La dépression majeure (DM)

La dépression est un trouble de santé mentale qui touche environ 2% des enfants et de 4% à 7% des adolescents (Costello et al., 2002). Différentes classifications sont possibles lors du diagnostic psychologique de ce trouble et les principaux symptômes communs sont l ‘humeur triste ou irritable, des changements somatiques et des perturbations cognitives, d’une durée et d’une intensité suffisamment sévère pour interférer avec le fonctionnement de l’individu, tel que défini dans le Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (Se éd.; DSM-S; American Psychiatric Association [AP A], 2013). La présente recherche se centre sur les perturbations cognitives associées à la dépression infantile. Chez les adultes, plusieurs revues systématiques et méta-analyses font ressortir des difficultés dans les capacités attentionnelles (Ottowitz, Dougherty, & Savage, 2002), exécutives (Castaneda, Tuulio-Henriksson, Marttunen, Suvisaari, & Lonnqvist, 2008; Henry & Crawford, 200S; Rogers et al., 2004) et mnésiques (Burt, Zembar, & Niederehe, 1995). Plusieurs études ont examiné ce lien chez les enfants et les adolescents, mais peu d’études ont réalisé une revue systématique afin de statuer sur les connaissances actuelles à ce sujet et guider les recherches futures.

La dépression est un trouble de santé mentale de plus en plus répandu au Canada. Plusieurs ouvrages décrivent les caractéristiques de ce trouble chez les adultes. Toutefois, nos connaissances sur la dépression chez les enfants et les adolescents sont moins bien documentées. L’intérêt de cette section sera donc de présenter les informations en lien avec la dépression infantile. Cette section commence par une présentation de ce trouble tel que défini .par le DSM-5 (APA, 2013). Par la suite, les particularités concernant le diagnostic psychologique et la prévalence ainsi que la comorbidité et l’évolution de ce trouble seront abordées. Une description sur l’étiologie de la dépression, notamment les facteurs biologiques, personnels et environnementaux, sera ensuite exposée. Enfm, les traitements actuels pour la dépression seront brièvement présentés.

Dans le DSM-5 (APA, 2013), les troubles dépressifs ont comme caractéristique commune la présence d’une humeur triste ou irritable, accompagnée de changements somatiques et cognitifs, qui est suffisamment sévère pour interférer avec le fonctionnement de l’individu. Comparé à l’édition précédente, c’est-à-dire le DSM-IVTR (AP A, 2003), le DSM-5 a connu plusieurs changements et ajouts dans la classification des troubles dépressifs (Gotlib & Lemoult, 2014). En raison de la récence de cette nouvelle édition, une présentation de la classification selon le DSM IV-TR s’avère davantage pertinente pour la compréhension du présent travail. Dans ce sens, les symptômes caractérisant le trouble dépressif majeur, le trouble dysthymique et le trouble dépressif non spécifié du DSM-IV-TR sont abordés ci-dessous.

La dépression majeure (DM) est principalement caractérisée par une humeur dépressive ou une diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir, presque tous les jours, sur une période d’au moins deux semaines. L’individu doit également présenter cinq, ou plus, des symptômes suivants: altération du poids ou de l’appétit, insomnie ou hypersomnie, agitation ou ralentissement psychomoteur, fatigue, sentiments de dévalorisation, problèmes de concentration ou pensées de mort récurrentes. Pour ce qui est de la dysthymie (DYS), les symptômes sont similaires à la DM, mais la présence d’au moins deux symptômes est suffisante et la durée est de deux ans (ou un an chez les enfants). Le DSM-IV-TR (APA, 2003) ne précise pas les symptômes requis pour la dépression non spécifiée (DNS), mais celle-ci est généralement émise lorsque l’individu démontre des symptômes dépressifs, mais ne remplit pas les critères diagnostiques d’un autre trouble dépressif. Pour certains chercheurs, la DNS serait une dépression mineure (Philipp et al., 1992).

Pour le présent travail, les termes « dépression» et« dépressive» seront utilisés d’une manière générale pour désigner un de ces troubles dépressifs mentionnés ci-haut.

Diagnostic psychologique et prévalence
Pour établir la présence d’une dépression, plusieurs outils existent. Le Diagnostic Interview for Children and Adolescents (DICA; Reich, 2000) et le Schedule for Affective Disorders and Schizophreniafor School-Age Children – Present and Lifetime Version (KSADS-PL; Kaufman et al., 1997) représentent deux instruments d’entrevues qui évaluent l’état mental des je unes en se basant sur les critères diagnostiques du DSM-IV ou du DSMIII-R (APA, 1989). Les questionnaires auto rapportés sont également des outils fréquemment utilisés. Par exemple, le Children’s Depression Inventory (CDI; Kovacs, 2003), développé à partir de la version adulte, Beck’s Depression Inventory (BDI; Beck & Steer, 1997) est un court questionnaire de 27 items qui permet d’évaluer les symptômes cognitifs, affectifs et comportementaux généralement associés à la dépression.

