La dictée négociée : moteur d’apprentissage orthographique et métacognitif

La maîtrise de l’orthographe renvoie souvent à une conception élitiste. En effet, elle est un instrument de sélection et de reconnaissance sociale. A ce propos, Angoujard A. (1994), p.38 explique que « notre société a fait de la capacité à respecter la norme orthographique l’indice privilégié du niveau culturel et intellectuel des Français. » Ainsi, une succession d’erreurs dans une lettre de motivation ou à un examen peut éliminer une personne, celle-ci ayant pourtant les compétences requises.

L’orthographe occupe donc une place primordiale dès l’école élémentaire. Jean Pierre Jaffré constate que différents travaux comparant des écrits d’enfants d’autrefois à des écrits plus récents arrivent à des interprétations complètement différentes. En effet, Chervel et Manesse observent que les élèves sont sans doute meilleurs en 1987 qu’en 1873. Néanmoins, un travail universitaire, mené par Danièle Manesse et ses collaborateurs, présente des résultats inquiétants. En effet, en 2005, la même dictée (un court passage de Fénelon, de 83 mots) a été administrée à un échantillon représentatif de deux mille sept cent soixante-sept élèves de cent vingt trois classes du CM2 à la troisième. Le constat est le suivant : le niveau d’une classe de cinquième de 2005 est celui d’une classe de CM2 de 1987. La portée de ces résultats est donc à nuancer dans la mesure où comme le précise Jean-Pierre Jaffré « la liste des demandes faites à l’école tend à s’allonger sans cesse, ce qui ne permet plus aux enseignants de passer autant de temps à dicter des textes ou à enseigner la grammaire et l’orthographe. » Il précise donc que « Nous devons accepter ce qu’Antoine PROST appelle le ‘jugement de réalité’, et constater que tout désir de comparaison doit composer avec un niveau qui se déplace plus qu’il ne baisse. » .

Il convient également de préciser que l’orthographe se heurte souvent à des représentations erronées. Pour beaucoup, il existe une corrélation entre la maîtrise de l’orthographe et la pratique de la lecture. Ainsi, plus un enfant lit, plus il serait bon en orthographe. Or un élève peut être un très bon lecteur mais un scripteur médiocre car si la lecture du verbe « savoir » orthographié comme ceci « savais, savait, savaient » se prononce de manière identique, à l’écrit, les enjeux sont différents dans la mesure où il doit prendre en considération les accords avec les pronoms personnels précédant le verbe. Ainsi, lire n’aide pas forcément à orthographier mais l’inverse est vrai. En effet, les graphies différentes des énoncés suivants « le saut de Pierre, le seau de Pierre, le sceau de Pierre, le seau de pierre etc. » aident à la lecture en facilitant la compréhension.

De ce fait, la complexité du système orthographique doit être envisagée selon deux angles différents, selon que l’on se situe dans le domaine de la lecture en réception, ou bien dans celui de l’écriture en production, même si dans les deux cas, il est question de relations que les phonèmes entretiennent avec les graphèmes et vice versa. Tandis que pour la lecture, on parle de correspondances graphie-phonie (C.G.P), pour l’écriture, il s’agit de correspondances phonie-graphie (C.P.G). Ceci explique donc que « les correspondances phonèmes-graphèmes en écriture soient moins stables et régulières que les correspondances graphèmes-phonèmes en lecture ».

Mais qu’entend-on exactement par dictée « traditionnelle » (par opposition aux autres formes de dictées) ? Il s’agit d’un exercice au cours duquel les élèves doivent écrire, sans aide extérieure ni préparation préalable, un texte choisi et dicté par l’enseignant. André Angoujard, précise que dans cette conception évaluative, « la dictée elle-même n’apprend à l’évidence rien aux élèves ». Jacques David (2006) résume donc la situation ainsi : « cette orthographe passive s’impose aux élèves » ce qui ne permet en aucun cas « d’objectiver les fonctionnements orthographiques et de les organiser en système cohérent ». En effet, la dictée dans sa version traditionnelle ne fait pas appel au raisonnement des élèves. Il semble donc nécessaire de l’envisager sous un autre angle afin qu’elle soit un véritable outil d’apprentissage. Jacques David (2006) explique donc que « Pour faire évoluer les représentations figées et les pratiques stéréotypées de l’orthographe, il est nécessaire de rompre résolument avec un enseignement qui n’envisage que la mémorisation des formes normées de l’écrit et l’application de règles apparemment logiques ou exhaustives. Il faut au contraire admettre que les élèves sont capables de construire des connaissances orthographiques de façon dynamique, en les sensibilisant très tôt aux variations du français écrit, en les aidant à réfléchir dans un système et des sous-systèmes hiérarchisés, en multipliant les raisonnements heuristiques à partir des phénomènes étudiés. » André Angoujard partage le même avis que Jacques David car il s’agit pour lui de transformer la dictée en tâche problème. En effet, nombre d’élèves connaissent les règles usuelles mais ne parviennent que difficilement à les appliquer. Cette démarche doit donc permettre aux élèves d’être plus actifs et de mettre en œuvre une réelle réflexion leur permettant ainsi de dépasser leurs représentations erronées.

