaine (Programme cantonal genevois de développement des soins palliatifs, 2012).
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de 2015, « Les soins palliatifs sont une approche pour améliorer la qualité de vie des patients (adultes et enfants) et de leur famille, confrontés aux problèmes liés à des maladies potentiellement mortelles. Ils préviennent et soulagent les souffrances grâce à la reconnaissance précoce, l’évaluation correcte et le traitement de la douleur et des autres problèmes, qu’ils soient d’ordre physique, psychosocial ou spirituel».
Dignité
Dans la pratique infirmière, le patient est au centre des soins. C’est la raison pour laquelle promouvoir la dignité de la personne est indispensable. Les soignants promeuvent la dignité du patient en fin de vie en tenant compte, d’une part, du fait qu’il est un être unique avec ses propres valeurs et d’autre part, en respectant son autonomie (ASI, 2006). Selon le Code de Déontologie de la profession Infirmière (CDI) de 2006, plusieurs responsabilités sont indispensables, comme le respect des droits de l’Homme : droit à la dignité, à la vie et à un traitement humain. Selon Simone Weil (sd, cité par Fontaine, 2016), l’Homme a constamment besoin de l’attention d’autrui et ceci s’exprime par l’importance de l’aspect relationnel présent dans les soins. Ces derniers sont prodigués par des hommes envers d’autres. Ceci induit la vérification de la valeur de ses soins et par conséquent, de respecter la dignité d’autrui. Pour cela, une réflexion constante sur l’agir infirmier est inévitable.
L’infirmier doit garantir que le patient possède toutes les informations nécessaires à sa compréhension pour permettre une prise de décision en lien avec sa santé. De plus, selon la loi genevoise K 1 80, l’infirmier doit respecter la dignité, la sécurité et les droits du patient lors des soins (Art. 9 de la loi concernant les rapports entre membres des professions de la santé et patients du 24 décembre 1987 (K 1 80)).
La dignité signifie, entre autres, respecter la personne malade dans son ensemble et comme un être unitaire. Promouvoir désigne une élévation à un grade, à une dignité supérieure. Elle est inscrite dans le préambule de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. La dignité est le socle de la liberté, de la justice et de la paix. Elle peut se qualifier selon trois visions qui se regroupent :
La dignité intrinsèque (ontologique) qui doit son origine dans les Droits de l’Homme en 1948. Elle affirme que chaque personne a le droit au respect de sa dignité malgré ses actes et qu’aucun individu n’est en mesure de nier la dignité d’autrui (Ricot, 2006).
La dignité décence, c’est-à-dire épargner à autrui l’image de nos maux. Cette dernière est liée à l’apparence ainsi qu’à l’image que l’on donne et que l’on rend (ne pas être un fardeau, assumer les épreuves de la vie, etc.). Qu’est-ce que je projette comme image ? A quoi je sers ? (Ricot, 2006).
Lors de la conférence du 3 mai, Fontaine (2016) a présenté sa définition de la dignité-liberté. Selon ce dernier, la dignité-liberté exprime les choix des individus. Ceux-ci sont libres de décider de leurs gestes et cela sans considération des conséquences.
Approche infirmière
La promotion de la dignité du patient fait appel au rôle propre de l’infirmière. Le développement du rôle propre des infirmiers contribue à la consolidation, à la reconnaissance de la profession et répond aux besoins de la population. Ce développement permet à la discipline infirmière de se différencier de l’approche médicale (Allen, M., cité par Dallaire, 2008). Celle-ci est souvent orientée vers le curatif contrairement à l’approche infirmière qui se penche sur l’expérience de santé de la personne. Dallaire (2008) met en évidence le fait que l’évolution de la science infirmière et du travail de recherche infirmier permettent de prodiguer des soins de qualité.
L’infirmier est capable d’identifier un problème en posant des objectifs pertinents en soins infirmiers. Le choix de ces derniers se fait en partenariat avec la personne, mais également avec la famille dans la mesure du possible. L’infirmière ne peut pas définir la dignité de la personne, car elle est propre à chaque individu. Le rôle propre, ainsi que toutes les compétences en soins infirmiers, sont nécessaires pour pouvoir accompagner l’individu. En tenant compte du patient, de son environnement interne et externe dans la promotion de la dignité, l’infirmière démontre son respect envers autrui et favorise la qualité de vie de la personne en fin de vie. Les infirmiers se doivent de défendre et revendiquer les droits des patients, lorsque ceux-ci n’y parviennent pas. De plus, il est dans leur devoir de les soutenir dans leurs prises de décision. Ce concept s’intitule l’advocacy et consiste en une philosophie appliquée et indispensable à respecter dans les soins infirmiers (Phaneuf, 2013).
Le principe d’autodétermination est important dans la prise en soins de la personne atteinte d’un cancer. Le respect de ce principe a des effets positifs sur la promotion de la dignité du patient. Selon Spielewoy (2012), une personne atteinte d’un cancer avancé a son propre point de vue sur sa dignité. Il illustre cela avec les propos d’une de ses patientes : «si je dois mourir, je veux mourir dignement et non avec plein de tuyaux partout, dans une chambre d’hôpital» (p.2).
Besoins des patients
Dans les soins palliatifs, les professionnels doivent considérer le patient dans sa globalité et être attentif à ses besoins (OFSP, 2010). Les personnes soignées ont des besoins très spécifiques tels qu’«être respectés pleinement comme individus», «participer à la prise de décision» et «se préparer à mourir» (Pereira, Cantin, Beauverd & Zulian, 2008,p.455).
