La pédagogie différenciée
Définition La différenciation peut être définie au sens large comme une « démarche pédagogique visant à s’ajuster aux besoin de l’élève » (Alexandre, 2010, p.69) et de ce fait, chaque enseignant est amené au cours de sa carrière à réfléchir à comment mettre en place cette démarche dans le cadre de son cours afin d’aider au mieux ses élèves dans leur processus d’apprentissage. La différenciation prend tout sons sens lorsque l’on comprend, comme le formule Philippe Perrenoud, que « toute situation didactique proposée ou imposée uniformément à un groupe d’élèves est inévitablement inadéquate pour une partie d’entre eux » (1995, pp. 28-29). Un fois ce constat établi, il devient donc nécessaire ses méthodes d’enseignement en prenant en compte cette donnée essentielle afin d’offrir à chaque élève un cadre sécurisant et adapté dans lequel il puisse s’engager activement dans ses apprentissages. Selon J. Houssaye la pédagogie différenciée permet de prendre en compte « les différences entre les élèves d’une même classe » et elle « se propose de reconnaitre ces différences, de les estimer légitimes, de se fonder sur elles pour assurer l’ordre de l’apprentissage dans la classe. » (2014, pp 47-48). La différenciation permet de se concentrer sur les besoins de chaque élève et offre des chemins différents à chaque élève afin de lui permettre d’arriver à la même destination que le reste de la classe tout en s’adaptant à son profil propre. La différenciation sert donc à poursuivre un objectif d’enseignement collectif tout s’appuyant sur des pratiques d’enseignement d’apprentissage variées. En outre, il est nécessaire de préciser que différenciation n’est pas synonyme d’individualisation car si il la différenciation nécessite une « gestion individualisée des processus d’apprentissages » (Perrenoud, 1995, p. 48-49), ce sont bien les parcours qui sont individualisés et non les élèves qui « travaillent seuls ou face à [l’enseignant] uniquement. La différenciation permet ainsi des’inscrire dans un processus d’apprentissage basé sur l’adaptation où « chacun travaill[e] à son niveau, à son rythme, selon ses possibilités actuelles [car] même en difficulté, tout élève peut apprendre, progresser, acquérir des savoirs » (Robbes, 2009).
Types de différenciation La différenciation peut se faire à plusieurs niveaux, en prenant des « formes différentes mais complémentaires ». Elle peut ainsi se décliner au niveau des processus d’apprentissages en s’adaptant aux processus et fonctionnements cognitifs des apprenants. Les contenus d’apprentissages peuvent également être différenciés en faisant varier le type d’objectifs ou en développant dans des activités transversales pour faire travailler différentes compétences. Enfin, même les structures d’apprentissages peuvent être différenciées grâce à la formation de groupes de niveaux ou de compétences par exemple, groupes qui permettent de mettre en place une différenciation (Houssaye, 2014, pp 47-48) Dans le cas des « pôles opposés » évoqués par Nathalie Giaffreda dans ses observations quant à ses classes de LV1, la différenciation va effectivement pouvoir et devoir s’opérer sur des structures et des niveaux d’apprentissage des plus divers ; en effet, l’un des pôles nécessite de multiples activités de rémédiation (apport linguistique en langue vivante mais aussi plus scolaire au sens général : appréhension et compréhension d’une consigne, respect du cadre de l’exercice, cohérence et logique du raisonnement, enchaînement et présentation des idées…). En revanche, l’autre pôle, celui des élèves très avancés linguistiquement et globalement scolairement, nécessite de multiples activités d’exploration : horizons linguistiques plus ambitieux, mais aussi apport culturel et historique augmenté, recherche de réponses à des questions plus larges amenées par les problématiques posées par le cours d’anglais, travaux dirigés plus diversifiés. Pour que cette différenciation soit un succès et qu’elle puisse viser à réduire effectivement le fossé qui sépare ces élèves réunis au sein d’une même classe, il faudrait pour imaginer de nombreuses heures de travail supplémentaire dédiées à cela. Dans les faits, cet investissement n’est pas envisageable et le déroulement de l’année scolaire a fait réaliser au professeur (N.Giaffreda) qu’elle n’aurait probablement pas l’occasion dans sa carrière de mettre efficacement en place un protocole de différenciation aussi efficace en parallèle d’un cours de LV1 « normal ».