Il convient dans un premier temps de définir ce qui est entendu par orthographe dans ce mémoire. D’après Nina Catach, cela correspond à « la manière d’écrire les mots d’une langue en conformité, d’une part avec le système de transcription graphique adopté à une époque donnée, d’autre part suivant certains rapports entre les différents sous-systèmes de la langue – phonologie, morphologie, syntaxe, lexique ». L’orthographe est donc envisagée dans sa composante linguistique, en tant que système graphique. Mais la notion de conformité apportée à la définition implique d’envisager l’orthographe également dans sa composante sociale, en tant que norme sociale établie par une société.

Le système orthographique français est particulièrement complexe, et ce pour plusieurs raisons. Le système graphique français est comme la plupart des langues un système alphabétique. Les principes propres à ce système sont les suivants :
– L’orientation : lecture et écriture se font dans une même orientation (de gauche à droite puis de haut en bas) ;
– Les frontières : les mots sont séparés par des frontières, matérialisées à l’écrit par des espaces ;
– La ponctuation : les signes forts de la ponctuation sont présents ;
– Lien entre l’oral et l’écrit : ce qui est écrit peut être dit et vice versa ;
– Le sens : ce qui est écrit a une signification sociale ;
– Les syllabes, à l’oral et à l’écrit : les voyelles seules ou associées aux consonnes structurent des constructions de syllabes différentes, éléments de base à tout mot (VCV- CVC etc.)
– Le code alphabétique : correspondances graphèmes-phonèmes.

Le code alphabétique met donc en relation des phonèmes avec des graphèmes. D’après le Hatier Concours CRPE 2016, « Un phonème est la plus petite unité distinctive de la chaîne parlée. » Le changement d’un phonème par un autre phonème crée un nouveau mot. Par exemple, dans les mots « pain » et « bain », les phonèmes /p/ et /b/ sont bien des phonèmes qui n’ont pas de sens en eux-mêmes mais qui par leur place dans le mot donnent accès à une signification complètement différente du mot.

Quant au graphème, il est défini de la façon suivante par Hatier Concours CRPE 2016 : « la plus petite unité distinctive d’un système graphique donné. » Il peut être constitué d’une seule lettre (« p » ; « t »), d’un groupe de lettres (digramme « en » ou trigramme « oin ») ou d’une lettre pourvue d’un signe diacritique (accent « é, è, ê, ô, â, à, ù » ; ou cédille « ç »). Par exemple, dans le verbe « pourchasser », les différents graphèmes sont : « p », « ou », « r », « ch », « a », « ss », « e », « r ».

Trois principes sont à la base des systèmes d’écriture :
– Le principe phonographique : une unité graphique transcrit une unité phonique ;
– Le principe sémiographique : il s’agit de la relation entre une forme graphique et une unité pourvue de sens linguistique. Par exemple, le « s » de « enfants » transcrit la signification du pluriel ;
– Le principe pictographique : il renvoie à une relation établie entre une forme graphique et une notion. Par exemple, le pictogramme interdisant de fumer peut être traduit par des expressions telles que : ne pas fumer, il est interdit de fumer etc.

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Table des matières

Introduction
I. Cadre théorique
1. Le système orthographique
1.1. Description du système orthographique français
1.2. Apprentissage de l’orthographe
2. Concepts théoriques mobilisés
2.1. Le conflit socio-cognitif
2.2. La métacognition
2.3. Manipulations syntaxiques
3. Traitement des erreurs commises par les élèves
3.1. Statut de l’erreur
3.2. Les travaux de Nina Catach
II. Dispositif répondant à la problématique du mémoire
1. Problématisation
2. Etude détaillée
2.1. Participants et objectifs
2.2. Dispositif
III. Analyse des résultats
1. Méthodologie d’analyse des résultats
2. Présentation des résultats
2.1. Présentation et interprétation des résultats quantitatifs
2.1.1. Présentation quantitative des résultats de la classe de CE1
2.1.2. Présentation quantitative des résultats de la classe de CE2
2.1.3. Comparaison quantitative des résultats des classes de CE1 et de CE2
2.1.4. Interprétation des résultats quantitatifs des classes de CE1 et de CE2
2.2. Présentation et interprétation des résultats qualitatifs
2.2.1. Présentation qualitative des résultats de la classe de CE1
2.2.2. Présentation qualitative des résultats de la classe de CE2
2.2.3. Comparaison qualitative des résultats des classes de CE1 et de CE2
2.2.4. Interprétation des résultats qualitatifs des classes de CE1 et de CE2
IV. Discussion des résultats
Conclusion 

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