Trois catégories de besoins peuvent être identifiés : Les besoins physiologiques regroupent tous les symptômes physiques. L’infirmière doit pouvoir les gérer tout en prenant en compte le respect et la volonté de la personne (Société Suisse de Médecine et de Soins Palliatifs, 2012). Elle doit être également capable de soutenir et d’encourager l’autonomie du patient sous la forme d’éducation thérapeutique.
Les besoins psychosociaux regroupent deux dimensions : la dimension psychique et sociale. Le patient traverse des situations difficiles, c’est pourquoi la dimension psychique doit être présente et encouragée. De plus, l’infirmière doit également être à l’écoute et disponible envers les proches. La dimension sociale inclue l’environnement du patient, c’est-à-dire les proches, le cercle d’amis, la situation financière, etc. Elle prend en compte les besoins, les ressources existantes et l’autonomie de la personne (OFSP, 2010).
Les besoins existentiels sont englobés dans la dimension spirituelle, selon l’OFSP (2010). La spiritualité est une notion qui se retrouve dans toutes les cultures et qui se développe en permanence chez l’individu. Cette dernière dépend de l’environnement culturel dans lequel la personne évolue (Vilalta, Valls, Porta & Viñas, 2014). Il contribue à protéger la dignité et à améliorer la qualité de vie face à la maladie, la souffrance et la mort (OFSP, 2010). Par ailleurs, Vosit-Steller, Swinkin & McCabe (2013) expriment que souvent lors de la phase terminale d’un cancer, les besoins existentiels ainsi que spirituels sont pris en compte. Ils mettent en évidence les éléments clés pour le maintien de la dignité chez les personnes. Selon ces auteurs, il est nécessaire de donner un soin attentif, respecter l’autodétermination et les valeurs de la personne pour renforcer le contrôle de sa vie, individualiser chaque prise en soins, agir comme l’avocate du patient, proposer une écoute active et préserver l’intimité de celle-ci.
Ancrage disciplinaire
Selon Parse (2014), la discipline infirmière englobe trois paradigmes : la totalité, la simultanéité et l’Humaindevenant. Ces trois paradigmes orientent l’infirmière dans sa pratique. Le paradigme de la totalité perçoit la personne comme un «être bio-psycho-social et spirituel unique, séparé de et en interaction avec l’environnement». En revanche, selon Rogers dans le paradigme de la simultanéité, l’individu est vu comme «un être unitaire, un champ d’énergie en processus mutuel avec l’environnement» (Doucet & Maillard, 2011, p. 3).
Parse (2014) s’est inspirée pour la théorie de l’Humaindevenant de la science unitaire de Rogers, qui appartient au paradigme de la simultanéité. Celui-ci se lie à l’école de pensée des patterns. Parse a développé le paradigme et l’école de pensée de l’Humaindevenant. Le paradigme, ou autrement dit, la vision du monde de l’Humaindevenant est fondée sur la cocréation indivisible, imprévisible et toujours changeante de l’être humain, sur la dignité et sur la qualité de vie (Parse, 2014).
Parse a créé neuf assomptions philosophiques en adéquation avec le paradigme de l’Humaindevenant, en les divisant par trois concepts : Humainunivers, Ethos et Vivant qualité.
Les trois premières assomptions reflètent que l’Humainunivers cocrée avec le devenant sans interruption. C’est pourquoi, le devenant est indivisible, imprévisible et toujours changeant. «Le pattern humain émerge avec les patterns uniques» qui varient d’un individu à l’autre (Parse, 2014, p.18). Le regard, les paroles, la posture, le toucher et le silence sont ralliés aux patterns, permettant à l’environnement d’interagir avec le devenant (Parse, 2014).
Les trois suivantes représentent l’ «Ethos» de l’Humaindevenant qui se rapporte à la dignité. Cette dernière se traduit par une « présence auguste » (Parse, 2014, p.29).
Ce concept s’applique par le fait d’être honorable et respectable, avec une unicité intrinsèque (Parse, 2014). Finalement, les valeurs, la confiance, la présence et l’existence sont l’essence de l’Humaindevenant (Parse, 2014).
Les trois dernières assomptions indiquent que le Vivant qualité est le pilier et la constante évolution de la personne en devenir. C’est pourquoi, la personne est unique (Parse, 2014). Pour résumer, considérer la personne dans son ensemble comme un être individuel est primordial pour une prise en soins optimale. Pour cela, le soignant respecte les valeurs de la personne soignée et offre une présence constante auprès du patient.
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Table des matières
1. Introduction
1.1 Problématique
1.1.1 Soins palliatifs
1.1.2 Dignité
1.1.3 Approche infirmière
1.1.4 Besoins des patients
1.2 Cadre théorique
1.2.1 Ancrage disciplinaire
1.2.2 Métaconcepts
1.3 Synthèse et question de recherche
2. Méthode
2.1 Sources d’information et stratégie de recherche documentaire
2.2 Diagramme de flux
3. Résultats
3.1 Tableau synoptique
3.2 Analyse critique des articles retenus
3.3 Tableau comparatif
4. Discussion
4.1 Les moyens utilisés pour évaluer et promouvoir la dignité
4.2 Les ressentis des patients en fin de vie
4.3 Les actions infirmières
5. Conclusion
5.1 Apports et limites du travail
5.2 Recommandations
6. Références
7. Annexes
ANNEXE 1 – Comment aborder la dignité en fin de vie?
ANNEXE 2 – Exemple de fiche de lecture
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