Devoir à la maison et autonomie
Afin de réhabiliter le devoir à la maison ou du moins de redonner du sens aux devoir à la maison, Simonato insiste sur l’importance de développer l’autonomie de l’élève et de l’amener à gérer son « implication personnelle, consciente et réfléchie dans son travail personnel » ( Simonato, 2007, p. 84). Il faut amener les élèves à réfléchir à leur travail à la maison et sur la façon dont il l’exécute afin qu’ils trouvent par eux-mêmes les clés de leur apprentissage. L’un des facteurs essentiels à développer est donc un climat de confiance qui suscite chez l’élève l’envie de « compléter les savoirs » ( Simonato, 2007, p. 79) car il a confiance en ces capacités et en l’implication de son enseignant pour l’aider à progresser. Il semble donc que pour une démarche efficace il faut viser à plus de qualité au niveau des devoirs à la maison proposés plutôt qu’à une plus grande quantité dans laquelle l’élève se sentirait perdu. C’est dans cette visée que la différenciation nous a semblé être une piste intéressante pour permettre à l’élève de réinvestir son processus d’apprentissage. En effet, les devoirs à la maison peuvent être vus comme une extension de la salle de classe et permettent donc à l’élève d’internaliser ce qu’il a appris dans cette classe. Les devoirs à la maison peuvent servir de pont en ce qu’ils ferment le fossé qui se creuse entre chaque séance, en fonction de l’écart de temps qui sépare les heures de cours. Mais si l’autonomie augmentée est le progrès qui est le plus souvent évoqué quant à l’utilité des devoirs, ils pourraient finalement aussi être vecteurs d’échec et d’une mauvaise estime de soi. En effet, sans préparation efficace préalable – c’est à dire, une attention efficiente en salle de classe de la part de l’élève, les devoirs peuvent être difficiles voire impossibles à réaliser sans aide extérieure et ainsi représenter un simple gâchis du temps d’étude précieux dont dispose l’élève. C’est donc une activité qui ne peut représenter une route vers l’autonomie de l’élève et un développement de compétences parallèles que si elle est effectuée dans les conditions idéales. Pour cela, le professeur peut agir favorablement en s’assurant de la cohérence / pertinence des devoirs demandés, et de la capacité de l’élève à les comprendre ; en revanche, certains facteurs de réussite ou d’échecs (notamment le contexte social et familial) resteront indépendants de l’initiative bienveillante du professeur ou de l’institution au sens large. L’efficacité des devoirs à la maison et leur faculté à rendre l’élève plus autonome et davantage acteur de son apprentissage est donc un « combat » qui se jouera au cas par cas et pour lequel il ne pourra être établi de solution passe-partout.
Mise en place d’un devoir de vacances différencié
A l’approche des vacances de décembre, j’ai fait circuler dans la classe un court questionnaire informant mes élèves qu’ils auraient à rendre un devoir maison la semaine de la rentrée ; devoir dont ils pourraient choisir en partie les modalités. L’objectif était de les faire réfléchir à leurs besoins langagiers afin qu’ils décident, en fonction, de la compétence langagière (EE ou EOC) qu’il serait souhaitable qu’ils travaillent en priorité. Les questions étaient relativement vagues – trop pour certains élèves qui n’ont pas pris la peine de réfléchir réellement à leurs besoins en cours de langue ou de formuler leurs envies. Les questions posées devaient leur permettre de cibler selon leurs besoins la pratique de l’écrit ou de l’oral, de choisir le contenu qui serait plus à leur goût (différenciation purement thématique ici) et enfin de sélectionner parmi des points de langues vus en classe celui ou ceux qui leur posaient le plus de problèmes – conjugaison présent / passé, ordre des mots dans des phrases, utilisation de connecteurs logiques pour structurer leur écrit. Les élèves avaient donc le choix entre deux activités langagières et deux types de sujets différents, l’un consistant à présenter une personne célèbre qu’ils admiraient, l’autre à inventer une brève histoire gothique au passé. Ces sujets permettaient de réinvestir des notions grammaticales, lexicales et culturelles vues dans les séquences travaillées entre les vacances de la Toussaint et celles de Noël. En outre, trois niveaux étaient proposés, allant d’une étoile (pour les plus à l’aise) à trois étoiles. Les consignes du niveau 1 étaient accompagnées de suggestions de connecteurs logiques à réemployer afin de travailler sur la structure et l’organisation de leur production. Pour le niveau 2, les consignes étaient plus détaillées, proposant des connecteurs logiques et du vocabulaire (avec les 3 formes des verbes irréguliers par exemple). Pour le niveau 3, des amorces de phrases avec connecteurs logiques étaient déjà rédigées et le vocabulaire était plus détaillé. Ces différents parcours étaient à trouver sur la plateforme itslearning dans une page de contenu créée à cet effet. En donnant ces devoirs à faire à la maison et en leur offrantt la possibilité de me rendre les devoirs par internet ou en main propre au collège, j’ai souhaité également les pousser à développer leur autonomie que ça soit dans la gestion de leur temps de travail ou dans l’utilisation d’outils numérique pour rendre leur travail. De nombreux élèves de mes classes n’utilisent que rarement- si ce n’est jamais – la plateforme numérique itslearning et cet exercice les a finalement obligés à s’y rendre et à en découvrir certaines des fonctions basiques. Les consignes ont été données lors de la dernière heure avant les vacances et les sujets distribués en fonction des réponses des élèves au questionnaire. Un temps a été réservé pour expliquer aux élèves le fonctionnement de la tâche, les modalités techniques (pour envoyer un fichier audio par exemple) et pour leur permettre de poser leurs questions s’ils en avaient. Ils avaient pour consigne de rendre ce devoir de vacances le vendredi de la rentrée au plus tard. La semaine suivant la rentrée, une fois les devoirs collectés, je leur ai distribué un questionnaire afin de recueillir leurs avis quant à la réalisation d’un devoir de vacances différenciés dont ils avaient pu choisir en partie les modalités. Les devoirs leur ont ensuite été rendus avec des retours personnalisés et une évaluation par compétences.
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Table des matières
Introduction
Contexte de la mise en œuvre en lycée – Nathalie Giaffreda
Contexte de la mise en œuvre en collège – Clémentine Grelier
Cadre théorique
I. La pédagogie différenciée
1. Définition
2. Types de différenciation
II. Les devoirs à la maison
1. Une pratique discutée et discutable
2. Devoir à la maison et autonomie
Mise en place du dispositif et analyse des résultats
I. Lycée ( N. Giaffreda)
1. Analyse des données
2. Bilan de la première différenciation
3. Bilan de la deuxième différenciation
II. Collège (C. Grelier)
1. Mise en place d’un devoir de vacances différencié
2. Analyse des résultats
Conclusion
Nathalie Giaffreda
Clémentine Grelier
Bibliographie
Annexes
Annexe – Cadre théorique
Annexe – Lycée
Annexe – Collège
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