Le diagnostic psychologique de la dépression chez les jeunes n’est toutefois pas simple, car la manifestation des symptômes peut différer entre un adulte et un enfant. Cette particularité est prise en compte dans le DSM-5 (APA, 2013), où il est écrit que les enfants peuvent présenter de l’irritabilité plutôt que de la tristesse. L’irritabilité est surtout observée chez les filles dépressives vers la mi-adolescence, tandis que chez les garçons, ce symptôme est manifeste peu importe l’âge (Kovacs, Obrosky, & Sherrill, 2003). Outre l’irritabilité, la diminution de l’appétit, qui représente un des critères diagnostiques pour les adultes, est un faible indicateur de la dépression chez les enfants et les adolescents, car ce comportement peut être retrouvé chez les jeunes ne présentant pas de dépression (Kovacs et al., 2003). Par ailleurs, lors de l’évaluation du fonctionnement de l’enfant, il faut souvent consulter les parents ou les personnes proches du jeune, car les enfants présentent moins de facilité qu’un adulte pour rapporter ce qu’ils ressentent et vivent. Cependant, les informations recueillies auprès de différentes sources ne sont pas toujours convergentes. En effet, les corrélations entre les réponses du parent et celles de l’enfant par rapport aux symptômes dépressifs chez l’enfant sont faibles (Krôner Herwig, Morris, Heinrich, Gassmann, & Vath, 2009). Il est donc évident que le jugement et l’expertise du professionnel sont essentiels afin de poser ce diagnostic adéquatement.

Une étude américaine estime que la prévalence de la dépression est de 2% chez les enfants et de 4% à 7% chez les adolescents (Costello, Erkanli, & Angold, 2006; Costello et al., 2002). La prévalence peut différer selon le type de dépression. Par exemple, parmi un échantillon d’enfants entre 9 et 13 ans, la prévalence était de 0,03% pour la DM, 0,13% pour la DYS et 1,45% pour la DNS (Costello et al., 1996). Au Canada, la prévalence est plus difficile à déterminer, car peu d’études ont examiné la prévalence de la dépression chez les enfants. Selon Statistique Canada (2015), 4,5% des individus âgés de 12 à 19 ans ont rapporté un trouble de l’humeur diagnostiqué par un professionnel de la santé en 2014. Ce taux représente une augmentation minime quoique notable lors des dernières années, puisqu’il était de 3% en 2011 .

Chez les adultes, la prévalence de la dépression est plus élevée pour les femmes que les hommes. En effet, la prévalence est de 9,6% chez les femmes et de 6% chez les hommes, le taux le plus élevé étant chez les femmes âgées de 45 à 64 ans (Statistique Canada, 2015). Cette différence n’est toutefois pas observée chez les enfants. Plusieurs auteurs rapportent que la dépression affecte autant de garçons que de filles (Angold & Rutter, 1992; P. Cohen et al., 1993; Domènech-Llaberia et al., 2009). Le taux pourrait même être plus élevé chez les garçons que chez les filles (Angold, Costello, & Worthman, 1998; Steinhaus en & Winkler Metzke, 2003). Il est probable que l’écart émerge au début de l’adolescence (Angold, Erkanli, Silberg, Eaves, & Costello, 2002; Costello, Mustillo, Erkanli, Keeler, & Angold, 2003; Hankin et al., 1998), où le taux devient de 1,5 à 3 fois plus élevé chez les femmes (American Psychiatric Association, 2013).

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Table des matières

Introduction 
Contexte théorique
Dépression
Définitions
Diagnostic psychologique et prévalence
Comorbidité et évolution de la dépression
Étiologie de la dépression
Traitements
Fonctions cognitives et outils d’évaluation
Attention
Fonctions exécutives
Mémoire
Profil neuropsychologique des adultes en dépression
Objectifs de l’étude
Méthodologie
Résultats
Les fonctions cognitives et la dépression
Attention
Fonctions exécutives
Mémoire
Discussion
Différences méthodologiques
Caractéristiques de la dépression
Comorbidité
Médication
Âge
Sexe
Tests
Groupe contrôle
Implications cliniques
Limites de la présente étude
Conclusion

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